LONDRES: Un ancien général de l'armée égyptienne pourrait devenir le nouveau chef d'Al-Qaïda. Sa présence en Iran et sa valeur potentielle de pion dans les négociations américano-iraniennes signifient cependant que sa vaste expérience militaire et terroriste empêcheraient une résurgence du groupe semblable à celle de l'ère 9/11, selon un expert.
Saif Al-Adel, l'un des membres les plus hauts placés d'Al-Qaïda, est pressenti pour succéder à Ayman Zawahiri. Ce dernier n'a pas été vu depuis des années, et serait mort selon les rumeurs.
Al-Adel est un terroriste actif depuis plus de 30 ans. Washington a mis en place une prime de 7,5 millions de dollars sur sa tête pour son rôle dans les attentats à la bombe contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998, et qui ont fait 224 morts.
Al-Adel aurait été impliqué dans la bataille de 1993 décrite dans le film «Black Hawk Down» dans la capitale somalienne Mogadiscio, en plus de jouer un rôle décisif dans la mise en place du réseau derrière les attentats du 11 septembre à New York.
Philip Riding, analyste principal pour le Moyen-Orient et l’Afrique au sein de la firme de renseignement Sibylline, explique à Arab News que, si la réputation d’Al-Adel en tant que leader qualifié et stratège militaire reste préoccupante, le fait qu’il soit isolé en Iran risque d’entraver ses capacités de leadership.
«Quelle que soit l'expérience militaire considérable d'Al-Adel - en tant qu'ancien général égyptien - son retranchement en Iran et sa capacité à communiquer avec les membres de son organisation dispersés à travers le monde sont bien plus pertinents», a-t-il révélé.
«Saif Al-Adel est l'un des nombreux leaders de haut rang d'Al-Qaïda en Iran. Al-Adel y était auparavant assigné à résidence, mais ces dernières années, il s'est clairement vu accorder une plus grande liberté, dont notamment la possibilité de voyager à l'étranger».
Riding a poursuivi: «Al-Adel est un atout potentiellement précieux pour les Iraniens, et ils ne voudront certainement pas le voir partir définitivement. Des hommes comme Al-Adel et la liberté qui leur est accordée sont une monnaie d'échange utile pour Téhéran dans ses négociations avec l'administration Biden.
«De plus, bien qu'ils puissent devenir des pions dans la confrontation américano-iranienne, Al-Adel et les autres leaders d'Al-Qaïda en Iran ont peu de bases d'opérations alternatives», ajoute-t-il, «… ces contraintes limiteront sans doute la capacité d'Al-Adel à mettre en œuvre une stratégie cohérente».
Cependant, Riding avertit qu'Al-Qaïda, malgré l’isolement de son chef, constitue toujours une menace pour la sécurité mondiale.
Il estime toutefois que le groupe «va essayer probablement de continuer à radicaliser des individus ou des petits groupes en Europe, mais il n'y a guère de raisons de penser qu'il réussira mieux maintenant qu'au cours des cinq à dix dernières années».
Les forces de sécurité européennes sont devenues plus habiles à contrecarrer les types d'attaques qu'Al-Qaïda cherche à mener, a confié Riding, et d'autres endroits peuvent ne pas être aussi efficaces.
Al-Qaïda «souhaitera peut-être concentrer ses efforts là où ses alliés locaux ont connu le plus de succès ces dernières années».
L’expert pointe du doigt la région du Sahel, en particulier le Mali, le Burkina Faso et le Niger, qui ont souffert aux mains de l'allié d'Al-Qaïda Jama'at Nasr Al-Islam wa-l'Muslimin (JNIM) pendant des années, comme une zone d'expansion potentielle pour Al-Adel d’Al-Qaïda.
Riding précise que la JNIM «s’active librement sur une vaste zone au Sahel, et mène régulièrement des attaques».
Il avertit: «Si Al-Adel était suffisamment intelligent et influent, et disposé à le faire, il pourrait éventuellement pousser la JNIM à lancer des attaques contre des cibles occidentales au Sahel».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com