Ces chrétiens arabes qui réfutent le discours de levée des sanctions US contre Damas

Le président syrien Bashar Assad (à droite) rencontre le nouveau patriarche melkite gréco-catholique Youssef Absi (à gauche) dans la capitale syrienne Damas (Photo, AFP/SANA).
Le président syrien Bashar Assad (à droite) rencontre le nouveau patriarche melkite gréco-catholique Youssef Absi (à gauche) dans la capitale syrienne Damas (Photo, AFP/SANA).
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Publié le Jeudi 18 février 2021

Ces chrétiens arabes qui réfutent le discours de levée des sanctions US contre Damas

  • Une lettre du 21 janvier affirmait que des «mesures coercitives unilatérales» imposées par les États-Unis avaient aggravé la situation des Syriens
  • Les détracteurs de la lettre disent que les Assad ont l’habitude d’utiliser les minorités comme moyen de peaufiner leur image à l’étranger

NEW YORK: Lorsque le moment est venu pour Bashar Jaafari, ancien représentant permanent de la Syrie à l’ONU, de quitter New York, une seule personne l’a vu à l’aéroport JFK: sa fidèle assistante de bureau.

Le symbolisme du moment a peut-être échappé à la dame pendant qu’elle saluait le diplomate qui disparaissait dans la foule des voyageurs: rien de plus que le départ solitaire de Jaafari ne pourrait incarner l’image du régime de Bashar Assad tel qu’il est isolé sur la scène mondiale aujourd’hui.

Jaafari est retourné à Damas où il reprendrait ses fonctions de vice-ministre des Affaires étrangères, de retour dans les bras d'un régime qui était son seul soutien au siège de l'ONU.

Pendant des années, Jaafari avait utilisé le temps qui lui était alloué au Conseil de sécurité afin de blâmer l'Occident pour la misère sous laquelle le peuple syrien vivait. Une fois, Il a même qualifié les nations occidentales de «voleurs sans frontières d’Ali Baba», uniquement pour piller les richesses de la Syrie, tant matérielles que culturelles.

Les membres du Conseil de sécurité de l’ONU semblent ne pas douter que seul le régime est à l’origine des atrocités infligées aux Syriens, et que seule la corruption du régime est en mesure d’expliquer la catastrophe économique de plus en plus grave (Photo, AFP).

Les insultes de Jaafari n’ont cependant rien fait pour modifier la position des États membres sur des faits désormais fermement établis et régulièrement soulignés par les rapports du secrétaire général sur la Syrie. Pendant chaque réunion du conseil, des représentants demandaient à Assad d’avouer clairement l’emploi des armes chimiques qu'il a utilisées contre son propre peuple à plusieurs reprises.

Les membres de l’ONU ont rejeté les plans d’Assad pour des «élections simulées». Et lorsque le régime, soutenu par la Russie, a organisé une conférence destinée à encourager les réfugiés syriens à retourner dans une Syrie «désormais sûre», les Américains l'ont qualifiée de «numéro de cirque».

Hormis la Russie, qui assure de manière fiable la défense du régime, les membres du Conseil de sécurité semblent ne pas douter que seul le régime est à l’origine des atrocités infligées aux Syriens et que seule la corruption du régime est en mesure d’expliquer la catastrophe économique qui ne cesse de s’aggraver.

Isolé et paralysé par les sanctions de la loi César sur la protection civile en Syrie, le régime a utilisé toutes les ruses possibles pour trouver un moyen de les contourner. La relève de la garde à Washington, associée à la nomination de hauts conseillers de la Maison Blanche désireux d’apaiser avec l'Iran, pourrait bien être la pause qu'Assad et le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah attendaient.

Isolé et paralysé par les sanctions de la loi César sur la protection civile en Syrie, le régime a utilisé toutes les ruses possibles pour trouver un moyen de les contourner (Photo, AFP).

«En tant que Syriens, nous avons peur de ces conseillers qui entretiennent de bonnes relations avec les Iraniens», a révélé Ayman Abdel Nour, un réformiste syrien. «Vont-ils nous vendre - comme ils l'ont fait sous le président Barack Obama - comme la cerise sur le gâteau avec un autre accord nucléaire? »

Une lettre largement médiatisée envoyée au président Joe Biden le 21 janvier par Michel Abs, secrétaire général du Conseil des églises du Moyen-Orient, et cosignée par le patriarche syriaque catholique Ignace Joseph III Younan, le patriarche melkite catholique Joseph Absi et le patriarche syriaque orthodoxe Ignatius Ephrem II, a fait valoir que «les mesures coercitives unilatérales imposées par les États-Unis aggravent de plus en plus la situation économique du peuple syrien».

