Génocide arménien : une radio turque réduite au silence

Une photo montre un microphone et un casque dans un studio d'Acik Radyo à Istanbul, après que la station de radio a été suspendue par les autorités, à Istanbul le 16 octobre 2024. (Photo AFP)
Une photo montre un microphone et un casque dans un studio d'Acik Radyo à Istanbul, après que la station de radio a été suspendue par les autorités, à Istanbul le 16 octobre 2024. (Photo AFP)
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Publié le Mercredi 16 octobre 2024

Génocide arménien : une radio turque réduite au silence

  • Une radio indépendante turque a cessé d'émettre mercredi sur ordre des autorités pour avoir laissé être évoqué sur son antenne le génocide arménien de 1915, nié par Ankara.
  • Le RSF estime que 90 % des médias nationaux sont sous le contrôle du pouvoir.

ISTANBUL : Une radio indépendante turque a cessé d'émettre mercredi sur ordre des autorités pour avoir laissé être évoqué sur son antenne le génocide arménien de 1915, nié par Ankara, ce qui constitue un nouveau coup porté à la liberté d'expression en Turquie.

À 13 heures (10 heures GMT), précises, sous les applaudissements de confrères et d'amis venus témoigner leur soutien, les journalistes d'Açik Radyo (Radio ouverte en turc) ont mis fin à leurs programmes, certains au bord des larmes, promettant au micro que leur station « continuera d'exister ».

« Il s'agit de notre bande FM, qui est un grand trésor constitué depuis 30 ans grâce aux contributions de milliers de personnes. Nous sommes en train de la perdre et cela nous attriste", a déclaré à l'AFP Ilksen Mavituna, coordinateur des programmes de la station.

« Açik Radyo était une radio unique en Turquie. C'était la seule radio qui tirait ses auditeurs vers le haut », a déploré Meral Erbil, une ancienne programmatrice de la radio publique TRT aujourd'hui retraitée.

La petite station stambouliote, qui émettait depuis 30 ans et se voulait « ouverte à toutes les voix », avait été condamnée fin mai à une amende et cinq jours d'interdiction de diffusion d'une émission dans laquelle, fin avril, un invité était revenu sur les massacres d'Arméniens perpétrés en 1915 par les troupes ottomanes, les qualifiant de « génocide » à l'instar de nombreux historiens.

Le Haut conseil turc de l'audiovisuel (RTÜK), qui avait reproché à la radio de ne pas avoir « tenté de corriger les déclarations faites par l'invité », a par la suite annulé sa licence au motif que la direction d'Açik Radyo n'a pas respecté la suspension du programme pour « incitation à la haine et à l'hostilité ».

L'entreprise entend obtenir de la justice qu'elle revienne sur cette décision, refusant d'être « réduite au silence ».

- « Acharnement » -

« Nous demandons aux autorités de restituer l'antenne à Açik Radyo et de mettre fin à cet acharnement scandaleux », a lancé mercredi Erol Önderoglu, représentant de l'ONG Reporters sans Frontières (RSF) en Turquie. Il a salué une « radio qui a depuis sa création il y a 30 ans incarné l'information pluraliste (...), dans un pays où la polarisation médiatique n'a cessé de se renforcer ».

Il s'agit d'une « vraie perte », a-t-il insisté, citant les « débats riches sur l'environnement » ou les « créneaux d'émissions animés par des journalistes arméniens ».

La Turquie, dirigée depuis deux décennies par Recep Tayyip Erdogan et son parti AKP (islamo-conservateur), pointe à la 158e place sur 180 au classement 2024 de la liberté de la presse de RSF, qui estime que 90 % des médias nationaux sont sous le contrôle du pouvoir.

Des dizaines de médias turcs ont été fermés et de nombreux autres repris en main après le coup d’État raté de juillet 2016, qui a donné lieu à de vastes purges et conduit le président Erdogan à élargir ses pouvoirs.


