En France, ces binationaux «blessés» par le projet de l'extrême droite de leur interdire certains métiers

Un manifestant brandit une pancarte indiquant "Nous n'avons jamais essayé l'anarchie" lors d'un rassemblement contre l'extrême droite place de la République à Paris, le 27 juin 2024. (AFP)
Un manifestant brandit une pancarte indiquant "Nous n'avons jamais essayé l'anarchie" lors d'un rassemblement contre l'extrême droite place de la République à Paris, le 27 juin 2024. (AFP)
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Publié le Vendredi 28 juin 2024

En France, ces binationaux «blessés» par le projet de l'extrême droite de leur interdire certains métiers

  • En janvier, le RN avait déjà déposé une proposition de loi prévoyant la possibilité d'interdire l'accès à des emplois dans les administrations et entreprises publiques aux Français possédant une autre nationalité
  • Il faut remonter aux années 1930 pour retrouver la mise en place de restrictions pour les personnes naturalisées. A la Libération, ces lois ont pour la plupart disparu

PARIS: "Blessés" et "inquiets": des Français ayant une autre nationalité, de profils différents et se considérant pleinement français, témoignent de leur stupéfaction après la proposition de campagne du parti d'extrême droite RN de leur interdire des emplois et fustigent un possible "précédent de discrimination".

"Je me sens touché en tant que binational et produit de la République française: j'ai beau être Franco-Malien, je dois tout à la France, je ne dois rien au Mali à part mon origine familiale, le Mali ne m'a pas formé; je me sens Français avant tout", lance d'une traite à l'AFP le blogueur Samba Gassama, 37 ans.

"Entendre des Français me rejeter, c'est blessant", confie-t-il.

Lors de sa campagne pour les législatives, le Rassemblement national (RN), en tête des intentions de vote, a dit vouloir "empêcher" les binationaux d'occuper "des emplois extrêmement sensibles", par exemple des binationaux russes pour des "postes de direction stratégique dans la défense".

En janvier, le RN avait déjà déposé une proposition de loi prévoyant la possibilité d'interdire l'accès à des emplois dans les administrations et entreprises publiques aux Français possédant une autre nationalité.

Ainsi, 3,3 millions de Français pourraient demain se voir interdire l'accès à un emploi, selon les estimations du syndicat CFDT.

Lors d'un débat télévisé mardi, le Premier ministre Gabriel Attal a accusé le président du RN Jordan Bardella d'hypocrisie et d'avoir une représentante franco-russe, Tamara Volokhova, à un poste sensible du Parlement européen, en contradiction avec la proposition du RN.

En France, la binationalité n'empêche pas l'accès aux emplois de la fonction publique.

"Il y a des réserves de nationalités dans pas mal de domaines", explique à l'AFP Patrick Simon, démographe à l'Institut national d'études démographiques (Ined). "Les non-ressortissants européens ont des limitations; il y a des restrictions supplémentaires pour les métiers dans les domaines régaliens comme la sécurité, la défense" notamment.

"Or, les double nationaux ne font pas partie des personnes soumises à ces restrictions parce qu'ils sont nominalement et pleinement français", souligne-t-il. "Ce que le RN entend étendre, c'est de considérer que les personnes double nationaux ne sont pas des nationaux à part entière; c'est évidemment dangereux".

«Grande souffrance»

Il faut remonter aux années 1930 pour retrouver la mise en place de restrictions pour les personnes naturalisées. A la Libération, ces lois ont pour la plupart disparu.

Dans une tribune mardi au journal Le Monde, Mohamed Bouabdallah, diplomate de carrière et binational, dit vivre "comme une grande souffrance le fait que la loyauté des binationaux puisse être ainsi questionnée".

"Nous sommes des milliers de binationaux (...) à occuper des postes de premier plan dans l'appareil d'Etat, y compris sur des postes dits +sensibles+", souligne-t-il.

Selon lui, "le RN s'inscrit dans la droite ligne du régime raciste de Vichy (...) En 2024, ce ne sont plus les juifs (leur tour viendra), mais les arabes et les musulmans".

Les binationaux interrogés - qui se disent aussi profondément attachés à leur autre nationalité - admettent a minima un sentiment de malaise et d'incompréhension, voire d'injustice face à cette proposition du RN.

"C'est une insulte à l'ensemble des binationaux", réagit Amayas Allam, 24 ans, Franco-Algérien et étudiant dans une grande école de commerce, qui s'alarme du fait qu'un certain nombre de Français soutiennent ce genre de mesures.

"Ce qui me fait peur, c'est le précédent de discrimination entre les Français que cela créerait", qui pourrait "ouvrir la porte" à d'autres mesures visant les binationaux sur "l'accès aux soins, aux services publics, etc.".

"Je ne comprends pas cette démarche du RN", témoigne Nadjet Aviles, 58 ans, enseignante dans le secondaire, qui se dit "inquiète en tant que Franco-Algérienne". "C'est complètement stigmatisant pour les binationaux; je me suis posée la question de si je commençais à faire mes valises, alors que cela fait 34 ans que je vis en France, mes enfants sont nés ici...", s'époumone-t-elle.

Rodrigo Arenas, député franco-chilien LFI-Nupes (gauche radicale), arrivé en 1978 en France à l'âge de 4 ans avec ses parents qui fuyaient la dictature de Pinochet, ne décolère pas non plus. Cette proposition est une "stupidité pragmatique, politique, stratégique, qui ne répond à aucun besoin et est au contraire contraire aux intérêts de la France", dit-il à l'AFP.

"L'Assemblée nationale, le Sénat et même les ministères sont parfois occupés par des personnalités politiques qui sont de différentes nationalités. C'est l'histoire de ce pays !", martèle-t-il.

Une émotion partagée par des binationaux plus jeunes.

Emily, Franco-Britannique de 17 ans vivant en Bretagne (ouest), dit ressentir de la "peur". "J'ai déjà eu des commentaires de gens pas très sympas par rapport à ma nationalité britannique, mais c'est juste à l'école, alors que si c'est des gens qui potentiellement étaient à la tête de l'Etat et mettaient des lois en place, c'est beaucoup plus grave...".

La chanteuse franco-malienne Manda Sira, 30 ans, s'émeut d'une proposition "lunaire". "C'est une manière de créer toujours des différences et des inégalités là où au contraire on se bat pour avancer et pour les gommer...", critique l'artiste, qui "s'alarme" de l'idée d'une "classification des Français qui auraient plus de valeur ou de droits".

Ces binationaux espèrent que le Conseil constitutionnel français s'opposera à une telle proposition, ou se refusent "à y croire".

Olga Prokopieva, Franco-Russe arrivée en France en 1995, présidente de l'association Russie-Libertés, se sent "aujourd'hui beaucoup plus Française que Russe". "J'ai fait toutes mes études et ma vie ici, ma fille est binationale aussi".

Elle juge "impensable" d'être privée "de certains de (ses) droits et possibilités". "C'est un retour en arrière très inquiétant", lance-t-elle. "Peut-être que le choc sera terrible après les législatives, mais pour le moment je préfère ne pas y croire".


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.