Les signataires incluent également d'autres religieux en plus des fonctionnaires et des personnalités civiles ayant des liens étroits avec le régime d'Assad.

Comme peuvent l'attester les spécialistes de l'histoire moderne du Moyen-Orient, le régime d'Assad utilise depuis longtemps les minorités comme un moyen de redorer son image à l'étranger tout en dissimulant ses crimes secrets.

Lorsque Hafez Assad est arrivé au pouvoir en 1970, il s'est présenté dès le premier jour comme le «protecteur des minorités» et l'antidote à la montée du fondamentalisme islamique. Au nom de la lutte contre le radicalisme, le père Assad a exterminé des villes entières, a commis des massacres terribles et a renforcé son régime minoritaire alaouite avec une main de fer en s’imposant sur la nation en tant que chef absolu.

Une photo prise le 20 avril 2014 montre Assad visitant l'ancienne ville chrétienne de Maaloula que ses troupes avaient récemment reprise aux rebelles (Photo, AFP/SANA).

Son fils Bashar continue d'utiliser la minorité chrétienne dans ses diverses tentatives dans le but de contourner les sanctions, et comme une tentative désespérée de regagner une sorte de reconnaissance internationale.

Ainsi, il a envoyé quatre patriarches à Washington en 2013 pour rencontrer le président Barack Obama. Lorsque ce dernier les a regardés répéter les mêmes points de discussion à partir de petits papiers cachés dans leurs poches, il était furieux.

«Cette réunion était vraiment un désastre», se souvient Abdel Nour, qui a rencontré les quatre patriarches dans le hall de leur hôtel avant leur rencontre avec Obama.

«Il était très clair que les patriarches n’étaient que les messagers du service de renseignement du régime. Ainsi, lorsqu'ils sont revenus l'année suivante, Obama a refusé de les rencontrer ».

Un transfuge de l'armée syrienne utilisant le pseudonyme de César, tout en portant également une cagoule pour protéger son identité, témoigne de la guerre en Syrie lors d'une audition du comité sénatorial des relations étrangères au Capitole à Washington DC, le 11 mars 2020 (Photo, AFP).

Assad avait plus de tours dans son sac, pour ainsi dire, alors que l'étau des sanctions continuait de se resserrer. En 2017, après avoir déclaré la victoire à Alep, il a cherché le soutien public du Vatican.

Pour l'obtenir, il a fait au Saint-Siège deux offres que ce dernier ne pouvait pas refuser: La première était un permis pour construire une faculté de théologie romaine melkite ouverte aux séminaristes de tout le Moyen-Orient.

La seconde était une visite qu'il a personnellement rendue à un camp de jeunes catholiques syriaques. Tout sourire, il a posé pour les caméras qui le montraient en parfaite harmonie avec des jeunes chrétiens.

Quelques chiffres

* 128 000  Personnes auraient été assassinées dans les prisons syriennes par le régime d'Assad.

* 7,6 milliards de dollars  Ligne de crédit iranienne estimée au régime d'Assad depuis 2011.

* 70%  Baisse de des dépenses budgétaires par habitant de la Syrie depuis 2010.

* 902 millions de dollars  Déficit budgétaire prévu de la Syrie de pour 2021.

* 117 milliards de dollars  Coût estimé de la reconstruction de la Syrie

Le patriarche Younan, qui a été nommé par le Vatican, était très heureux. Lui et son homologue romain melkite ont envoyé des télégrammes au pape François faisant l’éloge de la générosité du président et l'implorant d'envoyer une délégation pour rencontrer Assad.

«Le pape ne pouvait pas dire non. Ce sont ses deux patriarches pour tout le Moyen-Orient, pas seulement pour la Syrie », a affirmé Abdel Nour. «Ils ont des circonscriptions au Liban, en Jordanie et en Palestine. Donc, il a envoyé cette délégation. Assad a utilisé la séance photo pour montrer au monde qu'il avait le soutien du Vatican».

Encore une fois, le Vatican s'est rapidement éloigné des «actions» d'Assad.

Ainsi, lorsque Abdel Nour, qui est également rédacteur en chef d’All4Syria, le principal média indépendant de Syrie, a entendu parler de la lettre du 21 janvier, il a été choqué.

