PARIS: Le brouillard persiste autour des intentions d'Emmanuel Macron pour ce début d'année, laissant libre cours aux supputations sur un possible remaniement, qui pourrait signer la fin du bail d'Elisabeth Borne à Matignon, et sur son énigmatique "rendez-vous avec la Nation"
Vers un remaniement?
Un ministre important résume l'ambiance: "On entre dans ces périodes où tous ceux qui parlent ne savent rien et ceux qui savent, même qu'un peu, ne parlent pas".
Reste qu'une refonte du dispositif gouvernemental est jugée probable dans le camp présidentiel, y compris par certains qui n'y croyaient pas avant l'adoption dans la douleur de la loi sur l'immigration.
Le chef de l'Etat a déjà entrepris de rafraîchir son équipe à l'Elysée, avec l'arrivée annoncée d'un nouveau directeur de cabinet, l'ex-préfet Patrice Faure, et celle, attendue, de son ancienne plume Jonathan Guémas comme conseiller pour la communication.
Beaucoup se demandent désormais quand le remaniement aura lieu. Le Conseil des ministres de rentrée ayant été reporté de ce mercredi au suivant, le 10 janvier, Emmanuel Macron voudra-t-il redémarrer l'année avec une nouvelle équipe? Ou attendra-t-il le 17 janvier pour connaître le sort du ministre du Travail Olivier Dussopt, qui sera fixé ce jour-là sur l'issue de son procès pour "favoritisme"?
Borne sur la sellette?
La Première ministre pourrait faire les frais de la volonté du président d'ouvrir une nouvelle page plus positive après les réformes compliquées de 2023.
Elisabeth Borne est restée très discrète lors de son déplacement en Guyane pour le Nouvel An, au moment même où, dans ses voeux télévisés au Français, le président la remerciait "tout particulièrement" pour son action - un message interprété par certains comme un hommage avant limogeage.
Qui pour Matignon?
Dans l'incertitude, des noms de possibles successeurs à Matignon circulent, comme ceux des ministres Sébastien Lecornu, Christophe Béchu ou Bruno Le Maire. Sans que l'on sache si ces hypothèses sont réelles, poussées par les intéressés et leurs soutiens ou, au contraire, par leurs rivaux pour leur faire du tort.
L'entourage de Sébastien Lecornu, rouage discret mais apprécié au sommet de l'Etat, souligne laconiquement qu'il "acceptera ce que Macron lui demandera", même s'il "aime son portefeuille à la Défense". Celui de Christophe Béchu se réjouit de voir "son nom cité dans la presse comme Premier ministrable" après des débuts chahutés à la Transition écologique.
Dans les deux cas, "pas sûr que les Français perçoivent un vrai changement", ni qu'il s'agisse de personnalités capables de mener la bataille des élections européennes de juin face à un Rassemblement national qui a le vent en poupe, prévient un cadre macroniste de la première heure.
Ce dernier mise plutôt sur Bruno Le Maire. Avec deux obstacles pour le ministre de l'Economie: "sa capacité à rassembler la majorité" après avoir poussé une ligne à droite, et la réticence manifestée jusqu'ici par le président à "confier les clés à un vrai politique".
A moins que, faute de solution idéale, Elisabeth Borne grignote un nouveau sursis.
Fin de la grogne ministérielle?
En petit comité, le président n'a pas caché son agacement face aux ministres de l'aile gauche qui ont manifesté leur grogne sur la loi immigration, certains menaçant de démissionner.
Celui des Transports Clément Beaune, qui avait organisé un dîner avec ses collègues hostiles au texte, ne s'est toujours pas expliqué publiquement. Celui du Logement Patrice Vergriete se montre concentré dans son couloir ministériel et a eu mercredi un rendez-vous avec Elisabeth Borne pour avancer sur ses dossiers.
Qu'attendre du "rendez-vous" de Macron?
Les voeux d'Emmanuel Macron n'ont pas dissipé le mystère autour du "rendez-vous avec la Nation" promis pour janvier. Et la plupart de ses soutiens avouent ne rien savoir de ce qu'il mijote.
Tout juste commence-t-on à comprendre que cette énième initiative présidentielle pourrait être une forme de réponse au processus de "décivilisation" qu'il déplore dans la société. Il a évoqué un lien avec l'école, "la mère des batailles", et un nécessaire "réarmement civique" aux contours encore flous.
Le chef de l'Etat doit s'exprimer vendredi pour l'hommage à l'ex-président de la Commission européenne Jacques Delors, puis la traditionnelle galette de l'Elysée. Mais il faudra attendre au mieux la semaine prochaine pour en savoir plus sur ce "rendez-vous" qui pourrait être perlé tout au long du mois.