Au G7, une Meloni rayonnante face à un Macron affaibli

Le président français Emmanuel Macron est accueilli par la Première ministre italienne Giorgia Meloni à son arrivée à la station balnéaire de Borgo Egnazia pour le sommet du G7 organisé par l'Italie dans la région des Pouilles, le 13 juin 2024 à Savelletri. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron est accueilli par la Première ministre italienne Giorgia Meloni à son arrivée à la station balnéaire de Borgo Egnazia pour le sommet du G7 organisé par l'Italie dans la région des Pouilles, le 13 juin 2024 à Savelletri. (AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 13 juin 2024

Au G7, une Meloni rayonnante face à un Macron affaibli

  • Le président français, chantre d'un progressisme centriste, et la Première ministre italienne, venue de l'extrême droite post-fasciste, se toisent depuis longtemps
  • Le principal dossier du G7, sur l'utilisation au profit de l'Ukraine des actifs russes gelés par les Occidentaux, semble avoir déjà été tranché

BARI: Une bise et un sourire pour la photo, quelques frictions dans les coulisses. Emmanuel Macron, qui aime se poser en leader des Européens, est arrivé jeudi au G7 en Italie affaibli par ses déboires électoraux face à une Giorgia Meloni triomphante.

Le président français, chantre d'un progressisme centriste, et la Première ministre italienne, venue de l'extrême droite post-fasciste, se toisent depuis longtemps. Mais là, les rapports de force semblent s'être inversés.

Emmanuel Macron a essuyé dimanche une lourde défaite aux élections européennes face à l'extrême droite, et a convoqué des législatives anticipées auxquelles il risque gros.

Et il n'est pas le seul à ne pas être à son avantage dans le luxueux resort balnéaire de Borgo Egnazia, dans les Pouilles.

Le président américain Joe Biden, en difficulté face au retour en force de son prédécesseur Donald Trump; le chancelier allemand Olaf Scholz, dont les sociaux-démocrates ont aussi enregistré une déroute aux européennes; le Premier ministre conservateur britannique Rishi Sunak, qui devrait céder son fauteuil aux travaillistes dans moins d'un mois...

La plupart des dirigeants des sept démocraties les plus riches de la planète font pâle figure face à la dirigeante italienne, qui a réussi l'exploit de remporter les européennes en améliorant son score par rapport au scrutin qui l'a portée au pouvoir fin 2022.

"J'espère que vous pourrez goûter à l'hospitalité pour laquelle l'Italie est célèbre dans le monde entier", a dit Giorgia Meloni à ses homologues dans un sourire gourmand en ouvrant le sommet.

C'est peu dire que Rome, souvent hérissée par une posture française jugée arrogante, savoure son rôle de "protagoniste".

"L'Italie se présente comme une bouée de sauvetage, dans un chaos d'incertitudes", commente-t-on de source diplomatique italienne, dans une allusion à peine voilée, entre autres, aux inconnues françaises.

Paris veut faire comme si de rien n'était. "Le chef de l'Etat est le chef de l'Etat. Et c'est en tant que tel qu'il vient au G7. Il n'a pas d'explication à donner ici", balaye un conseiller quand on lui demande s'il devra justifier son choix de dissoudre l'Assemblée nationale, qui pourrait le contraindre dans un mois à une cohabitation avec un Premier ministre d'extrême-droite.

"C'est clair qu'Emmanuel Macron a moins de prestige et d'assurance qu'auparavant", décrypte l'ex-diplomate Michel Duclos, conseiller spécial à l'Institut Montaigne.

L'adversaire le plus dangereux

Cela pèsera-t-il sur les négociations ? Le principal dossier du G7, sur l'utilisation au profit de l'Ukraine des actifs russes gelés par les Occidentaux, semble avoir déjà été tranché.

Mais un long travail technique reste à faire pour sa mise en œuvre.

"On peut se demander si un gouvernement français moins allant dans le soutien à Kiev le mettrait vraiment en œuvre", explique à l'AFP Michel Duclos, relevant qu'en raison du flou électoral "la parole d'Emmanuel Macron engage moins la France que par le passé".

Ce sentiment est relativisé par la tradition de continuité de la politique étrangère de la France, et le statut du président français, avec son "domaine réservé" réel ou fantasmé en matière de diplomatie, ajoute-t-il.

