« Retourne d'où tu viens » : la téléréalité britannique aborde le sujet sensible de l'immigration

Chloe Dobbs, commentatrice politique britannique de droite, pose pour un portrait à Londres le 6 février 2025. Le nouveau format de télé-réalité britannique a suscité la controverse en tentant de décrire le voyage éprouvant des réfugiés au Royaume-Uni, à travers les yeux de six Britanniques. (Photo par Ben STANSALL / AFP)
Chloe Dobbs, commentatrice politique britannique de droite, pose pour un portrait à Londres le 6 février 2025. Le nouveau format de télé-réalité britannique a suscité la controverse en tentant de décrire le voyage éprouvant des réfugiés au Royaume-Uni, à travers les yeux de six Britanniques. (Photo par Ben STANSALL / AFP)
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Publié le Dimanche 09 février 2025

« Retourne d'où tu viens » : la téléréalité britannique aborde le sujet sensible de l'immigration

  • Diffusée depuis lundi sur la chaîne publique Channel 4, l'émission, baptisée « Go Back Where You Came From » (Retourne d'où tu viens), a déjà attiré de nombreuses critiques.
  • L'ONG Amnesty International UK a qualifié un tel programme « sensationnaliste » sur un sujet aussi sensible politiquement de « profondément décevant ».

LONDRES : Reproduire une traversée sur une embarcation de fortune et expérimenter la misère en Somalie : une émission de téléréalité britannique, qui prétend faire vivre à six candidats le périple de migrants vers l'Europe, suscite une vive polémique.

Diffusée depuis lundi sur la chaîne publique Channel 4, l'émission, baptisée « Go Back Where You Came From » (Retourne d'où tu viens), a déjà attiré de nombreuses critiques. L'ONG Amnesty International UK a qualifié un tel programme « sensationnaliste » sur un sujet aussi sensible politiquement de « profondément décevant ».

Durant les quatre épisodes du programme, diffusés au rythme d'un par semaine, les six candidats, dont quatre sont fermement opposés à l'immigration et deux plutôt favorables, vont « expérimenter certains des plus importants dangers que rencontrent des réfugiés dans leur voyage » vers l'Europe, selon le résumé de Channel 4.

Au début de leur périple, les candidats se trouvent à Raqqa, en Syrie, et à Mogadiscio, en Somalie. Ils visitent des marchés locaux et jouent au football avec des enfants qui vont ensuite fouiller les décharges pour tenter d'y trouver de quoi survivre.

Dans le premier épisode, le candidat Dave Marshall, 35 ans, filmé au pied des falaises de Douvres avant son départ, appelle la Navy britannique à bombarder les migrants dans la Manche. Une autre, Chloe Dobbs, chroniqueuse politique de 24 ans, affirme que « sans contrôle de l'immigration, le Royaume-Uni va devenir un enfer rempli de gens en burqa ».

Ces dernières années, les gouvernements britanniques successifs ont tenté d'endiguer l'arrivée clandestine de migrants par la Manche. Près de 37 000 personnes sont parvenues à entrer ainsi au Royaume-Uni en 2024, soit 25 % de plus qu'en 2023. Au moins 78 personnes sont mortes dans ces traversées, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

- mieux qu'un documentaire « ennuyant » !

« L'émission explore les diverses opinions, parfois polarisées dans notre société, sous un angle nouveau », a défendu un porte-parole du programme.

Mais pour Myria Georgiou, professeure de communication à la London School of Economics, le « succès » des émissions de téléréalité « dépend totalement de leur capacité à diffuser des opinions choquantes ».

« Je suis certaine que les candidats participent pour voir les opinions les plus extrêmes », a-t-elle déclaré à l'AFP.

Si certains spectateurs et des associations ont salué le choix de Channel 4 de diffuser ce programme en première partie de soirée, d'autres ont exprimé leur indignation. L'ONG Refugee Council, qui soutient les réfugiés, a également salué cette initiative, qu'elle juge « bienvenue ».

« Certains des propos et opinions exprimés dans le premier épisode ont mis beaucoup de gens mal à l'aise. Mais au moins un candidat affirme maintenant que son expérience l'a rendu plus sensible à la situation des réfugiés », a-t-elle réagi sur X.

Pour Chloe Dobbs, il s'agit d'« un show très amusant que beaucoup de gens voudront regarder ». Probablement « beaucoup plus qu'un documentaire traditionnel et ennuyeux ».

- « Nauséabonde » -

Dans un bâtiment endommagé de Raqqa, l'ancienne « capitale » du groupe jihadiste État islamique (EI), une famille propose à Dave et deux autres candidats de les loger pour la nuit. « C'est très aimable à vous de nous accueillir dans votre maison », répond Dave sans ironie.

Dans l'un des « défis » qu'ils doivent relever, les candidats simulent une traversée maritime sur une petite embarcation.

L'épreuve a été un moment de bascule pour Chloé, qui avait auparavant estimé que certains migrants y voyaient une expérience « amusante ».

