PARIS : Découvrir la palette de nuances et d'effets de la photographie en noir et blanc: une visite virtuelle, dans le Grand Palais fermé à cause des restrictions sanitaires, explore une discipline artistique à part entière, tendant vers l'abstraction.
Reportée à deux reprises, l'exposition "Noir et Blanc: une esthétique de la photographie" présente une vaste sélection des collections photographiques de la Bibliothèque nationale de France (BnF).
Elle a dû être définitivement annulée, un nouveau report étant rendu impossible par la fermeture, le 12 mars, du Grand Palais pour travaux jusqu'en 2024.
Mais l'exposition reste en virtuel jusqu'au 18 juin. Sur le site grandpalais.fr, il suffit d'acheter un lien pour un créneau: le visiteur a ensuite le choix entre un parcours avec audioguide, à son rythme, profitant des contenus numériques explicatifs qui jalonnent les salles, ou une visite guidée d'une heure commentée par un conférencier, à qui il pourra poser des questions à la fin.
Plus de 300 tirages de 200 photographes ont été exposés, de 1852 à 2020. Il ne s'agit "pas d'une exposition nostalgique, d'une exposition sur le sépia qui existait avant la photo en couleur", souligne en préambule la commissaire Sylvie Aubenas.
Le noir et blanc "crée, dit-elle, une distance, offre un décalage radical. Il répond à une esthétique choisie, cultivée, exacerbée, qui permet d'explorer la nuit, le mystère, la mort, le glamour, les rêves, la poésie lyrique des paysages, dramatisant les portraits et exaltant les formes et les lumières".
De Man Ray à Brassaï, en passant par Helmut Newton et Robert Frank, cette exposition va des oeuvres expérimentales des débuts à des photos, proches de toiles abstraites contemporaines, d'Ellen Carey ou Marina Gadonneix.
En zoomant sur six tirages d'un portrait qu'Émile Zola a pris de ses enfants Denise et Jacques, le visiteur virtuel observe les fines variations (bleu, différents gris, sépia) à partir d'un même négatif.
Avec un autre zoom, deux arbres incandescents surgissent d'une nuit opaque: ce négatif magique de 1852 du Britannique Benjamin Brecknell Turner inverse en fait les valeurs des noirs et des blancs, selon le procédé de son compatriote Fox Talbot.
Une partie particulièrement fascinante de l'exposition montre un nuancier de matières: "entre les blancs purs et les noirs saturés, s'égrène toute une gamme d'ombres vibrantes, tantôt veloutées, laquées ou mates, mordorées ou bleutées, de lumières moelleuses, opalescentes ou brillantes", décrit une autre commissaire, Dominique Versavel.