Tunisie: Kaïs Saïed, l’empêcheur de gouverner en rond?

Dix jours après le vote de confiance de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le bras de fer continue entre Kaïs Saïed et le tandem Rached Ghannouchi-Hichem Mechichi. (Photo AFP)
Dix jours après le vote de confiance de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le bras de fer continue entre Kaïs Saïed et le tandem Rached Ghannouchi-Hichem Mechichi. (Photo AFP)
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Publié le Samedi 06 février 2021

Tunisie: Kaïs Saïed, l’empêcheur de gouverner en rond?

  • Le président tunisien, Kaïs Saïed, a bloqué la prestation de serment des onze nouveaux ministres, suspectés de conflits d’intérêts
  • Pour la première fois dans l’histoire de la Tunisie, de nouveaux ministres sont ainsi dans l’impossibilité de prendre leurs fonctions

TUNIS: Le président tunisien, Kaïs Saïed, a bloqué la prestation de serment des onze nouveaux ministres, suspectés de conflits d’intérêts. Pour quatre d’entre eux, ces soupçons ont été confirmés par I Watch, relais de Transparency International en Tunisie; mais ils ont été ignorés par la majorité gouvernementale. Cette dernière œuvre discrètement à réunir les conditions politiques et constitutionnelles pour destituer le chef de l’État.

Pour la première fois dans l’histoire de la Tunisie, de nouveaux ministres sont ainsi dans l’impossibilité de prendre leurs fonctions. En effet, Kaïs Saïed refuse qu’un certain nombre des onze ministres récemment nommés prêtent serment – précisément ceux qui, selon lui, font l’objet de poursuites judiciaires ou se trouvent en situation de conflits d’intérêt. Ces accusations sont confirmées par I Watch.

Relais en Tunisie de Transparency International, cette ONG a appelé les députés à ne pas accorder leur confiance à quatre ministres dont elle a, contrairement à Kaïs Saïed, révélé l’identité: il s’agit de Hédi Khairi (ministère de la Santé), Sofiane ben Tounes (Énergie et Mines), Youssef Fennira (Formation professionnelle et Emploi), et Youssef Zouaghi (Justice).

À Sofiane ben Tounes, affilié à Qalb Tounes («Au cœur de la Tunisie»), parti de l’ancien candidat à la présidentielle Nabil Karoui, il est reproché l’implication de sa société, Oscar Infrastructure Services, dans la conclusion d’un contrat avec société Dickens & Madson Canada Inc., une société de lobbying, afin de faciliter l’élection de Karoui.

Hédi Khairi est, lui, en plus mauvaise posture. I Watch l’accuse d’abord d’avoir fait jouer ses relations pour éviter des poursuites à son frère, avocat, qui est à l’origine d’un accident de la route qui a fait une victime. Ensuite, le nouveau ministre de la Santé désigné se serait rendu coupable de faux et d’usage de faux avec la complicité de cadres de la douane et de la justice: il aurait changé la plaque minéralogique d’une voiture importée, à l’insu de son propriétaire et au profit du même frère.

Youssef Fennira est, selon I Watch, coupable d’avoir accordé des marchés de formation à une société dirigée par sa mère et sa sœur alors qu’il était directeur général de l’Agence pour l’emploi et le travail indépendant (Aneti), entre 2019 et 2020. Il avait été limogé de ce poste au mois de septembre dernier après un rapport de l’inspection générale du ministère de la Formation professionnelle et de l’Emploi, à la tête duquel il venait d’être nommé. Reçu à sa demande par I Watch, M. Fennira s’est défendu en affirmant «ignorer la réglementation afférente aux conflits d’intérêts et être déterminé à les éviter à l’avenir».

Finalement, seul le nouveau ministre de la Justice, Youssef Zouaghi, semble, bizarrement, ménagé par I Watch. L’ONG s’est en effet abstenue de détailler les «soupçons sérieux» qu’elle a évoqués dans son adresse aux députés. Serait-ce parce que l’ancien directeur général de la douane avait été décoré le 5 décembre par le président?

