Face au RN, les tâtonnements de la majorité à l'Assemblée

Le Premier ministre français Gabriel Attal (à droite) s'entretient avec des éleveurs de bovins lors d'une visite dans une ferme à Janvilliers, à environ 100 km à l'est de Paris, le 15 février 2024 (Photo, AFP).
Le Premier ministre français Gabriel Attal (à droite) s'entretient avec des éleveurs de bovins lors d'une visite dans une ferme à Janvilliers, à environ 100 km à l'est de Paris, le 15 février 2024 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 15 février 2024

Face au RN, les tâtonnements de la majorité à l'Assemblée

  • Depuis sa nomination à Matignon le 9 janvier, Gabriel Attal revendique de travailler avec "tout le monde" à l'Assemblée, car "l'arc républicain c'est l'hémicycle"
  • Mais les déclarations du nouveau Premier ministre sont loin de faire l'unanimité dans le camp présidentiel et n'empêchent pas les atermoiements persistants à l'Assemblée

PARIS: Le Rassemblement national dans l'arc républicain ? Les déclarations de Gabriel Attal ont semé le trouble au sein de la majorité, qui peine à se positionner face aux troupes de Marine Le Pen à l'Assemblée nationale.

A l'aile droite du camp présidentiel, le chef des députés Horizons Laurent Marcangeli est allé dans le sens du Premier ministre jeudi dans le quotidien L'Opinion. "Les gens en ont marre qu'on leur fasse la morale" sur le RN, juge ce proche d'Edouard Philippe.

"Il faut combattre électoralement" Marine Le Pen, mais pas s'opposer par principe aux propositions de son camp dans l'hémicycle, considère le député corse.

"Sur la loi immigration, le texte ne passait pas sans les voix du RN. Et ça ne m'a pas choqué", lâche-t-il. Soutenu par l'extrême droite, le projet de loi aurait aussi été adopté avec une abstention du groupe lepéniste, mais pas en cas de vote contre.

Depuis sa nomination à Matignon le 9 janvier, Gabriel Attal revendique de travailler avec "tout le monde" à l'Assemblée, car "l'arc républicain c'est l'hémicycle", à rebours de sa prédécesseure Elisabeth Borne qui en excluait le Rassemblement national et La France Insoumise.

"Je n'ai pas l'impression d'une doctrine différente d'avant", minimise un conseiller de l'exécutif.

Mais les déclarations du nouveau Premier ministre sont loin de faire l'unanimité dans le camp présidentiel et n'empêchent pas les atermoiements persistants à l'Assemblée.

A l'aile gauche du groupe Renaissance, l'ancienne ministre Nadia Hai prévient auprès de l'AFP: "on n'a aucune volonté de travailler aujourd'hui avec le RN. Pour nous, il y a une (...) barrière qui est dressée, qui est en béton armé, et ça ne changera pas".

Sous couvert d'anonymat un parlementaire évoque une "incompréhension" entre le groupe Renaissance et l'exécutif. "On n'a pas compris et on ne nous a pas clairement dit quelle est la stratégie face au RN. Le groupe est un peu perdu".

«Malaise»

Mardi soir lors de l'examen d'un texte sur les dérives sectaires, la secrétaire d'Etat Sabrina Agresti-Roubache s'est fait taper sur les doigts par les élus Renaissance, pour ne pas s'être opposée à des amendements du RN, contrairement à la rapporteure du texte Brigitte Liso.

"Moi le RN, je les bats dans les urnes", a fini par répliquer la ministre le lendemain, en semblant s'adresser à son camp.

Juste avant, la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot avait assuré qu'il n'y avait "pas de complaisance à l'endroit du RN".

La gauche, elle, s'engouffre dans la brèche. Depuis le début de la législature, elle ne cesse de reprocher aux macronistes de notabiliser l'extrême droite, en ayant par exemple laissé le RN accéder à deux postes de vice-présidents de l'Assemblée.

A la séance de questions au gouvernement mardi, un vif échange a opposé Gabriel Attal à la cheffe des députés écologistes Cyrielle Chatelain, chacun se renvoyant la responsabilité de la montée du RN, qui caracole dans les sondages, à quatre mois des européennes.