Quoi qu'il en soit, le dossier ukrainien a donné lieu à quelques tensions. Le fait que l'Elysée annonce aux journalistes, dès mercredi, "un accord" sur ce sujet a agacé les Italiens, qui ont eu le sentiment que les Français leur grillaient la politesse, comme s'en sont plaintes des sources officielles italiennes dans les médias transalpins.

Les Etats-Unis, la France et d'autres ont aussi déploré les velléités du gouvernement Meloni d'atténuer une déclaration du G7 soutenant le droit à l'avortement, même si officiellement, Paris salue l'esprit général des négociateurs italiens.

Cette question n'est pas anodine, au moment où Emmanuel Macron comme Joe Biden placent leur survie électorale sur le plan de la "bataille des valeurs" face aux extrêmes.

Le président français en a fait le cœur de sa conférence de presse de mercredi pour lancer la campagne, tout en insistant sur "l'incapacité à gouverner" de ses adversaires.

"Or Meloni a démontré qu'il est possible de gouverner", alliée au centre-droit mais aussi aux populistes, "sans que l'Italie ne tombe en ruine ni en disgrâce", relève Lorenzo Castellani, chercheur en Sciences politiques à l'université romaine Luiss. Cela en fait, pour la France ou l'Allemagne, "l'adversaire le plus dangereux".


Menace de grève dans les aéroports parisiens à l'approche des JO

Cette photographie montre une vue des anneaux olympiques affichés au niveau des arrivées de l'aéroport d'Orly, au sud de Paris, le 19 juin 2024. (Photo, AFP)
Cette photographie montre une vue des anneaux olympiques affichés au niveau des arrivées de l'aéroport d'Orly, au sud de Paris, le 19 juin 2024. (Photo, AFP)
Short Url
  • En période estivale, les aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et d'Orly accueillent quelque 350.000 passagers par jour au total
  • Les syndicats, qui parlent d'"ultimatum" à leur direction, lui réclament "une gratification uniforme et équitable pour tous les agents travaillant pendant les Jeux olympiques"

PARIS: Plusieurs syndicats du gestionnaire des aéroports desservant Paris, le Groupe ADP, ont menacé mercredi d'appeler à la grève à partir de début juillet, réclamant notamment une gratification en vue des Jeux olympiques.

"Depuis de nombreux mois, les organisations syndicales CGT, CFDT, FO et UNSA réclament à la direction des moyens pour faire face à l'évolution du trafic aérien et à l'organisation des JOP", les Jeux olympiques et paralympiques, ont-elles indiqué dans un communiqué.

En période estivale, les aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et d'Orly accueillent quelque 350.000 passagers par jour au total. Le Groupe ADP ne s'attend pas à voir les volumes de voyageurs croître à l'occasion des Jeux, mais a pris des mesures pour garantir l'accueil des athlètes, avec des parcours spécifiques et des infrastructures éphémères.

Les syndicats, qui parlent d'"ultimatum" à leur direction, lui réclament "une gratification uniforme et équitable pour tous les agents travaillant pendant les Jeux olympiques" et affirment que "les mesures discriminatoires doivent être remplacées par une approche juste".

En outre, ces organisations "exigent un plan d'embauche adapté à chaque activité et catégorie de personnel", assurant qu'"il manque près de 1.000 postes". Elles demandent aussi "des mesures concrètes pour stopper la dégradation des conditions de travail et garantir toute l'année l'exercice des droits aux congés".

Sans réponse de leur direction d'ici au 5 juillet, les syndicats "répondront à la demande de nombreux salariés en déposant un préavis de grève", ont-ils prévenu.

Contactée par l'AFP mercredi après-midi, la direction d'ADP n'a pas été en mesure de réagir dans l'immédiat. Le groupe est contrôlé à 50,6% par l'Etat. Le PDG Augustin de Romanet assure actuellement son propre intérim jusqu'après les Jeux, car le gouvernement lui a refusé un troisième mandat.

Les salariés d'ADP avaient déjà été appelés à la grève le 19 mai. Le mouvement n'avait pas provoqué de perturbations majeures.

Des salariés de plusieurs secteurs ou entreprises publiques se sont mobilisés avec succès ces derniers mois pour obtenir des primes d'activité en vue des Jeux olympiques, notamment à la RATP et la SNCF.