Dix jours après le vote de confiance de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le bras de fer continue entre Kaïs Saïed et le tandem Rached Ghannouchi-Hichem Mechichi. Les deux camps poursuivent leurs déclarations et leurs initiatives guerrières. Ennahdha et Qalb Tounes, les deux plus importantes formations de la coalition majoritaire, menacent Saïed de destitution. Dans sa dernière édition du 4 février, Arrai Alaam («L’Opinion publique»), organisme officieux du parti islamiste, rappelle que les cent quarante-quatre voix récoltées lors du vote de confiance aux nouveaux ministres placent la majorité à une voix seulement des deux tiers requis pour créer la Cour constitutionnelle tant attendue et déposer une motion de censure contre le président, que cette instance devra valider.

En réponse, Kaïs Saïed, quant à lui, s’est d’abord offert un bain de foule lundi 2 février sur l’avenue Habib-Bourguiba, la principale artère de la capitale. Une manière de suggérer que la population pourrait voler à son secours en cas de coup dur. Le lendemain, il a reçu Noureddine Taboubi, secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui est son plus important soutien.

Face à cette crise, juristes et politiques ne sont pas sur la même longueur d’ondes. Les premiers sont majoritairement enclins à considérer que le président viole la constitution. L’un d’entre eux, Ahmed Souab, ancien juge au tribunal administratif, suggère au chef du gouvernement de passer en force en s’appuyant sur la théorie de la «procédure impossible», un concept de droit administratif. 

Les politiques sont, eux, divisés. Certains imputent la responsabilité de la crise au chef de l’État, de manière implicite ou explicite. L’ancien président Moncef Marzouki, qui avait gouverné avec Ennahdha (de 2011 à 2013), lui demande de «cesser ses coups de canif à la Constitution», de «jouer son rôle de garant et de président de tous» et de «laisser le gouvernement travailler». Lotfi Mraïhi, président de l’Union populaire républicaine (UPR), va plus loin: il estime que Kaïs Saïed «est devenu un danger pour la démocratie». Haykel Mekki, député du Courant démocratique, proche du président, lui conseille de permettre aux nouveaux ministres de prêter de serment, tout en soulignant que «cela ne diminuerait en rien sa volonté de lutter contre la corruption».

À l’inverse, l’UGTT partage les griefs du président au sujet du remaniement et des nouveaux ministres. Dans un communiqué du mardi 2 février, le syndicat historique estime que le remaniement ministériel est entaché de plusieurs irrégularités: il aurait été effectué «sous la pression des lobbies», constituerait «un passage en force» qui ne tient pas compte «des nombreuses réserves de plusieurs parties au sujet des procédures et à l’égard de certains noms objets de soupçons». Juriste et ancien député, Rabeh Khraifi a appelé les nouveaux ministres soupçonnés de conflits d’intérêt à se retirer. Et, contre toute attente, une des figures du mouvement Ennahdha est du même avis; il s’agit de Samir Dilou, un opposant à Ghannouchi. Dans une déclaration sur une radio locale, il estime en effet que Kaïs Saïed est dans son rôle de garant de la Constitution. Et, surtout, il appelle au retrait des ministres contestés.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).


L'Égypte annonce que 50 camions-citernes de carburant entreront chaque jour dans la bande de Gaza

Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.
  • M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

LE CAIRE : Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.

M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

La trêve devrait entrer en vigueur dimanche à 13 h 30 GMT, ouvrant ainsi la voie à un afflux massif d'aide, selon les médiateurs.

Des centaines de camions sont garés du côté égyptien du poste frontière de Rafah, un point d'entrée autrefois vital pour l'aide humanitaire, fermé depuis mai, lorsque les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien du point de passage.

Au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue nigérian, M. Abdelatty a déclaré : « Nous espérons que 300 camions se rendront au nord de la bande de Gaza », où des milliers de personnes sont bloquées dans des conditions que les agences humanitaires qualifient d'apocalyptiques.

Les travailleurs humanitaires ont mis en garde contre les obstacles monumentaux qui pourraient entraver les opérations d'aide, notamment la destruction des infrastructures qui traitaient auparavant les livraisons.