"Sur quelles voix comptez-vous lorsque vous présentez des motions de censure pour faire tomber le gouvernement ? (...) A force de faire l'appel du pied à l'extrême droite, vous en devenez leur marchepied", a lancé Gabriel Attal à la gauche.

Interrogée après cet échange, Cyrielle Chatelain estime avoir touché le "point sensible" des macronistes, un "malaise profond" du point de vue "moral et politique" sur "leur relation au RN".

Au Rassemblement national, on regarde de loin la querelle. Le parti à la flamme dénonce le "mépris" passé d'Elisabeth Borne, sans véritablement croire au changement de pied de Gabriel Attal.

"C'est la sinusoïdale Renaissance: +le RN est très méchant, puis finalement les Insoumis sont encore plus méchants (...). C'est les semaines A et les semaines B", balaie un député lepéniste.


Macron tous azimuts, Bayrou encalminé: semaine à deux vitesses pour l'exécutif

Vent dans les voiles après son weekend à Kiev, Emmanuel Macron plonge de plain-pied cette semaine dans la politique intérieure, avec en point d'orgue deux heures d'émission télévisée mardi soir. (AFP)
Vent dans les voiles après son weekend à Kiev, Emmanuel Macron plonge de plain-pied cette semaine dans la politique intérieure, avec en point d'orgue deux heures d'émission télévisée mardi soir. (AFP)
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  • Samedi avec Volodymyr Zelensky jouant la paix en Ukraine, mardi répondant aux questions du youtubeur Tibo InShape: Emmanuel Macron se démultiplie, quitte à tenter tous les grands écarts
  • Il s'est illustré à la manœuvre samedi à Kiev, lors d'un voyage commun avec les dirigeants allemand Friedrich Merz, britannique Keir Starmer et polonais Donald Tusk, plaidant pour un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours entre l'Ukraine et la Russie

PARIS: Vent dans les voiles après son weekend à Kiev, Emmanuel Macron plonge de plain-pied cette semaine dans la politique intérieure, avec en point d'orgue deux heures d'émission télévisée mardi soir. Offrant un contraste saisissant avec son Premier ministre, englué dans l'affaire Bétharram.

Samedi avec Volodymyr Zelensky jouant la paix en Ukraine, mardi répondant aux questions du youtubeur Tibo InShape: Emmanuel Macron se démultiplie, quitte à tenter tous les grands écarts.

Il s'est illustré à la manœuvre samedi à Kiev, lors d'un voyage commun avec les dirigeants allemand Friedrich Merz, britannique Keir Starmer et polonais Donald Tusk, plaidant pour un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours entre l'Ukraine et la Russie.

Après huit ans d'activité sur la scène internationale, et aux côtés de leaders moins expérimentés, le chef de l'Etat français a su aussi habilement gérer la mise en scène individuelle: dîner en tête-à-tête avec M. Zelensky et photo marquante des dirigeants debriefant avec Donald Trump autour du téléphone du Français sur haut-parleur.

Des gains politiques que M. Macron espère faire fructifier à domicile, après avoir atteint à l'automne dernier des records personnels d'impopularité, dans le sillage d'une dissolution ratée.

"Ce n'est pas la remontada" dans les sondages "et il ne peut pas se permettre de rester sur son Aventin", juge un ministre. Le même, constatant l'appétit retrouvé du président pour les moindres détails de la vie politique intérieure, glisse: "chassez le naturel, il revient au galop".

Lundi matin, il doit se rendre à Wissous (Essonne), pour l'inauguration d'un "laboratoire d'excellence" de l'entreprise franco-italienne EssilorLuxottica, leader mondial de l'optique. Un déplacement dans le cadre du raout annuel Choose France sur l'attractivité économique du pays, que M. Macron a initié et qu'il présidera le 19 mai.

Et si mercredi il devrait être sur le terrain dans le cadre des commémorations de l'attaque du péage d'Incarville qui avait coûté la vie à deux agents pénitentiaires, l'attention se concentre sur ses deux heures d'émission spéciale, titrée "Les défis de la France", mardi soir sur TF1.

