Sahara occidental: vers une ère de glaciation entre Alger et Paris ?

Les forces de sécurité sahraouies tiennent un poste de contrôle à l'extérieur du camp de réfugiés de Dakhla, à environ 170 km au sud-est de la ville algérienne de Tindouf, le 14 janvier 2023. (AFP)
Les forces de sécurité sahraouies tiennent un poste de contrôle à l'extérieur du camp de réfugiés de Dakhla, à environ 170 km au sud-est de la ville algérienne de Tindouf, le 14 janvier 2023. (AFP)
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Publié le Mardi 30 juillet 2024

Sahara occidental: vers une ère de glaciation entre Alger et Paris ?

  • Alger a aussitôt annoncé mardi le "retrait avec effet immédiat" de son ambassadeur en France.
  • "Et finalement, les menaces algériennes n'ont pas beaucoup d'importance, compte tenu de ce que peut lui apporter une bonne relation avec Rabat sur le plan économique et stratégique".

PARIS : La France est exposée à une brouille diplomatique potentiellement durable avec l'Algérie après le soutien appuyé d'Emmanuel Macron au plan d'autonomie marocain pour le Sahara occidental rendu public symboliquement mardi, le jour même du 25e anniversaire de l'intronisation du roi du Maroc.

Alger a aussitôt annoncé mardi le "retrait avec effet immédiat" de son ambassadeur en France.

Peu avant, Rabat avait fait savoir que le président français avait adressé à Mohammed VI une lettre dans laquelle Paris reconnaît désormais ce plan datant de 2007 comme "la seule base pour aboutir à une solution politique juste, durable et négociée conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies".

Avant même l'annonce de la lettre au roi, Alger avait indiqué que le gouvernement tirerait "toutes les conséquences qui découlent de cette décision française".

"Pour le Maroc, la question du Sahara est vitale. C'est au coeur de la diplomatie et de toutes les affaires de l'État marocain", rappelle auprès de l'AFP Pierre Vermeren, historien et professeur à l'Université de la Sorbonne, qui voit donc dans cette prise de position "un cadeau fait au roi".

"La décision a été mûrement réfléchie" puisqu'elle a été prise au plus haut niveau de l'Etat pendant les Jeux olympiques de Paris, ajoute-t-il.

Pour Agnès Levallois, de l'Institut de recherche et d'études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient, cette décision illustre la capacité des Marocains à "imposer un nouveau tempo de la relation avec la France".

Mais elle met en garde contre les conséquences vis-à-vis du voisin algérien pour qui "ça ne peut être perçu que comme une déclaration de guerre". "Car même si à l'Elysée, on souligne qu'il ne s'agit pas d'une reconnaissance de la Marocanité du Sahara (comme l'ont fait les Etats-Unis et Israël) cela y ressemble", dit-elle.

"Il ne faut pas s'attendre à ce que les relations s'améliorent avec Paris", abonde Hasni Abidi du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen, à Genève. Outre le rappel de l'ambassadeur, Alger pourrait aussi geler "ses collaborations avec Paris".

A l'Elysée comme au Quai, on fait valoir que les relations bilatérales entre la France et l'Algérie et celles entre la France et le Maroc sont traitées séparément et qu'on entend poursuivre le travail avec Alger.

Pour autant, relève Agnès Levallois, la lettre envoyée par le président Macron donne le sentiment d'un revirement de Paris vis-à-vis de son partenaire algérien. "Emmanuel Macron se rend compte qu'il n'y a peut-être pas grand chose à faire avec Alger et se tourne vers les Marocains, qu'il avait un temps délaissés", résume-t-elle.

- Axe stratégique -

Ces dernières années ont en effet été émaillées de tensions extrêmement fortes entre Rabat et Paris, ancienne puissance coloniale où vit une importante diaspora marocaine.

La politique de rapprochement avec l'Algérie voulue par Emmanuel Macron, alors qu'Alger a rompu en 2021 ses relations diplomatiques avec Rabat, avait notamment irrité le Maroc au plus haut point.