 


Retraites: le RN à la peine pour clarifier son programme avant les législatives

La cheffe du groupe parlementaire d'extrême droite Rassemblement National (RN) à l'Assemblée nationale Marine Le Pen (à droite) et le président du parti de droite Les Républicains (LR) Eric Ciotti assistent à une conférence de presse du président du RN pour présenter les priorités du " gouvernement d'union nationale" au cas où le score du parti lors du vote parlementaire anticipé lui donnerait une chance de nommer un Premier ministre, à Paris le 24 juin 2024. (AFP)
La cheffe du groupe parlementaire d'extrême droite Rassemblement National (RN) à l'Assemblée nationale Marine Le Pen (à droite) et le président du parti de droite Les Républicains (LR) Eric Ciotti assistent à une conférence de presse du président du RN pour présenter les priorités du " gouvernement d'union nationale" au cas où le score du parti lors du vote parlementaire anticipé lui donnerait une chance de nommer un Premier ministre, à Paris le 24 juin 2024. (AFP)
Short Url
  • Mardi soir lors du premier débat télévisé avant les législatives des 30 juin et 7 juillet, le président du RN a de nouveau semé le trouble sur le sujet sensible des retraites
  • La cheffe des Ecologistes Marine Tondelier a accusé Bardella de vouloir «faire pire» que la dernière réforme fixant l'âge légal à 64 ans et «qu'il souhaite pourtant abroger»

PARIS: Les cadres du Rassemblement national tentaient mercredi de mettre au clair leur position sur les retraites, après que leur chef de file Jordan Bardella a évoqué la veille plusieurs âges de départ à 60, 62 voire 66 ans.

Mardi soir lors du premier débat télévisé avant les législatives des 30 juin et 7 juillet, le président du RN a de nouveau semé le trouble sur le sujet sensible des retraites.

Répétant son intention de permettre "dès l'automne" à "ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans" de "partir avec un temps de cotisation de 40 annuités et un âge de départ légal de 60 ans", il a ajouté que pour les autres "il y aura une progressivité qui tournera autour d'un âge pivot de 62 ans et de 42 annuités" et que "par conséquent" dans le cas d'une carrière débutée "à 24 ans vous partirez avec 42 années de cotisation, c'est à dire 66 ans".

Ses adversaires ont aussitôt pilonné le leader d'extrême droite. La cheffe des Ecologistes Marine Tondelier l'a ainsi accusé de vouloir "faire pire" que la dernière réforme fixant l'âge légal à 64 ans et "qu'il souhaite pourtant abroger".

"Quel aveu de Bardella!", a réagi le porte-parole du parti communiste Ian Brossat, quand la présidente socialiste de la région Occitanie, Carole Delga y a vu la confirmation que "le RN c'est l'arnaque sociale".

Dans le camp présidentiel aussi, le ministre du Logement Guillaume Kasbarian a qualifié M. Bardella de "tartuffe" et s'est demandé si "quelqu'un a compris quoi que ce soit à (son) programme sur les retraites".

Les lieutenants du RN sont venus à la rescousse de leur leader dans les matinales radio et télé mercredi.

Sébastien Chenu a ainsi assuré sur LCI que chacun aurait toujours "une possibilité de partir à 62 ans, mais effectivement, après, vous regardez si c'est à taux plein ou pas à taux plein". Il a aussi assuré cela ferait même "gagner un an sur la réforme actuelle" avec laquelle "une personne qui entre sur le marché du travail à 24 ans partirait à 67 ans" - pour une pension à taux plein avec 43 années de cotisation, donc.

Mais Laure Lavalette s'est à son tour emmêlé les pinceaux sur BFMTV, en affirmant qu'"on peut évidemment partir à l'âge légal avant" et qu'avec la réforme du RN "celui (qui a commencé à) 24 ans pourrait partir à 60 ans mais pas à sa retraite pleine".

Une contradiction flagrante avec les 62 ans minimum avancés par M. Bardella, mais également inscrits dans une proposition de loi que la députée sortante avait déposé l'an dernier au nom de son groupe.

Ce texte proposait même un âge légal minimum de 58 ans pour ceux qui ont débuté leurs carrières à 16 ou 17 ans, ainsi qu'un seuil maximal à 67 ans pour le taux plein pour ceux qui ont commencé à 25 ans.


