Gaza vit «l'enfer sur terre» selon l'ONU, la pression monte contre Israël

Les Palestiniens réagissent après le bombardement israélien à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 12 décembre 2023, au milieu des combats en cours entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. (Photo, AFP)
Les Palestiniens réagissent après le bombardement israélien à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 12 décembre 2023, au milieu des combats en cours entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 13 décembre 2023

Gaza vit «l'enfer sur terre» selon l'ONU, la pression monte contre Israël

  • Dans le sud du territoire soumis à un blocus israélien depuis plus de 15 ans et à un siège total depuis deux mois, de nouvelles frappes meurtrières ont visé Khan Younès et Rafah
  • Des frappes sur deux maisons de Rafah ont fait 24 morts, selon le ministère de la Santé du Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007

JÉRUSALEM: La pression internationale monte contre Israël, avec l'appel à une écrasante majorité de l'Assemblée générale des Nations Unies à un "cessez-le-feu humanitaire" dans la bande de Gaza, devenue "l'enfer sur terre" selon l'ONU en raison des bombardements incessants et des conditions humanitaires chaque jour plus terribles.

Et pour la première fois depuis le début de la guerre, le président américain Joe Biden a critiqué publiquement le gouvernement israélien pour son opposition à une "solution à deux Etats" et l'a mis en garde contre une érosion du soutien de l'opinion publique mondiale à cause de ses bombardements "aveugles" sur Gaza.

Prenant le relais d'un Conseil de sécurité paralysé, l'Assemblée générale de l'ONU a réclamé mardi "un cessez-le-feu humanitaire immédiat", dans une résolution adoptée par 153 voix pour, 10 contre, et 23 abstentions. Mais le texte, non-contraignant, ne condamne pas le Hamas, une absence fustigée par Israël et les Etats-Unis qui ont voté contre.

"Pourquoi est-ce si difficile de dire sans équivoque que tuer des bébés et abattre des parents devant leurs enfants est horrible?", a lancé l'ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield.

"Le temps est venu de rejeter la faute sur ceux qui le méritent, les monstres du Hamas", a insisté pour sa part l'ambassadeur israélien Gilad Erdan, répétant que selon lui, un cessez-le-feu ne ferait que renforcer le mouvement islamiste palestinien au pouvoir à Gaza depuis 2007.

La population dans la bande de Gaza, où 85% des 2,4 millions d'habitants ont été déplacés et des quartiers entiers détruits par les bombardements, vit "l'enfer sur terre", a lancé le directeur de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini.

Dans le sud du territoire soumis à un blocus israélien depuis plus de 15 ans et à un siège total depuis deux mois, de nouveaux raids meurtriers ont visé mardi Khan Younès et Rafah. Des frappes sur deux maisons à Rafah ont fait 24 morts, selon le ministère de la Santé du Hamas.

"Ils (les militaires israéliens) ont dit eux-mêmes que le sud est sûr, Rafah est sûre. Où est la sécurité à Rafah ? Chaque jour il y a des frappes à Rafah ici", a lancé Tawfiq Abou Brik, au milieu des ruines.

L'armée israélienne a déclaré la guerre au Hamas après une attaque d'une violence et d'une ampleur sans précédent menée le 7 octobre contre Israël par ses commandos infiltrés depuis la bande de Gaza voisine, qui a fait 1.200 morts, en majorité des civils, selon les autorités.

Elle a promis de détruire le Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis et l'Union européenne, et son offensive à Gaza a coûté la vie à 18.412 personnes, en grande majorité des femmes et des moins de 18 ans, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Deux corps d'otages découverts

Le 7 octobre, les combattants palestiniens ont emmené aussi environ 240 personnes en otage à Gaza, où 135 sont toujours détenus, selon l'armée, après plusieurs libérations dont une centaine à la faveur d'une trêve fin novembre.

Mardi, l'armée a annoncé avoir "durant une opération à Gaza, découvert et ramené en Israël les corps des otages Eden Zakaria et (du soldat) Ziv Dado".