Abdel Nour signale avoir pris le téléphone et appelé les signataires. Il a appris que certains avaient été contraints de signer; d'autres avaient demandé des modifications à la lettre avant d'accepter de signer, mais leurs noms ont quand même été ajoutés sans qu'aucune modification n'ait été apportée.

Des fidèles chrétiens orthodoxes syriens participent à un défilé marquant le dimanche des Rameaux à l'église Saint-Élie de Damas, la capitale syrienne, le 9 avril 2017 (Photo, AFP).

Un signataire était sur un lit d'hôpital quand Abdel Nour l'a appelé. Le patient n'avait même pas entendu parler de la lettre, a-t-il avoué.

Un examen des antécédents de l’un des signataires de la lettre, SOS Chrétiens d’Orient (SOS-CO), révèle que l’ONG française a consciemment transféré de l’argent et du matériel aux Forces de défense nationale (FDN) pro-régime.

Le rapport de novembre 2020 préparé par l'Observatoire syrien des droits de l'homme (SOHR) basé au Royaume-Uni a également affirmé qu'il existe des liens étroits entre les fondateurs de SOS-CO et les leaders du FDN.

Le département du Trésor américain définit le NDF comme «une milice pro-Assad, affiliée à l'Iran». Il a sanctionné l'un de ses principaux leaders à la fin de l'année dernière pour son rôle présumé dans le massacre de plus de 70 civils.

Ce qui a le plus chagriné Abdel Nour, c'est le langage sophistiqué et efficace de la lettre. Elle a été rédigée par des dignitaires chrétiens très respectés qui ont fait qu’une seule et simple demande: que les sanctions soient levées.

Assad (Centre) marchant avec des religieux chrétiens et musulmans lors d'une conférence annuelle organisée par le ministère des Awqaf à Damas (Photo, AFP).

C'est le genre de lettre qui retient l'attention à Washington, D.C. «Ils y ont travaillé très dur. Ils ont commencé à écrire en décembre, deux mois avant que Biden ne prête serment », a expliqué Abdel Nour.

«Cette lettre a été soumise le 21 janvier, deuxième jour du mandat de Biden, dans l'espoir de profiter du nouvel moment. Elle donne l'impression que toutes les souffrances du peuple syrien sont dues aux sanctions de la loi César contre les personnalités du régime.

Il fallait faire quelque chose, a signalé Abdel Nour, président de l'association à but non lucratif Syrian Christians for Peace (Chrétiens syriens pour la paix). Le travail sur une nouvelle lettre a alors commencé. Une réponse a été rédigée et signée par d'éminentes personnalités chrétiennes et musulmanes de six pays arabes.

Les noms comprenaient des membres du Congrès arabe chrétien; le diplomate jordanien Marwan Muasher; et les anciens députés libanais Fares Souaid et Ahmed Fatfat; en plus des intellectuels et des politiciens irakiens et des recteurs d'université ainsi que des écrivains célèbres.

Les signataires ont écrit que lorsque on parle d’Assad, le monde a affaire à un leader qui a été convoqué par les tribunaux européens pour ses crimes de guerre et ses crimes contre l'humanité.

Ils ont fait valoir que les Syriens souffrent effectivement, mais pour des raisons qui n'ont rien à voir avec les sanctions: le régime a trouvé des moyens de voler l'aide humanitaire, de vendre les marchandises sur le marché et d'utiliser les bénéfices afin de financer ses opérations militaires contre les civils.

Des volontaires de la défense civile syrienne recherchent des victimes à la suite des frappes aériennes du gouvernement syrien sur l'enclave de Douma, tenue par les rebelles de la Ghouta orientale, à la périphérie de la capitale Damas, le 20 mars 2018 (Photo, AFP).

Ils ont demandé que l'aide soit fournie directement aux citoyens syriens pauvres vivant dans des camps de réfugiés sous la supervision d'organisations internationales.

La lettre a également insisté sur le fait de mettre un terme à toute augmentation des fournitures humanitaires, affirmant que ce n'est pas la quantité d'aide qui est le problème, mais la façon dont elle est distribuée. Au lieu de cela, il serait plus que suffisant pour les États-Unis de faire pression pour une mise en œuvre complète de la résolution 2254, qui appelait à un cessez-le-feu et à un règlement politique global, selon les signataires.