Législatives: la campagne très polarisée attise les violences

Le député sortant Nicolas Metzdorf prononce un discours lors d'un meeting de campagne pour les élections législatives à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, le 26 juin 2024. (AFP)
Le député sortant Nicolas Metzdorf prononce un discours lors d'un meeting de campagne pour les élections législatives à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, le 26 juin 2024. (AFP)
Short Url
  • Au-delà des tracts piétinés, plusieurs candidats et militants de tous bords ont été agressés, physiquement ou verbalement
  • Candidate Renaissance dans le Val-de-Marne, Shannon Seban a porté plainte pour injure raciste, affirmant avoir été traitée de «sale sioniste» par des «partisans de l'extrême gauche» dimanche à Ivry-sur-Seine

PARIS: Plusieurs candidats et militants ont été agressés alors qu'ils faisaient campagne pour les élections législatives, dans un contexte d'antagonismes exacerbés entre les blocs Rassemblement national, Nouveau Front populaire et camp macroniste, qui s'accusent mutuellement de violences.

"Quand je distribue des tracts sur les marchés, des gens les chiffonnent et les jettent en me lançant: +On ne veut pas de vous!+. Je n'ai jamais vu ça. Avant, ils les prenaient même s'ils ne votaient pas pour nous, ils restaient polis", raconte à l'AFP Fatiha Keloua Hachi, députée socialiste sortante et candidate du NFP en Seine-Saint-Denis.

Au-delà des tracts piétinés, plusieurs candidats et militants de tous bords ont été agressés, physiquement ou verbalement.

Cette campagne éclair, "très, très polarisée", avec "un fort enjeu" et "deux blocs antagonistes", a "réactivé des comportements exacerbés", analyse pour l'AFP Luc Rouban, politologue au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).

Candidate Renaissance dans le Val-de-Marne, Shannon Seban a porté plainte pour injure raciste, affirmant avoir été traitée de "sale sioniste" par des "partisans de l'extrême gauche" dimanche à Ivry-sur-Seine.

Jeudi dernier, le parquet de Saint-Étienne (Loire) a ouvert une enquête pour "violence en réunion" après "une bousculade, des insultes et des projections d'eau et de farine" visant le candidat RN Hervé Breuil sur un marché. La cheffe de file du parti Marine Le Pen avait pointé des "milices d'ultragauche, soutiens du Nouveau Front populaire".

Plusieurs militants de gauche déplorent, eux, des agressions attribuées à l'extrême droite. Un homme distribuant des tracts du NFP à Bordeaux a déposé une plainte samedi, après avoir frappé par un homme affirmant "supporter (Jordan) Bardella".

Dans les Hauts-de-Seine, la députée écologiste sortante Sabrina Sebahi assure que des "militants" du RN ont "insulté et menacé une militante du Nouveau Front populaire, âgée", samedi à Nanterre, quand le candidat NFP dans le Val-de-Marne Joao Martins Pereira (PS) a fait état d'une "violente agression" de militants sur un marché de Maisons-Alfort, par "des hommes d'extrême droite, tout de noir vêtus".

Dans cette atmosphère pesante, l'élue écologiste parisienne Raphaëlle Rémy-Leleu, témoin samedi de propos racistes visant un candidat de gauche, a fait passer des consignes aux militants de son parti, mêlant prudence et "bons réflexes" en cas de violences.

«Climat éruptif»

Noë Gauchard, candidat NFP dans le Calvados, a vu ses affiches barrées d'un tag "SS". Lui aussi constate auprès de l'AFP que "les agressions verbales se produisent quasiment tous les jours sur les tractages, les marchés.

Pour le politologue Luc Rouban, cette campagne présente une configuration inédite depuis la guerre d'Algérie, quand les pro et les anti-indépendance de la colonie française se déchiraient.

L'auteur de l'ouvrage "Les racines sociales de la violence politique" (2024) estime que la violence s'est accrue avec les mobilisations des "gilets jaunes" et contre la réforme des retraites, et surtout depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre.

Selon lui, ces crises ont réactivé "le clivage droite-gauche", la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron le 9 juin ayant acté la "disparition" des "modérés des deux côtés".

Sur le terrain, "on sent la nation fracturée", confirme, "inquiète", Fatiha Keloua Hachi.

Du côté des sondeurs également, on perçoit de la violence dans les réponses tranchées des Français: beaucoup de "pas du tout" ou de "très".

La directrice de BVA Opinion Christelle Craplet évoque pour l'AFP un "climat éruptif", en particulier "des propos très violents" dans les réponses aux questions ouvertes sur Emmanuel Macron.

Ce dernier brandit lui-même le spectre d'une "guerre civile" en cas de victoire des "deux extrêmes", quand Marine Le Pen a accusé encore mercredi "l'extrême gauche (qui) depuis toujours agit par la violence" et pourrait selon elle contester dans la rue la victoire du RN aux législatives.