KIEV : Après des années de tergiversations et malgré l'opposition de militaires, le Parlement ukrainien a voté mercredi pour que Kiev rejoigne la Cour pénale internationale (CPI) dans l'espoir de punir la Russie pour des crimes de guerre présumés commis en Ukraine, ont annoncé plusieurs députés.
La question est très sensible en Ukraine, beaucoup craignant que ses forces armées combattant contre l'armée russe ne soient à leur tour visées par la CPI, dont la mission est de poursuivre les auteurs de génocide, de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et d'agression.
Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba s'est félicité d'une "décision historique". "C'était un long voyage plein de défis, de mythes et de craintes. Aucun d'entre eux n'était vrai. Et aujourd'hui, nous y sommes enfin", a-t-il déclaré sur le réseau social X.
Au total, 281 parlementaires ont voté pour ratifier le Statut de Rome, traité fondateur de la CPI, alors qu'un minimum de 226 était requis, et pour que l'Ukraine devienne ainsi le 125e membre de cette institution, ont annoncé plusieurs élus sur les réseaux sociaux.
Cette décision ouvrira "de plus grandes possibilités pour punir les Russes et renforcera l'isolement de la Russie", s'est félicitée sur Facebook la députée du parti présidentiel Ievguénia Kravtchouk.
Selon elle, l'Ukraine a invoqué l'article 124 du Statut de Rome qui permet d'exempter, pendant sept ans, tout Ukrainien, civil comme militaire, de toute poursuite pour crimes de guerre par la CPI.
La ratification de ce document soumis au Parlement par le président Volodymyr Zelensky fait partie d'engagements de Kiev auprès de l'Union européenne, a-t-elle ajouté: "C'est une mesure nécessaire, pleinement justifiée et sûre", a estimé la députée.
Le vote au Parlement a été précédé de "discussions difficiles", a affirmé une parlementaire d'opposition, Iryna Guerachtchenko, qui, à l'instar de son parti Solidarité européenne, n'a pas soutenu ce texte.
"Les militaires ont demandé que la ratification soit reportée jusqu'à la fin de la loi martiale", a-t-elle ajouté sur Telegram.
"Personne n'a expliqué ce qui se passera après" les sept années d'exemption prévues par l'article 124, a déclaré Mme Guerachtchenko.
Après le début de l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe en 2022, la CPI a déjà émis des mandats d'arrêt contre le président Vladimir Poutine et plusieurs autres hauts responsables civils et militaires russes pour des crimes présumés en Ukraine.
Kiev "travaille déjà" avec la CPI pour "garantir une responsabilité globale pour toutes les atrocités russes" en Ukraine, a souligné le ministre Kouleba. "Ce travail sera désormais encore plus efficace".
L'Ukraine est en proie à la guerre depuis dix ans: en 2014, la Russie a d'abord annexé la péninsule ukrainienne de Crimée et déclenché les hostilités dans l'est du pays, avant de lancer une invasion à grande échelle en février 2022.