Mais en février, le chef de la diplomatie française Stéphane Séjourné s'était rendu à Rabat, missionné par Emmanuel Macron, pour renouer durablement avec Rabat.

"La France a certainement peser le pour et le contre en évaluant ce que peut lui apporter un rapprochement avec Alger et avec Rabat", abonde la politologue Khadija Finan.

"Aujourd'hui, l'axe stratégique Rabat/Tel Aviv semble lui permettre d'être présente en Afrique", dit-elle.

"Et finalement, les menaces algériennes n'ont pas beaucoup d'importance, compte tenu de ce que peut lui apporter une bonne relation avec Rabat sur le plan économique et stratégique".

Dans le contexte de la présidentielle en Algérie, Pierre Vermeren s'interroge sur le degré de frictions. Peuvent-elles conduire à la rupture alors que "cinq millions d'Algériens, Franco-Algériens et Français d'origine algérienne vivent en France?", demande-t-il.

La question est aussi de savoir si les Algériens estiment avoir besoin de la France au Sahel, en Libye, en Tunisie ou s'ils se sentent "assez forts pour faire leurs affaires avec les Chinois et les Russes", explique l'historien.

Khadija Finan note, elle, que la décision de Paris coïncide avec la libération d'intellectuels par Rabat, ce qui "donne le sentiment que la France appuie un pays qui change".

Parmi les prisonniers libérés figure l'historien franco-marocain Maâti Monjib, de quoi "éclaircir la relation franco-marocaine" sur le dossier des droits de l'Homme", opine enfin Pierre Vermeren. "Ce n'est pas du tout négligeable".

 


La Russie dit avoir abattu plus d'une centaine de drones ukrainiens

Un habitant passe à vélo devant un bâtiment très endommagé dans la ville de Pokrovsk, dans la région de Donetsk, le 20 septembre 2024, lors de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
Un habitant passe à vélo devant un bâtiment très endommagé dans la ville de Pokrovsk, dans la région de Donetsk, le 20 septembre 2024, lors de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
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  • La Russie a annoncé samedi avoir abattu plus d'une centaine de drones ukrainiens au-dessus de son territoire au cours de la nuit
  • Cinquante-trois drones ont été abattus au-dessus de la région de Briansk (ouest), frontalière de la Russie et où le gouverneur a déclaré qu'il n'y avait ni dégâts ni victimes

MOSCOU: La Russie a annoncé samedi avoir abattu plus d'une centaine de drones ukrainiens au-dessus de son territoire au cours de la nuit, des attaques qui ont selon elle fait des dégâts limités et pas de victimes selon les premières informations.

"Cent un drones ukrainiens à voilure fixe ont été interceptés et détruits par les systèmes de défense aérienne en service", a déclaré le ministère russe de la Défense sur Telegram.

Cinquante-trois drones ont été abattus au-dessus de la région de Briansk (ouest), frontalière de la Russie et où le gouverneur a déclaré qu'il n'y avait ni dégâts ni victimes.

Dix-huit ont été abattus au-dessus de Krasnodar (sud-ouest), dans la région voisine de la Crimée, péninsule ukrainienne sur la mer Noire annexée par la Russie en 2014.

Selon le gouverneur de Krasnodar, Veniamin Kondratyev, la chute de débris d'un drone a "provoqué un incendie qui s'est propagé à des objets explosifs" dans le district de Tikhoretsky. Des habitants ont été évacués mais aucune victime n'a été signalée, a-t-il ajouté sur Telegram.

Moscou a récemment annoncé que son armée interceptait presque quotidiennement des drones ukrainiens lancés par Kiev en représailles à l'offensive russe lancée en Ukraine en février 2022.