L'accélération du nombre d'exécutions aux États-Unis inquiète profondément l'ONU.

Cette image diffusée avec l'autorisation de l'Innocence Project montre Robert Roberson photographié à travers un plexiglas à l'unité Polunsky du département de la justice pénale du Texas à Livingston, au Texas, le 19 décembre 2023. (Photo AFP)
Cette image diffusée avec l'autorisation de l'Innocence Project montre Robert Roberson photographié à travers un plexiglas à l'unité Polunsky du département de la justice pénale du Texas à Livingston, au Texas, le 19 décembre 2023. (Photo AFP)
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  • l'ONU a fait part de sa « profonde préoccupation » face à l'accélération du nombre d'exécutions aux États-Unis, où deux hommes doivent être mis à mort cette semaine.
  • La peine de mort a été abolie dans 23 des 50 États américains, tandis que six autres – l'Arizona, la Californie, l'Ohio, l'Oregon, la Pennsylvanie et le Tennessee – ont instauré un moratoire.

GENEVE :Mercredi, l'ONU a fait part de sa « profonde préoccupation » face à l'accélération du nombre d'exécutions aux États-Unis, où deux hommes doivent être mis à mort cette semaine.

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme est « profondément préoccupé par l'exécution imminente de deux hommes » au Texas et en Alabama jeudi, a affirmé le porte-parole Seif Magango dans un communiqué.

« Cela fait suite à l'exécution de six personnes dans cinq États américains sur une période de 12 jours le mois dernier », rappelle-t-il.

« Cette hausse du taux d'exécutions est profondément inquiétante », insiste le porte-parole.

Derrick Ryan Dearman doit être exécuté jeudi en Alabama, où il a été reconnu coupable du meurtre de plusieurs personnes à la hache en 2016.

Le même jour, Robert Roberson, un autiste de 57 ans, doit mourir par injection létale au pénitencier d'État de Huntsville, au Texas, pour la mort de sa fille de deux ans, Nikki, en février 2002.

Les avocats de M. Roberson affirment que sa fille n'est pas morte du syndrome du bébé secoué, mais d'une pneumonie aggravée par la prescription d'un mauvais médicament.

Le cas de Robert Roberson a attiré l'attention de l'organisation Innocence Project, du romancier américain à succès John Grisham, des législateurs et des experts médicaux du Texas.

« Nous nous opposons à la peine de mort, par principe, en toutes circonstances », rappelle M. Magango dans le communiqué de mercredi.

« Elle est incompatible avec le droit fondamental à la vie et augmente le risque inacceptable d'exécuter des personnes innocentes », souligne-t-il.

Selon lui, « les preuves suggèrent également qu'elle n'a que peu ou pas d'effet dissuasif sur la criminalité ». Cette année, 19 exécutions ont eu lieu aux États-Unis, dont celle de Marcellus Williams dans l'État du Missouri le 24 septembre. Son cas a également été défendu par l'Innocence Project en raison des doutes sur sa culpabilité.

La peine de mort a été abolie dans 23 des 50 États américains, tandis que six autres – l'Arizona, la Californie, l'Ohio, l'Oregon, la Pennsylvanie et le Tennessee – ont instauré un moratoire.


L'ère de l'électricité renouvelable se profile dans un monde encore imprégné d'énergies fossiles

Énergies propres et fossiles (Photo Fournie AN)
Énergies propres et fossiles (Photo Fournie AN)
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  • Malgré « l'élan croissant » en faveur de la transition énergétique, « le monde est encore loin d'une trajectoire alignée sur ses objectifs de neutralité carbone » à 2050, souligne ainsi l'AIE.
  • Selon l'AIE, « un niveau record d'énergie propre a été installé au niveau mondial en 2023, mais les deux tiers de l'augmentation de la demande d'énergie ont encore été satisfaits par les combustibles fossiles ».