Les combats au sol accompagnés de frappes aériennes font rage à Khan Younès, où s'étaient réfugiés des centaines de milliers de civils fuyant la progression des troupes israéliennes dans le nord de Gaza.

Le Hamas a fait état aussi de combats dans le centre du territoire. Et des tirs d'artillerie ininterrompus et plusieurs frappes ont ciblé la ville de Gaza (nord).

Les soldats israéliens ont lancé le 27 octobre une offensive terrestre dans le nord de Gaza, avant de l'étendre à l'ensemble du territoire. Selon l'armée, 105 soldats y sont morts dont 13 tués par des "tirs amis".

Les combattants palestiniens ont eux continué à tirer des roquettes en direction d'Israël dont la grande majorité ont été interceptées, selon l'armée.

«Elle était morte»

Après avoir fui leurs maisons dans le nord puis leurs abris à Khan Younès, des dizaines de milliers de Palestiniens s'abritent désormais à Rafah, plus au sud, devenue un gigantesque camp avec de centaines de tentes montées avec des bouts de bois, des bâches en plastique et des draps.

Après une frappe nocturne qui a creusé un énorme cratère dans un quartier de Rafah, des survivants fouillent les ruines, à mains nues ou à l'aide de pelles.

"Il reste des gens sous les décombres. La Défense civile nous aide mais nous n'avons pas assez d'équipements pour les sortir", a témoigné Abou Jazar, 23 ans.

Des blessés, enveloppés dans des couvertures, sont emmenés dans le coffre des voitures vers un hôpital de la ville. D'autres sont transportés, une fois tirés des décombres, sur de grandes couvertures tenues par des jeunes hommes qui courent au milieu de personnes couvertes de poussière.

A l'hôpital al-Najjar de Rafah, Hani Abou Jameh porte en pleurant le corps enveloppé dans un linceul blanc de sa fillette, Sidal, tuée par un éclat d'obus alors qu'elle dormait sous une tente. Autour de lui, dix corps sont alignés.

"Il y a eu un bombardement très, très fort, à trois reprises. (...) Au matin, j'ai découvert qu'elle était morte", a-t-il raconté.

Depuis le siège imposé le 9 octobre à Gaza, Israël contrôle l'entrée de l'aide internationale dans le territoire via l'unique point de passage ouvert de Rafah, avec l'Egypte.

Selon l'agence de l'ONU chargée de la coordination humanitaire (Ocha), 100 camions transportant de l'aide sont entrés depuis lundi soir via Rafah, de même que 120.000 litres de carburant, une assistance qui reste d'après elle très en deçà des besoins.

De plus, en raison des combats, l'aide est très difficilement acheminée au-delà de Rafah où la nourriture se fait rare.

Blinken pour la protection «sans équivoque» des journalistes

Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, sollicité sur le sort des journalistes à Gaza, s'est dit en faveur de la protection "sans équivoque" des reporters en zone de conflit, dans une lettre envoyée à l'AFP.

Les Etats-Unis "continueront à souligner auprès d'Israël, et de tous les pays, que les journalistes doivent être protégés contre tout danger", a-t-il écrit dans ce courrier reçu mardi par l'AFP.

Washington "défend sans équivoque la protection des journalistes dans les conflits armés", a-t-il poursuivi.

L'AFP et d'autres médias internationaux avaient envoyé fin octobre une lettre commune à M. Blinken, lui demandant d'aider à protéger les journalistes, une profession lourdement endeuillée à Gaza depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

Désaccord entre alliés

La guerre a fait flamber les violences en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, où les forces israéliennes ont tué six Palestiniens mardi, selon l'Autorité palestinienne.

Elle a aussi rallumé le front avec le Hezbollah libanais à la frontière. L'aviation et l'artillerie israéliennes ont bombardé des positions du mouvement libanais dans le sud du Liban en riposte à des tirs d'obus sur le nord d'Israël, d'après l'armée.

