GAZA: Après quatorze ans d’absence, le mouvement Dahlan, une branche séparatiste du Fatah, est de retour dans la bande de Gaza.
Le mouvement est dirigé par Mohammed Dahlan, qui vit aux EAU depuis qu'un conflit l’a opposé au président Mahmoud Abbas. Il a alors été contraint de quitter la Cisjordanie où il avait trouvé refuge quand le Hamas a pris le contrôle de Gaza en 2007.
Dimanche dernier, deux de ses partisans sont revenus à Gaza. Parmi eux figure Abdel Hakim Awad, directeur de la campagne électorale de Dahlan. Il est aussi l'un des fondateurs du mouvement de jeunesse du Fatah à Gaza, et jouit d’une extraordinaire popularité au sein des jeunes et du mouvement étudiant.
Le retour survient au lendemain de la rencontre des représentants de Dahlan avec la délégation du Hamas, et qui a pris part au dialogue national palestinien au Caire au début du mois.
Les élections législatives sont prévues pour le 22 mai, mais le porte-parole de Dahlan Imad Mohsen a tenu à minimiser l’importance du moment choisi pour le retour. Planifié depuis 2018, il n’est pas vraiment motivé par les sondages, malgré les apparences, dit-il.
Des centaines de membres du Fatah ont fui la bande de Gaza par crainte de représailles, après le schisme de 2007 qui a placé l’enclave côtière sous le contrôle du Hamas, et ont rejoint le mouvement de Dahlan.
Mohsen estime que 300 militants du Fatah se trouvent en Égypte et ailleurs. Il ne voit aucun obstacle juridique qui empêche leur retour à Gaza. «On s'attend à ce que ces frères reviennent en grand nombre dans un avenir proche», a-t-il déclaré à Arab News.
Une source palestinienne, qui a préféré garder l'anonymat, confie à Arab News qu'il est possible de voir revenir Dahlan lui-même à Gaza avant les élections».
Les observateurs relient ces développements à une éventuelle participation de Dahlan aux élections, sur une liste à part ou conjointement avec le Fatah si les efforts de réconciliation avec Abbas sont couronnés de succès.
«Notre position n’a pas changé. Dès le début, notre objectif consiste à nous présenter aux élections sur une liste unifiée avec Fatah ou, si Abbas refuse, de nous présenter sur une liste qui comprenne les chefs du mouvement», explique Mohsen. «Nous parlons de personnalités qui détiennent des compétences nationales, professionnelles et dynamiques aptes à relever les défis qui accablent la cause palestinienne. Nous faisons partie intégrante de la scène palestinienne, et aucun parti ne peut nous en exclure ou nous empêcher de participer à cet exercice démocratique. Par conséquent, notre mouvement participera à toutes les élections, même la présidentielle (une), en temps et en lieu opportuns».
Les opinions varient quant à l’influence de Dahlan sur les résultats des élections et l’aptitude du Fatah à tirer des bénéfices et éviter une répétition du scénario électoral de 2006, lorsque le Hamas a obtenu une majorité écrasante.
L’analyste politique Mukhaimar Abu Saada estime que le mouvement de Dahlan va se présenter aux élections avec une seule liste, après l’échec des efforts de réconciliation au sein du Fatah. Il est dans l’intérêt du Hamas de monter plusieurs listes du Fatah, histoire d’augmenter ses chances d’obtenir des résultats extraordinaires, ajoute-t-il.
D’après lui, le Fatah affronte de grands défis. Outre la liste de Dahlan, Marwan Barghouti ne s’est toujours pas encore prononcé au sujet de sa participation aux élections.
«Un Fatah unifié offrirait la meilleure option. Sinon, il pourra toujours monter une liste de partenariat avec le Hamas», déclare Saada à Arab News. Selon lui, il est trop tôt pour évaluer l’ampleur des dégâts, puisque les trois mois qui restent avant le scrutin gardent la voie ouverte aux discussions.
Options
Les élections législatives seront suivies de l’élection présidentielle le 31 juillet, puis d’un appel aux urnes en vue de former le Conseil national de l'Organisation de libération de la Palestine le 31 août.
Un membre du Comité central du Fatah, chargé du dialogue national, estime que son organisation est prête à entamer un dialogue avec toutes les factions afin bâtir un front national élargi qui permettrait à tous ceux qui le désirent de participer aux élections.
Jibril Rajoub affirme aussi que «toutes les possibilités sont sur la table, comme la liste unique, si les discussions avec les autres factions n’aboutissent pas».
Abdallah Abdallah, membre du Conseil révolutionnaire du Fatah, insiste que l’organisation reste unie, qu’elle ne connaît aucune division, et que Dahlan ne représente pas un mouvement national.
«Dahlan a été renvoyé du Fatah, des jugements ont été rendus contre lui», dit Abdallah à Arab News. «Il n'est pas en mesure de se présenter aux élections. Quant aux membres de son mouvement, qui sont principalement des membres du Fatah, rien ne les empêche de retourner à leur formation politique».
Mais le professeur de sciences politiques, Naji Shurrab, pense que le mouvement de Dahlan n’est pas près de disparaître.
Le mouvement a prouvé «au cours des dernières années qu'il est devenu une organisation, avec une présence et un soutien populaire non seulement à Gaza et en Cisjordanie, mais aussi dans la diaspora», assure-t-il à Arab News. «Il bénéficie d'un soutien régional et arabe incontestable. Il semble financièrement solide, et il réussit à attirer les jeunes».
Le professeur exclut que une réconciliation interne du Fatah du vivant d’Abbas, car les dernières lois proposées par ce dernier ne sont que des tentatives d’empêcher la participation de Dahlan aux élections.
Pour Shurrab, Fatah est le véritable perdant du refus d’Abbas de se réconcilier avec Dahlan et d’unifier le mouvement lors des prochaines élections.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com