PARIS : D'ici la fin de la décennie, plus de la moitié de l'électricité de la planète sera d'origine bas carbone, mais le monde, toujours dépendant des énergies fossiles, est encore « loin d'une trajectoire alignée » sur les objectifs de neutralité carbone, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

« Nous avons connu l'ère du charbon et l'ère du pétrole, et nous entrons maintenant à grande vitesse dans l'ère de l'électricité, qui définira le système énergétique mondial à l'avenir et sera de plus en plus basée sur des sources d'électricité propres », estime le directeur exécutif de l'AIE Fatih Birol, cité dans le communiqué du rapport annuel de l'organisation, le World Energy Outlook 2024.

« Avec l'énergie nucléaire, qui fait l'objet d'un regain d'intérêt dans de nombreux pays, et l'essor du solaire et des batteries, les sources d'énergie à faibles émissions devraient produire plus de la moitié de l'électricité mondiale avant 2030 », affirme l'AIE dans ce rapport, basé sur les politiques actuelles.

L'Agence de l'énergie de l'OCDE décrit une soif d'électricité stimulée par l'industrie, les modes de transport électriques, les besoins de l'intelligence artificielle et des 11 000 centres de données recensés dans le monde, ainsi que la climatisation. Elle souligne également la nécessité d'accélérer la décarbonation.

Malgré « l'élan croissant » en faveur de la transition énergétique, « le monde est encore loin d'une trajectoire alignée sur ses objectifs de neutralité carbone » à 2050, souligne ainsi l'AIE.

- Diminuer les émissions.

À la faveur de l'essor des « technologies propres », l'AIE s'attend à un pic des émissions mondiales de CO2 « avant 2030 ». Cependant, « en l'absence d'une forte baisse par la suite, le monde est en passe d'atteindre une hausse de 2,4 °C des températures moyennes mondiales d'ici la fin du siècle ».

« 2024 a montré que la demande d'électricité est insatiable, et l'AIE suppose qu'elle le restera (...). Cela signifie que le monde n'a pas encore renoncé aux combustibles fossiles et ne réduit pas les émissions de CO2 dans le secteur de l'énergie », a commenté Dave Jones, directeur du programme perspectives du groupe de réflexion Ember.

Selon l'AIE, « un niveau record d'énergie propre a été installé au niveau mondial en 2023, mais les deux tiers de l'augmentation de la demande d'énergie ont encore été satisfaits par les combustibles fossiles ». Ils représentaient un peu moins de 80 % de la demande mondiale d'énergie en 2023, contre 83 % en 2011. Parmi ces combustibles, le charbon a atteint une consommation record en 2023, année la plus chaude jamais enregistrée.

L'AIE s'attend également à une augmentation de près de 50 % des capacités d'exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) d'ici 2030, ce qui laisse entrevoir « une surcapacité » pour ce gaz acheminé par bateau, très convoité depuis la guerre en Ukraine.

L'AIE anticipe un pic de la demande pour toutes les énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon) « d'ici la fin de la décennie », à rebours des estimations du secteur pétro-gazier. « Cela ne signifie pas qu'elle diminuera immédiatement (...) mais nous constatons un pic et un affaiblissement de la croissance de la demande mondiale de pétrole », souligne le patron de l'AIE. « Nous aurons encore besoin de pétrole pendant de nombreuses années », assure-t-il.


Avec son système antimissile, Washington accroît son implication dans le conflit entre Israël et l'Iran

Vue d'ensemble prise depuis Metula, dans le nord d'Israël, lors d'une tournée des médias étrangers avec le porte-parole de l'armée israélienne, montre la fumée s'échappant de la frontière dans le village d'Adaisseh, dans le sud du Liban, le 15 octobre 2024. (AFP)
Vue d'ensemble prise depuis Metula, dans le nord d'Israël, lors d'une tournée des médias étrangers avec le porte-parole de l'armée israélienne, montre la fumée s'échappant de la frontière dans le village d'Adaisseh, dans le sud du Liban, le 15 octobre 2024. (AFP)
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  • L'envoi de militaires américains en Israël dans le cadre du déploiement d'un système de défense antimissile témoigne de la détermination de Washington à protéger son allié, mais renforce aussi son implication dans le conflit
  • Le Pentagone a annoncé mardi que les premiers soldats chargés de faire fonctionner ce système de défense antimissiles à haute altitude (Thaad), considéré comme l'un des plus perfectionnés au monde, étaient arrivés lundi en Israël

