Invasion du Capitole : la Russie officielle y voit le déclin de l'Amérique

Des membres de la Garde nationale et de la police de Washington D.C. éloignent un petit groupe de manifestants de la capitale après que des milliers de partisans de Donald Trump ont pris d'assaut le bâtiment du Capitole des États-Unis à la suite d'un rassemblement «Stop the Steal» le 6 janvier 2021 à Washington, DC. (AFP)
Des membres de la Garde nationale et de la police de Washington D.C. éloignent un petit groupe de manifestants de la capitale après que des milliers de partisans de Donald Trump ont pris d'assaut le bâtiment du Capitole des États-Unis à la suite d'un rassemblement «Stop the Steal» le 6 janvier 2021 à Washington, DC. (AFP)
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Publié le Vendredi 08 janvier 2021

Invasion du Capitole : la Russie officielle y voit le déclin de l'Amérique

  • Le Congrès américain a confirmé jeudi Joe Biden en tant que prochain président des Etats-Unis, mais plusieurs responsables russes estiment que les évènements mettent en lumière les échecs de la démocratie américaine
  • Moscou s'est longtemps offusqué des critiques américaines sur l'état de la démocratie russe sous le président Vladimir Poutine, accusant Washington d'hypocrisie et de condescendance

MOSCOU: «La fête de la démocratie est terminée», a proclamé jeudi un responsable du Parlement russe, parmi de nombreuses voix de personnalités loyales au Kremlin raillant une Amérique en bout de course, alors que l'opposition vantait au contraire le revers infligé à Donald Trump.

La Russie s'est réveillée le matin du Noël orthodoxe avec des images diffusées en boucle par les chaînes de télévision publiques, titrées l'«Assaut du Capitole» ou «Chaos à Washington», accompagnées de musiques anxiogènes, montrant la foule en train de pénétrer dans le Capitole sous les tirs de gaz lacrymogène de membres des forces de l'ordre armes à la main.

Le Congrès américain a confirmé jeudi Joe Biden en tant que prochain président des États-Unis, mais plusieurs responsables russes estiment que les évènements mettent en lumière les échecs de la démocratie américaine.

«Le système électoral des États-Unis est archaïque, il ne répond pas aux normes démocratiques modernes (...) et les médias américains sont devenus un instrument de lutte politique», a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova.

«C'est en grande partie la raison de la division de la société observée actuellement aux Etats-Unis», a-t-elle ajouté, citée par les agences de presse russes.

Moscou s'est longtemps offusqué des critiques américaines sur l'état de la démocratie russe sous le président Vladimir Poutine, accusant Washington d'hypocrisie et de condescendance.

Plus un «phare de la démocratie»

Des responsables russes ont au contraire affirmé que les États-Unis avaient perdu toute légitimité à dispenser des enseignements démocratiques à d'autres pays.

«La partie perdante a des raisons plus que suffisantes d'accuser les gagnants de falsifications», a assuré sur Facebook Konstantin Kosatchev, le président de la commission des Affaires étrangères de la chambre haute du Parlement russe, «il est évident que la démocratie américaine boite des deux pieds».

«L'Amérique (...) n'a donc plus aucun droit de donner le cap. Et encore moins de l'imposer aux autres», a-t-il ajouté.

Il n'y a pas eu jeudi de réaction du Kremlin, mais de nombreux parlementaires soutenant le gouvernement ont commenté les évènements. 

Pour le président de la commission des Affaires étrangères de la chambre basse, Léonid Sloutsky, «les Etats-Unis ne peuvent certainement plus imposer de normes électorales à d'autres pays et prétendre être le +phare de la démocratie+ dans le monde».

L'opposition pas d'accord 

L'opposition au Kremlin n'est pas de cet avis.

«Les poutinistes triomphent en voyant les conflits aux États-Unis et font l'éloge de la "stabilité" russe», observait jeudi sur Twitter l'opposant Alexeï Navalny, qui se trouve à Berlin où il récupère de ce que les médecins allemands ont identifié comme une tentative d'empoisonnement à l'arme chimique après qu'il est tombé dans le coma dans un avion au-dessus de la Sibérie.

«Pour la Russie, il est bien sûr inconcevable que l'actuel président des États-Unis... tente de rester au pouvoir mais n'y parvienne pas», a ajouté Lioubov Sobol, une alliée de M. Navalny.

«C'est ça, le pouvoir de la démocratie», a ajouté sur Twitter cette opposante, qui fait l'objet de poursuites en Russie.

Le président Vladimir Poutine, au pouvoir depuis plus de 20 ans, a fait adopter en 2020 des amendements constitutionnels lui permettant le cas échéant de rester au Kremlin jusqu'en 2036

Anton Gorelkine, un député du comité des télécoms de la chambre basse, a de son côté félicité Twitter et Facebook pour la suspension des comptes de Donald Trump.

«Les réseaux sociaux doivent fonctionner en conformité avec règles strictes dans le cadre de la loi. Parce que la liberté absolue d'information devient une arme entre les mains des extrémistes», a-t-il déclaré sur sa chaîne Telegram. 

Les pays occidentaux critiquent régulièrement la Russie pour ses mesures visant à renforcer le contrôle des réseaux sociaux, très utilisés par l'opposition et en particulier par l'opposant n°1 au Kremlin, Alexeï Navalny. 

Washington a notamment accusé Moscou d'«intensifier la répression de sa société civile» au moment du récent vote d'une nouvelle loi durcissant les mesures contre les ONG et les médias considérés comme des «agents de l'étranger».

Le Kremlin a aussi été accusé d'avoir activement contribué aux divisions aux États-Unis. Washington a pris de multiples sanctions contre la Russie, notamment du fait de piratages informatiques et d'accusations d'ingérence dans la présidentielle de 2016.

Les relations entre Moscou et Washington se sont considérablement dégradées ces dernières années, avec plusieurs vagues de sanctions américaines contre la Russie, des conflits au sujet des traités de non-prolifération d'armes de destruction massive et des accusations d'attaques informatiques russes d'envergure.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.