Le droit international interdit de "piéger" des objets civils, insiste l'ONU

Rosemary DiCarlo, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix. (Capture d'écran/UNTV)
Rosemary DiCarlo, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix. (Capture d'écran/UNTV)
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  • L'utilisation d'appareils "piégés" ayant l'apparence d'objets "inoffensifs" pourrait constituer un "crime de guerre", a dénoncé vendredi le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk
  • Le ministre des Affaires étrangères libanais Abdallah Bou Habib, qui avait fait le déplacement, s'en est lui pris directement pris à Israël, qu'il a qualifié d'"Etat voyou"

Nations unies, États-Unis: L'utilisation d'appareils "piégés" ayant l'apparence d'objets "inoffensifs" pourrait constituer un "crime de guerre", a dénoncé vendredi le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, devant le Conseil de sécurité où le Liban a accusé Israël de "terrorisme".

"Le droit international humanitaire interdit l'utilisation d'appareils piégés ayant l'apparence d'objets inoffensifs", a déclaré Volker Türk lors d'une réunion demandée par l'Algérie après l'explosion simultanée cette semaine de bipeurs, talkies-walkies et autres appareils de transmission du Hezbollah au Liban.

"C'est un crime de guerre de commettre des violences destinées à propager la terreur parmi les civils", a-t-il ajouté.

"La guerre a des règles", a-t-il martelé, répétant son appel pour une enquête "indépendante, rigoureuse et transparente".

"Cibler de façon simultanée des milliers d'individus, que ce soit des civils ou des membres de groupes armés, sans savoir qui est en possession des appareils concernés, de leur localisation et de leur environnement au moment de l'attaque, viole le droit humanitaire international et, le cas échéant, le droit humanitaire international", a-t-il insisté.

"Il est ainsi difficile de concevoir comment, dans ces circonstances, de telles attaques pourraient être conformes aux principes clés de distinction, de proportionnalité et de précaution".

"Ces attaques représentent un nouveau développement dans la guerre, où les appareils de communication deviennent des armes (...). Cela ne peut pas être la nouvelle normalité", a-t-il lancé.

- "Terrorisme" -

Le ministre des Affaires étrangères libanais Abdallah Bou Habib, qui avait fait le déplacement, s'en est lui pris directement pris à Israël, qu'il a qualifié d'"Etat voyou".

"Faire exploser à distance des appareils de communication de façon collective, sans aucun égard pour ceux qui les portent ou qui est autour est une méthode de guerre sans précédent dans sa brutalité et sa terreur, ciblant des milliers de personnes d'âges différents vaquant à leurs occupation dans leurs maisons, dans la rue, à leur travail, dans les centres commerciaux, est tout simplement du terrorisme", a-t-il déclaré.

"Au lieu de nous accuser, nous votre voisin pacifique, nous devriez prendre des mesures maintenant" contre le Hezbollah, a répondu l'ambassadeur israélien Danny Danon.

"Si vous continuez à ignorer l'agression du Hezbollah, vous aurez la responsabilité de la souffrance du peuple libanais", a-t-il ajouté, assurant qu'Israël ne voulait pas un "conflit plus large" mais seulement "protéger" ses citoyens.

Interrogé devant la presse sur la responsabilité éventuelle d'Israël dans les attaques aux bipeurs, il a indiqué ne pas vouloir faire de commentaire. "Mais je peux vous dire que nous ferons tout ce que nous pourrons pour cibler ces terroristes", a-t-il ajouté.

Avant la réunion, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU de son côté appelé à la "retenue maximale" de toutes les parties.

"Nous sommes très inquiets de l'intensification de l'escalade autour de la Ligne bleue (ligne de démarcation définie par l'ONU entre le Liban et Israël), y compris la frappe meurtrières aujourd'hui à Beyrouth. Nous appelons toutes les parties à la désescalade immédiatement. Tout le monde doit faire preuve d'une retenue maximale", a déclaré Stéphane Dujarric.

Après les explosions mardi et mercredi des appareils de transmission utilisés par des membres du Hezbollah, qui ont fait 37 morts et 2.931 blessés, les échanges de tirs se sont intensifiés depuis jeudi entre l'armée israélienne et le Hezbollah, mouvement islamiste soutenu par l'Iran.


