WASHINGTON: Nouveau coup de théâtre à Washington: les conservateurs ont lancé vendredi une procédure pour destituer le chef de la Chambre des représentants, le républicain Mike Johnson, après un vote sur le budget du gouvernement qu'ils jugent bien trop dépensier.
L'élue Marjorie Taylor Greene, proche de Donald Trump, a déclaré avoir déposé une motion pour évincer le leader de l'institution, qu'elle a accusé de "trahison".
"Il nous faut un nouveau speaker", a-t-elle affirmé à des journalistes, accusant le responsable, seulement en poste depuis octobre, d'être dans les "bras des démocrates".
L'élue de Géorgie, bien connue pour ses frasques, ses provocations et ses remarques injurieuses, a justifié cette mesure en assurant que le budget de 1.200 milliards de dollars adopté par la Chambre plus tôt dans la journée ne défendait pas les intérêts de son parti.
Il est pourtant impératif pour les deux chambres du Congrès d'approuver ce texte avant minuit pour éviter un assèchement soudain des finances de l'Etat fédéral.
Cette paralysie, que les Américains surnomment "shutdown", n'est d'ailleurs toujours pas à exclure, puisque le calendrier est encore très flou sur la tenue d'un vote au Sénat, lui-même secoué par des mutineries républicaines.
Querelles
L'annonce par Marjorie Taylor Greene de la procédure de destitution a provoqué une onde de choc dans la capitale américaine.
Mais il n'est pas encore très clair quand cette mesure sera débattue, ni ses chances de succès.
Ce rebondissement, quoique spectaculaire, a aussi un véritable air de déjà vu.
L'ancien "speaker" de la Chambre, Kevin McCarthy, avait été destitué il y a seulement quelques mois dans un scénario très similaire.
Mike Johnson sera-t-il le deuxième leader républicain à faire les frais de tractations budgétaires?
La tension qui règne autour de l'adoption de ces lois de finances est telle, que les Etats-Unis ne sont pas parvenus jusqu'ici à adopter un quelconque budget pour 2024 -- une situation à laquelle aucune autre grande économie mondiale n'est confrontée.
Les parlementaires n'ont été capables pour l'instant que d'adopter une série de mini-lois pour prolonger le budget de l'Etat fédéral de quelques jours, quelques mois tout au plus.
Dès qu'un de ces mini-budgets est sur le point d'expirer, comme ce doit être le cas pour l'un d'entre eux vendredi, revient le risque que l'administration fédérale ne soit mise partiellement à l'arrêt.
Ce qui arriverait vendredi à minuit, sans vote du Sénat.
La liste des conséquences potentielles d'une paralysie de l'Etat est longue: des militaires et des agents de la sécurité des transports non payés, des administrations à l'arrêt, certaines aides gelées...
Une situation extrêmement impopulaire auprès des Américains et dont la plupart des effets se feraient sentir en début de semaine.
Fonds coupés pour l'Unrwa
S'il est finalement adopté, le projet de loi présenté jeudi prolongera le budget américain jusqu'à la fin de l'exercice financier, soit le 30 septembre.
Ce texte de 1.012 pages, fruit de tractations très acrimonieuses, contient des mesures qui auraient de fortes répercussions à l'étranger.
Le texte interdit ainsi tout financement direct des Etats-Unis à l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, l'Unrwa, au coeur d'une controverse depuis qu'Israël a accusé fin janvier 12 de ses quelque 13.000 employés à Gaza d'être impliqués dans l'attaque meurtrière du 7 octobre perpétrée par le Hamas.
Le projet de loi en débat vendredi contient aussi des centaines de millions de dollars pour Taïwan, mais ne débloque aucun financement pour l'Ukraine, l'enveloppe pour Kiev faisant l'objet de négociations séparées.
Le texte débattu vendredi contient aussi plusieurs mesures liées à l'immigration -- un sujet explosif en pleine campagne présidentielle -- et une litanie de mesures, pas forcément liées au budget.
Un texte adopté le 9 mars avait déjà permis de boucler une autre partie du budget de 2024.