Les stéréotypes dans les ballets classiques, à démonter ou à préserver?

Des danseurs du groupe The Bang interprètent des extraits de « Nut / Cracked » de David Parker lors d'une répétition générale à Arts on Site dans la section Greenwich Village de New York le 15 décembre 2020 (Photo, AFP)
Des danseurs du groupe The Bang interprètent des extraits de « Nut / Cracked » de David Parker lors d'une répétition générale à Arts on Site dans la section Greenwich Village de New York le 15 décembre 2020 (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 10 janvier 2021

Les stéréotypes dans les ballets classiques, à démonter ou à préserver?

  • « N'importe quelle œuvre peut être recontextualisée », assure Kader Belarbi, ancien danseur étoile et directeur du Ballet du Capitole
  • L'historien Pap Ndiaye et la Secrétaire générale du Défenseur des droits Constance Rivière doivent bientôt rendre à l'Opéra un rapport se penchant entre autres sur la question des stéréotypes

PARIS: De la « cancel culture » à l'Opéra de Paris? Nullement, mais un début de réflexion sur les stéréotypes d'un autre âge dans le répertoire du ballet classique, un exercice délicat entre patrimoine et modernité. 

Quelques mois après un manifeste inédit sur la diversité à l'Opéra rédigé par des danseurs et employés noirs et métisses de l'institution, la question du répertoire a été mise en lumière par une polémique. Fin décembre, le nouveau directeur général de l'Opéra, Alexander Neef, affirme dans Le Monde que « certaines oeuvres vont sans doute disparaître du répertoire », après un paragraphe évoquant « Le Lac des Cygnes » et « Casse-Noisette ».  

La toile s'enflamme et l'extrême droite, par la voix de Marine Le Pen, dénonce un « anti-racisme devenu fou ». L'Opéra dément rapidement, invoquant une « juxtaposition malencontreuse ». 

Trace d'un passé 

La controverse fait écho à d'autres: le New York Times qui se demande s'il faut continuer à exposer Gauguin qui eut des relations sexuelles avec de très jeunes filles, « Dix petits nègres » rebaptisé « Ils étaient dix »; HBO Max qui retire temporairement « Autant en emporte le vent » pour y ajouter une contextualisation en plein mouvement Black Lives Matter. 

Les ballets académiques du XIXe siècle sont plus connus pour leur brillante chorégraphie que pour l'exactitude de leur représentation des cultures extra-européennes. 

« C'est la question de l'exotisme », très à la mode à l'époque dans tous les arts, rappelle l'historienne de la danse Sylvie Jacq-Mioche, citant en exemple les toiles de Delacroix. 

Si le « blackface » a disparu ces cinq dernières années de l'Opéra, si le coiffage de cheveux crépus et le teint des collants et des pointes sont en cours d'adaptation et si la diversité au sein du ballet peut se travailler sur la durée, la question du répertoire est plus complexe. 

Dans « La Bayadère », des fakirs hindous apparaissent comme serviles alors qu'il s'agit d'ascètes respectés en Inde et dans « Raymonda », le Sarrasin est un rôle sombre.  

L'historien Pap Ndiaye et la Secrétaire générale du Défenseur des droits Constance Rivière doivent bientôt rendre à l'Opéra un rapport se penchant entre autres sur la question des stéréotypes. 

Si les ballets académiques sont déclinés en plusieurs versions (à l'Opéra, ce sont celles de Rudolf Noureev pour la plupart), c'est « parce que les corps ont changé et la technique aussi », rappelle Sylvie Jacq-Mioche. Quid des mentalités ? « Il s'agit d'une trace d'un passé qui a existé », dit-elle, rappelant qu'« un ballet qui n'est pas dansé tombe dans l'oubli ».  

Selon elle, les classiques peuvent coexister avec des ballets qui s'en inspirent et parlent du monde d'aujourd'hui, citant la « Giselle » du Britannique Akram Khan, la « Coppél.i.A » de Jean-Christophe Maillot ou « Le Lac des cygnes » de Matthew Bourne, exclusivement masculin. 

