F. Gouyette: France-Algérie, une relation profonde, douloureuse, qui s'inscrit au présent

Mon attachement à cette région a commencé très tôt. Il me vient de mon histoire familiale, affirme François Gouyette à Arab News en français. (Photo fournie).
Mon attachement à cette région a commencé très tôt. Il me vient de mon histoire familiale, affirme François Gouyette à Arab News en français. (Photo fournie).
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Publié le Mardi 16 février 2021

F. Gouyette: France-Algérie, une relation profonde, douloureuse, qui s'inscrit au présent

  • Liées pour toujours par l’histoire, la France et l'Algérie sont aujourd’hui de grands partenaires en termes d'éducation, de culture et de diplomatie
  • C'est pour aborder ces liens et les problématiques qui en découlent qu'Arab News en français est allé à la rencontre de François Gouyette, Ambassadeur de France en Algérie

PARIS: Liées pour toujours par l’histoire, la France et l'Algérie sont aujourd’hui de grands partenaires en termes d'éducation, de culture et de diplomatie. Mais pour l’historien Benjamin Stora, les plaies du passé doivent être soignées par la réconciliation des mémoires françaises des crimes commis en Algérie et la réconciliation des peuples respectifs d’aujourd’hui. La mission Stora, confiée par le président Emmanuel Macron, montre la détermination à aller de l’avant avec l’Algérie. C'est pour aborder ces problématiques qu'Arab News en français est allé à la rencontre de l'ambassadeur de France en Algérie, François Gouyette. 

Le président Emmanuel Macron a exprimé à maintes reprises sa volonté de donner un nouvel essor aux relations franco-algériennes, comment qualifiez-vous l’état actuel de ces relations ?

L’Algérie et la France entretiennent des liens solides d’amitié. Notre relation s’inscrit dans une histoire longue et profonde, douloureuse également, il faut le reconnaître, mais elle s’écrit aussi et surtout au présent. Elle est très vivante : nos deux pays sont liés par des rapports humains multiples par-delà la Méditerranée. C’est une relation étroite qui unit au quotidien les sociétés civiles (étudiants, entrepreneurs, chercheurs, artistes, intellectuels) dont les projets sont autant de ponts entre nos deux pays. 

Comme vous le voyez, la relation entre la France et l’Algérie ne se limite pas aux échanges politiques, elle est très concrète et bénéficie directement aux populations des deux pays. 

François Gouyette, ambassadeur de France en Algérie

L’Algérie est pour la France un partenaire majeur. D’abord parce que ce pays est une puissance de premier plan en Afrique, une puissance d’équilibre dont la diplomatie joue un rôle utile en faveur du dialogue, en particulier, dans les crises régionales. Ensuite, parce que notre relation est riche et multiple, et que nos intérêts communs sont nombreux: les échanges humains, éducatifs, scientifiques, la coopération économique, les enjeux sécuritaires pour lutter ensemble contre le terrorisme, et la concertation diplomatique afin d’œuvrer ensemble à la résolution des crises régionales.

Nos rapports bilatéraux connaissent un nouvel élan. Les deux chefs d’Etat ont noué une relation de confiance et se parlent régulièrement depuis leur rencontre à Berlin, en janvier 2020. Les échanges à niveau ministériel se sont intensifiés, avec les visites à Alger de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, en octobre dernier, et Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, en novembre. Nous préparons la tenue d’un Comité intergouvernemental de Haut niveau au premier semestre 2021. Cette instance, qui réunit nos Premiers ministres respectifs et plusieurs membres de nos gouvernements, apportera une nouvelle impulsion politique à la coopération franco-algérienne.

La France est très engagée aux côtés de l’Algérie. Notre ambassade à Alger dispose d’un budget de coopération de 6 millions d’euros, l’un des tout premiers du réseau diplomatique français. La coopération universitaire et scientifique, en particulier, est très dynamique: il y a 250 accords actifs entre les universités et laboratoires de nos deux pays. En matière de coopération institutionnelle, des dizaines de projets sont financés, chaque année, à parité avec le gouvernement algérien. La France partage ainsi son expertise avec l’Algérie dans des domaines aussi variés que la santé, l’agriculture, la protection de l’environnement, le sport ou la préservation du patrimoine. Des milliers d’Algériens de tous âges fréquentent chaque année les cinq instituts français de Tlemcen, Oran, Alger, Annaba et Constantine. Nous développons d’ailleurs de plus en plus de programmes et d’événements bilingues, en français et en arabe. Nous œuvrons également au rapprochement entre les associations des deux rives de la Méditerranée afin de soutenir les initiatives de la société civile en matière d’insertion économique et sociale des jeunes, de promotion de la citoyenneté et de développement durable. 

