PARIS: Au volant de sa Tesla, dans Paris, Adrien ne se sent plus à l’aise, et songe sérieusement à l’échanger contre une voiture de marque européenne.
Les regards que lui jettent de nombreux passants qui défilent devant lui aux feux rouges se font de plus en plus pesants.
D’ailleurs, lui-même éprouve une certaine gêne lors de ses déplacements avec sa voiture, considérée comme un bijou de la technologie automobile tout en étant écologique.
Cadre supérieur dans la finance, Adrien est aux premières loges pour constater les dégâts provoqués sur les marchés par la politique du président américain Donald Trump.
Il a donc du mal à continuer à se déplacer dans un engin de marque américaine, qui plus est, propriété du proche conseiller du président américain, Élon Musk.
À l’instar de ce dernier, une majorité de Français exprime aujourd’hui une réticence croissante, voire une franche hostilité à l’égard des États-Unis.
Un sondage de l’institut IFOP montre que la cote de sympathie de ce pays s’est érodée de 40 points, pour atteindre son niveau le plus bas, soit 23 pour cent de sympathisants, depuis l’arrivée au pouvoir de Trump.
Longtemps perçus comme allié naturel et ami, les États-Unis voient aujourd’hui leur image se dégrader en France.
Ce glissement s’inscrit dans une véritable dynamique, alimentée par deux facteurs majeurs: le désengagement militaire américain d’un côté et, de l’autre, l’offensive commerciale, qui porte un sérieux coup d’arrêt au libre échange.
Résultat: une défiance croissante, des appels au boycott et une volonté diffuse de reconquête économique et culturelle.
Le désengagement militaire amorcé en 2010, lorsque les États-Unis ont entamé un retrait progressif de leurs forces en Europe au profit d’un recentrage stratégique sur la région indo-pacifique, est aujourd’hui perçu comme une véritable fracture géostratégique.
Combiné à la logique d’«America First» brandie par Trump, ce désengagement met les Européens face à leurs responsabilités, notamment en Afrique ou en Europe de l’Est, et les incite à augmenter leurs dépenses militaires et à se forger une politique de défense, qui leur est propre.
La confiance s’est émoussée, au point qu’il est dorénavant nécessaire de s’atteler à l’élaboration d’une autonomie stratégique européenne affirmée, loin de l’ombre américaine.
En France, cela a nourri le sentiment d’un abandon, d’une rupture dans le pacte transatlantique en vigueur depuis près de soixante-dix ans, mais c’est sur le terrain économique que la rupture est la plus visible.
L’administration Trump a ouvert les hostilités par une salve d’augmentations des droits de douane, sanctions unilatérales et bras de fer sur les exportations.
Ce protectionnisme américain est vécu en France comme une attaque directe contre les intérêts européens, même si l’administration américaine a tenté d’adoucir le ton, en suspendant l’entrée en vigueur des droits de douanes. Le mal est fait.
Le soupçon d’un partenaire peu fiable persiste et se traduit par des appels croissants au boycott des produits américains.
Sur les réseaux sociaux, des groupes comme «Boycott USA» ou «Achetez français», rassemblent des dizaines de milliers de membres, avec pour mot d’ordre: réduire la dépendance aux marques américaines, de Coca-Cola à Google.
Un rejet autant idéologique que pratique, au nom d’un patriotisme économique renaissant, qui dépasse le simple cadre commercial et reflète une mutation de la relation transatlantique, où la fascination d’hier laisse place à la résistance citoyenne, et au patriotisme économique.
Autrefois symbole du monde libre, l’Amérique est actuellement perçue comme un géant intrusif et méprisant, qui impose ses normes, et ses lois extraterritoriales à l’ensemble de la planète.
C’est un tournant qui s’opère, puisque pour de nombreux Français il ne s’agit plus seulement d’acheter local, mais de défendre une forme de souveraineté économique, culturelle, et technologique.
Un tournant qui semble s’installer dans la durée, au regard des évolutions inhérentes à la politique américaines et ses rapports avec le monde.
À ce sujet, le journaliste spécialisé dans l’analyse économique François Lenglet, avance dans une tribune publiée par le quotidien Le Figaro, un constat des plus pessimistes estimant que «la période de mondialisation libre-échangiste se referme et nous ne la reverrons plus de notre vivant». Boycottons en masse, coupons tout ce qui