Il y débattra notamment avec la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet et le maire de Béziers Robert Ménard, répondra à des questions de Français, ou à des interpellations du YouTubeur Tibo InShape ou du journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot.

Fraîcheur 

L'occasion de défendre le bilan, mais aussi de dresser "des perspectives car il reste deux ans de mandat", fait valoir son entourage. "Il a cette volonté de travailler jusqu'au dernier jour du quinquennat", complète une ministre de poids.

Au menu, des possibles référendums, alors qu'Emmanuel Macron avait indiqué lors de ses vœux pour 2025 que les Français seraient amenés à "trancher" sur des sujets déterminants. L'éventail de thèmes que le chef de l'Etat pourrait soumettre à consultation est large, de l'utilisation des écrans chez les jeunes à l'organisation territoriale, la droite poussant ardemment pour mettre sur la table l'immigration.

François Bayrou, lui, a proposé d'interroger les citoyens sur la trajectoire à venir des finances publiques, trois Français sur cinq s'y montrant favorables selon un sondage Elabe dimanche.

"C'est un des plus importants sujets que la nation a devant elle aujourd'hui. Je ne crois pas que la classe politique le traitera spontanément", fait-il valoir auprès de l'AFP, s'en remettant donc au "peuple des citoyens".

La suggestion de M. Bayrou a reçu un accueil tiède dans l'entourage de M. Macron, rappelant que le référendum reste une prérogative présidentielle. Signe de la fraîcheur d'une relation au sommet de l'exécutif faite de "hauts et de bas", dixit un proche du Premier ministre.

Difficile à ce titre de ne pas regarder les deux heures d'émission de M. Macron à l'aune de ce qui attend M. Bayrou le lendemain: son audition par une commission d'enquête de l'Assemblée sur les violences dans les établissements scolaires. En toile de fond, l'affaire Betharram qui lui colle aux doigts comme le sparadrap du capitaine Haddock, puisqu'il devra se défendre de sa connaissance de faits de violences sexuelles et physiques dans cet établissement au cœur de son fief des Pyrénées-Atlantiques.

Ce dossier mobilise son énergie - il dénonce des "accusations scandaleuses" - plombe sa popularité et alimente son procès en immobilisme. Une situation que semble vouloir exploiter le chef de l'Etat: "Bayrou dans ses tergiversations et sa lenteur, il donne de l’air à Macron", glisse un de ses fidèles.


Paris estime que la demande de révision de l'accord entre l'Union européenne et Israël est « légitime »

Des drapeaux palestiniens flottent au vent sur la place du Dam avec le Palais royal d'Amsterdam en arrière-plan (Paleis op de Dam), à Amsterdam, le 15 novembre 2024. (Photo de Simon Wohlfahrt / AFP)
Des drapeaux palestiniens flottent au vent sur la place du Dam avec le Palais royal d'Amsterdam en arrière-plan (Paleis op de Dam), à Amsterdam, le 15 novembre 2024. (Photo de Simon Wohlfahrt / AFP)
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  • « Les Pays-Bas ont demandé à la Commission européenne d'analyser le respect par le gouvernement israélien de l'article 2 de cet accord d'association avec Israël », a rappelé Jean-Noël Barrot, invité de France Info/Le Monde.
  • « C'est une demande légitime que j'invite la Commission européenne à instruire », a-t-il ajouté. 

PARIS : Invité de France Info/Le Monde, le ministre français des Relations avec le Parlement a estimé que la demande des Pays-Bas de réviser l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël était « légitime », invitant « la Commission européenne à instruire le dossier », alors que l'aide humanitaire ne parvient plus à Gaza depuis plus de deux mois.

« Les Pays-Bas ont demandé à la Commission européenne d'analyser le respect par le gouvernement israélien de l'article 2 de cet accord d'association avec Israël », a rappelé Jean-Noël Barrot, invité de France Info/Le Monde.

Celui-ci précise que les relations entre l'UE et Israël sont basées sur le respect des droits humains et des principes démocratiques.

