DUBAÏ: Les chrétiens yéménites, aux côtés des adeptes bahaïs du pays et de ce qui reste de sa communauté juive, font face à une terrible persécution de la part de la milice houthie; comme en témoigne l’exemple de Mushir Khalidi.
Le prêtre de 50 ans est emprisonné par les services de renseignement des Houthis depuis quatre ans, à la suite d'une campagne d'arrestations menée contre les quelques deux mille chrétiens vivant sur le territoire contrôlé par la milice.
De l’ancienne communauté juive du Yémen, il ne reste personne, les Houthis ayant même tenu à déporter les deux dernières familles restées à Sanaa.
La milice a aussi expulsé les dirigeants bahaïs, et a poursuivi en justice dix-neuf membres de cette communauté religieuse, malgré une promesse faite l'année dernière de les épargner après quatre ans de détention.
Des sources à Sanaa confient au quotidien Asharq Al-Awsat que la milice houthie a ciblé les chrétiens yéménites et arrêté plusieurs d’entre eux, dont Khalidi, un converti, qui aurait été torturé en prison. Les services de renseignement continuent d'enquêter sur d'autres personnes dont les croyances religieuses n'ont pas encore été révélées, d'autant plus que la plupart des convertis yéménites au christianisme ont déjà quitté le pays.
La famille de Khalidi évite de mentionner son emprisonnement par crainte de répercussions contre lui, mais un ancien prisonnier, récemment libéré d'une prison houthie, raconte à Asharq Al-Awsat qu'il a rencontré Khalidi et d'autres détenus. Le prêtre a été arrêté après la chute de Sanaa, dit-il, et ajoute que ses geôliers l'ont placé à l'isolement des semaines durant. Il raconte aussi que d'autres détenus chrétiens ont été contraints de renoncer à leurs croyances religieuses sous la torture.
Deux amis de Khalidi expliquent à Asharq Al-Awsat, sous couvert d'anonymat, qu'il s’est converti au christianisme au milieu des années 1990. D’après eux, la communauté chrétienne yéménite, qui pratiquait auparavant ses rituels religieux dans divers endroits secrets à Sanaa, Taïz et Ibb, a pour la plupart fui au Liban, à Chypre et ailleurs depuis le déclenchement de la guerre.
Selon ces sources, l’épouse de Khalidi et ses cinq enfants vivent actuellement dans un appartement loué à Sanaa. La famille craint pour sa vie en raison de l’intolérance des Houthis envers les autres religions.
Les mêmes sources affirment qu'un haut responsable houthi du nom de Khaled Al-Madani gère le dossier de ce que le groupe décrit comme des «signes d'occidentalisation», et ses fonctions comprennent, en plus de poursuivre les adeptes d'autres religions, de contrôler la nature du travail que les femmes peuvent exercer , ainsi que les règlements sur le port des vêtements et la mixité dans les universités et les instituts.
La communauté internationale bahaïe a publié une déclaration qui indique que les autorités houthies continuent de harceler la minorité au Yémen, la terroriser, mettre sa vie en danger et saisir ses biens. C’est le cas des membres de cette communauté qui sont actuellement poursuivis.«Ce qui arrive à ces dix-neuf personnes est scandaleux, mais pour nous, c’est très familier», se désole Diane Alaei, la représentante de la communauté internationale bahaïe auprès de l'ONU à Genève, faisant référence à un cas antérieur de six bahaïs yéménites emprisonnés entre 2013 et 2017, libérés à la suite d’une campagne soutenue par l'ONU, pour être ensuite expulsés et fichés comme «fugitifs».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com