Retailleau/Darmanin : deux présidentiables de droite sur la même ligne sécuritaire

Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur et de l'Outre-mer sortant, prononce un discours sous le regard de Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l'Intérieur, et de Nicolas Daragon, le nouveau ministre délégué à la Sécurité quotidienne, lors de la cérémonie de passation des pouvoirs au ministère de l'Intérieur, à Paris, le 23 septembre 2024. (Photo AFP)
Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur et de l'Outre-mer sortant, prononce un discours sous le regard de Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l'Intérieur, et de Nicolas Daragon, le nouveau ministre délégué à la Sécurité quotidienne, lors de la cérémonie de passation des pouvoirs au ministère de l'Intérieur, à Paris, le 23 septembre 2024. (Photo AFP)
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Publié le Lundi 06 janvier 2025

Retailleau/Darmanin : deux présidentiables de droite sur la même ligne sécuritaire

  • Pour la première fois dans l'histoire récente de la Ve République, les ministres de l'Intérieur et de la Justice sont sur la même longueur d'onde
  • « Avec eux, la chaîne pénale sera cohérente. C'est un binôme très complémentaire avec un intérêt commun : incarner la sécurité », relève pour sa part Franck Louvrier, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée.

PARIS : Pour la première fois dans l'histoire récente de la Ve République, les ministres de l'Intérieur et de la Justice sont sur la même longueur d'onde. Toutefois, les ambitions présidentielles de Bruno Retailleau et Gérald Darmanin pourraient déboucher sur une compétition mortifère pour l'un et l'autre.

« Ils ne s'adorent pas, mais ils ne veulent pas s'embêter l'un l'autre », estime un ancien ministre d'Emmanuel Macron, car, dit-il, « ils sont convaincus tous les deux qu'en matière régalienne, il faut de la fermeté ».

« Ce sont deux grands fauves de la politique qui ont des visions assez proches de ce que doit être le continuum de sécurité », note une ministre du gouvernement Bayrou.

« Avec eux, la chaîne pénale sera cohérente. C'est un binôme très complémentaire avec un intérêt commun : incarner la sécurité », relève pour sa part Franck Louvrier, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée.

Il considère que la « concurrence entre ces deux profils de présidentiables va être annihilée car l'un ne peut pas réussir sans l'autre ». Il estime même que le tandem peut « être solide malgré les vicissitudes du gouvernement, pour peu qu'il parvienne à installer l'idée dans l'opinion qu'il représente la sécurité ».

De prime abord, tout semble opposer les deux hommes, hormis leur position commune sur la sécurité et l'ordre. Ils ne sont pas de la même génération : Bruno Retailleau, âgé de 64 ans, pourrait être le père de Gérald Darmanin, âgé de 42 ans. Tous deux sont certes de droite et le revendiquent, mais le premier est resté à LR et était proche de François Fillon quand le second, dont le mentor était Nicolas Sarkozy, a quitté le parti pour rejoindre Emmanuel Macron en 2017.

- « Petites phrases » -

« Retailleau est un conservateur cultivé, beaucoup plus que Darmanin. Il est intellectuellement très affûté », décrit un responsable socialiste, grand connaisseur des arcanes gouvernementales et parlementaires.

Il estime que l'ex-patron du groupe LR au Sénat est très différent de son cadet dans sa manière de faire : « Il a des convictions, mais il n'est pas sans foi ni loi, il ne fait pas de coups dans le dos alors que Gérald Darmanin est plus opportuniste ».

Avant la dissolution et son entrée au gouvernement de Michel Barnier début septembre comme ministre de l'Intérieur, le sénateur vendéen n'était pas connu pour avoir des ambitions présidentielles.

Mais dès son arrivée place Beauvau, il a « fait du Sarko en termes de com' », selon un parlementaire de gauche, multipliant les formules choc (« mexicanisation du pays ») et les postures martiales, disant souhaiter « frapper la délinquance au cœur et en profondeur ».

Selon la ministre du gouvernement Bayrou, il n'y a pas de différence entre eux. « Les deux sont adeptes des petites phrases », affirme-t-elle.

À son arrivée place Beauvau, Bruno Retailleau avait laissé entrevoir son envie de tacler son prédécesseur. Devant un Gérald Darmanin impassible, il avait répété à trois reprises que sa feuille de route était de « rétablir l'ordre », sous-entendant que cela n'avait pas été le cas auparavant.

Trois mois plus tard, ils sont réunis avec une ambition commune : mettre fin au narcotrafic, source d'un grand nombre de meurtres. Chacun a proclamé sa détermination en ce domaine. « Le risque est plus grand pour Bruno Retailleau. Si les résultats ne sont pas à la hauteur de ses paroles, ce sera un problème pour lui. Pour Gérald Darmanin, la tâche est plus aisée. On attend toujours davantage de la police », souligne le responsable socialiste.