« C'est une demande légitime que j'invite la Commission européenne à instruire », a-t-il ajouté. 

Interrogé sur le fait que cela signifiait-il que la France était favorable à la remise en question de cet accord, le ministre a répondu : « Attendons l'analyse que fera la Commission européenne du respect ou non par Israël de l'article 2 de cet accord. »

Le ministre a insisté sur la situation humanitaire catastrophique à Gaza.

« Je crois qu'il faut mettre des mots sur la réalité. La réalité, c'est que les Palestiniens de Gaza sont affamés, assoiffés, et qu'ils manquent de tout ; la bande de Gaza est aujourd'hui au bord du chaos et de la famine », a-t-il dénoncé.

« Je crois que tout le monde s'en aperçoit », a-t-il poursuivi. « On entend, y compris dans la communauté juive, des voix s'émouvoir de cette attitude incompréhensible du gouvernement israélien », a-t-il dit. « Et c'est en donnant de la voix qu'on peut espérer infléchir la position des Israéliens. » 

Mercredi, la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a proposé à Israël de l'aider à acheminer l'aide humanitaire à Gaza.

Le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Caspar Veldkamp, lui a adressé une lettre dans laquelle il réclame une révision de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël, conformément à son article 2.

« Je voudrais demander un examen du respect par Israël de l'article 2 dans les plus brefs délais », a écrit le ministre dans cette lettre.


Les Français favorables à l'organisation d'un référendum proposé par Bayrou

France's Prime Minister Francois Bayrou delivers a speech during commemorations to mark the National Day of Remembrance of Slavery and its Abolitions, in Brest, western France, on May 10, 2025. (Photo by Fred TANNEAU / AFP)
France's Prime Minister Francois Bayrou delivers a speech during commemorations to mark the National Day of Remembrance of Slavery and its Abolitions, in Brest, western France, on May 10, 2025. (Photo by Fred TANNEAU / AFP)
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  • Dans cette étude publiée après la proposition du Premier ministre François Bayrou d'interroger les Français sur la trajectoire à venir des finances publiques.
  • « Cette idée a pénétré l'opinion », s'est d'ailleurs félicité M. Bayrou samedi en marge d'un déplacement à Brest.

PARIS : D'après un sondage Elabe pour BFMTV publié dimanche, ils sont très majoritairement favorables à l'organisation d'un référendum (83 %) et placent l'économie, les retraites et l'immigration en tête des sujets sur lesquels ils aimeraient être questionnés.

Dans cette étude publiée après la proposition du Premier ministre François Bayrou d'interroger les Français sur la trajectoire à venir des finances publiques, plus d'un Français sur deux se dit favorable à l'organisation d'un référendum, et 28 % très favorable.

« Cette idée a pénétré l'opinion », s'est d'ailleurs félicité M. Bayrou samedi en marge d'un déplacement à Brest.

« Beaucoup de citoyens français disent oui au fond, que nous soyons pour une fois associés à ces décisions, c'est une chose qui nous intéresse et qui est très importante. Le monde politique est en revanche un peu moins enthousiaste, ce que l'on comprend assez bien : l'intervention directe des citoyens change le rapport de force et le débat », a encore observé le Premier ministre. 

Le président Emmanuel Macron avait également proposé d'organiser plusieurs scrutins de ce type dans ses vœux pour 2025. Il pourrait se montrer plus précis sur la question lors d'une émission spéciale sur TF1 mardi soir.

Parmi les sujets sur lesquels ils souhaitent se prononcer, les personnes interrogées citent en premier lieu la dépense, la dette et les impôts (59 %). Arrivent ensuite ex aequo les retraites et l'immigration (52 %). Ils sont 43 % à demander à être interrogés sur la fin de vie, 22 % sur la réduction du nombre d'échelons territoriaux et 19 % sur la proportionnelle.

En bas du tableau, on trouve les rythmes scolaires et l'usage des écrans et des réseaux sociaux pour les enfants (16 %).

Sondage réalisé en ligne les 6 et 7 mai auprès d'un échantillon de 1 000 personnes représentatives de la population âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. La marge d'erreur est comprise entre 1,4 et 3,1 points.