Comme vous le voyez, la relation entre la France et l’Algérie ne se limite pas aux échanges politiques, elle est très concrète et bénéficie directement aux populations des deux pays. 

Le rapport de l’historien Benjamin Stora sur la colonisation et la guerre d’Algérie a été récemment publié à Paris. Dans quelle mesure ce rapport pourra-t-il contribuer à l’apaisement des mémoires liées à cette période ? 

La remise du rapport de Benjamin Stora sur les mémoires de la colonisation et de la guerre d’Algérie s’inscrit dans la continuité du travail de reconnaissance historique mené par le président de la République depuis le début de son quinquennat. Depuis son élection, le président Macron a engagé une démarche de reconnaissance lucide des crimes commis durant la période coloniale dans une volonté sincère d’apaisement des mémoires, en France comme dans notre relation avec l’Algérie.

Le chef de l’État a accompli à cet égard plusieurs gestes courageux et concrets. En septembre 2018, il a reconnu la responsabilité de l’État français dans la mort de Maurice Audin et, au-delà, l’utilisation de la torture dans le cadre d’un système légal institué par ce qu’on appelait alors «les pouvoirs spéciaux». La remise à l'Algérie des restes mortuaires de combattants algériens conservés au musée de l'Homme a constitué, en juillet 2020, un autre acte fort, en réponse à une demande des autorités et de la société algériennes. 

La mission Stora entend dresser un état des lieux précis du regard porté sur les enjeux mémoriels de part et d’autre de la Méditerranée. L’historien plaide pour un travail de reconnaissance des faits afin d’amorcer l’œuvre de réconciliation des mémoires qui prendra nécessairement du temps. 

Ce travail comprend deux volets, qui doivent être distingués

- Le premier porte sur la réconciliation des mémoires françaises de la colonisation et de la guerre d’Algérie, qualifiées par M. Stora dans son rapport de «mémoire du malaise», entre déni et non-dits.

- Le second s’inscrit dans une volonté nouvelle de réconciliation des peuples français et algérien, passant, à la fois, par des mesures symboliques et des actes concrets. 

Benjamin Stora formule plusieurs recommandations qui visent à favoriser cette nécessaire réconciliation des mémoires. Il propose, en particulier, la création d’une Commission «Mémoires et vérité» qui serait chargée d’impulser des initiatives communes entre la France et l’Algérie et d’assurer un suivi des préconisations de son rapport.

Le président de la République n’a été ni acteur, ni témoin engagé de cette période. Aucun chef de l’État avant lui n’a affiché autant d’ambition en matière de réconciliation mémorielle et de détermination à aller de l’avant avec l’Algérie, tout en regardant notre passé douloureux avec lucidité. Il a engagé cette démarche en toute transparence et dans un dialogue confiant avec son homologue algérien.

Comment voyez-vous l’évolution du conflit autour du Sahara occidental depuis la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur l’enclave par le président américain sortant Donald Trump ?

La France suit la situation avec attention. Nous avons appelé à la retenue et à la reprise du processus politique. Le conflit au Sahara occidental n'a que trop duré et fait peser un risque permanent de tensions, comme nous l’avons vu récemment à Guerguerate. La France est attachée à la recherche d'une solution politique dans le cadre de la légalité internationale. Elle est, sur cette base, favorable à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Dans cette perspective, elle considère le plan d'autonomie marocain comme une base de discussions sérieuse et crédible. Nous appelons de nos vœux la désignation rapide d’un envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies en vue de relancer le processus politique.

La mission Stora entend dresser un état des lieux précis du regard porté sur les enjeux mémoriels de part et d’autre de la Méditerranée. L’historien plaide pour un travail de reconnaissance des faits afin d’amorcer l’œuvre de réconciliation des mémoires qui prendra nécessairement du temps. 

