Dans le grenier à céréales du Maroc, la sécheresse compromet la saison agricole

Le 7 février 2024, un agriculteur vérifie son champ de céréales à Berrechid, province marocaine historiquement riche en blé, située à environ 40 kilomètres au sud-est de Casablanca, alors que la sécheresse sévit depuis six années consécutives.  (Photo Fadel Senna AFP)
Le 7 février 2024, un agriculteur vérifie son champ de céréales à Berrechid, province marocaine historiquement riche en blé, située à environ 40 kilomètres au sud-est de Casablanca, alors que la sécheresse sévit depuis six années consécutives. (Photo Fadel Senna AFP)
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Publié le Dimanche 11 février 2024

Dans le grenier à céréales du Maroc, la sécheresse compromet la saison agricole

  • Le royaume enregistre depuis début janvier une pluviométrie en baisse de 44% par rapport à début 2023, avec en parallèle une hausse moyenne des températures de 1,8 degré par rapport à la période de 1981-2010, a indiqué récemment le ministre de l'Eau
  • Les agriculteurs, qui redoutaient ce nouvel épisode, avaient déjà diminué de moitié la superficie semée en céréales en novembre

BERRECHID, Maroc : «La récolte est déjà perdue». Abderrahim Mohafid a très peu d'espoir de sauver sa production de blé cette année, en raison de la rareté des pluies qui précipite le Maroc dans sa sixième année consécutive de sécheresse.

Sur la route menant à son hameau dans la province de Berrechid, au sud-est de Casablanca, les vastes champs sont anormalement nus.

Dans cette zone agricole réputée pour être le grenier céréalier du pays, «le blé devrait déjà être à 60 centimètres» à cette période, note amèrement M. Mohafid, 54 ans, en arpentant ses 20 hectares où presque rien n'a poussé.

A quelques kilomètres de son hameau de Oulad Mbarek, Hamid Najem est dans la même situation. Ses 52 hectares de blé tendre et d'orge «ne sont plus bons à rien».

«Nous n'avons jamais connu une année aussi dure», s'alarme ce quinquagénaire.

Plus de 88% des 155.000 hectares de la surface agricole de cette province ne sont pas irrigués et la majorité des agriculteurs y dépendent donc de la pluie, selon le ministère de l'Agriculture.

Mais le royaume enregistre depuis début janvier une pluviométrie en baisse de 44% par rapport à début 2023, avec en parallèle une hausse moyenne des températures de 1,8 degré par rapport à la période de 1981-2010, a indiqué récemment le ministre de l'Eau, Nizar Baraka.

Les barrages sont remplis à seulement 23%, contre environ 32% l'année dernière, et face aux risques de pénurie, les autorités marocaines ont restreint ces dernières semaines l'ouverture des hammams et des stations de lavage automobile dans plusieurs villes, ou interdit l'arrosage des golfs et jardins à l'eau potable.

- «Impact grave sur l'économie» -

Cette sixième année de sécheresse «compromet» la saison agricole, alerte l'agronome Abderrahim Handouf.

Les agriculteurs, qui redoutaient ce nouvel épisode, avaient déjà diminué la superficie semée en céréales en novembre (2,3 millions d'hectares emblavés contre quatre à cinq millions d'hectares en moyenne les années précédentes), explique-t-il à l'AFP.

D'après l'agronome, cette situation aura un «impact grave sur l'économie», dans un pays où l'agriculture emploie un tiers de la population et représente 14% des exportations, plus rémunératrices que le marché local.

Cette année, Abderrahim Mohafid espérait rattraper les difficultés accumulées les saisons précédentes en adoptant la technique du semis direct consistant à semer sans labour préalable de la terre, ce qui lui permet de préserver son humidité naturelle.

«La récolte est déjà perdue mais j'espère qu'il va pleuvoir en février et mars pour avoir au moins de quoi nourrir le bétail», confie-t-il.

L'horizon est moins sombre chez les grands exploitants comme Hamid Mechaal, qui peut compter sur l'irrigation pour sauver ses 140 hectares où il cultive du blé, de la carotte et de la pomme de terre, dans l'est de la province de Berrechid.

«Avec la sécheresse, on est obligés d'irriguer à 85% alors qu'avant, l'irrigation n'était que complémentaire», relève l'agriculteur, qui assure qu'il est approvisionné, comme 500 agriculteurs de la région, par une dotation fixe de 5.000 tonnes d'eau à l'hectare «pour mieux gérer» la précieuse ressource.

- «Revoir» la politique agricole -

L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) s'est toutefois alarmée d'une «intensification désordonnée de l'irrigation» dans la plaine de Berrechid ces deux dernières décennies.

«Entre 2007 et 2017, la production de carottes, par exemple, y a bondi de près de 500%», a-t-elle noté dans un rapport de novembre, soulignant que l'aquifère y était «l'une des plus dégradées» du pays.

Le modèle agricole marocain, axé depuis 15 ans sur l'exportation, soulève à nouveau des interrogations sachant que le pays fait face à «une offre hydrique en baisse absolue» et qu'il a misé sur des cultures gourmandes en eau, note l'agronome Mohamed Taher Srairi.