« C'est à ce moment-là que ça m'a vraiment frappé. Mon Dieu, les gens doivent vraiment être désespérés pour monter à bord de ces bateaux », explique-t-elle.

Mais cette simulation a également choqué en France, où le président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, l'a jugée « nauséabonde ».

« Des centaines de personnes sont mortes en tentant de rejoindre l'Angleterre ces dernières années. Cette situation est un drame humanitaire, pas un jeu », a-t-il dénoncé sur X, en appelant Channel 4 à déprogrammer l'émission.

Ce programme est inspiré d'un programme australien diffusé au début des années 2010, à une époque où la classe politique était divisée sur la manière de lutter contre les arrivées illégales de migrants par bateau.

Pour Myria Georgiou, le retour de l'émission dix ans plus tard au Royaume-Uni n'est pas anodin, car « des dirigeants politiques, au niveau national comme mondial, ont banalisé les opinions les plus outrancières ».

Et « la politique étant devenue un divertissement, il n'est pas surprenant que le divertissement devienne politique ».


Un enfant meurt chaque jour en tentant de franchir la Méditerranée centrale, selon l'Unicef

Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie. (Photo AFP)
Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie. (Photo AFP)
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  • Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie.
  • Les droits consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant ne connaissent pas de frontières ni de rivages.

ROME : Selon un rapport publié mardi par l'Unicef, environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie.

L'Unicef se fonde sur le fait que parmi les personnes arrivées sur le sol européen par cette voie migratoire, un sur six est un enfant, pour estimer ce chiffre.

Ce chiffre pourrait être sous-estimé, car de nombreux naufrages passent inaperçus, faute de survivants pour témoigner.

Par ailleurs, sept enfants sur dix voyagent seuls, sans leurs parents, selon l'agence onusienne chargée des enfants.

« Beaucoup d’enfants qui tentent de traverser la Méditerranée centrale fuient la guerre, les conflits, la violence et la pauvreté », indique le rapport, précisant que « plus de la moitié des enfants et des jeunes interrogés déclarent avoir subi des violences physiques et un tiers affirment avoir été détenus contre leur gré ». 

« Les gouvernements doivent protéger les droits et l'intérêt supérieur des enfants (...). Les droits consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant ne connaissent pas de frontières ni de rivages : ils accompagnent les enfants lorsqu’ils les traversent », a déclaré Regina De Dominicis, haut responsable de l'Unicef, citée dans le rapport.

L'agence onusienne rappelle que si l’adoption du Pacte européen sur la migration et l’asile devant entrer en vigueur mi-2026 « peut permettre de mieux organiser la gestion des migrations, ce dernier doit être mis en œuvre en parfaite conformité avec les obligations légales de défense de l'intérêt supérieur de l’enfant ».

L'Unicef appelle également à renforcer les opérations de recherche et de sauvetage en mer pour prendre en compte les besoins spécifiques des enfants. 

« À son arrivée, chaque enfant doit immédiatement bénéficier d'une représentation juridique ainsi que de solides mesures de protection. Les mesures de restriction des déplacements ne doivent jamais entraîner la détention d'un enfant dans un centre de rétention, que ce soit lors des procédures de contrôle, de passage des frontières, de demande d’asile ou de renvoi », conclut l'Unicef. 


La Turquie cherche à renforcer son ancrage sur le continent africain

Cette photo prise et diffusée par le bureau de presse de la présidence turque le 12 avril 2025 montre le président turc Recep Tayyip Erdogan (R) rencontrant le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors de la 4e édition du Forum diplomatique d'Antalya (ADF2025) à Antalya. (Photo by Handout / Turkish Presidency Press Office / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le bureau de presse de la présidence turque le 12 avril 2025 montre le président turc Recep Tayyip Erdogan (R) rencontrant le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors de la 4e édition du Forum diplomatique d'Antalya (ADF2025) à Antalya. (Photo by Handout / Turkish Presidency Press Office / AFP)
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  • La Turquie cherche désormais à y étendre son influence en proposant sa médiation dans des conflits.
  • Très impliqué sur les dossiers syrien et ukrainien, le président turc Recep Tayyip Erdogan a renforcé son image d'interlocuteur clé en Afrique en négociant, il y a quelques mois, un accord de paix entre la Somalie et l'Éthiopie.

ANTALYA, TURQUIE : La Turquie, qui pousse ses pions en Afrique depuis plusieurs années, cherche désormais à y étendre son influence en proposant sa médiation dans des conflits, à la faveur notamment du retrait de la France et des États-Unis.

Témoignage des efforts d'Ankara pour consolider son ancrage sur le continent, un forum diplomatique organisé ce week-end à Antalya, dans le sud de la Turquie, a réuni, aux côtés du président syrien Bachar el-Assad, des ministres russe et ukrainien des Affaires étrangères, ainsi que de nombreux responsables africains, dont le chef de l'État somalien.

« Les pays africains cherchent des alternatives et la Turquie en représente une », a affirmé à l'AFP Eghosa Osaghae, directeur général de l'Institut nigérian des affaires internationales (NIIA), présent à Antalya. 