Non aux caricatures 

« N'importe quelle œuvre peut être recontextualisée », assure Kader Belarbi, ancien danseur étoile et directeur du Ballet du Capitole. 

Ayant revisité entre autres « Le Corsaire » (créé à Paris en 1856), il est pour une « relecture en profondeur » des classiques, sans « qu'il y ait une perte de mémoire » et « qu'on devienne aseptisé ». 

« On ne peut pas condamner un passé, mais il ne faut pas rester dans des clichés caricaturaux de personnages et une pantomime désuète ». 

Dans « La Bayadère » que le Capitole était censé présenter en 2020, « nous avons décidé que les +Indiens+ ne seraient pas maquillés en couleur sombre...et pour le ballet +Les Mirages+, nous discuterons pour repenser le passage des +négrillons+ », indique le directeur qui veut « faire attention à certaines sensibilités ou susceptibilités, mais sans tomber dans le politiquement correct ».  

De l'autre côté de l'Atlantique, Phil Chan, danseur américano-chinois, a cofondé en 2017 une association qui milite pour l'élimination des clichés asiatiques dans les ballets classiques. 

« Le ballet change tout le temps, ce n'est pas comme la Joconde. « Aujourd'hui, nos voisins sont indiens, nos cousins sont noirs, nos collègues sont chinois; on ne peut plus mettre l'Europe au centre, avec les autre pays dansant à la périphérie ».  

Il a réécrit le livret du « Corsaire », avec l'historien de la danse Doug Fullington, et a repris la chorégraphie originale, en changeant le contexte du harem, des pirates et du pacha. 

 


Paul Kupelian, artiste informel et chroniqueur du côté coloré de la vie

L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. (fournie)
L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. (fournie)
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  • A force de peindre son quotidien, ses lieux familiers et le chaos de Beyrouth, il devient le chroniqueur visuel d'événements importants, tout comme de sa propre évolution
  • Sa signature artistique se caractérise par un style vibrant et coloré, joyeux et dynamique, ce qui ne l’empêche pas de trouver, dans les infinies nuances de sa palette lumineuse, une harmonie chromatique qui se révèle au premier coup d’œil

BEYROUTH : Figuratif ? Naïf ? L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. Né en 1975, cet artiste autodidacte de nationalité libanaise et française dont les racines remontent à l'Arménie, a grandi dans une famille d'artistes. Il n’a que 7 ans quand sa grand-tante l’initie à la technique reine, et donc complexe, de la peinture à l’huile. Dès lors, le reste de son enfance est ébloui par d’innombrables heures passées à dessiner et à peindre tout ce qui l’entoure. Il met toute sa passion à se perfectionner, aborde de nouveaux médiums tels que l'encre de Chine, l'acrylique, le pastel gras, le fusain ou la sanguine. Savait-elle, cette bienveillante aïeule, qu’elle lui offrait à travers l'art l'exutoire thérapeutique suprême, un moyen d'exprimer ses émotions et d'affronter les complexités de la vie ?  A force de peindre son quotidien, ses lieux familiers et le chaos de Beyrouth, il devient le chroniqueur visuel d'événements importants tout comme de sa propre évolution, projetant ses troubles sur la toile et y gagnant en retour paix intérieure et stabilité.

Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Sa signature artistique se caractérise par un style vibrant et coloré, joyeux et dynamique, ce qui ne l’empêche pas de trouver, dans les infinies nuances de sa palette lumineuse, une harmonie chromatique qui se révèle au premier coup d’oeil. Il y a dans ses oeuvres une joie contagieuse que confirme le sourire spontané de tout spectateur qui y est confronté. Ce pouvoir n’échappe pas au regard avisé de la galeriste Nadine Begdache, commissaire de l’espace Janine Rubeiz, à Beyrouth. En 2016, elle lui offre son exposition inaugurale : "Looking at the Bright Side" (Regard sur le côté lumineux de la vie). Une présentation saluée par les critiques d'art et les collectionneurs.

Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Qu’on ne se trompe pas sur la « naïveté » de cet artiste autodidacte. Sa profonde compréhension des proportions, de la perspective et des détails complexes n’échappe pas à un regard averti.  Ses peintures, bien que légères, servent de canal à ses émotions. Dans ses œuvres récentes, Paul Kupelian utilise principalement la peinture acrylique à grande échelle, un médium dont il apprécie la polyvalence et le potentiel expressif.

Chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Bien qu’il n’ait pas donné d’exposition depuis un certain temps, il confie à Arab News en français qu’il vit à présent à Dubai où il occupe un poste de direction dans le retail.  « Je peins dès que j’en ai le temps, le soir et surtout les weekends » poursuit-il. « La peinture est mon exutoire, je peux y passer des heures sans voir le temps passer. Cela me permet de tout oublier et m’apporte énormément de joie » ajoute Paul Kupelian qui affirme que, comme pour beaucoup d’artistes, son art est sa thérapie. Ajoutez à cette passion celle de l’histoire, la géopolitique, la philosophie, la musique, les voyages, le sport, vous obtenez, dans chaque toile, une nouvelle fenêtre ou un nouveau miroir où chacun peut trouver une réponse à ses propres questionnements.

 


Deuxième jour de la RSFW: défilé historique de maillots de bain et dentelle élégante

La collection d’EAU comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. (Photo fournie)
La collection d’EAU comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. (Photo fournie)
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  • Certains looks élégants étaient associés à des couvre-chefs soyeux et à des sacs à main sophistiqués
  • La collection de Sara Altwaim, comprenait un certain nombre de robes blanches fluides en dentelle et en mousseline

MER ROUGE: La marque marocaine EAU a marqué l’histoire en lançant, vendredi, la deuxième série de défilés de la Red Sea Fashion Week. En effet, c’est la première fois que des maillots de bain font leur entrée sur un podium saoudien.

Avec la piscine scintillante de St. Regis et les palmiers ondulants en arrière-plan, la deuxième RSFW a mis en valeur l’une des pièces incontournables de l’été.

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EAU. (Photo fournie)

La collection comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. Bleu roi, jaune moutarde, vert chasseur et rouge marron dominaient la collection, créant une palette d’automne plutôt singulière, mais bienvenue, pour la saison estivale à venir.

Certains looks élégants étaient associés à des couvre-chefs soyeux et à des sacs à main sophistiqués, notamment des paniers tressés parsemés de strass, des sacs de plage en paille et des pochettes à franges.

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Sarah Altwaim. (Photo fournie)

La mode affluait à mesure que la mer Rouge brillait. La collection de Sara Altwaim comprenait un certain nombre de robes blanches fluides en dentelle et en mousseline. Chacune des pièces est attrayante, grâce à une touche individuelle, de subtiles perles, des coupes superposées ou un mélange de tissus.

Altwaim a présenté un tissu en mousseline d’inspiration sous-marine présentant des croquis de créatures des fonds marins, comme les poissons, les crevettes et les crabes, qui ont fait leur apparition dans une variété d’ensembles.

Les cols de perles très superposés, les jupes en forme de paréo, les résilles ornées de bijoux, les tissus métalliques et les vêtements fluides étaient également inspirés de la vie marine.

La créatrice saoudienne Yasmina Q a introduit les vêtements d’intérieur, clôturant les défilés avec une collection de robes en tricot effet côtelé dans des tons vert menthe, bleu écume de mer, jaune vif, corail et bien plus encore.

Il y avait aussi des manches évasées et une taille ajustée qui se transformait en une forme trapèze. Certaines pièces étaient également sans manches pour un look estival plus décontracté. La collection, composée de lunettes de soleil et de chapeauxestivaux, présentait également une gamme de vêtements d’intérieur, allant des bas côtelés aux hauts ajustés simples, en passant par les chemises côtelées, les hauts kimonos et les pulls amples.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les 80 ans de Dave: «pour un beatnik, faire carrière est un gros mot!»