François Gouyette, ambassadeur de France en Algérie

En fin connaisseur de la région du Maghreb, où vous n’êtes pas à votre premier poste, quel bilan faites-vous de votre expérience dans la région ?

Je suis très attaché à cette région dans laquelle j’ai servi et continue de servir depuis quarante ans. J’ai tissé avec nombre de ses habitants des liens d’amitié durables et me suis également intéressé aux cultures du Maghreb, qu’il s’agisse de littérature, de musique, de cinéma ou de beaux-arts.

J’ai été en poste dans les pays du Maghreb à des moments cruciaux. En Libye, notamment, où j’ai été ambassadeur de 2008 à 2011, puis en Tunisie, que j’ai rejointe en 2012, alors que ce pays connaissait une expérience démocratique unique. Je suis arrivé en Algérie après le mouvement populaire du Hirak, que le monde a observé avec admiration et qui a indéniablement ouvert une nouvelle phase pour ce pays.

Pour un diplomate, c’est à la fois une chance et une immense responsabilité que de servir son pays lorsque l’Histoire est en marche. J’ai le sentiment de l’avoir fait en me montrant toujours ouvert au dialogue avec l’ensemble du spectre politique, soucieux de ne négliger aucune sensibilité au sein de la société, de ne porter aucun jugement a priori. La mission d’un diplomate, c’est de parvenir à une vision d’ensemble des évolutions en cours pour être en mesure de les décrypter de la manière la plus juste possible. C’est aussi de construire des relations de confiance avec les acteurs politiques et la société civile. Cette confiance constitue une assise pour le développement des relations entre les gouvernements, lesquelles peuvent être, à leur tour, fructueuses pour nos peuples respectifs.

Vous êtes considéré comme l’un des diplomates qui éprouvent une attirance particulière pour le Maghreb et le Moyen-Orient, pouvez-vous nous dire d’où vient cette attirance ?

Mon attachement à cette région a commencé très tôt. Il me vient de mon histoire familiale. Mon père a passé une partie de son enfance en Algérie, en Kabylie, d’abord, à Constantine, ensuite, et, enfin à Alger, qu’il a quittée en 1950 pour poursuivre ses études en France. Parfaitement intégré au milieu de ses camarades algériens, il a appris l’arabe dialectal et le kabyle et a conservé de cette période un attachement profond pour ce pays. Au début des années 1970, j’ai découvert l’Algérie où ma famille avait conservé des amitiés fortes. L’adolescent que j’étais y a, par la suite, passé ses vacances estivales et s’est familiarisé avec ce pays, ses habitants, ses langues et sa culture.

Pour un diplomate, c’est à la fois une chance et une immense responsabilité que de servir son pays lorsque l’Histoire est en marche. J’ai le sentiment de l’avoir fait en me montrant toujours ouvert au dialogue avec l’ensemble du spectre politique, soucieux de ne négliger aucune sensibilité au sein de la société, de ne porter aucun jugement a priori.

François Gouyette, ambassadeur de France en Algérie

Vous êtes également passionné par la langue arabe, que vous maîtrisez parfaitement. Quelle est l’origine de cette passion ?

L’Algérie a naturellement été ma porte d’entrée dans la langue arabe, que j’ai ensuite étudiée en France pendant six ans à l’université. Ce choix a été un élément déterminant dans ma carrière diplomatique. J’ai, d’ailleurs, tenu, dès mon arrivée à Alger, à instituer une programmation bilingue, en arabe et en français, dans nos instituts culturels, où chacun est le bienvenu. Un nouveau cycle de débat d’idées en langues arabe et française, «les Rencontres Ibn Khaldoun» s’est, ainsi, ouvert, il y a quelques jours, à l’Institut français d’Alger. Des concerts mettant à l’honneur la musique arabo-andalouse seront également organisés.

Qu’en est-il de votre autre passion pour la musique arabe, notamment nord-africaine, dont vous possédez une collection d’enregistrements rares ?

J’éprouve, en effet, un vif  intérêt pour la musique arabe, en général, et pour  les musiques du Maghreb, en particulier. À la faveur de mes séjours en Algérie, mais aussi au Maroc, en Tunisie et en Libye, j’ai découvert la musique arabo-andalouse et ses différentes écoles. Je me suis particulièrement intéressé aux genres musicaux qui en sont issus: le Hawzi de Tlemcen et son jumeau du Maroc oriental, le Gharnati; le Chaâbi d’Alger; le Malouf, dans ses variantes constantinoise, tunisienne et libyenne. Au Moyen-Orient, le Maqam irakien représente pour moi la quintessence de la musique arabe classique.