Lundi, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin ont déjeuné ensemble pour la première fois depuis l'annonce du nouveau gouvernement. « C'était un déjeuner de travail extrêmement constructif qui leur a permis de travailler ensemble. Ils ont abordé plusieurs dossiers, dont la proposition de loi sénatoriale contre le narcotrafic », a commenté auprès de l'AFP l'entourage du garde des Sceaux, assurant qu'il n'y avait « pas du tout » de rivalité entre les deux hommes.


« Figure de la vie politique » : la gauche dénonce la réaction de Bayrou après la mort de Le Pen

Le chef du parti centriste français MoDem François Bayrou arrive pour assister à une cérémonie pour rendre hommage aux 42 citoyens français tués et à toutes les victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre dernier (Photo, AFP).
Le chef du parti centriste français MoDem François Bayrou arrive pour assister à une cérémonie pour rendre hommage aux 42 citoyens français tués et à toutes les victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre dernier (Photo, AFP).
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  • Jean-Marie Le Pen était un raciste et un antisémite notoire, adorateur de Pétain et tortionnaire en Algérie », a écrit sur les réseaux sociaux Manon Aubry, cheffe de file des eurodéputés de La France insoumise.
  • "C'était un raciste. Un antisémite. Un colonialiste. Un nostalgique du régime de Vichy. Un antiféministe… Un multirécidiviste qui a fondé le FN avec des SS. Pas une figure de la vie politique française", a appuyé le secrétaire général du Parti socialiste

PARIS : Plusieurs responsables de gauche ont dénoncé mardi la réaction, jugée trop laudative, de François Bayrou à la mort de Jean-Marie Le Pen, qualifié de « figure de la vie politique » et instigateur de « polémiques » par le Premier ministre.

« Jean-Marie Le Pen est mort. Ce n'était pas juste une « figure de la vie politique française », comme a réagi François Bayrou. Le respect pour les défunts ne doit pas conduire à la cécité sur son parcours. Jean-Marie Le Pen était un raciste et un antisémite notoire, adorateur de Pétain et tortionnaire en Algérie », a écrit sur les réseaux sociaux Manon Aubry, cheffe de file des eurodéputés de La France insoumise.

« Le racisme, la haine des musulmans, l'antisémitisme ne sont pas des polémiques. Ce sont des délits punis par la loi », a ajouté Paul Vannier, député LFI.

« Au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée et des affrontements nécessaires sur le fond, Jean-Marie Le Pen aura été une figure de la vie politique française. On savait, en le combattant, quel combattant il était », avait écrit un peu plus tôt François Bayrou sur X.

"C'était un raciste. Un antisémite. Un colonialiste. Un nostalgique du régime de Vichy. Un antiféministe… Un multirécidiviste qui a fondé le FN avec des SS. Pas une figure de la vie politique française", a appuyé le secrétaire général du Parti socialiste Pierre Jouvet.

"Il n'est pas question de polémiques, mais de condamnations pour des propos racistes, antisémites et négationnistes", a pour sa part estimé le porte-parole du Parti communiste français Ian Brossat, qualifiant de message du Premier ministre de "pathétique".

Le fondateur du Front national est mort mardi à l'âge de 96 ans.


Macron sur Sansal : une « ingérence inacceptable dans une affaire intérieure », selon Alger

Président  Emmanuel Macron (Photo AFP)
Président Emmanuel Macron (Photo AFP)
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  • « Des propos du président français qui déshonorent, avant tout, celui qui a cru devoir les tenir de manière aussi désinvolte et légère.
  • Ces propos ne peuvent être que réprouvés, rejetés et condamnés.

ALGER, ALGERIE : Alger a rejeté mardi comme « une immixtion inacceptable dans une affaire interne algérienne » les déclarations du président français Emmanuel Macron sur l'Algérie, dans lesquelles il affirmait que ce pays « se déshonore » en maintenant en prison l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal.

« Des propos du président français qui déshonorent, avant tout, celui qui a cru devoir les tenir de manière aussi désinvolte et légère. Ces propos ne peuvent être que réprouvés, rejetés et condamnés pour ce qu'ils sont : une immixtion éhontée et inacceptable dans une affaire interne algérienne », a indiqué le ministère algérien des Affaires étrangères dans un communiqué.

« Ce que le président français présente indûment et faussement comme une affaire de liberté d'expression n'en est pas une au regard de la loi d'un État souverain et indépendant. Elle relève essentiellement d'une mise en cause de l'intégrité territoriale du pays, un délit passible de la loi algérienne », a ajouté le ministère algérien.


