En France, une macroniste réélue à la tête de l'Assemblée nationale, la gauche battue

La députée française du parti au pouvoir Renaissance et nouvellement réélue présidente de l'Assemblée nationale, Yael Braun-Pivet, réagit après avoir été réélue à l'issue du troisième tour de l'élection du président de la chambre basse à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 18 juillet 2024. (AFP)
La députée française du parti au pouvoir Renaissance et nouvellement réélue présidente de l'Assemblée nationale, Yael Braun-Pivet, réagit après avoir été réélue à l'issue du troisième tour de l'élection du président de la chambre basse à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 18 juillet 2024. (AFP)
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Publié le Vendredi 19 juillet 2024

En France, une macroniste réélue à la tête de l'Assemblée nationale, la gauche battue

  • La macroniste Yaël Braun-Pivet a été réélue présidente de l'Assemblée nationale, la gauche, pourtant le principal groupe à la chambre basse française, voyant ses perspectives d'accéder au pouvoir s'éloigner
  • Il a fallu trois tours à la présidente sortante pour retrouver son fauteuil, grâce à une alliance scellée entre les députés du centre droit favorables au président Emmanuel Macron et ceux de la droite conservatrice qui a retiré son candidat Philippe Juvin

PARIS: La macroniste Yaël Braun-Pivet a été réélue présidente de l'Assemblée nationale, la gauche, pourtant le principal groupe à la chambre basse française, voyant ses perspectives d'accéder au pouvoir s'éloigner.

Le camp du président français Emmanuel Macron a perdu la majorité à l'Assemblée après sa décision de dissolution surprise à l'approche des JO, suivie de législatives qui ont divisé la chambre basse en trois blocs, tous loin de la majorité absolue.

Il a fallu trois tours à la présidente sortante pour retrouver son fauteuil, grâce à une alliance scellée entre les députés du centre droit favorables au président Emmanuel Macron et ceux de la droite conservatrice qui a retiré son candidat Philippe Juvin.

Après quasiment six heures de suspense, Mme Braun-Pivet est finalement créditée de 220 voix, contre 207 pour le communiste André Chassaigne, le candidat du Nouveau front populaire (gauche), et 141 pour Sébastien Chenu, qui représentait l'extrême droite.

M. Chassaigne a dénoncé avec virulence un vote "volé" par une "alliance contre nature" entre la macronie et la droite, alors que la gauche est arrivée en tête au second tour des législatives.

Sébastien Chenu dénonçant lui une "victoire des combines" entre Les Républicains (droite) et le camp Macron.

La présidente des députés de gauche radicale (La France insoumise, LFI) Mathilde Panot s'était par avance indignée d'"un coup de force antidémocratique", puisque son camp s'était adjugé le plus grand nombre de députés aux législatives anticipées du 30 juin et du 7 juillet dernier, décidées par le président Macron.

Un "statu quo" avec Yaël Braun-Pivet serait "irresponsable", avait abondé auprès de l'AFP la cheffe des députés écologistes Cyrielle Chatelain.

Mais un accord entre la droite traditionnelle, qui a retiré son candidat à la présidence de l'Assemblée, et la macronie a mis un terme aux espérances de la gauche.

"On assume totalement de prendre nos responsabilités. Cela veut dire empêcher LFI et ceux qui bordélisent l'Assemblée nationale d'accéder à la présidence de l'Assemblée", a justifié Vincent Jeanbrun, porte-parole du groupe de La Droite Républicaine.

Le président Emmanuel Macron a félicité Yaël Braun-Pivet pour sa réélection, saluant sa "responsabilité républicaine".

"Tous ceux qui vous connaissent savent que vous veillerez au respect de la pluralité des opinions et à l'expression de la diversité des sensibilités", a déclaré sur X le chef de l'Etat.

Le Nouveau Front populaire, une alliance des partis socialiste, communiste, écologiste et de LFI mise en place juste avant les législatives pour contrer une victoire annoncée de l'extrême droite, n'avait depuis dix jours cessé de faire étalage de ses divisions, au grand désespoir de ses soutiens.

Si les quatre formations se sont mises d'accord sur un nom pour le perchoir, ils n'ont pas réussi pour l'heure à s'entendre sur l'identité d'un éventuel futur Premier ministre.

Et l'alliance entre les macronistes et la droite pour la présidence de l'Assemblée pourrait sembler indiquer que leurs perspectives de gouverner s'éloignent.

- "Tout sauf la gauche" -

Jeudi, le Nouveau front populaire s'est trouvé aux prises d'un "tout sauf la gauche", a estimé une source macroniste.