Xi Jinping arrive en France pour sa première tournée européenne depuis 2019

Le président chinois Xi Jinping (à gauche) et le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Le président chinois Xi Jinping (à gauche) et le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
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  • Paris veut a minima s'assurer que la Chine, principale alliée du président russe Vladimir Poutine, ne bascule dans un soutien clair à son effort de guerre face à Kiev
  • De mercredi à vendredi, Xi Jinping ira ensuite en Serbie et en Hongrie

PARIS: Xi Jinping arrive dimanche à Paris, où son homologue français Emmanuel Macron entend prôner la "réciprocité" commerciale et la recherche d'une résolution de la guerre en Ukraine face à un président chinois qui continue d'afficher son soutien à la Russie.

De retour pour la première fois en Europe depuis 2019, le numéro un de la superpuissance asiatique a organisé sa tournée sous le sceau de l'équilibre diplomatique: après la visite d'Etat en France, qui lui demande depuis un an d'user de son influence pour "ramener la Russie à la raison", il se rendra en Serbie et Hongrie, deux pays restés proches de Moscou.

Il doit être accueilli vers 16H00 (14H00 GMT) par le Premier ministre Gabriel Attal à l'aéroport parisien d'Orly.

Lundi, Xi Jinping, qui vient célébrer les 60 ans de relations diplomatiques franco-chinoises, enchaînera les rendez-vous avec Emmanuel Macron, qui s'est concerté en amont avec le chancelier allemand Olaf Scholz.

Le matin, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen se joindra au duo franco-chinois à l'Elysée pour une session qui devrait permettre de soulever les différends commerciaux.

Et ils sont nombreux. Menacée d'être prise en tenailles entre les économies américaine et chinoise, massivement aidées par la puissance publique, l'Union européenne a multiplié ces derniers mois les enquêtes sur les subventions étatiques chinoises à plusieurs secteurs industriels, notamment aux véhicules électriques, accusées de fausser la concurrence.

«Trêve olympique»

Dans un entretien à La Tribune dimanche, Emmanuel Macron reconnaît que les Européens ne sont "pas unanimes" sur la stratégie à adopter car, dit-il, "certains acteurs voient toujours dans la Chine essentiellement un marché de débouchés" alors qu'elle "exporte massivement vers l'Europe".

Il plaide lui pour "mieux protéger notre sécurité nationale", "être beaucoup plus réalistes dans la défense de nos intérêts" et "obtenir la réciprocité".

A Pékin, ces mesures jugées "protectionnistes" passent mal. Les autorités chinoises ont lancé leur propre enquête antisubventions visant essentiellement le cognac français, contre laquelle le président français compte s'élever.

Si aucun contrat mirobolant n'a été annoncé à ce stade, des discussions sur des investissements étaient en cours jusqu'au bout. Un forum économique franco-chinois est aussi prévu lundi au théâtre Marigny.

L'après-midi, après une cérémonie protocolaire d'accueil en grande pompe aux Invalides, et avant un banquet à l'Elysée, Emmanuel Macron et Xi Jinping se retrouveront en tête-à-tête pour la séquence la plus politique, puis s'exprimeront devant la presse.

Le Français compte demander au Chinois de soutenir la "trêve olympique" pour "l'ensemble" des conflits à l'occasion des Jeux de Paris cet été.

Paris veut a minima s'assurer que la Chine, principale alliée du président russe Vladimir Poutine, ne bascule dans un soutien clair à son effort de guerre face à Kiev. Voire "l'encourager à utiliser les leviers" dont elle dispose sur Moscou pour "contribuer à une résolution de ce conflit", selon l'Elysée.

Casser le protocole 

Emmanuel Macron avait porté ce même message il y a un an lors de sa propre visite d'Etat en Chine, avec des résultats modestes.

Pour Marc Julienne, chercheur à l'Institut français des relations internationales, "cette approche révèle un manque de compréhension des intérêts et de la stratégie de Pékin", qui veut "se tenir à distance du conflit" et n'entend "pas s'impliquer davantage, ni dans le sens des Européens, ni dans le sens d'un soutien militaire à la Russie".