WASHINGTON: L'envoi de militaires américains en Israël dans le cadre du déploiement d'un système de défense antimissile témoigne de la détermination de Washington à protéger son allié, mais renforce aussi son implication dans le conflit, notent mardi des analystes.

Le Pentagone a annoncé mardi que les premiers soldats chargés de faire fonctionner ce système de défense antimissiles à haute altitude (Thaad), considéré comme l'un des plus perfectionnés au monde, étaient arrivés lundi en Israël et que d'autres allaient suivre.

Ce déploiement renforce la défense antiaérienne d'Israël, dont les dirigeants ont promis de riposter à l'attaque menée le 1er octobre par l'Iran, qui avait lancé quelque 200 missiles sur son sol.

Il s'agissait de la réponse iranienne à l'assassinat à Téhéran du chef du Hamas palestinien, Ismaïl Haniyeh, imputé à Israël, et du chef du Hezbollah libanais, Hassan Nasrallah, dans une frappe israélienne près de Beyrouth.

Des navires et avions américains avaient aidé Israël à se défendre contre cette attaque et la précédente, le 13 avril. Mais avec ce système de défense antimissile mobile, c'est une centaine de soldats américains qui seront sur le terrain et se retrouveront donc à risque.

"Mettre des soldats américains en Israël montre clairement que Washington est, de manière très visible et tangible, engagé à défendre Israël, et se battra s'il le faut", observe Raphael Cohen, du groupe de réflexion Rand Corporation.

L'administration du président Joe Biden "espère probablement que cette mesure aura un effet de dissuasion accru sur l'Iran et rassurera Israël", ajoute-t-il.

Mais, selon lui, elle pourrait aussi en retour donner aux Etats-Unis une "plus grande influence" sur la réponse d'Israël à l'attaque de missiles iranienne.

- "Une cible très coûteuse" -

Israël dispose déjà de systèmes de défense antiaériens très sophistiqués, mais M. Cohen estime qu'ils ont été mis à l'épreuve par près d'une année de combats avec les différents groupes régionaux alliés de Téhéran.

"Si l'Iran augmente sa capacité de feu et que le Hezbollah continue ses attaques, plus de missiles vont passer et toucher leurs cibles", reprend-il, en référence au mouvement pro-iranien qu'Israël combat au Liban.

Thaad, conçu pour intercepter les missiles à haute altitude et fournissant une protection sur une large zone, sera "pleinement opérationnel dans un avenir proche", a déclaré mardi dans un communiqué le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder.

Ce système, développé dans les années 1990 mais mis en service pour la première fois en 2008, nécessite 95 personnes pour le faire fonctionner.

Il consiste en six lanceurs montés sur des camions, chacun composé de huit intercepteurs, d'un puissant système radar et d'un élément de contrôle des tirs, selon le Service de recherche du Congrès américain.

Tom Karako, directeur du projet de défense missile du Centre américain d'études internationales et stratégiques (CSIS), rappelle que le Thaad, dont le radar coûte un milliard de dollars, est "potentiellement une cible très coûteuse" qu'il convient de correctement protéger.

Les Etats-Unis n'ont qu'un nombre très limité de systèmes Thaad, "ne produisent pas beaucoup de projectiles thaad en ce moment" et doivent donc "mûrement réfléchir" à son utilisation, souligne-t-il.

Le déploiement de Thaad en Israël "ajoute évidemment beaucoup en terme de potentiel et de capacité, mais  (...) s'accompagne aussi d'un risque stratégique, et de coûts opérationnels et d'opportunité".