Très impliqué sur les dossiers syrien et ukrainien, le président turc Recep Tayyip Erdogan a renforcé son image d'interlocuteur clé en Afrique en négociant, il y a quelques mois, un accord de paix entre la Somalie et l'Éthiopie.

Selon M. Osaghae, la capacité d'Ankara à combler le vide laissé par la France, dont de nombreuses anciennes colonies se sont détournées ces dernières années, « dépendra en grande partie de l'attrait des offres turques ».

« Nous entretenons avec la France des relations dont nous sommes très fiers, mais la France ne nous empêche pas d'avoir d'autres partenariats », a déclaré à l'AFP Léon Kacou Adom, le ministre ivoirien des Affaires étrangères, lors du forum d'Antalya.

Le pays d'Afrique de l'Ouest, ancienne colonie française, souhaite collaborer avec la Turquie dans tous les secteurs, notamment le commerce, la communication, la sécurité, l'éducation et la formation, a-t-il souligné.

« Tout cela nous intéresse (...). La Turquie nous fait des offres que nous étudions », a-t-il ajouté.

- « Solutions aux problèmes africains » -

De nombreux pays africains sont confrontés à des menaces sécuritaires, émanant de groupes comme Boko Haram ou les shebab somaliens.

« Si la Turquie peut apporter son aide dans ces domaines, pourquoi pas ? », estime M. Osaghae. « Le point positif est que de nombreux pays africains coopèrent déjà militairement avec la Turquie. Cela peut être la pierre angulaire de l'influence turque », relève-t-il.

La Turquie, qui a proposé en janvier sa médiation entre le Rwanda et la République démocratique du Congo, a signé ces dernières années des accords de défense avec plusieurs États africains dont la Somalie, la Libye, le Kenya, le Rwanda, l'Éthiopie, le Nigeria et le Ghana.

Ces accords ont ouvert des marchés à l'industrie de défense turque, notamment pour ses drones réputés fiables et bon marché.

« Nous nous efforçons de faire en sorte que l'Afrique trouve ses propres solutions aux problèmes africains », affirme Alp Ay, diplomate turc et représentant spécial d'Ankara dans les négociations entre la Somalie et la région séparatiste du Somaliland.

Selon un haut diplomate somalien, Ankara a joué « un rôle très utile en parvenant à réunir les deux pays pour résoudre ce problème ». « L'Afrique a désespérément besoin de médiateurs », résume pour sa part le politologue nigérian Eghosa Osaghae.

Si la responsabilité du respect de l'accord incombe désormais aux deux parties, la Turquie continuera toutefois de jouer son rôle de facilitateur, souligne le diplomate turc Alp Ay, qui envisage l'avenir avec « espoir ».

Recep Tayyip Erdogan s'est entretenu avec son homologue somalien, Hassan Cheikh Mohamoud, samedi à Antalaya.

Au cours de leur rencontre, les deux hommes ont promis d'« accroître la coopération » entre les deux États, selon Ankara, qui dispose déjà d'un droit d'exploration des ressources énergétiques le long des côtes somaliennes. 


Zelensky exhorte Trump à se rendre en Ukraine pour voir les ravages de la guerre

Le président américain Donald Trump et le président ukrainien Volodymyr Zelensky se rencontrent dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump et le président ukrainien Volodymyr Zelensky se rencontrent dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025. (AFP)
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  • « Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a exhorté son homologue américain, Donald Trump, à se rendre dans son pays pour prendre conscience de l'étendue des dégâts causés par l'invasion de la Russie. 
  • En se rendant en Ukraine, M. Trump « comprendra ce que Poutine a fait ».

WASHINGTON : le président ukrainien Volodymyr Zelensky a exhorté dimanche son homologue américain Donald Trump à se rendre dans son pays pour mieux comprendre la dévastation causée par l'invasion russe. 

« Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a exhorté son homologue américain, Donald Trump, à se rendre dans son pays pour prendre conscience de l'étendue des dégâts causés par l'invasion de la Russie. 

En se rendant en Ukraine, M. Trump « comprendra ce que Poutine a fait ».

Cette invitation intervient alors que M. Trump fait pression pour mettre rapidement un terme à ce conflit qui dure depuis plus de trois ans, les États-Unis ayant engagé des discussions directes avec la Russie malgré ses attaques incessantes contre l'Ukraine.

Washington a également discuté d'une éventuelle trêve avec des responsables ukrainiens.

Cette invitation fait suite à la vive polémique qui a éclaté à la Maison Blanche fin février entre le président ukrainien, M. Zelensky, et le vice-président américain, M. JD Vance, devant la presse.

M. Vance avait alors accusé l'Ukraine d'accueillir des dirigeants étrangers pour faire de la propagande en vue de gagner leur soutien. 

M. Zelensky a nié une nouvelle fois cette allégation et a déclaré à la chaîne CBS que si M. Trump décidait de se rendre en Ukraine, « nous ne préparerons rien, ce ne sera pas du théâtre ». Ce ne sera pas du théâtre. »