Malgré une répression sectaire, les manifestations pro-Gaza se poursuivent dans les universités américaines

Des étudiants et des manifestants protestent contre la guerre à Gaza, le 11 mai 2024 à Austin, au Texas. (AFP)
Des étudiants et des manifestants protestent contre la guerre à Gaza, le 11 mai 2024 à Austin, au Texas. (AFP)
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Publié le Mardi 14 mai 2024

Malgré une répression sectaire, les manifestations pro-Gaza se poursuivent dans les universités américaines

Malgré une répression sectaire, les manifestations pro-Gaza se poursuivent dans les universités américaines
  • Peu d’attention a été accordée aux actes d’islamophobie et de haine antiarabe
  • Seuls quelques incidents ont été rapportés dans les médias après que des manifestants pro-israéliens ont été punis

Les manifestations étudiantes dans des dizaines d’universités à travers les États-Unis ont été très efficaces pour sensibiliser l’opinion publique au génocide israélien dans la bande de Gaza.

Les preuves de l’attaque militaire génocidaire d’Israël sont indéniables. Pour cela, la plupart des porte-parole pro-israéliens, des membres du Congrès et des médias de droite se sont plutôt concentrés sur les fausses allégations d’antisémitisme.

Les universités, sous la pression de puissantes organisations et d’hommes politiques pro-israéliens, ont également réprimé les manifestations propalestiniennes, mais pas les manifestations pro-israéliennes.

Les membres du Congrès, en particulier ceux qui ont reçu des millions de dollars pour financer la campagne pro-israélienne, ont mené la lutte contre les étudiants, qualifiant l’invasion israélienne de Gaza de «nécessité», sans évoquer les meurtres de femmes et d’enfants ni la destruction de plus de 370 000 maisons et de nombreux commerces, églises, mosquées, écoles et hôpitaux.

Sur les campus, les partisans pro-israéliens et les manifestants antipalestiniens ont riposté contre les manifestants propalestiniens au moyen de l’islamophobie, de la haine antiarabe et du racisme, mais l’accent reste mis sur la lutte contre l’antisémitisme. C’était l’objet d’un discours prononcé la semaine dernière par le président Joe Biden à l’Holocaust Memorial Museum de Washington. Les paroles dures du président ont été considérées comme un contrepoids à sa menace de suspendre les livraisons d’armes à l’armée israélienne si cette dernière poursuivait ses violences, en particulier contre Rafah, où la majorité des Palestiniens de Gaza sont entassés, cherchant refuge contre les attaques israéliennes.

Biden risque de perdre le soutien des électeurs dans les États clés, où il avait à peine devancé Donald Trump en 2020, en raison du mouvement intitulé «Abandon Biden», dont les partisans ont juré de ne pas soutenir la réélection en raison de son soutien au génocide israélien.

«Les partisans pro-israéliens ont riposté contre les manifestants propalestiniens au moyen de l’islamophobie, de la haine antiarabe et du racisme.»

- Ray Hanania

Depuis qu’Israël a lancé sa campagne à Gaza, Biden a débloqué 40 milliards de dollars (1 dollar = 0,93 euro) de financement pour aider à couvrir les coûts d’Israël, même si Israël est l’un des pays les plus riches du monde. Les manifestants font valoir que les 40 milliards de dollars fournis par Biden et le Congrès pro-israélien sont inutiles et devraient plutôt être utilisés pour offrir des avantages aux Américains, en particulier aux sans-abri, aux pauvres et aux personnes âgées. Les citoyens israéliens bénéficient déjà, pour l’essentiel, de soins de santé gratuits et d’une éducation essentiellement gratuite, subventionnée par le gouvernement.

L’opinion publique américaine continue de remettre en question l’aide étrangère du pays à Israël et le génocide perpétré par Tel-Aviv à Gaza. Les sondages montrent une inquiétude croissante concernant les actions d’Israël, qui, la semaine dernière, ont donné à Biden le prétexte d’arrêter certaines expéditions d’armes vers Israël en raison de violations présumées des restrictions d’utilisation contre des civils.

