FRANCFORT : La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu jeudi ses mesures de soutien monétaire à l'économie, toujours inquiète du «risque sérieux» que fait peser sur la reprise la virulence de la pandémie.
Les gardiens de l'euro ont opté pour le statu quo sur leur panoplie d'outils anti-crise sensiblement renforcés lors de leur dernière réunion de décembre.
«Une stimulation monétaire importante reste essentielle pour préserver des conditions de financement favorables», a estimé Mme Lagarde, à l'issue d'une réunion du Conseil des gouverneurs.
La principale arme de la BCE, le programme d'achat d'urgence face à la pandémie (PEPP) lancé en mars pour maintenir des conditions de financement favorables, continue de porter sur 1 850 milliards d'euros à dépenser d’ici mars 2022.
La banque a insisté sur la flexibilité de sa stratégie, aussi bien s'il s'agit de ne «pas utiliser entièrement» cette enveloppe car les achats en cours seraient suffisants, que s'il faut au contraire muscler le soutien, en cas de nouveau «choc négatif» lié à la pandémie.
L'autre programme plus ancien, dénommé «QE» («Quantitative Easing», «Assouplissement quantitatif»), est lui aussi maintenu à son rythme actuel de 20 milliards d'euros par mois, sans limite dans le temps.
De même l'institution va accorder aux banques de nouvelles vagues de prêts bon marché, tandis que les taux d'intérêt ont été maintenus à leur plus bas historique.
Une partie des liquidités déposées auprès de la BCE au lieu d'être distribuées via des crédits vont restées taxées à -0,5%, comme depuis septembre 2019.
Le taux directeur servant dans le refinancement des banques à court terme a lui été maintenu à zéro, niveau auquel il campe depuis 2016.
Cet arsenal doit permettre aux États, entreprises et ménages d'emprunter à bas coût pour stimuler l'investissement et l'emploi, et in fine les prix.
Plus de risques
La BCE, qui joue les pompiers de la zone euro depuis le début de la crise sanitaire, n'est pas sous pression pour gonfler à nouveau ses interventions, s'accordent les observateurs.
Elle va «rester en attente pendant plusieurs mois», prédit Andrew Kenningham, économiste chez Capital Economics.
L'évolution de la situation sanitaire est au centre des attentions de la banque alors que l'apparition de nouveaux variants du virus et le lent déploiement des vaccins assombrissent les espoirs d'un retour rapide à la croissance.
«L'intensification de la pandémie pose des risques pour les perspectives économiques à court terme», a déclaré Mme Lagarde aux journalistes.
«Il est probable que la production se soit contractée au quatrième trimestre de 2020», a-t-elle ajouté, après le fort rebond de l'été dans la foulée d'une levée des confinements en Europe. Et le premier trimestre 2021 s'annonce également décevant en raison de la prolongation des restrictions en Europe.
La Française reste cependant confiante pour la seconde partie de l'année. Elle estime que les dernières prévisions de l'institution de Francfort, qui table sur une croissance du PIB de la zone euro de 3,9% cette année, restent «largement valables».
Euro fort
La BCE peut également se rassurer sur le fait que les marchés obligataires restent calmes, et ce en dépit des crises gouvernementales en Italie et aux Pays-Bas.
Cela «montre bien l'efficacité de la politique de la BCE pour contenir toute augmentation des taux longs», élément déclencheur de la crise des dettes en zone euro dans les années 2000, observe Eric Dor, directeur de recherche à l'Institut d'économie scientifique et de gestion (IESEG).
L'appréciation de l'euro constitue cependant un casse-tête pour la banque centrale qui n'arrive pas à faire remonter l'inflation vers 2% en glissement annuel, le niveau jugé adéquat pour aider l'activité.
Depuis fin février, la monnaie unique s'est appréciée de plus de 10% face au billet vert et Mme Lagarde a souligné jeudi que la BCE »surveille très attentivement les taux de change».
Un euro fort fait baisser le coût des importations et rend les exportations moins compétitives.
L'inflation, négative en zone euro d'août à décembre, devrait remonter progressivement cette année mais la pression sur les prix va rester «modérée» par la suite, faute d'une demande assez soutenue, a averti Mme Lagarde.