Les besoins nationaux sont estimés à plus 16 milliards de m3 d'eau, dont 87% pour le secteur agricole, mais n'a disposé que de cinq milliards ces cinq dernières années, selon M. Baraka.

Pour l'agronome Abderrahim Handouf, «la politique agricole devrait être revue de fond en comble».

«Aujourd'hui, j'ai l'impression que le gouvernement regarde dans un sens alors que la réalité est dans le sens opposé», regrette-t-il.


Liban: l'Union européenne annonce une aide d'un milliard d'euros pour soutenir l'économie

Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
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  • Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés
  • Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens

BEYROUTH: La cheffe de la Commission européenne a annoncé jeudi à Beyrouth une aide d'un milliard d'euros pour soutenir la "stabilité socio-économique" du Liban et appelé ce pays à bien coopérer dans la lutte contre l'immigration clandestine.

Les fonds seront "disponibles à partir de cette année jusqu’en 2027. Nous voulons contribuer à la stabilité socio-économique du Liban", a déclaré Ursula von der Leyen, ajoutant "compter sur une bonne coopération" des autorités libanaises dans la lutte contre l'immigration clandestine vers l'Europe.

Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens, soit le plus grand ratio par habitant au monde.

Le petit pays méditerranéen, frontalier de la Syrie, n'a de cesse d'exhorter la communauté internationale de les rapatrier, les armes s'étant tues dans plusieurs régions syriennes.

Les migrants, demandeurs d'asile et réfugiés qui quittent le Liban par bateau à la recherche d'une vie meilleure en Europe se dirigent souvent vers Chypre qui affirme être en première ligne face aux flux migratoires au sein de l'UE.

"La réalité actuelle de cette question est devenue plus grande que la capacité du Liban à la traiter", a déclaré le Premier ministre libanais Najib Mikati, lors d'une conférence de presse en présence de Mme. von der Leyen et du président chypriote Nikos Christodoulides.

Augmentation des ressortissants syriens à Chypre 

"Nous renouvelons notre demande à l'UE, (...) d’aider les personnes déplacées dans leur pays (d'origine et non au Liban), pour les encourager à rentrer volontairement", a-t-il poursuivi.

De son côté, Chypre, qui fait état d'une augmentation des arrivées de ressortissants syriens, estime que la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza, qui a déclenché des violences à la frontière israélo-libanaise, a affaibli les efforts de Beyrouth pour empêcher les départs.

De janvier à avril 2024, plus de 40 bateaux transportant environ 2.500 personnes ont accosté à Chypre, a indiqué à l'AFP l'agence de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Chypre avait conclu il y a des années avec le Liban un accord pour le retour de migrants en situation irrégulière.

Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés et de la manière de contrôler le flux migratoire vers son pays.


TotalEnergies: le gouvernement remonté contre un possible transfert de sa cotation à New York

Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
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  • Aujourd'hui, TotalEnergies a déjà des titres inscrits à Londres et à New York, mais de manière secondaire
  • M. Pouyanné avait notamment évoqué la frilosité de l'Europe vis-à-vis de sa stratégie qui consiste à continuer d'investir dans les énergies fossiles

PARIS: Confronté à la réflexion de TotalEnergies quant au transfert de la cotation principale du groupe à New York, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a affirmé jeudi qu'il comptait se battre pour que ce déménagement de la Bourse de Paris "n'ait pas lieu".

 

"Je suis là pour faire en sorte que ça n'ait pas lieu, parce que je pense que c'est une décision qui est grave", a déclaré M. Le Maire sur BFMTV/RMC.

"Est-ce que l'intérêt suprême de la nation est de garder le siège social de Total en France et la cotation principale de Total en France? Oui, et donc je me battrai pour ça", a-t-il ajouté.

"Nous avons besoin de Total", a-t-il souligné, mentionnant le plafonnement à moins de 2 euros du litre du carburant dans ses stations françaises.

L'affaire est partie des déclarations surprises de Patrick Pouyanné à l'agence Bloomberg. Dans un entretien publié le 26 avril, Patrick Pouyanné avait dit réfléchir à une cotation principale à la Bourse de New York. Près de la moitié de l'actionnariat de TotalEnergies est désormais constituée d'actionnaires institutionnels (fonds de pension, gestionnaires d'actifs, assureurs...) nord-américains.

"Ce n'est pas une question d'émotion. C'est une question d'affaires", avait ajouté le dirigeant de l'entreprise, tout en assurant que le siège social de ce fleuron du CAC 40 resterait bien à Paris.

Son argument principal: "une base d'actionnaires américains qui grossit", ce qui amène l'entreprise à s'interroger sur la façon de "donner accès plus facilement aux actions pour les investisseurs américains", a-t-il expliqué aux analystes, le 26 avril.

Appétit américain pour les fossiles 

Las du manque d'appétit des investisseurs européens pour le secteur pétrogazier, alors que le groupe estime investir beaucoup dans les énergies vertes, le PDG chercherait à se rapprocher des investisseurs américains moins contraints par des règles d'investissement durable.