La lettre n'est apparemment pas passée inaperçue au département d'État. Anthony Blinken, qui au cours de son audience de confirmation de cinq heures au Sénat le mois dernier n'a pas mentionné une seule fois la Syrie. Blinken a appelé le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres et a discuté de certaines recommandations de la lettre. Tous deux ont réaffirmé leur attachement au processus politique en vertu de la résolution 2254 du Conseil de sécurité et l'extension d'une autorisation transfrontalière afin de fournir de l'aide de manière à aider à soulager les souffrances du peuple syrien.

Le problème a de nouveau été soulevé lors d'un appel entre Blinken et son homologue turc. «Blinken a montré qu'il est un fonctionnaire qui a de la dignité», a commenté Abdel Nour.

Assad a rencontré le chef suprême iranien Ali Khamenei en 2019 lors de sa première visite en République islamique depuis le début du conflit syrien. Au cours de la réunion, Assad a exprimé sa gratitude envers l'Iran pour tout ce qu'il avait fait pour la Syrie pendant le conflit (Photo, AFP).

«Blinken a sans doute lu une lettre crédible d'un groupe de signataires réputés et il l'a adoptée comme sa politique».

Abdel Nour, dont le podcast Risala Ila Sourriyyin (Lettre aux Syriens) compte 1,5 million d'auditeurs hebdomadaires, a dévoilé que les États-Unis n'avaient toujours pas de stratégie pour faire face à la crise syrienne, bien que le département d'État envisage d’élaborer une. Il pense que cela ne sera pas séparé de la stratégie pour le Moyen-Orient, qui inclut l'Iran.

Dans une liste de recommandations qu'il a été invité à partager, Abdel Nour a exhorté l'équipe du Département d'État à tenir compte des leçons apprises par l'accord nucléaire de l'ère Obama de 2015: «L'accord n'a pas empêché le régime iranien de s'élargir et de prendre le contrôle des capitales arabes. Cela a mis les alliés américains (les pays du CCG) en danger constant. L'accord nucléaire ne doit pas être rétabli sans d'abord répondre aux préoccupations des Arabes qui vivent dans la région. Ensuite, il y a l’affaire des missiles balistiques iraniens qui, s'ils sont développés, atteindront certes les capitales européennes».

L’accord sur le nucléaire doit être révisé d’après Blinken. Mais dans un Conseil de sécurité qui a été paralysé pendant des années par les disputes américano-russes, un accord révisé est-il une option réaliste?

«Je pense que oui», a répondu Abdel Nour, «parce qu'au cours des deux dernières années, l'Iran a montré son visage hostile. Il a montré les dégâts qu'il peut infliger aux installations pétrolières saoudiennes utilisant le Yémen et l'Irak. Et c’est très dangereux. Ce que Téhéran a également fait contre l'ambassade américaine en Irak est inacceptable».

«Cela ne passera pas. Il y aura sûrement des représailles».

 

Avec les contributions d'Oubai Shahbandar à Washington, D.C.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Au Liban, la plupart des sites militaires du Hezbollah ont été cédés à l'armée dans le sud du pays

L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
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  • « Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.
  • Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

BEYROUTH : Selon une source proche du mouvement pro-iranien, l'AFP a appris samedi que la plupart des sites militaires du Hezbollah dans le sud du Liban avaient été placés sous le contrôle de l'armée libanaise.

« Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.

Dimanche, une émissaire américaine en visite à Beyrouth a exhorté les autorités libanaises à accélérer le désarmement du Hezbollah.

« Nous continuons d'exhorter le gouvernement à aller jusqu'au bout pour mettre fin aux hostilités, ce qui inclut le désarmement du Hezbollah et de toutes les milices », a déclaré Morgan Ortagus sur la chaîne locale LBCI. 

Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

« Nous allons bientôt élaborer une stratégie de défense nationale dans ce cadre », a-t-il ajouté.

Le Hezbollah est le seul groupe libanais à avoir conservé ses armes après la fin de la guerre civile en 1990, au nom de la « résistance » contre Israël.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban pour soutenir son allié palestinien.

Ces hostilités ont dégénéré en guerre ouverte en septembre 2006 avec des bombardements israéliens intenses au Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah, dont la direction a été quasiment décimée. La guerre a fait plus de 4 000 morts.

Israël, qui a maintenu sa présence militaire au Liban dans cinq points « stratégiques » le long de la frontière, continue de mener régulièrement des frappes au Liban, disant viser des infrastructures et des membres du Hezbollah.


