LONDRES: Plus des trois quarts des réfugiés syriens pourraient être aux prises avec de graves problèmes de santé mentale, causés par la décennie de guerre dans leur pays d’origine, selon un nouveau rapport.
L'association britannique «Syria Relief» a sondé des centaines de réfugiés au Liban, en Turquie et dans la province syrienne d'Idlib. Elle a constaté que 84% des répondants présentent au moins sept des quinze symptômes reliés au syndrome de stress post-traumatique (TSPT).
Le TSPT survient généralement après une exposition à un événement traumatisant. Les victimes éprouvent alors des symptômes divers, dont l'anxiété et les crises de panique. Le syndrome s’accompagne souvent d'autres problèmes de santé mentale, comme la dépression.
Malgré les taux extrêmement élevés de TSPT, Syria Relief explique que l'accès à une assistance médicale professionnelle est difficile, voire impossible, pour de nombreux réfugiés.
Seuls 15% des réfugiés au Liban sont conscients de la disponibilité des ressources en termes de santé mentale. Chez les déplacés internes à Idlib, ce chiffre chute à 1%.
L'un des répondants, Ahmed, a subi des blessures lors d’une frappe aérienne du gouvernement. Il est resté prisonnier à l’intérieur d'un bâtiment sinistrés pendant 12 heures avant d'être secouru.
«Nous ne pouvions voir que la poussière et l'obscurité. Nous sommes restés piégés dans le froid, sous les décombres, pendant 12 heures, jusqu'à ce que la Défense civile syrienne (les Casques blancs) nous libère», raconte-t-il. «C’est une expérience indescriptible. Le bruit des avions était tellement terrifiant. J'ai toujours peur de ce son, ce sera encore le cas dans cent ans. Je suis obsédé par ma peur», a-t-il ajouté.
«J'ai reçu des soins médicaux, mais psychologiquement, personne ne s'est occupé de moi. Je ne sais même pas s'il existe un soutien en matière de santé mentale pour des personnes comme moi, ou même pour des personnes dont la santé mentale est pire que la mienne».
Charles Lawley, auteur du rapport et communicant de Syria Relief, affirme à Arab News qu’il «doit y avoir un changement d’attitude à l’égard de la santé mentale. La nécessité de réparer les dommages physiques, que ce soient des bâtiments et ou des corps abîmés, est évidente. Mais nous devons aussi réparer les dommages invisibles».
Lawley et l'équipe de Syria Relief exhortent la communauté internationale à «s’assurer de dédier un financement des services dédiés aux besoins psycho-sociaux qui surviennent quand un individu devient victime de conflits et de catastrophes».
Les effets du conflit sur la santé mentale des millions de réfugiés syriens pourraient survivre à la guerre elle-même, c’est un danger réel s’inquiète Lawley.
«Je me suis entretenu avec une femme qui a assisté à la mort de son mari lors d'une frappe aérienne contre leur maison. Quatre mois plus tard, elle perd deux de ses trois enfants dans une autre frappe aérienne. C'était il y a six ans. Comment peut-on vivre ainsi sans l’aide d’un professionnel de la santé mentale?» il ajouta.
«Certaines de mes interlocuteurs n’ont pas mis les pieds en Syrie ou dans une zone de conflit actif depuis cinq, ou sept ans, voire même dix ans. Mais les symptômes du traumatisme causé par leurs expériences ne guérissent pas».
Près de 12 millions de Syriens, plus de la moitié de la population d'avant-guerre, sont aujourd’hui soit réfugiés, soit déplacés internes.
Le conflit a débuté en 2011, lorsqu'une série de manifestations pour la démocratie ont été accueillie avec un usage brutal de la force de la part du régime d'Assad.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com