PARIS: La France devrait réussir à repasser sous la barre de 2% d'inflation sans entrer en récession, selon les dernières prévisions de la Banque de France, qui prévoit cependant pour 2024 une croissance économique inférieure à celle sur laquelle table le gouvernement.
La banque centrale française, qui attendait jusqu'ici une progression de 0,9% du produit intérieur brut (PIB) cette année, l'a révisée mardi "très légèrement à la baisse", à 0,8%. Cela provient d'un "moindre acquis de croissance à l’issue du quatrième trimestre 2023", a-t-elle expliqué.
"C’est désormais confirmé: la France va échapper à la récession", déclare le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, dans une interview mardi soir au Figaro.
Cette prévision, qui constitue un très léger ralentissement par rapport au 0,9% de 2023, est surtout moins optimiste que celle du gouvernement, à 1%, sur laquelle repose son budget annuel. "Nos prévisions diffèrent désormais de seulement 0,2 point. Franchement, c’est dans la marge d’incertitude", estime M. Villeroy de Galhau
La juste évaluation de la croissance française en 2024 est un enjeu majeur pour le gouvernement, qui a déjà été contraint mi-février d'annoncer 10 milliards d'euros de coupes budgétaires lorsqu'il a révisé cet indicateur en baisse par rapport à sa prévision initiale de 1,4%.
Une nouvelle révision en baisse signifierait de nouvelles coupes, ou bien que la France ne respecterait pas son objectif de déficit public pour 2024 (4,4% du PIB), faute de recettes suffisantes.
Une situation "préoccupante" et "très sérieuse", a jugé mardi matin la Cour des comptes dans son rapport annuel. La juridiction estime elle aussi que les projections de croissance du gouvernement sont "optimistes", au point peut-être de compromettre la trajectoire "fragile" de retour du déficit public sous 3% du PIB en 2027.
«Rebond plus prononcé»
Prudente pour 2024, avec une prévision de +0,2% au premier trimestre, la Banque de France se montre en revanche confiante pour les années suivantes. Elle prévoit ainsi pour 2025 et 2026 "un rebond plus prononcé" qu'auparavant, "sous l’effet d’hypothèses plus favorables sur les prix de l’énergie et les conditions financières".
La banque centrale française prévoit désormais une croissance de 1,5% en 2025 (contre 1,3% initialement prévu) et 1,7% en 2026 (contre 1,6%). Ces prévisions se rapprochent donc davantage de celles du gouvernement, qui table sur 1,7% en 2025 et 2026.
Ce rebond de la croissance, couplé aux prévisions de la Banque de France sur le reflux de l'inflation, confirme le scénario de désinflation sans récession, en passant simplement par un stade d'activité ralentie en 2024.
L'institution prévoit, en effet, que l'inflation repasse début 2025 sous la barre de 2%, ce qui est la cible fixée par la Banque centrale européenne. En 2025 et 2026, elle devrait atteindre 1,7%, selon l'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) permettant la comparaison entre pays européens.
L'inflation reculerait déjà "sensiblement" cette année: elle devrait s'afficher à 2,5% en moyenne annuelle, estime la Banque de France, contre 5,7% en 2023.
«Hausses mesurées»
De façon générale, les "biens de consommation alimentaires et industriels" ne devraient connaître "que des hausses de prix mesurées en 2025-2026", prévoit-elle, "tandis que les prix finaux de l’énergie se replieraient sur ces deux années".
En dehors de l'énergie et de l'alimentation, les prix reflueront en revanche plus lentement, ce dont témoigne l'inflation sous-jacente, qui exclut les prix volatils de ces deux catégories:. Estimée à 2,4% cette année, elle devrait diminuer à 2,2% en 2025, pour ne repasser sous 2% qu'en 2026 (à 1,9%).
"Le prix des services ralentiraient plus tardivement, pour retrouver à l’horizon 2026 une inflation proche de sa moyenne 2002-2009 (à 2,6%)", note la Banque de France.
Pour les produits manufacturés, l'institution estime que "l’impact des tensions géopolitiques en mer Rouge sur les coûts des transports" pourrait "affecter les prix de détail au cours de la deuxième partie de l’année 2024, sans toutefois remettre en cause leur ralentissement".
La progression des salaires, ralentie par rapport à 2023 mais tout de même supérieure à celle des prix en 2024, redonnera un peu d'air aux ménages, qui verront leur pouvoir d'achat s'accroître.