Loin des frontières d'Israël et de Gaza, les rebelles Houthis du Yémen, affirmant agir par solidarité avec les Palestiniens, ont tiré un missile lundi qui a touché un pétrolier battant pavillon norvégien en mer Rouge, faisant craindre un débordement du conflit.

Alors que les Etats-Unis ont apporté un soutien sans faille à Israël dans sa guerre contre le Hamas, Joe Biden a signalé mardi des désaccords avec son allié.

Le président américain a souligné qu'à l'heure actuelle, Israël avait le soutien de "la majeure partie du monde". Mais il a lancé l'avertissement suivant: "Ils sont en train de perdre ce soutien avec les bombardements aveugles qui ont lieu."

A propos du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le démocrate de 81 ans a dit: "C'est un bon ami mais il faut qu'il change", or "ce gouvernement en Israël fait qu'il est très difficile pour lui de changer", selon une retranscription de ses propos transmise par la Maison Blanche.


Quatre journalistes tués à Gaza, le nombre de morts parmi les professionnels des médias dépasse cent

Israël poursuit son offensive sur Gaza en dépit d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU exigeant un cessez-le-feu immédiat. (Photo AFP)
Israël poursuit son offensive sur Gaza en dépit d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU exigeant un cessez-le-feu immédiat. (Photo AFP)
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  • Cent quatre journalistes palestiniens, ainsi que deux journalistes israéliens et trois libanais, auraient été tués depuis le début du conflit
  • Israël poursuit son offensive sur Gaza en dépit d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui exige un cessez-le-feu immédiat

LONDRES: L’Autorité des médias de Gaza a déclaré jeudi que quatre journalistes avaient été tués lors d’une frappe aérienne israélienne, ce qui porte à plus de cent le nombre total de journalistes tués dans le conflit.

Selon l’agence Anadolu, les victimes sont Hail al-Najjar, éditeur vidéo à Al-Aqsa Media Network, Mahmoud Jahjouh, photojournaliste pour le site Palestine Post, Moath Moustafa al-Ghefari, photojournaliste pour le site Kanaan Land et pour la Palestinian Media Foundation, et Amina Mahmoud Hameed, présentatrice de programmes et rédactrice dans plusieurs organes de presse.

Le Bureau de presse de Gaza a indiqué que les quatre journalistes avaient été tués lors d’une frappe aérienne israélienne, mais il n’a pas fourni de détails supplémentaires sur les circonstances de leur mort.

Au total, cent quatre journalistes palestiniens, deux israéliens et trois libanais ont été tués depuis le début du conflit, le 7 octobre.

Ces dernières pertes s’ajoutent au lourd tribut déjà payé par les professionnels des médias. Selon le Comité pour la protection des journalistes, le conflit de Gaza constitue le conflit le plus meurtrier pour les journalistes et les professionnels des médias depuis que l’organisation a commencé à tenir des registres.

Israël poursuit son offensive sur Gaza en dépit d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui exige un cessez-le-feu immédiat.

Jeudi, l’Afrique du Sud, qui a porté plainte contre Israël pour génocide devant la Cour internationale de justice, a demandé à cette dernière d’ordonner à Israël de mettre fin à son assaut contre Rafah.

Selon les autorités médicales de Gaza, plus de 35 200 Palestiniens ont été tués, principalement des femmes et des enfants, et plus de 79 200 ont été blessés depuis le début du mois d’octobre, lorsqu’Israël a lancé son offensive, répondant à une attaque du Hamas.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël: l'armée annonce avoir trouvé et rapatrié les corps de trois otages de Gaza

Ricarda Louk est assise devant une pancarte représentant sa fille disparue Shani Louk, le 17 octobre 2023, à Tel Aviv. L'armée israélienne a déclaré le 17 mai 2024 avoir retrouvé les corps de trois otages israéliens à Gaza, dont Louk. (AP)
Ricarda Louk est assise devant une pancarte représentant sa fille disparue Shani Louk, le 17 octobre 2023, à Tel Aviv. L'armée israélienne a déclaré le 17 mai 2024 avoir retrouvé les corps de trois otages israéliens à Gaza, dont Louk. (AP)
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  • L'armée israélienne a récupéré «les corps de nos otages Shani Louk, Amit Buskila et Itzhak Gelerenter, pris en otage durant le massacre commis par le Hamas le 7 octobre », a déclaré le contre-amiral Daniel Hagari
  • Sur les 252 personnes emmenées comme otages le 7 octobre, 125 sont toujours détenues à Gaza, dont 37 sont mortes selon l'armée israélienne

