Macron rend hommage à Badinter, qui entrera au Panthéon

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Publié le Mercredi 14 février 2024

Macron rend hommage à Badinter, qui entrera au Panthéon

  • «Il était une âme qui crie, une force qui vit et arrache la vie aux mains de la mort», a déclaré le chef de l'Etat
  • Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure en a officiellement fait la demande au chef de l'Etat, dans un courrier révélé par le journal Libération

PARIS: Emmanuel Macron a annoncé mercredi le principe d'une entrée au Panthéon de Robert Badinter, en rendant un hommage national à celui qui porta l'abolition de la peine de mort et était "la République faite homme".

"Il était une âme qui crie, une force qui vit et arrache la vie aux mains de la mort", a déclaré le chef de l'Etat dans son discours sur la place Vendôme.

C'est dans ce lieu symbolique et inédit, devant le ministère de la Justice, que la France a salué la mémoire de l'ancien garde des Sceaux décédé la semaine dernière à l'âge de 95 ans. Là où le ministre du président socialiste François Mitterrand rédigea la loi abolissant le châtiment suprême, à rebours de l'opinion publique de l'époque.

L'entrée de son cercueil sur la place, depuis le ministère, est applaudie par la foule de plusieurs centaines de personnes venues assister à cette cérémonie ouverte au public, malgré une pluie fine. Tout comme la retranmission de ses mots historiques demandant, à la tribune de l'Assemblée nationale le 17 septembre 1981, "l'abolition de la peine de mort en France".

"Il a aussi beaucoup œuvré pour la dépénalisation de l'homosexualité et pour l'amélioration des conditions de vie dans les prisons. C'est un grand monsieur", dit Catherine Martin, une retraitée parisienne de 71 ans.

Le président de la République, lui, se fait solennel pour annoncer une prochaine panthéonisation, s'ajoutant à celles qu'il a décidées depuis 2017 pour Simone Veil, Maurice Genevoix, Joséphine Baker et, la semaine prochaine, les résistants Missak et Mélinée Manouchian.

"Votre nom devra s'inscrire aux côtés de ceux qui ont tant fait pour le progrès humain et pour la France et vous attendent, au Panthéon", a lancé le chef de l'Etat en présence de la philosophe Elisabeth Badinter, veuve de celui qui fut, selon les mots du président, "l'avocat pour toujours de cette cause, l'abolition".

"Le principe est acté. Il y aura une cérémonie de panthéonisation", a précisé l'entourage d'Emmanuel Macron à l'AFP, soulignant que la famille avait donné son accord mercredi matin. "La date et les modalités sont à discuter avec la famille."

Une panthéonisation peut se faire sous la forme d'une simple plaque au nom du défunt, d'un cénotaphe -- un monument funéraire qui ne contient pas de corps --, ou une inhumation.

Dès vendredi, à peine connue la nouvelle de sa mort, le président avait laissé planer la possibilité d'une entrée de l'avocat dans ce temple républicain qui proclame sur son fronton "Aux grands hommes, la patrie reconnaissante".

"C'est légitime" car au Panthéon ce sont "les grands hommes qui ont porté de grandes idées", a estimé mercredi sur franceinfo le président du Conseil Constitutionnel Laurent Fabius, fonction occupée par Robert Badinter de 1986 à 1995.

Badinter: Agresti-Roubache salue la «  décence » du RN et tacle LFI

La secrétaire d'Etat Sabrina Agresti-Roubache a dénoncé mercredi "le manque de décence absolue" de LFI qui a annoncé sa présence à l'hommage à Robert Badinter, contre la volonté de sa famille, en louant à l'inverse "la décence" du RN.

La famille de l'ancien ministre de la Justice décédé la semaine dernière a fait savoir qu'elle ne souhaitait pas la présence d'élus du Rassemblement national (RN) et de La France insoumise (LFI) à l'hommage national prévu mercredi.

Le RN a déclaré que Marine Le Pen et les autres élus de son parti invités avaient décidé de ne pas s'y rendre, conformément à la volonté de la famille.

La France insoumise a de son côté indiqué qu'elle serait représentée par deux de ses députés: Caroline Fiat, vice-présidente de l'Assemblée nationale et Éric Coquerel, président de la commission des Finances.

La décision du Rassemblement national est "une décision de décence, c'est le minimum", a réagi Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté et de la Ville sur CNews/Europe 1.

"Il faut respecter le souhait de la famille, dans un décès s'il y a bien quelque chose qu'il faut faire, c'est écouter le souhait de la famille donc (la décision de LFI, NDLR) c'est un manque de décence absolue", a-t-elle ajouté.

Polémique avec LFI

Le rendez-vous solennel de mercredi a eu lieu sur fond de polémique.

Elisabeth Badinter avait exprimé le souhait que les élus du Rassemblement national et de La France insoumise ne viennent pas à la cérémonie.

Marine Le Pen a accepté de se soumettre à cette demande, sans nier ses désaccords avec cette figure longtemps honnie à droite pour avoir aboli la peine de mort.