Le chanteur néerlandais francophone Wouter Otto Levenbach alias Dave, pose lors d'une séance photo à Paris le 29 avril 2024 (Photo, AFP).
Le chanteur néerlandais francophone Wouter Otto Levenbach alias Dave, pose lors d'une séance photo à Paris le 29 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Mardi, Dave fête ses 80 ans et ses 60 ans de scène au Grand Rex, à Paris
  • Débarqué des Pays-Bas, le jeune Wouter Otto Levenbach débute à Paris en 1965

PARIS: "A 20 ans, je rêvais de vivre en chantant, surtout pas faire carrière! Pour le beatnik que j'étais, c'était un gros mot!": à 80 ans, Dave, l'interprète des indémodables "Vanina" et "Du côté de chez Swann", n'en revient pas d'être devenu un chanteur populaire mais refuse de songer à des adieux.

"J'aimerais bien chanter jusqu’à la fin. La scène, c'est le nirvana et on nous paie pour ça, en plus!", confie à l'AFP le plus Français des Néerlandais, connu aussi pour son franc-parler.

Mardi, Dave fête ses 80 ans et ses 60 ans de scène au Grand Rex, à Paris, avant une nouvelle tournée qui passera par Amsterdam et Bruxelles.

"Quand je suis devenu chanteur populaire, je n'ai rien compris. En plus, je n'étais pas du tout branché +variétoche+...", ajoute celui qui est toujours fan de jazz.

Débarqué des Pays-Bas, le jeune Wouter Otto Levenbach débute à Paris en 1965: "je faisais la manche dans le Quartier latin. En m'accompagnant à la guitare, je reprenais les succès du moment", raconte Dave, qui vient de publier une autobiographie, "Comment ne pas être amoureux de vous" (Talent Editions).

"On m'a conseillé d'aller plutôt à Saint-Tropez. (...) Maintenant, j'y retourne, mais comme client!", ajoute le chanteur vite remarqué par le producteur Eddie Barclay.

En 1972, il est enrôlé dans l'opéra-rock "Godspell". Deux ans après, il perce enfin avec la reprise de "Sugar Baby Love" des Rubbets, adapté en français par son compagnon Patrick Loiseau, qui deviendra son parolier attitré. La même année, "Vanina" dépasse le million d'exemplaires.

Après "Dansez maintenant" et "Mon cœur est malade", deux autres tubes, Dave se maintient au sommet du hit-parade avec "Du côté de chez Swann", une ballade romantique signée encore Patrick Loiseau et devenue l'une des chansons emblématiques des seventies.

«Comme Henri Salvador»

"Quand Patrick m'a proposé ce texte, je lui ai demandé s’il n'était pas fou. Cela me semblait trop littéraire et je pensais que ça ne marcherait jamais... Finalement, le succès a été énorme. Ma seule chanson diffusée sur France Inter!", ironise-t-il.

"Sans prétention, les textes étaient plutôt intéressants à l'époque. Aujourd'hui, ils ont perdu un peu en qualité", juge-t-il. Dans la jeune génération, Zaho de Sagazan et Vianney sont toutefois ses préférés.

"Depuis toujours, j'aime amuser la galerie avec des blagues caustiques mais je suis un gentil avec un bon fond", assure le chanteur, victime d'une lourde chute en 2022 qui a entraîné quatre jours de coma, avec, pour seules séquelles, la perte de l'odorat et du goût.

A 80 ans, le chanteur rêve d'un album "à un million d’exemplaires, comme Henri Salvador à la fin de sa vie".

"Pour le plus tard possible", Dave a laissé des instructions pour qu'on grave sur son urne funéraire le mot "ouf": "parce que je serai probablement content que cela se termine et parce que +ouf+ en verlan, veut dire fou. Un bon résumé de ma vie".