VIENNE / PARIS: L'organisation de surveillance nucléaire de l'ONU a trouvé des particules d'uranium sur deux sites iraniens qu'elle a inspectés après des mois d’obstruction, affirment des diplomates, et se prépare à réprimander Téhéran pour avoir caché un tel fait, ce qui complique peut-être les efforts américains pour relancer la diplomatie nucléaire.
La découverte et la réaction de Téhéran risquent de nuire aux efforts de la nouvelle administration américaine en vue de rétablir l’accord nucléaire iranien de 2015, que le prédécesseur du président Joe Biden, Donald Trump, a abandonné.
Bien que les sites où la matière nucléaire a été trouvée soient censés être inactifs depuis près de deux décennies, les opposants à l'accord nucléaire, comme Israël, affirment que des preuves d'activités nucléaires non déclarées montrent clairement que l'Iran n'a pas agi de bonne foi.
L’ambassadeur d’Iran auprès de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Kazem Gharibabadi, a refusé de commenter, tout comme l’AIEA elle-même.
Un haut responsable iranien a déclaré: «Nous n'avons rien à cacher. C'est pourquoi nous avons autorisé les inspecteurs à visiter ces sites».
L'Iran a fixé la semaine prochaine comme date limite pour que Biden lève les sanctions réimposées par Trump, ou elle mettra fin aux inspections surprises de l'AIEA dans le cadre de l'accord, qui a levé les sanctions en échange des restrictions sur le programme nucléaire iranien. La semaine prochaine, l’AIEA devrait également publier un rapport trimestriel sur les activités nucléaires de Téhéran.
Sept diplomates ont déclaré à Reuters que l'agence profiterait de cette occasion pour réprimander l'Iran pour ne pas avoir expliqué à sa satisfaction comment les particules d'uranium se sont retrouvées sur les deux sites non déclarés. La réprimande pourrait apparaitre soit dans le rapport trimestriel, soit dans un rapport supplémentaire publié le même jour.
Les agences de renseignement américaines et l'AIEA croient que Téhéran avait un programme d'armes nucléaires secret et bien organisé qu'elle a interrompu en 2003, ce que l'Iran nie complètement. L'accord nucléaire de 2015 a effectivement met un point final sur ce passé, mais l'Iran est toujours tenue d'expliquer à l'AIEA les preuves d'activités même du passé concernant les matières non déclarées.
La matière a été découvert lors d'inspections rapides de l'AIEA qui ont été effectuées sur les deux sites en août et en septembre de l'année dernière, après que l'Iran a interdit l'accès pendant sept mois.
Le Wall Street Journal a rapporté plus tôt ce mois-ci que des matières radioactives ont été trouvées dans les échantillons prélevés par les inspecteurs sur les deux sites, malgré que le journal n'a pas précisé de quoi il s'agissait.
Quatre diplomates qui suivent de près les travaux de l'agence ont déclaré à Reuters que la matière trouvée dans ces échantillons était de l'uranium.
Identifier la matière comme de l'uranium impose à l'Iran la responsabilité d’expliquer ce fait, car l'uranium enrichi peut être utilisé dans le cœur d'une arme nucléaire. L'Iran est obligé de rendre des comptes de tout l'uranium afin que l'AIEA puisse vérifier qu'elle n'en détourne pas vers un programme d'armement nucléaire.
Deux des sources ont affirmé que l'uranium découvert l'année dernière n'avait pas été enrichi. Mais du moins, sa présence indique la présence des matières ou des activités nucléaires non divulguées sur les sites, que Téhéran aurait dû déclarer.
Les conclusions complètes de l’AIEA sont un secret bien gardé au sein de l’agence et seuls quelques pays en ont été informés.
Cinq diplomates ont souligné qu'après que l'AIEA eut confronté l'Iran aux conclusions, elle avait donné des réponses insatisfaisantes. Deux d'entre eux ont confié que l'Iran avait déclaré à l'agence que les traces étaient le résultat d'une contamination par des équipements radioactifs transportés depuis un autre site, mais l'AIEA a vérifié et les particules sur les sites ne correspondaient pas.
Un diplomate a donné quelques informations sur des échanges, mais pas des conclusions détaillées. Il a révélé que l’Iran avait donné des «réponses invraisemblables», décrivant la réponse de l’Iran comme une «tactique dilatoire typique».
L'agence a déclaré qu'elle soupçonnait l'un des sites d'abriter des travaux de conversion d'uranium, une étape de traitement de la matière avant l'enrichissement, et l'autre a été utilisé pour des tests d'explosifs.
Les sept diplomates ont déclaré qu'ils s'attendaient à ce que l'agence appelle l'Iran pour avoir omis d'expliquer les traces trouvées sur les deux sites, ainsi que pour son incapacité persistante à expliquer l’existence de la matière trouvée auparavant sur un autre site dans le village de Turqazabad, près de Téhéran.
Les diplomates ont soutenu que ce n’était pas certain que le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, composé de 35 pays, qui se réunit la semaine suivant le rapport trimestriel, prendrait des mesures contre l’Iran. Plusieurs ont même dévoilé que l'accent était mis sur les efforts visant à sauver l'accord de 2015 en y ramenant Washington.
«Tout le monde attend les Américains», a affirmé un diplomate.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.co