Bipeurs du Hezbollah: le parquet de Taïwan confirme deux auditions

Le New York Times a affirmé que les bipeurs qui ont explosé mardi, tuant des responsables du Hezbollah, avaient été fabriqués par l'entreprise taïwanaise Gold Apollo et piégés par Israël. (AFP)
Le New York Times a affirmé que les bipeurs qui ont explosé mardi, tuant des responsables du Hezbollah, avaient été fabriqués par l'entreprise taïwanaise Gold Apollo et piégés par Israël. (AFP)
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  • Les deux témoins entendus jeudi ont été autorisés à quitter les lieux après leur interrogatoire, a précisé cette source
  • Le parquet a également indiqué que quatre sites avaient été perquisitionnés, notamment dans les districts de Xizhi et de Neihu, à Taipeh

TAIPEI: Deux représentants de sociétés taïwanaises ont été auditionnés à Taïwan dans le cadre de l'enquête sur l'origine des bipeurs piégés du Hezbollah au Liban, a confirmé vendredi le parquet, sans toutefois livrer de noms.

"Nous avons demandé au Bureau d'enquêtes de poursuivre hier (jeudi, ndlr) l'audition en tant que témoins de deux personnes rattachées à des entreprises taïwanaises", a indiqué le bureau des procureurs du district de Shilin, à Taipei.

Le New York Times a affirmé que les bipeurs qui ont explosé mardi, tuant des responsables du Hezbollah, avaient été fabriqués par l'entreprise taïwanaise Gold Apollo et piégés par Israël.

Mais Gold Apollo a démenti ces informations, pointant du doigt son partenaire hongrois BAC, qui est autorisé à utiliser sa marque. "Ce ne sont pas nos produits (...) du début à la fin", a affirmé mercredi son directeur, Hsu Ching-kuang, à des journalistes à Taipei.

Le gouvernement hongrois a de son côté assuré que BAC était "un intermédiaire commercial, sans site de production ou opérationnel en Hongrie".

Jeudi, des journalistes de l'AFP avaient vu M. Hsu pénétrer dans les locaux des enquêteurs en compagnie d'une femme. Des médias locaux ont identifié cette femme comme étant la représentante d'une société basée à Taipei, Apollo Systems, liée à BAC.

Le parquet de Taïwan, qui n'a pas dévoilé d'identités, a dit vendredi prendre l'affaire "très au sérieux". "Nous clarifierons les faits dès que possible, notamment en ce qui concerne l'implication ou non d'entreprises taïwanaises", a souligné le bureau du procureur.

Les deux témoins entendus jeudi ont été autorisés à quitter les lieux après leur interrogatoire, a précisé cette source.

Le parquet a également indiqué que quatre sites avaient été perquisitionnés, notamment dans les districts de Xizhi et de Neihu, à Taipeh. Le siège de Gold Apollo est situé dans le premier et celui d'Apollo Systems dans le second, selon le registre du commerce.

Le ministre de l'économie, Kuo Jyh-huei, a indiqué vendredi à des journalistes que les bipeurs de Gold Apollo fabriqués à Taïwan étaient composés d'éléments bas de gamme, tels que des circuits intégrés et des piles. "Ces appareils ne peuvent pas exploser", a-t-il affirmé, indiquant que Gold Apollo avait exporté 260.000 bipeurs ces des deux dernières années sans aucun incident.

Interrogé sur les bipeurs utilisés au Liban par le Hezbollah, il a déclaré que l'on pouvait "être sûr qu'ils ne sont pas produits à Taïwan".

Le premier ministre Cho Jung-tai a pour sa part réaffirmé vendredi que "la société et Taïwan n'ont pas exporté directement des +pagers+ vers le Liban".

Des centaines de bipeurs et talkies-walkies utilisés par le mouvement islamiste libanais Hezbollah, soutenu par l'Iran et allié du Hamas palestinien, ont explosé à travers le Liban mardi et mercredi lors d'une attaque sans précédent, ayant fait 37 morts et près de 3.000 blessés.

Le chef du Hezbollah a promis une "terrible" riposte à cette spectaculaire attaque attribuée à Israël.