BEYROUTH: Des centaines de membres du Hezbollah ont été blessés mardi à travers le Liban dans l'explosion simultanée de leurs bipeurs, attribuée par une source proche du mouvement islamiste à un "piratage israélien".
Ces explosions sont survenues dans plusieurs places fortes du mouvement islamiste libanais, soutenu par l'Iran, quelques heures après l'annonce par Israël qu'il étendait les objectifs de la guerre contre le Hamas palestinien dans la bande de Gaza à sa frontière nord avec le Liban.
Depuis le début de la guerre à Gaza il y a près d'un an, la zone frontalière est devenue le théâtre d'échanges de tirs presque quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah, un allié du Hamas, qui ont entraîné le déplacement de dizaines de milliers de civils de part et d'autre.
Une source proche du Hezbollah a annoncé mardi que "des centaines de membres" du mouvement "avaient été blessés par l'explosion simultanée de leurs bipeurs" dans la banlieue sud de Beyrouth, dans le sud du Liban et dans la plaine orientale de la Békaa.
Une autre source proche du Hezbollah a affirmé à l'AFP qu'il s'agissait d'un "piratage israélien".
Il s'agit du premier incident de ce genre depuis le début des violences transfrontalières en octobre 2023.
Le ministre libanais de la Santé, Firas Abiad, a déclaré à l'AFP que "des centaines de personnes ont été blessées dans différentes régions du Liban" par ces explosions.
Un correspondant de l'AFP dans la Békaa a vu des blessés affluer en nombre vers les hôpitaux. Un autre dans la ville de Saïda, dans le sud du Liban, a signalé des dizaines d'ambulances arrivant jusqu'aux hôpitaux.
Une fillette de dix ans a été tuée, selon sa famille et une source proche du Hezbollah.
- "Action militaire" -
Israël avait annoncé peu avant sa décision d'étendre les buts de la guerre jusqu'à la frontière israélo-libanaise, afin de permettre le retour des déplacés. Les principaux objectifs affichés jusqu'à présent de la guerre à Gaza étaient la destruction du Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans le territoire palestinien, et le retour des otages enlevés lors de l'attaque du 7 octobre contref Irsaël.
"Le cabinet politique et de sécurité a mis à jour les buts de la guerre, afin d'y inclure le retour en toute sécurité des habitants du nord (d'Israël) chez eux", avait déclaré le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a été plus loin. "L'action militaire" contre le Hezbollah est "le seul moyen de garantir le retour des habitants du nord d'Israël dans leurs foyers", a-t-il dit à un émissaire américain en visite en Israël, Amos Hochstein.
Dans ce contexte à hauts risques, le secrétaire d'Etat Antony Blinken est attendu mercredi en Egypte pour discuter d'une nouvelle proposition de compromis en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des dizaines d'otages retenus dans le territoire palestinien, selon le département d'Etat.
- "Zone tampon" au Liban? -
Mardi, une frappe israélienne à Blida, à la frontière dans le sud du Liban, a fait trois morts selon les autorités libanaises, l'armée israélienne affirmant avoir tué des membres du Hezbollah. Le mouvement libanais a annoncé des tirs contre des positions militaires dans le nord d'Israël.
L'armée israélienne a affirmé que plusieurs drones venant du Liban avaient été interceptés alors qu'ils tombaient dans une zone dégagée.
Pour Michael Horowitz, expert géopolitique pour Le Beck, une société de conseil en sécurité basée au Moyen-Orient, "sans cessez-le-feu à Gaza, il n'y aura pas d'accord sur la question de la frontière avec le Liban. Pour Israël cela veut dire qu'il faudra donc probablement se préparer à une solution militaire d'autant que la pression monte car des dizaines de milliers d'Israéliens restent déplacés".
"Il y a un consensus (en Israël) sur le fait qu'une guerre pour éliminer complètement le Hezbollah sera extrêmement difficile, coûteuse et dangereuse car elle peut mener à un embrasement régional. Le but d'une opération militaire serait donc plus limité, notamment celui de créer une zone tampon dans le sud du Liban", a-t-il ajouté.
Le 7 octobre 2023, des commandos du Hamas ont mené une attaque sans précédent sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.205 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les chiffres officiels qui inclut les otages tués en captivité.
Sur les 251 personnes enlevées pendant l'attaque, 97 sont toujours retenues à Gaza, dont 33 ont été déclarées mortes par l'armée.
En représailles, Israël a promis de détruire le Hamas, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que l'Union européenne et les Etats-Unis.
Son armée a lancé une offensive qui a fait au moins 41.252 morts, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza, qui ne détaille pas les combattants et civils tués.
- "Tout détruit" -
Le chef du Hamas, Yahya Sinouar, a assuré lundi que son mouvement était "préparé" à "mener une longue guerre d'usure" contre l'armée israélienne.
Mardi avant l'aube, des frappes aériennes israéliennes ont ciblé le territoire palestinien assiégé, faisant au moins sept morts dont trois dans une maison de la ville de Gaza, dans le nord, selon la Défense civile.
"Cette guerre a tout détruit, notre santé mentale et physique, notre avenir et nos rêves. Elle nous a séparés de nos proches, a détruit tout ce qu'il y avait de beau dans nos vies", s'est exclamée Alaa Halilo, une Palestinienne de 32 ans déplacée à Gaza-ville.
Après des mois de négociations infructueuses pour parvenir à une trêve, les Etats-Unis planchent, "en particulier avec l'Egypte et le Qatar", les deux autres pays médiateurs, sur une nouvelle proposition de compromis, avait indiqué lundi le département d'Etat.
Mardi, le Qatar a affirmé que les efforts se poursuivaient pour tenter de parvenir à un cessez-le-feu.