Un haut responsable de l’ONU prévient le Conseil de sécurité du danger «très réel» d’horreurs à Gaza

Cette photo prise le 5 janvier 2024 montre la mosquée Omari de la ville de Gaza, la plus ancienne mosquée de Gaza, endommagée par les bombardements israéliens lors des combats actuels entre Israël et le mouvement palestinien Hamas. (AFP)
Cette photo prise le 5 janvier 2024 montre la mosquée Omari de la ville de Gaza, la plus ancienne mosquée de Gaza, endommagée par les bombardements israéliens lors des combats actuels entre Israël et le mouvement palestinien Hamas. (AFP)
Ilze Brands Kehris, Sous-Secrétaire générale aux droits humains et directrice du Bureau des Nations Unies (AFP)
Ilze Brands Kehris, Sous-Secrétaire générale aux droits humains et directrice du Bureau des Nations Unies (AFP)
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Publié le Samedi 13 janvier 2024

Un haut responsable de l’ONU prévient le Conseil de sécurité du danger «très réel» d’horreurs à Gaza

  • Contraindre les Palestiniens à évacuer leur terre pourrait équivaloir à un transfert forcé et constituer un «crime de guerre», a déclaré Ilze Brands Kehris, Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme
  • Le directeur des affaires humanitaires de l'ONU, Martin Griffiths, réitère son appel à un cessez-le-feu et au Conseil afin qu'il prenne des mesures urgentes pour mettre un terme à la guerre

NEW YORK: Les «déclarations incendiaires» de certains dirigeants israéliens appelant à la réinstallation permanente des Palestiniens dans d’autres pays ont fait craindre qu’ils ne soient délibérément forcés de quitter Gaza, et ne soient pas autorisés à y revenir. Un haut responsable des droits de l’homme de l’ONU a prévenu vendredi le Conseil de sécurité que «cela ne devait pas être permis», et que contraindre les Palestiniens à évacuer leur terre pourrait équivaloir à un crime de guerre.

Ilze Brands Kehris, Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme, a déclaré aux membres du Conseil que «l'horreur des attentats du 7 octobre, pour lesquels il doit y avoir une reddition des comptes, ne sera pas oubliée.»

Cependant, la menace d’un déplacement forcé revêt «un écho particulier» auprès des Palestiniens, a-t-elle ajouté.

«Cela est gravé dans la conscience collective palestinienne par ce qu’ils appellent la Nakba, ou «catastrophe», de 1948, lorsque des millions de Palestiniens ont été forcés de quitter leurs foyers», a-t-elle expliqué.

Ilze Brands Kehris s'exprimait lors d'une réunion du Conseil de sécurité, à la demande de l'Algérie, pour discuter de la menace de déplacement forcé à Gaza pour les Palestiniens.

Elle a expliqué que les déplacements massifs ont commencé le 12 octobre lorsque les autorités israéliennes ont ordonné aux civils vivant au nord de Wadi Gaza de quitter leurs maisons et de se diriger vers le sud, avant le lancement de l’offensive militaire israélienne.

«Même si Israël a déclaré que ses ordres d'évacuation visaient à assurer la sécurité des civils palestiniens, il semble qu'Israël a pris peu de mesures pour garantir que ces réinstallations soient conformes au droit international, en particulier en garantissant l'accès à des soins d'hygiène, de santé, de sécurité, de nourriture et d'hébergement appropriés, et en prenant des mesures pour minimiser le risque de séparation des membres des familles», a précisé Ilze Brands Kehris.

«De telles évacuations forcées, qui ne remplissent pas les conditions conformes à la légalité, constituent donc potentiellement un transfert forcé: un crime de guerre.

«Ces ordres ont souvent prêté à confusion, exigeant des civils de se déplacer vers des soi-disant «zones humanitaires» ou des «abris connus», malgré le fait que de nombreuses zones de ce type ont été par la suite frappées au cours des opérations militaires israéliennes, de même que le manque de capacité de ces abris à accueillir davantage de personnes.»