"Envoyer un membre du NFP au perchoir enverrait le signal qu’ils pourraient éventuellement nouer des deals à l’Assemblée. Or, nous nous efforçons depuis dix jours d’expliquer qu’ils ne sont pas en capacité de gouverner", expliquait encore en début d'après-midi le ministre du Logement Guillaume Kasbarian.

Mardi, M. Macron a accepté la démission du gouvernement du Premier ministre Gabriel Attal, alors que la France aborde la période sensible de l'accueil des Jeux Olympiques qui démarrent le 26 juillet, puis des Paralympiques.

Ce gouvernement démissionnaire reste cependant "en charge des affaires courantes", avec un rôle politique limité, vraisemblablement pendant plusieurs semaines, jusqu'à la nomination d'un nouveau gouvernement.

Au-delà de la présidence de l'Assemblée, c'est l'ensemble du paysage politique qui peine à se décanter dix jours après les législatives.

Les députés s'attaquent vendredi à la répartition des autres postes-clés. Avec des visions divergentes qui laissent augurer de vives tensions autour des places laissées au RN.

La droite compte elle tirer profit de son aide à la macronie. "Si nous obtenons des postes à responsabilité sans être (dans) l’exécutif, c’est un peu bingo pour nous. Notre ligne, c’est pas de participation à un gouvernement", assurait jeudi matin un proche du président du groupe Droite républicaine à l'assemblée Laurent Wauquiez.


Budget: Coquerel menace de se rendre en personne à Matignon mardi

Le député français nouvellement élu au sein de la coalition de gauche « Nouveau Front Populaire » et membre du parti de gauche La France Isoumise (LFI), Eric Coquerel, s'adresse aux journalistes à son arrivée pour une journée d'accueil à l'Assemblée nationale à Paris, le 2 juillet 2024. (Photo STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
Le député français nouvellement élu au sein de la coalition de gauche « Nouveau Front Populaire » et membre du parti de gauche La France Isoumise (LFI), Eric Coquerel, s'adresse aux journalistes à son arrivée pour une journée d'accueil à l'Assemblée nationale à Paris, le 2 juillet 2024. (Photo STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
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  • Les deux représentants de la commission des Finances disposent d'un droit de contrôle sur place et sur pièces de documents budgétaires.
  • Constitutionnellement, le budget doit être présenté au Parlement au plus tard le 1er octobre.

PARIS : Le président de la Commission des Finances, Éric Coquerel (LFI) a maintenu la pression lundi sur Michel Barnier en menaçant de venir en personne mardi réclamer des documents budgétaires toujours pas transmis à la représentation nationale.

"Aujourd'hui, on lui demande sa réponse et sinon, effectivement, avec Charles de Courson (le rapporteur général du budget, ndlr), nous irons demain (mardi) à Matignon", a déclaré le député insoumis sur France 2.

Les deux représentants de la commission des Finances disposent d'un droit de contrôle sur place et sur pièces de documents budgétaires.

Les lettres-plafonds fixent les crédits ministère par ministère pour 2025 et, a précisé M. Coquerel, "une loi constitutionnelle fixe le fait que nous ayons les documents budgétaires fin juillet".

"Je pense qu'ils comprennent notre demande qui est au nom de l'Assemblée, au nom des représentants du peuple, de ma commission" qui comprend "des députés qui soutiennent ce gouvernement", a-t-il estimé, assurant qu'il "préfererai(t) qu'aujourd'hui, le Premier ministre nous fasse signe".

"Mais si ce n'est pas le cas, nous irons effectivement à la porte de Matignon et demanderons ces documents de manière très policée", a-t-il prévenu.

Constitutionnellement, le budget doit être présenté au Parlement au plus tard le 1er octobre.


UE: un commissaire à la Défense, oui, mais pour quoi faire ?

La ministre espagnole de l'énergie, Teresa Ribera Rodriguez, pose lors d'une interview à Madrid le 19 octobre 2022. (Photo OSCAR DEL POZO / AFP)
La ministre espagnole de l'énergie, Teresa Ribera Rodriguez, pose lors d'une interview à Madrid le 19 octobre 2022. (Photo OSCAR DEL POZO / AFP)
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  • La réponse à cette question va dépendre à la fois de la personnalité du futur commissaire européen et du portefeuille qui lui sera finalement attribué.
  • L'arrivée d'un commissaire à la Défense pourrait donc se limiter à lui transférer les services actuellement gérés par l'ancien ministre français.

BRUXELLES : Ursula von der Leyen l'a promis: l'Union européenne, face à la menace russe et la guerre en Ukraine, aura son commissaire à la Défense. Mais pour quoi faire ?