"Les politiques au sens large ESG (environnement, social et de gouvernance, NDLR) en Europe ont plus de poids", a ainsi justifié M. Pouyanné lundi devant des sénateurs français.

Le PDG observe que "la base d'actionnaires européens de TotalEnergies diminue, notamment la base française" qui a reculé de "7% au cours des quatre dernières années, largement à cause des réglementations, de la pression qui est faite sur eux".

En filigrane, le patron pointe du doigt le changement en France du label Investissement socialement responsable (ISR), qui exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, une mesure décidée par Bercy lui-même fin 2023. Ahmed Ben Salem, analyste du groupe financier Oddo BHF, nuance ce point en indiquant que les fonds labellisés ISR représentaient 1,7% de l'actionnariat de TotalEnergies.

Pendant que l'UE muscle sa réglementation pour flécher les investissements vers la transition écologique, aux Etats-Unis la pression de certains Etats, comme le Texas, pour ne pas délaisser les entreprises d'énergies fossiles a poussé de grands gérants d'actifs à abaisser leurs ambitions climatiques.

"Nous observons clairement plus d'appétit pour les actions d'entreprises des secteurs énergétique, pétrole et gaz du côté de l'Amérique du Nord qu'en Europe", a dit M. Pouyanné aux analystes.

Conséquence de ce manque d'appétit: une valorisation moins importante. TotalEnergies avance "exactement les mêmes résultats trimestriels qu'une entreprise comme Chevron". Le groupe énergétique américain est valorisé 300 milliards de dollars en Bourse, contre 175 milliards pour TotalEnergies.

Le mirage d'un marché européen 

La faute au cloisonnement des marchés financiers en Europe, selon M. Le Maire, qui avait dans un premier temps estimé dimanche sur LCI qu'il fallait offrir à TotalEnergies "les moyens de se développer" en accélérant sur l'union des marchés de capitaux (UMC) dans l'UE.

L'UMC permettrait d'augmenter la taille du marché boursier européen pour que les entreprises s'y financent davantage. Ahmed Ben Salem n'est cependant pas convaincu des changements éventuels pour TotalEnergies: "Il faut des acheteurs sur le secteur, pas seulement des liquidités."

La moindre valorisation de TotalEnergies "est aussi subie par les autres majors européennes", explique-t-il à l'AFP, citant l'exemple du britannique Shell qui "est dans la même réflexion" concernant une cotation principale à New York.

Au Sénat, le patron n'a pas exclu de reconsidérer la question si "plus d'actionnaires européens (...) rachètent du TotalEnergies".


Microsoft signe un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable Brookfield

Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
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  • L'accord prévoit le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030
  • L'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé, va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques

SAN FRANCISCO: Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe.

Cet accord qualifié de "première" prévoit, selon Brookfield, le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030.

Il met également en lumière les importants investissements réalisés par les plus grands groupes mondiaux afin d'atteindre leur objectifs en terme d'énergie propre tout en restant compétitif dans la course au développement de l'intelligence artificielle (IA).

Car l'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé (cloud), va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques, alors qu'ils multiplient les centres de données, particulièrement énergivores, augmentant leur dépendance vis-à-vis des fournisseurs d'énergie traditionnels.

"Cette collaboration avec Brookfield vient soutenir le développement innovant de réseaux d'énergies plus variées au niveau mondial et va contribuer à atteindre notre objectif de 100% de notre consommation d'électricité décarbonnée, 100% du temps, d'ici à 2030", a assuré le directeur des énergies renouvelables chez Microsoft, Adrian Anderson.

Les conditions financières de l'accord n'ont pas été précisées, alors que la puissance prévue pour le parc pourrait potentiellement fournir en énergie l'équivalent de millions de foyers.

L'accord devrait également permettre à Brookfield d'augmenter ses actifs en projets éoliens et solaires aux Etats-Unis, en Europe et dans d'autres régions dans les prochaines années.

L'entreprise s'est dite "ravie de collaborer avec Microsoft pour répondre à la demande de leurs clients avec la construction d'une capacité dépassant 10,5 GWt en énergie renouvelable", a déclaré Connor Teskey, directeur général de l'unité des énergies renouvelables de Brookfield.

L'échelle de l'accord, près de huit fois plus gros que le plus important accord entreprise signé jusqu'ici en terme d'achat d'énergie renouvelable, vient souligner la montée en puissance de Brookfield ainsi que la capacité d'achat de Microsoft.

Le cadre de l'accord se fonde sur les échanges déjà existants entre les deux groupes, qui vont être étendus plus de 10 fois plus en termes de capacité renouvelable entre 2026 et 2030.

Si l'accord prévoit dans un premier lieu du solaire et de l'éolien, il sera étendu à d'autres technologies permettant de fournir de l'électricité décarbonnée, en particulier lorsque le vent ou le soleil n'en fournira pas suffisamment.

Comme Microsoft, Google, Amazon et Meta figurent désormais parmi les plus grosses entreprises acheteuses d'énergie propre, afin d'atteindre leurs engagements de neutralité carbone.