Plus de 90 % de la population de Gaza souffre d’une insécurité alimentaire aiguë, a-t-elle ajouté, dont un grand nombre sont au bord d’une famine «évitable, provoquée par l’homme.» Elle a mis l’accent sur le fait qu’affamer une population civile comme tactique de guerre était interdit par le droit international.

«Le taux élevé inacceptable de victimes civiles, la destruction presque complète des infrastructures civiles essentielles, le déplacement d'un pourcentage impressionnant de la population et les conditions humanitaires horribles que 2,2 millions de personnes sont forcées d’endurer donnent lieu à de très sérieuses inquiétudes quant à la perpétration potentielle de crimes de guerre, alors que le risque de nouvelles violations graves, voire d’atrocités, est bien réel», a affirmé Ilze Brands Kehris.

«La perspective de famine et de maladies généralisées, sachant que les Palestiniens sont entassés dans les plus petites parcelles de la bande de Gaza, le long de la frontière égyptienne, dans des conditions humanitaires désastreuses de surpopulation, avec une aide insuffisante et une rupture de la fourniture des services de base, tandis que le centre de Gaza et Khan Younès sont toujours sujets à des bombardements aériens permanents, accroît les risques de nouveaux déplacements massifs à une échelle toujours plus grande, potentiellement même au-delà des frontières de Gaza. Avec des gens ayant désespérément besoin d’un abri sûr et sécurisé, c’est là un danger dont le conseil doit être conscient.

Le droit des Palestiniens au retour dans leurs foyers doit être l’objet d’«une garantie à toute épreuve», a-t-elle ajouté.

Martin Griffiths, directeur des affaires humanitaires de l’ONU, a prévenu les membres du Conseil que toute tentative visant à modifier la démographie de Gaza devait être «fermement rejetée.» Il a décrit la guerre dans l’enclave comme étant menée sans «quasiment aucune considération pour son impact sur les civils.»

Depuis près de 100 jours, a-t-il affirmé, les opérations militaires incessantes d’Israël ont entraîné des dizaines de milliers de morts et de blessés, dont une majorité de femmes et d’enfants. Le déplacement forcé de 1,9 million de civils, soit 85 % de la population totale, a contraint des personnes traumatisées à fuir à plusieurs reprises, sous une pluie de bombes et de missiles, a-t-il ajouté.

Martin Griffiths a décrit en détail les abris surpeuplés, l’épuisement des réserves de nourriture et d'eau, ainsi que le risque croissant de famine. Il a indiqué que le système de santé à Gaza était sur le point de s’écrouler, avec comme conséquence le fait qu’il devient risqué pour les femmes d’accoucher, pour les enfants d’être vaccinés, et pour les malades et les blessés de recevoir des soins. Les maladies infectieuses sont en augmentation, a-t-il ajouté, obligeant les gens à se réfugier dans les enceintes des hôpitaux.

«Il n’y a aucun endroit sûr à Gaza», a soutenu Griffiths. «Une vie humaine digne est quasiment impossible.»

Les efforts visant à envoyer des convois humanitaires vers le nord de Gaza se heurtent à des retards ou à des refus d'autorisation, mettant ainsi les membres des équipes humanitaires en danger, a-t-il ajouté.

«Le manque de respect du système de notification humanitaire met en danger toute action des travailleurs humanitaires», a-t-il déclaré.

«Les collègues qui ont réussi à gagner le nord ces derniers jours décrivent des scènes d'horreur absolue: des cadavres laissés sur la route, des gens présentant des signes évidents de famine arrêtant des camions, à la recherche de tout ce qui pourrait leur permettre de survivre.

«Et même si les gens pouvaient rentrer chez eux, un grand nombre d’entre eux n’auraient plus de logement où aller.»