Le président français tentera néanmoins d'enfoncer le clou mardi, dans les Pyrénées, à l'occasion d'une escapade plus personnelle entre les deux hommes, accompagnés de leurs épouses.

L'objectif de ce déjeuner sur le col du Tourmalet, là où, enfant, il passait ses vacances chez sa grand-mère, est éminemment diplomatique: casser l'imposant protocole pour instaurer un dialogue plus direct, notamment sur l'Ukraine.

Sur la question sensible des droits humains, Emmanuel Macron dit préférer évoquer "les désaccords" plutôt "derrière des portes closes". Paris n'a pas non plus tenu à ériger en priorité le dossier de Taïwan, pourtant au coeur des fortes tensions entre les Etats-Unis et la Chine.

De mercredi à vendredi, Xi Jinping ira ensuite en Serbie et en Hongrie.

"L'idée est de mettre en avant une alliance des autocraties face au monde occidental" et "de montrer qu'il a encore des alliés en Europe", analyse Valérie Niquet, directrice Asie à la Fondation pour la recherche stratégique.


JO-2024: la flamme olympique arrive mercredi à Marseille

Son dernier passage remonte donc à 1992 et aux JO d'hiver d'Albertville (Savoie), après un premier séjour en 1968, pour les Jeux d'hiver de Grenoble (Photo, AFP).
Son dernier passage remonte donc à 1992 et aux JO d'hiver d'Albertville (Savoie), après un premier séjour en 1968, pour les Jeux d'hiver de Grenoble (Photo, AFP).
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  • La torche olympique débutera son périple français sur le Vieux-Port de Marseille
  • C'est la première fois que la flamme arrive en France pour des Jeux d'été car si Paris a déjà accueilli les JO, en 1900 et 1924, le principe de la flamme olympique n'a été inauguré qu'en 1928

MARSEILLE: Après 12 jours de navigation sur le trois-mâts Belem parti de Grèce, la flamme olympique accoste mercredi à Marseille où 150.000 personnes devraient l'accueillir, encadrées par un dispositif de sécurité exceptionnel, à moins de trois mois des Jeux de Paris.

C'est la première fois que la flamme arrive en France pour des Jeux d'été car si Paris a déjà accueilli les JO, en 1900 et 1924, le principe de la flamme olympique n'a été inauguré qu'en 1928 lors des Jeux d'Amsterdam.

Son dernier passage remonte donc à 1992 et aux JO d'hiver d'Albertville (Savoie), après un premier séjour en 1968, pour les Jeux d'hiver de Grenoble.

Allumée le 16 avril sur le site d'Olympie, à quelque 100 jours de la cérémonie d'ouverture des JO de Paris (26 juillet-11 août), la torche olympique débutera son périple français sur le Vieux-Port de Marseille, l'antique "Massalia" fondée il y 2.600 ans par des marins grecs, en présence du président de la République Emmanuel Macron.

"Le fil rouge de cette arrivée de la flamme, c’est l’histoire de ces Grecs partis il y a des millénaires à travers la Méditerranée pour arriver à Marseille et fonder la ville", a insisté le maire Benoît Payan, interrogé par l'AFP.

A la sortie du majestueux Belem, navire datant de 1896, année des premiers Jeux olympiques de l'ère moderne, le premier porteur de la flamme sera le nageur français Florent Manaudou. Quadruple médaillé olympique et sacré sur 50 m nage libre en 2012 à Londres, celui qui est toujours licencié au Cercle des Nageurs de Marseille visera une nouvelle médaille à Paris.

Sécurité renforcée 

Le 16 avril sur le site antique d'Olympie, c'est sa soeur Laure, elle aussi nageuse, championne olympique et triple médaillée en 2004, qui avait été la première relayeuse française après l'allumage de la flamme.

Après avoir rejoint la terre ferme sur une piste d'athlétisme flottante, Florent Manaudou se dirigera vers le Quai de la Fraternité, au bout de la mythique Canebière, où sera allumé le chaudron olympique aux alentours de 19h45. Par lui ou par un invité surprise comme Zinedine Zidane, né à Marseille? Le suspense demeure.