La réponse à cette question va dépendre à la fois de la personnalité du futur commissaire européen et du portefeuille qui lui sera finalement attribué.

Il n'y a ni armée ni ministre de la Défense de l'UE, mais Bruxelles s'occupe néanmoins d'industries de défense, particulièrement depuis le renforcement de la menace russe après l'annexion de la Crimée en 2014.

Ce domaine est actuellement sous la responsabilité du Français Thierry Breton, commissaire au Marché intérieur, chargé des industries de défense, qui a démissionné lundi avec fracas.

Ce départ, l'Europe n'en "avait pas besoin", déplore François Heisbourg, expert à la Fondation pour la recherche stratégique. Thierry Breton a "apporté beaucoup d'énergie et de savoir-faire pour bâtir une politique européenne d'achat d'armes" en commun, estime-t-il.

L'arrivée d'un commissaire à la Défense pourrait donc se limiter à lui transférer les services actuellement gérés par l'ancien ministre français.

"C'est le modèle le plus vraisemblable parce qu'il n'y a pas de débats de compétence", remarque de ce point de vue Camille Grand, spécialiste des questions de défense auprès du Conseil européen pour les Affaires étrangères (ECFR).

Une deuxième option: on lui confie d'autres responsabilités comme la cyber-sécurité, la lutte contre la désinformation, les attaques hybrides, "pour épaissir" son portefeuille, explique encore M. Grand.

Enfin, on peut aller encore plus loin en lui attribuant certaines des compétences actuellement entre les mains du chef de la diplomatie européenne, ce qui est très loin d'être simple.

- "Se battre" -

Le Haut-représentant de l'UE pour les Affaires étrangères, l'Espagnol Josep Borrell - et bientôt l'Estonienne Kaja Kallas, nommée pour le remplacer avant la fin de l'année -, est également compétent pour les questions de défense.

L'Agence européenne de défense, qui soutient entre autres l'innovation dans le secteur de l'armement, tombe sous la responsabilité du Haut-représentant, le HRVP en jargon bruxellois.

Mme Kallas sera-t-elle prête à y renoncer au profit du futur commissaire à la Défense ? On l'imagine mal de la part de cette ancienne Première ministre de l'Estonie, un des plus solides alliés de l'Ukraine en Europe, jugent les experts.

Quelle que soit l'option finalement retenue, "il va devoir se battre", juge ainsi M. Grand en évoquant ce qui attend le futur commissaire à la Défense. Sera-t-il placé sous l'autorité de Mme Kallas, d'un futur super-commissaire à la Sécurité ou à l'Autonomie stratégique ? Les hypothèses vont bon train à Bruxelles.

Son influence dépendra aussi de son poids politique et de son origine géographique. "Je pense qu'il serait très difficile pour quelqu'un provenant d'un petit pays, même s'il est compétent, de mobiliser les ressources nécessaires pour faire de son poste un succès", prévient ainsi Ian Lesser, expert auprès du German Marshall Fund à Bruxelles.

Aucun "grand" pays n'a jusqu'à présent publiquement affiché son intérêt pour le poste. Un moment évoqué, le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski a finalement jeté l'éponge.

- "Besoin urgent" -

Le candidat pressenti est l'ancien Premier ministre lituanien Andrius Kubilius. Mais la démission surprise de Thierry Breton lundi rebat toutes les cartes.

"Il y a clairement un besoin urgent de la part de la présidente de la Commission européenne de définir (son) rôle", juge Guntram Wolff, expert auprès de l'institut Brugel et auteur d'un "mémo" adressé au futur commissaire à la Défense.

Il faudra aussi lui donner les moyens d'agir.

Mme von der Leyen a évoqué le chiffre de 500 milliards d'euros sur 10 ans pour muscler la défense de l'Europe. Un chiffre qui a provoqué une levée de boucliers de la part de certains Etats membres.

L'ancien Premier ministre Mario Draghi a recommandé lundi dernier à Bruxelles que les Européens s'endettent - comme ils l'avaient fait lors de la pandémie du Covid-19 - pour mieux financer, entre autres, le secteur de la défense.

L'idée d'un nouvel emprunt commun, soutenue par la France, reste cependant une ligne rouge pour de nombreux pays du nord de l'Europe, tels que l'Allemagne ou les Pays-Bas.

"D'énormes investissements dans le secteur de la défense restent nécessaires sur le très long terme pour remédier aux lacunes européennes en matière de capacités de défense", explique pourtant, à titre personnel, Burkard Schmitt, directeur Défense auprès de l'ASD, le lobby à Bruxelles des industries de l'espace et de la défense.