La fourniture d’une aide humanitaire dans Gaza est considérée comme presque impossible, a indiqué Griffiths, compte tenu de l’accès limité aux domaines vitaux. Il a mis en garde sur le fait que la poursuite de l'extension des hostilités plus au sud pourrait entraîner des déplacements massifs vers les pays voisins, suscitant des inquiétudes quant à d'éventuels transferts forcés de population ou à des déportations.

Martin Griffiths a réitéré son précédent appel à «un bien plus important respect du droit humanitaire international, notamment la protection des civils et des infrastructures dont ils dépendent, la fourniture des éléments essentiels à la survie, la facilitation de l'aide humanitaire à l'échelle requise, ainsi que le traitement humain et la libération immédiate de tous les otages.» 

Il a également réitéré son appel à un cessez-le-feu, et au Conseil de sécurité afin qu’il prenne des mesures urgentes pour mettre un terme à la guerre.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Parlement libanais approuve un projet de loi sur le secret bancaire

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
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  • La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise
  • Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière

BEYROUTH: Le Parlement libanais a approuvé jeudi un projet de loi sur la levée du secret bancaire, une réforme clé réclamée par le Fonds monétaire international (FMI), au moment où des responsables libanais rencontrent à Washington des représentants des institutions financières mondiales.

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise imputée à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a désormais besoin de fonds pour la reconstruction.

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière.

Ces organismes pourront avoir accès à des informations telles que les noms des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

Le Liban applique depuis longtemps des règles strictes en matière de confidentialité des comptes bancaires, ce qui, selon les critiques, rend le pays vulnérable au blanchiment d'argent.

En adoptant ce texte, le gouvernement avait précisé qu'il s'appliquerait de manière rétroactive pendant 10 ans. Il couvrira donc le début de la crise économique, lorsque les banquiers ont été accusés d'aider certaines personnalités à transférer d'importantes sommes à l'étranger.

Le feu vert du Parlement coïncide avec une visite à Washington des ministres des Finances, Yassine Jaber, et de l'Economie, Amer Bisat, ainsi que du nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid, pour des réunions avec la Banque mondiale et le FMI.

M. Jaber a estimé cette semaine que l'adoption des amendements donnerait un "coup de pouce" à la délégation libanaise.

En avril 2022, le Liban et le FMI ont conclu un accord sous conditions pour un programme de prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord avec Beyrouth après des discussions avec M. Jaber. Le nouveau gouvernement libanais s'est engagé à mettre en oeuvre d'autres réformes et a également approuvé le 12 avril un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.


Syrie: Londres lève ses sanctions contre les ministères de la Défense et de l'Intérieur

Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
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  • "Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor
  • Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier

LONDRES: Le Royaume-Uni a annoncé jeudi avoir levé ses sanctions contre les ministères syriens de l'Intérieur et de la Défense ainsi que contre des agences de renseignement, qui avaient été imposées sous le régime de Bachar al-Assad.

"Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor.

Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier.

Ces autorités, issues de groupes rebelles islamistes, ont pris le pouvoir le 8 décembre.

Le Royaume-Uni avait début mars déjà levé des sanctions à l'égard de 24 entités syriennes ou liées à la Syrie, dont la Banque centrale.

Plus de trois cents individus restent toutefois soumis à des gels d'avoirs dans ce cadre, ainsi qu'une quarantaine d'entités, selon le communiqué du Trésor.

Les nouvelles autorités syriennes appellent depuis la chute d'Assad en décembre dernier à une levée totale des sanctions pour relancer l'économie et reconstruire le pays, ravagé après 14 années de guerre civile.


1983 – L'attaque contre les Marines américains à Beyrouth

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  • Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines
  • Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang

BEYROUTH: Le 23 octobre 1983, aux alentours de 6h25, une violente déflagration secoue Beyrouth et sa banlieue, jusque dans les hauteurs montagneuses. Le souffle, sourd et diffus, fait d’abord penser à un tremblement de terre.

Mais sept minutes plus tard, une seconde explosion, bien plus puissante, déchire la ville et ses environs, dissipant toute confusion: Beyrouth venait de vivre l’un des attentats les plus meurtriers de son histoire.

