PARIS: Ce devait être une formalité, c'est devenu un casse-tête. La composition de la deuxième moitié du gouvernement de Gabriel Attal est désormais espérée pour mercredi, avec la mise à l'écart probable d'Amélie Oudéa-Castéra de l'Education et l'inconnue François Bayrou qui complique les "équilibres".
C'est une constante dans les remaniements sous la présidence d'Emmanuel Macron: ils prennent toujours plus de temps que prévu.
D'abord promise autour du 20 janvier, la liste de la quinzaine de membres du gouvernement appelés à prêter main forte aux 14 ministres déjà nommés était finalement escomptée lundi, puis mardi, et maintenant "plutôt mercredi après-midi", selon l'entourage du chef de l'Etat, tout en restant "prudent".
"Ce sera annoncé dans les prochaines heures", a assuré sur Europe 1 la ministre chargée de l'Egalité femmes/hommes Aurore Bergé.
Soit quasiment un mois après la nomination du Premier ministre, un délai long pendant lequel des dossiers importants (Santé, Transports, Logement...) sont restés sans interlocuteur dédié.
Même à quelques heures du possible dénouement, très peu d'informations filtraient.
Pour la plupart des sources au sein du camp présidentiel, un point sensible semble avoir été tranché: après l'avoir longtemps soutenue, Emmanuel Macron se serait résolu à écarter Amélie Oudéa-Castéra du ministère prioritaire de l'Education nationale, après les polémiques nées de ses critiques contre l'école publique pour justifier la scolarisation de ses enfants dans le privé.
"Je souhaite son départ car je pense que l'Education nationale est une grande priorité", a déclaré sur Sud Radio le député Rassemblement national Jean-Philippe Tanguy, jugeant, à l'unisson des syndicats et des autres oppositions, qu'elle "n'a plus la confiance des enseignants".
"AOC" pourrait être rétrogradée pour ne garder qu'une partie de ses attributions, notamment les Jeux olympiques.
Candidat «surprise» à l'Education?
Le président avait même en tête, dès lundi soir, un candidat "surprise" pour porter les vastes chantiers autour de l'école, assure un proche.
Mais après sa relaxe judiciaire lundi, François Bayrou s'est invité dans "l'équation à mille équilibres", comme la nomme un conseiller élyséen. "Et comme en maths, quand on commence à ajouter une inconnue, ça devient plus rock", glisse-t-il.
Le président du MoDem, allié d'Emmanuel Macron depuis son ascension vers l'Elysée, a clairement fait des offres de service pour revenir au gouvernement dont il avait été écarté après quelques semaines seulement en 2017 en raison de ses ennuis judiciaires. Et son nom a donc commencé à circuler avec insistance pour reprendre l'Education, dont il fut déjà le ministre dans les années 1990.
Le dirigeant centriste "ne manque pas de titres pour rétablir une relation de travail et de confiance avec les organisations professionnelles", a encore plaidé mercredi matin le député MoDem Jean-Louis Bourlanges sur France Inter.
A moins qu'il hérite d'un autre portefeuille important, quitte à provoquer un jeu de chaises musicales plus vaste qu'attendu. Quoi qu'il en soit, "évidemment François Bayrou a parfaitement sa place dans un gouvernement, c'est le moins qu'on puisse dire", a dit sur franceinfo le député Renaissance Eric Woerth.
Va-t-il faire son grand retour? "Plus ça va, moins c'est clair", ironise un proche du leader centriste, tout en laissant entendre qu'il n'avait, à ce stade, pas été éconduit par Emmanuel Macron et Gabriel Attal, qu'il a rencontrés successivement lundi et mardi.
Cela compliquerait les équilibres partisans entre Renaissance, la formation du président, et ses alliés, le MoDem et Horizons, le parti de l'ex-Premier ministre Edouard Philippe. Mais aussi la recherche de la parité hommes/femmes.
Le duo exécutif doit aussi tenter de bien représenter les territoires dans une équipe jusqu'ici perçue comme trop francilienne. Privé de majorité absolue à l'Assemblée nationale, il espère recruter un ou plusieurs sénateurs, éventuellement venus de la droite, selon plusieurs sources au fait des tractations. Mais l'aile gauche de la macronie veille aussi à ne pas se retrouver lésée après la droitisation du gouvernement Attal première version.
Autant de difficultés qui ont jusqu'ici fait jouer la montre au chef de l'Etat.
Un tel délai, "c'est inédit", a constaté son prédécesseur socialiste François Hollande sur franceinfo. "Sur le logement, sur la santé, sur des questions de transport, il est nécessaire d'avoir des ministres ou alors il faut supprimer les gouvernements", a-t-il ajouté.