Auparavant, le Belem aura été au coeur d'une journée de fête, avec une grande parade maritime lors de laquelle 1.024 bateaux accompagneront le trois-mâts dans la rade de Marseille. Vers 19h00, son entrée dans le Vieux-Port sera saluée par un feu d'artifice, l'Orchestre philharmonique de Marseille et les incontournables "tifos", ces impressionnantes bannières des supporters de l'OM, le club de foot emblématique de la ville.

Puis la soirée se poursuivra par un grand concert, animé notamment par les rappeurs marseillais Soprano et Alonzo. "On va faire du beau, du grandiose, du sobre et populaire en même temps", a promis Benoît Payan, assurant que tout serait "gratuit du matin au soir, jusqu'au concert, et pour tout le monde".

Alors que les autorités attendent 150.000 personnes autour du Vieux-Port, un dispositif de sécurité qualifié d'exceptionnel sera déployé, dans un climat international tendu et marqué par les conflits en Ukraine et au Proche-Orient.

Le feu au Vélodrome 

A Marseille, ce sont plus de 6.000 membres des forces de l'ordre, dont des policiers des unités d'élite du Raid, des démineurs, des membres des brigades nautiques, des avions Rafale et un dispositif anti-drones, qui seront mobilisés.

En comptant les agents dépendant de la mairie (marins-pompiers, personnels de sécurité, policiers municipaux...), les effectifs atteindront 8.500 personnes et dépasseront ceux déployés en septembre 2023 pour la visite du pape François.

Lors d'une visite à Marseille, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a assuré que le Vieux-Port serait totalement "étanche". Les spectateurs seront soumis à une palpation et les plus de 3.000 bateaux amarrés au Vieux-Port minutieusement déminés à partir de lundi tandis que des plongeurs inspecteront les flots.

Après cette journée spectaculaire, la flamme débutera jeudi le périple qui doit la conduire à Paris, via tout le pays, dont les Antilles et la Polynésie française. Là encore, ce relais olympique sera une première en France pour des Jeux d'été, cette tradition remontant aux JO de Berlin en 1936.

Ce long "relais de la flamme", qui passera entre autres par le viaduc de Millau, les châteaux de la Loire, les plages du Débarquement ou le Mont-Saint-Michel, débutera dans la matinée à Notre-Dame de la Garde, la "Bonne Mère" qui surplombe Marseille.

Jeudi soir, le feu olympique sera allumé dans un chaudron posé devant le Stade Vélodrome, autre emblème de la ville méditerranéenne. Puis son chemin se poursuivra jusqu'à Paris, où la vasque olympique sera embrasée le 26 juillet, jour de la cérémonie d'ouverture des Jeux. Le 28 août, c'est la flamme paralympique, allumée elle en Grande-Bretagne, qui arrivera à Paris pour les Jeux paralympiques (28 août-8 septembre).


Dans les Pyrénées, Macron emmènera Xi sur ses terres d'adoption

Cette photographie, prise le 2 mai 2024, montre une vue de la station de ski du Grand Tourmalet - La Mongie dans les montagnes des Pyrénées, dans le sud-ouest de la France. Pour poursuivre la visite d'État du président chinois en France, Emmanuel Macron et XI Jinping, se rendront dans les Hautes-Pyrénées le 7 mai 2024, pour un déjeuner au restaurant "L'Etape du Berger" situé sur les pistes de la station de ski. (Photo de Lionel Bonaventure AFP)
Cette photographie, prise le 2 mai 2024, montre une vue de la station de ski du Grand Tourmalet - La Mongie dans les montagnes des Pyrénées, dans le sud-ouest de la France. Pour poursuivre la visite d'État du président chinois en France, Emmanuel Macron et XI Jinping, se rendront dans les Hautes-Pyrénées le 7 mai 2024, pour un déjeuner au restaurant "L'Etape du Berger" situé sur les pistes de la station de ski. (Photo de Lionel Bonaventure AFP)
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  • Le président français a choisi ce coin des Pyrénées, où il nourrit d'anciennes et profondes attaches, pour délocaliser l'espace d'une courte journée la visite d'Etat de M. Xi à l'occasion des 60 ans de l'établissement de relations diplomatiques entre les
  • Né à Amiens, dans le nord de la France, où il a grandi, Emmanuel Macron a passé de nombreuses vacances entre le bourg de Bagnère-de-Bigorre et la station de ski de La Mongie

BAGNÈRES-DE-BIGORRE, France : En apparence, c'est un petit cimetière comme les autres, mais c'est là, à Montgaillard, dans le département des Hautes-Pyrénées (sud), qu'Emmanuel Macron vient souvent se recueillir sur la tombe de sa grand-mère, près de la station de ski où il emmènera mardi le président chinois Xi Jinping.