Réaction inverse pour LFI qui était représentée par ses députés Caroline Fiat et Eric Coquerel. "C'est un hommage national, je n'ai pas envie de polémiquer", s'est agacé à son arrivée le député insoumis de Seine-Saint-Denis.

Pourfendeuse des extrêmes comme son mari, Elisabeth Badinter a toujours combattu le Front national puis le RN, mais a aussi plus récemment dénoncé un certain "islamo-gauchisme" et pointé la responsabilité "énorme" de LFI dans la montée de l'antisémitisme en France.

Robert Badinter, né dans une famille juive émigrée de Bessarabie (l'actuelle Moldavie), avait été témoin de l'arrestation de son père à Lyon pendant la Seconde Guerre mondiale. Il était mort en déportation en Pologne.

Son combat contre la peine de mort trouve son origine au matin du 28 novembre 1972: un de ses clients, Roger Bontems, complice d'une prise d'otages meurtrière, vient d'être guillotiné.

"Le combat contre la mort devint sa raison d’être. Après Patrick Henry (l'assassin d'un enfant en 1976, ndlr), Robert Badinter sauva la tête de cinq autres condamnés", a rappelé mercredi Emmanuel Macron, faisant "le serment d'être fidèle" à son "enseignement".

Mais le président a aussi eu des mots sombres. "Vous nous quittez au moment où (...) vos idéaux, nos idéaux, sont menacés. L'universel qui fait toutes les vies égales. L'Etat de droit qui protège les vies libres".


Plusieurs centaines de personnes ont manifesté lors d'un rassemblement antifasciste à Paris

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  • Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée.
  • « Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle.

PARIS : Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée, pour laquelle six membres de l'ultradroite ont été inculpés, a constaté un journaliste de l'AFP.

« Paris, Paris, Antifa ! », « Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers », « Nous sommes tous antifascistes », ont scandé les manifestants réunis place de la République. Un drapeau rouge « No pasaran » a été accroché sur un flanc de la statue, au centre de la place emblématique.

Ce rassemblement se tient six jours après l'agression à l'arme blanche d'un homme membre du collectif Young Struggle, qui se présente comme une « organisation de jeunesse socialiste » et adhérent au syndicat CGT. Il avait dû être hospitalisé quelques heures.

Dimanche dernier, « une vingtaine de personnes » appartenant à la mouvance d'ultradroite, « cagoulées et munies de tessons de bouteille » selon la préfecture de police, avaient pénétré dans la cour d'un immeuble où se situe une association culturelle de travailleurs immigrés de Turquie et agressé une personne avant de prendre la fuite.

Six jeunes hommes ont été inculpés pour violences volontaires aggravées. L'un d'eux, qui avait du sang sur ses vêtements et qui a reconnu sa participation, a été incarcéré.

« Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle, avant de faire siffler le nom de Bruno Retailleau, ministre français de l'Intérieur et connu pour ses positions très conservatrices.

« Partout, l'extrême droite se répand, encouragée par les saluts nazis de Elon Musk et Steve Bannon », a déclaré à sa suite Mathilde Panot, cheffe des députés du parti de gauche radicale LFI (La France Insoumise).

Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump, a récemment été sous le feu des projecteurs pour un geste qualifié de salut nazi lors de la convention CPAC, la grand-messe des conservateurs américains près de Washington.

Il a brièvement tendu sa main en l'air après avoir déclaré devant les supporters de Donald Trump : « Nous n'allons pas reculer, nous n'allons pas capituler, nous n'allons pas abandonner. Luttez, luttez, luttez ! »

En janvier, le milliardaire Elon Musk, conseiller de Donald Trump, avait lui-même été épinglé pour un geste ambigu analogue.


Macron dira à Trump qu'entre alliés on ne peut pas "faire souffrir l'autre" avec des droits de douane

Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
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  • "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris
  • Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques

PARIS: "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris alors que Donald Trump menace d'imposer des droits de douane sur de multiples produits européens.

"Je vais (lui) en parler parce qu'on a besoin d'apaiser tout ça", a relevé le président français qui doit rencontrer son homologue américain lundi à Washington.

"La filière agricole et agroalimentaire (française), c'est une grande filière d'exportation, donc il faut la défendre pour la rendre encore plus compétitive", a-t-il ajouté.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques, c'est-à-dire que les États-Unis appliqueront le même niveau de droits de douane sur les produits en provenance d'un pays que le niveau appliqué dans ce pays aux produits américains.

Il a également annoncé le retour de droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Et, s'il a déjà visé le Canada, le Mexique et la Chine, il a régulièrement assuré que les pays européens étaient également menacés.

En France, les viticulteurs sont particulièrement inquiets d'un retour des droits de douane américains sur le cognac et le vin, qu'ils exportent en masse vers les États-Unis, d'autant que le cognac souffre déjà d'un différend commercial entre l'UE et la Chine, son premier marché en valeur.

"Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange" avec Donald Trump, a encore dit Emmanuel Macron. "On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine".