Jean Marie Le Pen mort, ses idées plus que jamais ancrées dans la vie politique

Déchu en 2015 de la présidence du Front National, parti dont il a été le fondateur en 1972, et vivant en retrait de la politique, Le Pen suivait de près les évolutions politiques françaises qui ne pouvaient que lui donner des motifs de réjouissances. (AFP)
Déchu en 2015 de la présidence du Front National, parti dont il a été le fondateur en 1972, et vivant en retrait de la politique, Le Pen suivait de près les évolutions politiques françaises qui ne pouvaient que lui donner des motifs de réjouissances. (AFP)
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  • Ses frasques politiques allaient de pair avec les frasques de sa vie personnelle, ses mariages, ses séparations mais surtout l’acquisition obscure du domaine de Montretout, où il a résidé
  • Il a toujours préféré se cantonner dans le rôle du provocateur, l’empêcheur de tourner en rond, le sale gosse de la vie politique, plutôt que de réellement prendre des responsabilités politiques

PARIS: Jean Marie Le Pen patriarche et père fondateur de l’extrême droite française s’est éteint à l’âge de 96 ans, laissant derrière lui une empreinte bien nette sur la vie politique française.

Déchu en 2015 de la présidence du Front National, parti dont il a été le fondateur en 1972, et vivant en retrait de la politique, Le Pen suivait de près les évolutions politiques françaises qui ne pouvaient que lui donner des motifs de réjouissances.

Adepte du verbe cru et direct, Le Pen a cultivé tout au long de son parcours politique les saillies choquantes contre les arabes son bouc émissaire et contre les juifs ce qui lui a valu plus de 25 condamnations pour provocation à la haine raciale, et antisémitisme.

Vilipendé, chahuté, isolé politiquement et banni d’apparition dans les médias de l’époque, il a toujours préféré se cantonner dans le rôle du provocateur, l’empêcheur de tourner en rond, le sale gosse de la vie politique, plutôt que de réellement prendre des responsabilités politiques.

Ses frasques politiques allaient de paire avec les frasques de sa vie personnelle, ses mariages, ses séparations mais surtout l’acquisition obscure du domaine de Montretout, où il a résidé.

Vilipendé, chahuté, isolé politiquement et banni d’apparition dans les médias de l’époque, il a toujours préféré se cantonner dans le rôle du provocateur, l’empêcheur de tourner en rond, le sale gosse de la vie politique, plutôt que de réellement prendre des responsabilités politiques.

C’est d’ailleurs sans regret qu’il a vu la présidence de la République lui filer entre les doigts en réussissant à la surprise générale à se hisser au second tour des élections présidentielles en avril 2002.

L’essentiel pour lui résidait dans le séisme politique qu’il a provoqué en évinçant le candidat du Parti socialiste et ancien premier ministre Lionel Jospin, pour affronter au second tour de la présidentielle l’ancien président Jacques Chirac.

C’est ce séisme qui a donné naissance au fameux barrage républicain, incitant les électeurs de gauche à donner leurs voix à Chirac, candidat de la droite pour empêcher Le Pen d’accéder à la magistrature suprême.

En ce temps-là, la France était autre, plus d’un million et demi de personnes sont descendues dans la rue pour conspuer Le Pen. Chirac pour sa part avait refusé de participer face à lui au débat traditionnel entre les deux candidats au second tour de la présidentielle.

En ce temps-là, débattre avec le chef du Front National relevait d’un tabou, les idées racistes et identitaires de Le Pen étaient considérées anti-républicaines et nuisibles à la paix sociale et devaient donc rester circonscrites.

Mais même circonscrites, ces idées-là ont continué à essaimer en France, se nourrissant des problèmes économiques et sociaux et de la déception grandissante des Français à l’égard de la classe politique.

L’extrême droite est bien ancrée dans la vie politique française, elle peut même désormais peser sur les institutions et chambouler les équilibres, tel qu’on l’a vu avec la chute récente de l’ancien premier ministre Michel Barnier.

Surfant sur ces frustrations accumulées, Marine Le Pen, fille de Jean-Marie Le Pen a su au fil des ans, dépoussiérer l’image de l’extrême droite, en évinçant son père bien sûr ainsi que les autres caciques qui l’entouraient.

En édulcorant ses idées sans renoncer aux fondamentaux, en rajeunissant la direction du parti et sa base, elle est parvenue à l'installer solidement sur l’échiquier politique français.

Marine le Pen, qui a affronté l’actuel président français Emmanuel Macron à deux reprises au second tour des élections présidentielles en 2017 puis 2022, préside aujourd’hui un grand bloc parlementaire fort de 143 députés.

L’extrême droite est bien ancrée dans la vie politique française, elle peut même désormais peser sur les institutions et chambouler les équilibres, tel qu’on l’a vu avec la chute récente de l’ancien premier ministre Michel Barnier.

Tout cela ne pouvait que réjouir Le Pen père, qui l’a d’ailleurs exprimé dans une interview accordée à Arab News en français à la veille des élections présidentielles de 2022, qui voyait dans la mue opérée par sa fille un passage de relais entre générations.

Cette mue disait-il était nécessaire parce que « étant candidate à la présidentielle elle doit rassembler autant que possible, tout en restant compatible et loyale à l’esprit du message ».

En enterrant Le Pen, la France est loin d’enterrer son héritage idéologique porté à son zénith, banalisé et bien revendiqué par une large majorité de français.