Le président français a choisi ce coin des Pyrénées, où il nourrit d'anciennes et profondes attaches, pour délocaliser l'espace d'une courte journée la visite d'Etat de M. Xi à l'occasion des 60 ans de l'établissement de relations diplomatiques entre les deux pays.

Une façon de casser le protocole imposant qui entoure le moindre déplacement du dirigeant chinois pour tenter d'instaurer un dialogue sincère, notamment sur la question-clé de l'Ukraine.

- «Grâce à elle» -

Né à Amiens, dans le nord de la France, où il a grandi, Emmanuel Macron a passé de nombreuses vacances entre le bourg de Bagnère-de-Bigorre et la station de ski de La Mongie, juste avant le col du Tourmalet, mythique ascension du Tour de France.

C'est avec «Manette» et «Koulou», ses grands-parents maternels Germaine et Jean Noguès, que le jeune Emmanuel descendait chaque année en train jusqu'à cette petite vallée, une semaine en hiver et un mois en été.

«C'est grâce à elle qu'il est arrivé là où il est», raconte une cousine du président français, Nicole Arnal, 80 ans, venue donner un coup de main au magasin de vêtements pour dame que sa fille tient dans le centre-ville de Bagnère-de-Bigorre.

Institutrice puis directrice d'école, Manette «le faisait travailler tous les jours», même en vacances, se souvient-elle.

En dépit de la mort de Jean en 2002 et celle, douloureuse, de Manette en 2013, Emmanuel Macron n'a jamais cessé de se rendre dans les Hautes-Pyrénées.

«Il souffle quand il vient ici», explique la fille de Nicole, Sylvie Durant, 52 ans, dont les yeux s'embuent quand elle évoque les détracteurs du président, pour qui elle a forcément de l'affection.

- «Racines» -

«Un arbre, si vous voulez qu'il tienne, il a besoin de racines», philosophe l'éleveur et ami d'Emmanuel Macron Eric Abadie, dont le restaurant d'altitude accueillera la rencontre avec Xi Jinping mardi.

Au menu: épaule d'agneau, jambon de porc noir et haricots tarbais, une sélection de fromages du meilleur ouvrier de France Dominique Bouchait, et tarte aux myrtilles en dessert, à la demande expresse de Brigitte Macron. Les deux couples présidentiels et leurs interprètes dégusteront des vins locaux, un Montus rouge et un Saint Mont blanc.

«Manu», il l'a rencontré «gamin» alors qu'il venait déjeuner à son restaurant en face des pistes de La Mongie avec son grand-père, raconte l'éleveur de 61 ans a la carrure solide. «Le courant est passé» et leur amitié dure maintenant depuis près de trente ans.

Les péripéties politiques du «gamin» n'ont pas rompu les liens. «Quand il était ministre de l'Economie, (...) je l'ai fait dormir dans un canapé, avec Brigitte. Tout le monde ne l'aurait pas fait», se rappelle Eric Abadie. Les deux hommes se sont encore parlé la veille au téléphone, une vingtaine de minutes.

«Mes racines familiales sont ici (...) Dès que je peux, je viens. C'est un lieu de vérité où j'arrive serein et déterminé», avait confié le candidat Macron en 2017, au quotidien régional La Dépêche du Midi.

Pourtant fermée depuis un mois, la station de La Mongie est en «effervescence» à quelques jours de recevoir «non pas un, mais deux présidents», confie Enzo Celhaiguibel, 35 ans, sur le pas de la porte de son hôtel La voie lactée.

«Si Emmanuel Macron a choisi ce lieu qui lui est cher et auquel il est très attaché, ce n'est pas pour rien», estime l'hôtelier, qui y voit une «volonté de redynamiser la vallée».

A Eric Abadie, le président confiait encore récemment au téléphone: «Ça va faire dix ans que je serai au pouvoir, et j'aimerais qu'il y ait des choses qui restent.»

En y faisant monter Xi Jinping, le président français veut inscrire le Tourmalet dans l'histoire.