Et si les Etats membres ne sont pas prêts à payer, et à changer radicalement dans leur façon de coopérer entre eux, alors "l'impact sera limité, quelles que soient les initiatives prises par l'UE", assure-t-il.


Commission européenne: Breton claque la porte, Macron propose Séjourné

Le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton donne une conférence de presse sur la loi sur la cyber-résilience au siège de l'UE à Bruxelles le 15 septembre 2022. (Photo par Kenzo TRIBOUILLARD / AFP)
Le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton donne une conférence de presse sur la loi sur la cyber-résilience au siège de l'UE à Bruxelles le 15 septembre 2022. (Photo par Kenzo TRIBOUILLARD / AFP)
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  • Emmanuel Macron a aussitôt proposé un nouveau candidat français, le ministre démissionnaire des Affaires étrangères Stéphane Séjourné.
  • Ursula von der Leyen a accepté sa démission, le remerciant pour le travail effectué depuis cinq ans.

BRUXELLES : Le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, a claqué la porte de la Commission européenne lundi, se disant désavoué par la présidente Ursula von der Leyen, en pleines tractations sur la composition de la nouvelle équipe.

En fin de matinée, Emmanuel Macron a aussitôt proposé un nouveau candidat français, le ministre démissionnaire des Affaires étrangères Stéphane Séjourné, l'un de ses proches, ancien eurodéputé et ancien chef du groupe centriste Renew.

La France vise un portefeuille "centré sur les enjeux de souveraineté industrielle, technologique et de compétitivité européenne", selon l'Elysée.

Le départ fracassant de Thierry Breton a plongé le microcosme bruxellois dans la stupeur alors que les noms et les portefeuilles des nouveaux commissaires étaient potentiellement attendus mardi.

"Je démissionne de mon poste de commissaire européen, avec effet immédiat", a annoncé l'ancien ministre de 69 ans dans une lettre à Mme von der Leyen publiée dans la matinée sur le réseau social X.

Thierry Breton affirme que la cheffe de l'exécutif européen, en train de former son équipe pour un nouveau mandat de cinq ans, a réclamé à l'Elysée son retrait.

"Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom - pour des raisons personnelles qu'en aucun cas vous n'avez discutées directement avec moi - et proposé, en guise de compromis politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège" des commissaires, écrit-il.

Etre commissaire européen, "fut un honneur", souligne l'ancien ministre français, mais "à la lumière des derniers développements - qui témoignent une fois de plus d'une gouvernance douteuse - je dois conclure que je ne peux plus exercer mes fonctions au sein du Collège", conclut-il.

Ursula von der Leyen a accepté sa démission, le remerciant pour le travail effectué depuis cinq ans.

Les relations entre la dirigeante allemande et M. Breton étaient notoirement tendues depuis que ce dernier avait pris la tête au printemps d'une fronde au sein de l'exécutif bruxellois pour contester le style de direction de la présidente, jugé autoritaire.

- Blocage en Slovénie -

Le Français avait publiquement mis en cause l'éthique de Mme von der Leyen après la nomination fin janvier d'un émissaire chargé des petites et moyennes entreprises, un poste hautement rémunéré au sein de la Commission.

Le poste avait été attribué à l'eurodéputé allemand du Parti populaire européen (droite) Markus Pieper, quelques semaines avant un congrès à Bucarest début mars lors duquel le PPE avait apporté son soutien à un second mandat de Mme von der Leyen.

La polémique avait abouti à un vote de défiance du Parlement européen contre Mme von der Leyen, en pleine campagne pour les élections européennes de juin, et finalement au retrait de M. Pieper.

Finalement réélue à la tête de la Commission en juillet, Ursula von der Leyen devait présenter mardi aux chefs de groupe du Parlement européen les noms et les portefeuilles des nouveaux commissaires, en marge d'une plénière à Strasbourg.

La composition de l'exécutif européen relève de l'exercice d'équilibriste, révélateur du poids des Etats membres, des forces politiques et des orientations de l'UE.

Avant le retrait de M. Breton, la situation était déjà incertaine en raison d'un blocage du côté de la Slovénie, où l'approbation de la nouvelle candidate Marta Kos par le Parlement national se fait attendre.

Le départ de Thierry Breton, qui s'était imposé comme une figure de l'exécutif bruxellois en s'attaquant aux abus de pouvoir des géants du numérique, complique encore l'équation.

Il intervient après une polémique que les dirigeants tentent tant bien que mal de dégonfler sur le manque de femmes dans la nouvelle équipe en train de se constituer.

Après la démission surprise du commissaire sortant français, l'eurodéputée écologiste Marie Toussaint avait appelé Emmanuel Macron à "désigner une femme pour œuvrer à la parité au sein de la Commission".