Un sondage Gallup de mars montre qu’une majorité d’Américains (55%) désapprouve désormais l’action militaire israélienne à Gaza. D’autres sondages ont également montré une évolution similaire. Mais les manifestations étudiantes sont au centre de l’attention aux États-Unis et menacent d’avoir un impact sur l’élection de novembre. Les républicains et les démocrates tiendront respectivement leurs conventions présidentielles à Milwaukee en juillet et à Chicago en août. Ces conventions rassemblent souvent des manifestants des deux côtés des grands débats auxquels le public américain se trouve confronté, tels que le droit à l’avortement et le contrôle des armes à feu. Les manifestations étudiantes risquent de se poursuivre et de devenir le thème principal des deux conventions présidentielles.

Les manifestations étudiantes propalestiniennes dans les universités ont été intenses et controversées. On s’attend à ce que les manifestations se poursuivent alors que l’armée israélienne prend d’assaut Rafah.

Malgré l’hystérie de ceux qui critiquent les manifestants propalestiniens, comme certains membres du Congrès qui ont cherché à faire adopter une législation punitive, les manifestations étudiantes font partie intégrante de la société américaine. Ces événements ont eu lieu à de nombreuses reprises et ont eu une incidence considérable sur la politique intérieure et étrangère.

«L’opinion publique américaine continue de remettre en question l’aide étrangère du pays à Israël et le génocide perpétré par Tel-Aviv à Gaza.»

- Ray Hanania

Il y a eu une vague de protestations étudiantes contre la guerre du Vietnam, notamment lors de la Convention nationale démocrate à Chicago, en août 1968, qui s’est poursuivie jusqu’en 1973, lorsque le président Richard Nixon a retiré les forces de combat américaines du Vietnam. Les étudiants ont également protesté contre la politique d’apartheid de l’Afrique du Sud dans les années 1980.

Mais Israël occupe une place particulière aux États-Unis et il est protégé par le système politique du pays – une protection qui, selon les critiques, a été «achetée» par les comités d’action politique pro-israéliens.

Par ailleurs, peu d’attention a été accordée aux actes d’islamophobie et de haine antiarabe. Seuls quelques incidents ont été rapportés dans les médias après que des manifestants pro-israéliens ont été punis. Un exemple s’est produit à l’université d’État de l’Arizona la semaine dernière lorsqu’un professeur juif, Jonathan Yudelman, accompagné d’un soldat israélien, a violemment harcelé une étudiante musulmane de 20 ans qui ne participait à aucune des manifestations.

Après avoir visionné une vidéo de ses actions sur les réseaux sociaux, l’université a licencié Yudelman et elle lui a interdit de retourner sur le campus. Mais cette mesure n’a été prise qu’après que le président de l’État de l’Arizona, Michael Crow, a procédé à l’arrestation de dizaines d’étudiants et leur a interdit de poursuivre leurs cours.

Il ne fait aucun doute que les manifestants propalestiniens ont un combat difficile à mener dans l’environnement intensément pro-israélien des États-Unis. Ils risquent d’être arrêtés, battus par la police et renvoyés de leur classe. Mais rien ne semble présager qu’ils céderont à ce harcèlement injuste. Cependant, ils pourraient avoir besoin d’une aide supplémentaire pour contrer le fait qu’ils sont marginalisés par les grands médias, qui les accusent d’antisémitisme et défendent également le génocide israélien et la réponse du Congrès. Il est tout à fait normal que les slogans antiarabes brutaux des manifestants pro-israéliens soient également contestés et punis.

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur plusieurs fois primé de la mairie de Chicago. Il peut être joint sur son site Internet personnel à l’adresse suivante: www.Hanania.com.

X: @RayHanania

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com