Je travaillais alors pour le journal libanais As-Safir en tant que correspondant de guerre. Beyrouth était assiégée, dans sa banlieue sud, dans les montagnes et dans la région du Kharoub, par des affrontements entre le Parti socialiste progressiste et ses alliés d'une part, et les Forces libanaises d'autre part, dans ce que l'on appelait la «guerre des montagnes».

Le sud du pays a également été le théâtre de la résistance armée des combattants libanais contre l'occupation israélienne. Ces combattants étaient liés à des partis de gauche et, auparavant, à des factions palestiniennes.

Des forces multinationales, notamment américaines, françaises et italiennes, avaient été stationnées à Beyrouth après le retrait des dirigeants et des forces de l'Organisation de libération de la Palestine, à la suite de l'agression israélienne contre le Liban et de l'occupation de Beyrouth en 1982.

Quelques minutes après les explosions, la réalité s’impose avec brutalité: le quartier général des Marines américains, situé sur la route de l’aéroport de Beyrouth, ainsi que la base du contingent français dans le quartier de Jnah, ont été ciblés par deux attaques-suicides coordonnées.

Les assaillants, non identifiés, ont lancé des camions piégés – chargés de plusieurs tonnes d’explosifs – contre les deux sites pourtant fortement sécurisés, provoquant un carnage sans précédent.

Comment nous l'avons écrit

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Au lendemain des attentats, Arab News faisait état de 120 morts parmi les Marines et de 20 morts parmi les Français, un chiffre nettement inférieur au décompte final.

L'attaque de la base américaine a tué 241 militaires américains – 220 Marines, 18 marins et trois soldats – et en a blessé des dizaines. Le bombardement du site militaire français a tué 58 parachutistes français et plus de 25 Libanais.

Ces attentats étaient les deuxièmes du genre à Beyrouth; un kamikaze avait pris pour cible l'ambassade des États-Unis à Aïn el-Mreisseh six mois plus tôt, le 18 avril, tuant 63 personnes, dont 17 Américains et 35 Libanais.

Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines. Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang, des morceaux de corps et de la confusion. Voici ce que nous, journalistes, avons pu voir au milieu du chaos qui régnait immédiatement après la catastrophe, et ce qui reste gravé dans ma mémoire plus de 40 ans plus tard.

La nuit précédente, un samedi, les Marines avaient fait la fête, divertis par un groupe de musique qui avait fait le voyage depuis les États-Unis pour se produire devant eux. La plupart dormaient encore lorsque la bombe a explosé.

Aucun groupe n'a revendiqué les attentats ce jour-là, mais quelques jours plus tard, As-Safir a publié une déclaration qu'il avait reçue et dans laquelle le «Mouvement de la révolution islamique» déclare en être responsable.

Environ 48 heures après l’attentat, les autorités américaines pointent du doigt le mouvement Amal, ainsi qu’une faction dissidente dirigée par Hussein al-Moussawi, connue sous le nom d’Amal islamique, comme étant à l’origine de l’attaque.

Selon la presse locale de l’époque, la planification de l’attentat aurait eu lieu à Baalbeck, dans la région de la Békaa, tandis que le camion utilisé aurait été aperçu garé devant l’un des bureaux du mouvement Amal.

Le vice-président américain, George H.W. Bush, s'est rendu au Liban le lendemain de l'attentat et a déclaré: «Nous ne permettrons pas au terrorisme de dicter ou de modifier notre politique étrangère.»

La Syrie, l'Iran et le mouvement Amal ont nié toute implication dans les deux attentats.

En riposte à l’attaque visant leurs soldats, les autorités françaises ont lancé une opération militaire d’envergure: huit avions de chasse ont bombardé la caserne Cheikh Abdallah à Baalbeck, que Paris considérait comme un bastion de présences iraniennes.

À l’époque, les autorités françaises ont affirmé que les frappes avaient fait environ 200 morts.

