La politique américaine ne peut pas être jugée sur ses disparités et son hypocrisie croissantes. Malgré le silence médiatique sur la couverture propalestinienne et l’exagération excessive de la propagande pro-israélienne, le soutien aux Palestiniens ne cesse de croître dans tout le pays. Il aura un impact sur les prochains scrutins américains, de la présidentielle jusqu’à l’élection des membres locaux du Congrès.
Il ne fait aucun doute que ce que les militants du Hamas ont commis le 7 octobre était un crime de guerre violent et injustifié. Le fait qu’Israël ait opprimé les Palestiniens et qu’il se soit montré beaucoup plus violent à Gaza qu’en Cisjordanie et à Jérusalem-Est ne justifie pas la conduite inhumaine de certains combattants du Hamas.
Il est difficile de croire la propagande du gouvernement israélien dirigé par un Benjamin Netanyahou corrompu. Cependant, même si une petite partie de ce que disent les Israéliens était vraie, ce qui s’est passé le 7 octobre est monstrueux et choquant. Le Hamas doit être éliminé.
La politique d’apartheid d’Israël a certainement attisé la colère de nombreux Palestiniens. Toutefois, l’indignation face à une politique violente et injustifiée ne devrait jamais être à l’origine de la conduite inhumaine que nous avons constatée. Cela dit, quoi qu’aient fait les militants du Hamas, cela ne justifie pas ce que le gouvernement israélien fait subir à la population palestinienne.
Peu importe la manière dont agissent le gouvernement israélien, les grands médias partiaux et racistes des États-Unis et leur administration incompétente et chancelante pour défendre les crimes de guerre et la cruauté d’Israël contre les civils dans la bande de Gaza; la véritable histoire est en train d’être dévoilée. Ce que le peuple américain voit de ces atrocités, principalement sur les réseaux sociaux, est révoltant. Cela aura un impact énorme sur les élections.
Chaque jour, j’entends de nombreux Américains exprimer leur colère face à la violence et à la cruauté excessives d’Israël. L’armée israélienne a jusqu’à présent tué plus de 20 000 personnes, pour la plupart des civils, parmi lesquels plus de 8 000 enfants, et détruit des dizaines de milliers de maisons et d’entreprises qui appartenaient à des civils qui n’ont rien à voir avec le Hamas.
Ce que nous voyons et ce que les politiciens américains acceptent, c’est une explosion de vengeance de la part du gouvernement israélien, mêlée à une exploitation politique égocentrique qui vise à soutenir un gouvernement Netanyahou en position instable.
Le ciblage des Palestiniens, musulmans et chrétiens, est motivé par un stéréotype raciste promu par un gouvernement israélien moralement en faillite. Il est défendu aveuglément par une multitude d’élus américains, notamment la Maison-Blanche, le Sénat et le Congrès, dont un grand nombre sont intoxiqués par l’injection massive de fonds de campagne qui proviennent de comités d’action politique pro-israéliens. Ils redoutent également de voir leur réputation ternie lors des élections par de fausses allégations d’antisémitisme.
Les défenseurs moralement aveugles d’Israël ont utilisé les allégations d’antisémitisme comme une arme dans le but d’étouffer l’indignation croissante qui bouillonne au sein du peuple américain. De nombreux Américains ont peur de condamner publiquement Israël, craignant d’être ostracisés par les gardiens d’Israël motivés par la haine. Ils voient clairement le carnage de Netanyahou à Gaza et comment les Juifs eux-mêmes protestent contre les meurtres perpétrés par les deux camps sont diabolisés.
Ce conflit ne renforce pas Israël, mais il le prépare à des troubles politiques et à un éventuel effondrement. Les Américains ont peur de dire ouvertement ce qu’ils ressentent, redoutant des invectives et une intimidation publique préjudiciables. Mais ils n’ont pas besoin de cacher leurs sentiments lorsqu’ils votent.
Un récent sondage révèle d’importantes fissures dans le soutien américain à Israël.
«Ce que le peuple américain voit de ces atrocités, principalement sur les réseaux sociaux, est révoltant.» - Ray Hanania
Oui, les Américains condamnent les violences du Hamas le 7 octobre. Mais ils sont extrêmement mal à l’aise face à la réaction du gouvernement israélien, face à l’utilisation de 14,3 milliards de dollars (1 dollar = 0,90 euro) qui proviennent des impôts américains et face à la réserve inépuisable d’armes et de bombes de fabrication américaine utilisées dans le carnage de Gaza.
Un sondage réalisé avant Noël par The New York Times et Siena College montre que les Américains se répartissent à égalité entre la défense et la condamnation d’Israël. Selon le quotidien new-yorkais, les points de vue américains sur Israël sont «fragmentés», ce qui n’est pas en faveur d’Israël, qui bénéficie depuis des générations d’un soutien public américain inébranlable.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Pire encore, les sondages montrent que la base politique du président est divisée. Nombreux sont ceux, notamment les Américains musulmans, qui ont donné à Joe Biden l’impulsion dont il avait besoin pour vaincre Donald Trump en 2020 et qui l’abandonnent à la vitesse de l’éclair, non pas de façon temporaire, mais de manière définitive et dans le cadre d’un repositionnement à long terme de leur engagement politique.
La campagne croissante #AbandonBiden, menée par des électeurs américains arabes et musulmans désillusionnés, contribuera à sa défaite en 2024.
Il suffit de regarder les chiffres des élections dans les «États pivots» déterminants lors de l’élection de 2020: Biden a battu Trump dans le Michigan de seulement 154 188 voix, en Arizona de 10 457, dans le Wisconsin de 20 682, en Géorgie de 11 779, au Nevada de 33 596 et en Pennsylvanie de 81 660 voix. Dans le Minnesota, qui compte une importante population arabo-musulmane, Biden a battu son rival de 233 012 voix.
L’ampleur de ces différences de vote est éclipsée par les plus de 155 millions de suffrages exprimés.
Les Américains arabes et musulmans font ce que font souvent de nombreux Américains: voter «contre» les candidats aux élections plutôt que «pour» un candidat. Affaiblir Biden ne consiste pas à soutenir Trump. Il s’agit d’une stratégie à long terme avec des pertes à court terme, comme la possibilité d’une réélection de Trump. Cependant, ce dernier fait face à un nombre insurmontable de 91 accusations de corruption au niveau fédéral et étatique. Cela pourrait lui être fatal.
Cette confusion politique ouvre la porte à un troisième candidat. En tête du peloton se trouve Robert F. Kennedy Jr., fils de l'ancien procureur général américain du même nom et neveu de l'ancien président John F. Kennedy, tous deux assassinés.
Rien n’est certain, mais plusieurs choses sont claires: le peuple américain n’est plus en phase avec l’administration Biden, et il est peu probable que Trump revienne sur son trône controversé. Entre-temps, Israël dresse un «tableau de bord» sur lequel les décès de civils palestiniens depuis le 7 octobre dépassent de loin le nombre de morts israéliens, mais à un coût moral tel qu’il révèle le véritable visage du gouvernement immoral d’Israël.
Les élections américaines signifient que 2024 sera une année de «consternation et de stupeur» jamais vues auparavant en Occident.
Ray Hanania est un éditorialiste et ancien journaliste politique plusieurs fois primé auprès de l’Hôtel de ville de Chicago. Il peut être joint sur son site Internet personnel à l'adresse www.Hanania.com
X: @RayHanania
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com