Gaza : une délégation du Hamas est attendue au Caire samedi pour discuter d'une trêve

Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
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  • « Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat.
  • « Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

LE CAIRE : Une délégation du Hamas est attendue samedi au Caire pour des discussions avec les médiateurs égyptiens en vue d'une nouvelle trêve dans la bande de Gaza, a indiqué à l'AFP un responsable du mouvement islamiste palestinien.

« Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre et à l'agression, et garantissant le retrait complet des forces d'occupation de la bande de Gaza », a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat, en référence à Israël.

Selon lui, le Hamas n'a reçu aucune nouvelle offre de trêve, malgré des informations de médias israéliens rapportant que l'Égypte et Israël avaient échangé des projets de documents portant sur un accord de cessez-le-feu et de libération d'otages.

« Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

La délégation est conduite par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du Hamas, a-t-il précisé.

Selon le Times of Israel, la proposition égyptienne prévoirait le retour en Israël de 16 otages, huit vivants et huit morts, en échange d'une trêve de 40 à 70 jours ainsi que de la libération d'un grand nombre de prisonniers palestiniens.


Reconnaissance de l'État palestinien : de nombreuses conditions à réunir pour que la France agisse

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
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  • - Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 
  • Il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

PARIS : Toute reconnaissance de l'État palestinien par la France ne contribuera à mettre la solution des deux États avec Israël sur les rails que si elle réunit une myriade de conditions qui semblent pour le moment inatteignables.

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique ». Les obstacles sont de taille.

- Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 

L'an passé, il avait déclaré que la reconnaissance d'un État palestinien n'était pas un tabou, à condition que ce geste symbolique soit « utile ».

Mercredi, il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

La conférence pour les deux États, prévue en juin à New York sous l'égide de la France et de l'Arabie saoudite, doit être « un tournant », a-t-il dit. 

Des frontières à définir 

« Les attributs juridico-politiques de l'État palestinien en question n'existent pas aujourd'hui. C'est une pure fiction diplomatique », souligne néanmoins David Khalfa, de la Fondation Jean-Jaurès à Paris.

« Pour qu'un État palestinien soit viable, il faut une continuité territoriale entre Gaza et la Cisjordanie », note Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris. Or, « on ne voit pas aujourd'hui le gouvernement israélien accepter d'entamer un processus de décolonisation, de mettre un terme à l'occupation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, et de demander aux 700 ou 800 000 colons israéliens de quitter ces territoires occupés », dit-il. 

Une autre question épineuse est celle du désarmement du Hamas, qui a perpétré les attentats sanglants du 7 octobre 2023 en Israël et provoqué les représailles meurtrières de l'armée israélienne à Gaza.

Israël a fait de l'éradication du groupe sa priorité. 

Démilitarisation du Hamas et exfiltration

Quoiqu'affaibli, le groupe « a réussi à recruter des milliers de jeunes miliciens » et dispose encore d'un arsenal lui permettant de « mener des actions de guérilla contre les soldats israéliens et de réprimer dans le sang les leaders de la contestation anti-Hamas à Gaza », observe-t-il.

S'agissant de l'exfiltration de certains cadres du Hamas, la question est complexe à explorer avec ceux qui parlent au Hamas, reconnaît-on à Paris. Comment les exfiltrer et vers quelle destination, en plus du Qatar et de la Turquie ? Des interrogations  qui restent sans réponse actuellement. 

Revitaliser l'Autorité Palestinienne

« Les Israéliens doivent être convaincus que le Hamas va être désarmé, qu'il est exclu de la gouvernance de Gaza et que l'Autorité palestinienne va réellement se réformer », a expliqué à l'AFP une source diplomatique française.

Cela passe par le renforcement de la légitimité de l'Autorité palestinienne, alors que la popularité du Hamas augmente au sein de la population. 

Normalisation avec Israël

Selon Hasni Abidi, enseignant au Global Studies Institute de l'Université de Genève, il faut un changement de personnel politique en son sein pour qu'une Autorité palestinienne revitalisée soit en mesure d'assurer une gouvernance crédible dans la bande de Gaza. Or, ses dirigeants ne manifestent aucun désir de passer la main, ce qui permet à Israël d'entretenir l'idée qu'ils n'ont pas d'interlocuteur crédible.

La source diplomatique rappelle que la normalisation est un processus et pas un acte isolé. Elle souligne que ce processus peut se faire progressivement et que d'autres pays peuvent participer. Cependant, la France est réaliste et ne s'attend pas à un règlement immédiat du conflit israélo-palestinien.