BEYROUTH: Les autorités libanaises ont pris des mesures afin de sévir contre la pratique illégale de spéculation sur les devises, au milieu des manifestations qui se poursuivent à Beyrouth.
Le procureur général, le juge Ghassan Oueidat, a ordonné aux services de sécurité libanais, dont le renseignement militaire, les forces de sécurité intérieure, la sécurité générale, la sécurité de l'État et les douaniers, de poursuivre les changeurs qui manipulent la monnaie nationale et s’impliquent dans des activités illicites de spéculation sur les devises étrangères.
La décision, loin d’être la première, tente d'atténuer l'indignation générale qui en est à son sixième jour. Les manifestations ont pris de l’ampleur samedi et dimanche, après que le taux de change du dollar a atteint 11 000 livres libanaises.
Les manifestants ont érigé des barrages routiers avec des pierres et des pneus enflammés dans toutes les rues principales de Beyrouth et sur les autoroutes reliant les régions. L'armée libanaise a rouvert les routes bloquées.
Des centaines de personnes à moto ont manifesté dimanche soir, longeant les banlieues à majorité chrétienne; ce qui a nécessité la mobilisation des forces de l’ordre. À Choueifat, un affrontement a opposé des manifestants à un chauffard qui a forcé une route bloquée, blessant sept manifestants. Les forces de sécurité l'ont arrêté par la suite.
Les manifestations, sans leader apparent, se sont déplacées d'un secteur à l'autre.
Au cours du week-end, les rassemblements ont touché des zones jusque-là calmes, notamment la banlieue sud, et la ville d'Hermel dans le nord de la Bekaa, où les gens ont organisé un sit-in et incendié des pneus pour protester contre les mauvaises conditions de vie. Le couloir vers le sud, route sacro-sainte du Hezbollah, n’a pas été épargné.
À Baalbek, des militants ont organisé une marche en face de la citadelle romaine de la ville.
L'analyste politique Hanna Saleh estime qu’il n’y a «aucune explication à la hausse du taux de change du dollar du samedi soir, ni aux convois de moto, à moins qu’il ne s’agisse d'une tentative de créer une ambiance sectaire pour miner le soulèvement civil contre l'autorité corrompue au pouvoir».
«L’objectif est de ressusciter le président Michel Aoun, qui, selon les sondages menés par le Hezbollah, se trouve dans un pétrin, et qui n’est même plus toléré par ses partisans», dit Saleh, et qui ajoute que «chaque scénario établi en vue de couvrir le Hezbollah remue le couteau dans les plaies du Liban. Le Hezbollah veut diriger le jeu à partir des coulisses. Il a établi une économie parallèle. Comment des réformes peuvent-elles avoir lieu en présence d’une économie parallèle?»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com