Un responsable de l'Amal islamique a nié que l'Iran disposait d'un complexe dans la région de Baalbeck. Toutefois, il a reconnu le lien idéologique fort unissant son groupe à Téhéran, déclarant: «L’association de notre mouvement avec la révolution islamique en Iran est celle d’un peuple avec son guide. Et nous nous défendons.»

Le 23 novembre, le cabinet libanais a décidé de rompre les relations avec l'Iran et la Libye. Le ministre libanais des Affaires étrangères, Elie Salem, a déclaré que la décision «a été prise après que l'Iran et la Libye ont admis qu'ils avaient des forces dans la Békaa».

Un rapport d'As-Safir cite une source diplomatique: «Les relations avec l'Iran se sont détériorées en raison des interventions, pratiques et activités illégales qu'il a menées sur la scène libanaise, malgré de nombreux avertissements.»

Les attentats du 23 octobre étaient jusqu'alors le signe le plus évident de l'évolution de l'équilibre des forces régionales et internationales au Liban et de l'émergence d'un rôle iranien de plus en plus important dans la guerre civile.

Le chercheur Walid Noueihed m'a expliqué qu'avant 1982, Beyrouth avait accueilli toutes les formes d'opposition, y compris l'élite éduquée, appelée «opposition de velours», et l'opposition armée, dont les membres étaient formés dans des camps ou des centres d'entraînement palestiniens dans la vallée de la Békaa et au Liban-Sud.

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Vue aérienne de l'ambassade américaine à Beyrouth après l'explosion qui a fait 63 morts, dont 46 Libanais et 17 Américains. (AFP)

Il a indiqué que l'opposition iranienne au chah était présente parmi ces groupes et a décrit Beyrouth comme une oasis pour les mouvements d'opposition jusqu'en 1982. Toutefois, cette dynamique a changé lorsqu'Israël a envahi le Liban et assiégé Beyrouth, ce qui a entraîné le départ de l'OLP en vertu d'un accord international qui exigeait en échange qu'Israël s'abstienne de pénétrer dans Beyrouth.

Si les factions palestiniennes ont quitté le Liban, ce n'est pas le cas des combattants libanais associés à l'OLP, pour la plupart des chiites qui constituaient la base des partis de gauche libanais.

Les attaques contre les bases militaires américaines et françaises ont entraîné le retrait des forces internationales du Liban, explique M. Noueihed, laissant une fois de plus Beyrouth sans protection. Les opérations de résistance se sont multipliées, influencées par des idéologies distinctes de celles de la gauche traditionnelle, des groupes comme l'Amal islamique affichant ouvertement des slogans prônant la confrontation avec Israël.

En 1985, le Hezbollah est officiellement créé en tant qu'«organisation djihadiste menant une révolution pour une république islamique». Il s'est attiré le soutien des partis de gauche libanais et palestiniens, en particulier après l'effondrement de l'Union soviétique.

Selon M. Noueihed, l'émergence du Hezbollah a coïncidé avec le déclin des symboles existants de la résistance nationale, ce qui semble indiquer une intention d'exclure toutes les autres forces du pays du mouvement de résistance, laissant le Hezbollah comme parti dominant.

L'influence iranienne au Liban est devenue évidente lors des violents affrontements entre le Hezbollah et Amal, qui ont fait des dizaines de victimes et se sont terminés par la consolidation du contrôle du Hezbollah au milieu de la présence des forces militaires syriennes.

Beyrouth se vide peu à peu de son élite intellectuelle, a souligné M. Noueihed. Des centaines d’écrivains, d’intellectuels, de chercheurs et de professionnels des médias ont fui vers l’Europe, redoutant pour leur sécurité, laissant derrière eux une ville désertée par ceux qui faisaient autrefois vibrer sa vie culturelle et académique.

Najia Houssari est rédactrice pour Arab News, basée à Beyrouth. Elle était correspondante de guerre pour le journal libanais As-Safir au moment du bombardement de la caserne des Marines américains.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com