Le président américain est reparti à la charge vendredi contre son homologue ukrainien. Tout en estimant que Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine allaient "devoir se parler", pour "mettre fin au massacre de millions de personnes", il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'était "pas importante" dans des négociations avec la Russie.

Il a ciblé par ailleurs Emmanuel Macron, et Keir Starmer, qui n'ont selon lui "rien fait" pour mettre un terme à la guerre. Le Premier ministre britannique est attendu jeudi à Washington.


Au Salon de l'agriculture, Macron attendu au tournant

Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
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  • Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier
  • Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon

PARIS: Visites politiques encadrées et les vaches seront bien gardées? Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier.

Pas d'incitation à chahuter cette année, mais des appels au calme ambivalents de la part des principaux syndicats agricoles, qui doivent être reçus l'un après l'autre en début de matinée avant la traditionnelle coupe de ruban et la déambulation présidentielle.

Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon, qui ouvre ses portes au public à 09H00. En 2024, des milliers de personnes avaient été bloquées à l'extérieur pendant plusieurs heures en raison de heurts entre manifestants et CRS en marge de la venue d'Emmanuel Macron, entre huées, insultes, bousculades et violences.

Sécurité renforcée, commissariat mobile, chartes pour encadrer les visites politiques... Les organisateurs sont sur les dents pour ne pas voir se répéter le scénario catastrophe de l'an dernier.

L'entourage d'Emmanuel Macron lui a conseillé d'éviter une visite marathon, à l'image des 13 heures de déambulation de 2024 parmi les plus de 1.400 exposants et 4.000 animaux accueillis chaque année.

"Le président sera très probablement pris à parti", a averti Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, syndicat historique, qui l'attend sur les dossiers internationaux.

Cet automne, c'est l'opposition à l'accord de libre-échange UE-Mercosur qui a servi de cri de ralliement pour relancer les manifestations d'agriculteurs, qui dénoncent aussi les taxes douanières chinoises et craignent des mesures similaires de la nouvelle administration américaine.

"Je souhaite qu'il en parle à Donald Trump (...): arrêter les importations massives qui ne respectent pas nos normes, lever les contraintes qui nous empêchent d'être compétitifs", renchérit Pierrick Horel des Jeunes Agriculteurs, alliés de la FNSEA.

Pour Patrick Legras, porte-parole de la Coordination rurale, forte de sa percée aux élections professionnelles de janvier, "ça va être tendu". Selon lui, Emmanuel Macron va aussi avoir du mal à "expliquer qu'on négocie encore un accord pour importer du sucre ou du poulet d'Ukraine" — l'accord d'association UE-Ukraine, en cours de révision — évoquant des produits érigés en symboles d'une "concurrence déloyale".

Coutumière des actions coup de poing, la Coordination rurale a toutefois passé à ses sympathisants un message d'apaisement, dans l'espoir qu'Emmanuel Macron "aura vraiment quelque chose" à leur dire, selon sa président Véronique Le Floc'h.

- "Où sont les promesses?" -

Plus d'un an après la mobilisation qui avait bloqué routes et autoroutes, l'heure est au bilan des mesures obtenues par les agriculteurs qui réclament un revenu "décent", plus de considération et moins d'injonctions.

Pour le gouvernement, ses engagements ont été "honorés": "500 millions d'euros d'allégement de charges fiscales prévus dans le budget", "soutien à la trésorerie pour les agriculteurs en difficulté", "indemnisations à hauteur de 75 millions d'euros aux propriétaires du cheptel touché par les épizooties" ou encore "la mise en place du contrôle administratif unique en octobre dernier".

Surtout, deux jours avant le Salon, le Parlement a adopté la loi d'orientation agricole, attendue depuis trois ans par la profession. Ce texte érige l'agriculture au rang "d'intérêt général majeur", facilite les installations, la construction de bâtiments d'élevage et le stockage de l'eau, tout en dépénalisant certaines infractions environnementales.

"Un an après, où sont passés les prix plancher et ses promesses? Au Salon 2024, nous demandions des prix minimum garantis pour les producteurs: non seulement on n'a pas du tout avancé, mais la situation est pire aujourd'hui", s'indigne Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, troisième syndicat.

Elle estime que les demandes de l'alliance FNSEA-JA et de la CR ont été privilégiées, au détriment d'une "réelle transition agroécologique". Un argument repris par la gauche à propos de la loi d'orientation agricole.

Les personnalités politiques de tous bords devraient se succéder auprès de la vache limousine Oupette, égérie de l'édition 2025. Le Premier ministre François Bayrou est attendu lundi.

Malgré la volonté des organisateurs de limiter les visites à une journée pour chaque parti, Jordan Bardella (RN) a prévu de s'y rendre dimanche et lundi avec une délégation, comme en 2024, où les demandes de "selfies" avec le chef du parti d'extrême droite avaient contrasté avec la visite présidentielle.

En novembre, à la veille de nouvelles mobilisations paysannes, il s'était affiché dans le Lot-et-Garonne avec des cadres de la Coordination rurale, qui faisait campagne de son côté pour "dégager la FNSEA" des chambres d'agriculture.