JÉRUSALEM: L'armée israélienne a annoncé vendredi avoir découvert dans la bande de Gaza les corps de trois otages israéliens enlevés lors de l'attaque menée par le Hamas le 7 octobre en Israël et les avoir rapatriés.

L'armée a récupéré "les corps de nos otages Shani Louk, Amit Buskila et Itzhak Gelerenter, pris en otage durant le massacre commis par le Hamas le 7 octobre", a déclaré le contre-amiral Daniel Hagari, porte-parole de l'armée, ajoutant qu'ils avaient été "brutalement assassinés" par le Hamas en tentant de fuir le festival de musique Nova et "leur corps emmenés" à Gaza.

Selon l'amiral Hagari, les corps des otages ont été récupérés "durant une opération conjointe entre l'armée et l'agence de renseignements" sur la base de renseignements obtenus notamment "lors d'interrogatoire de terroristes arrêtés dans la bande de Gaza" et ont été identifiés à l'institut national de Médecine légale israélien.

Germano-Israélienne de 22 ans, Shani Louk était apparue dans une vidéo sur les réseaux sociaux, allongée sur le ventre, apparemment inconsciente et à moitié dénudée, à l'arrière d'un pick-up dans la bande de Gaza.

Amit Buskila était âgée de 27 ans et Itzhak Gelerenter de 56 ans lors de l'attaque.

"Le retour de leurs corps est un rappel douloureux et brutal que nous devons rapidement ramener tous nos frères et soeurs de leur cruelle captivité", les vivants et les morts, a réagi le Forum des familles d'otages, principale association de proches.

Sur les 252 personnes emmenées comme otages le 7 octobre, 125 sont toujours détenues à Gaza, dont 37 sont mortes selon l'armée israélienne.

L'attaque surprise menée depuis la bande de Gaza par des commandos du Hamas dans le sud israélien a entraîné la mort de plus de 1.170 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de chiffres officiels israéliens. Plus de 360 personnes ont été tuées sur le seul site du festival de musique Nova, organisé dans le sud d'Israël, tout près de la frontière avec la bande de Gaza.

En riposte, Israël a lancé une offensive tous azimuts sur la bande de Gaza, qui a déjà fait plus de 35.000 morts, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a adressé ses condoléances aux familles. "Cette perte terrible brise le coeur", nous "pleurons avec les familles", a assuré M. Netanyahu, promettant de ramener "tous les otages, les vivants et les morts".

 

 


Tunisie: l'ONU dénonce «l'intimidation et le harcèlement» des avocats

Ces arrestations ont suscité des condamnations de la part de la société civile tunisienne et ont déclenché une réaction internationale. (Dossier/AFP)
Ces arrestations ont suscité des condamnations de la part de la société civile tunisienne et ont déclenché une réaction internationale. (Dossier/AFP)
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  • «L'Etat de droit doit être respecté et les personnes détenues arbitrairement, y compris pour avoir défendu les droits des migrants et lutté contre la discrimination raciale, doivent être libérées», exige le Haut-Commissariat
  • Mme Shamdasani a indiqué que le Haut-Commissariat était «très préoccupé par le fait que des migrants sont de plus en plus souvent pris pour cible»

GENEVE: Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a dénoncé vendredi "l'intimidation et le harcèlement" dont sont victimes en Tunisie des avocats et membres des médias critiques du gouvernement et de ses politiques migratoires.

Les perquisitions contre l'Ordre des avocats dans ce pays "portent atteinte à l'Etat de droit et violent les normes internationales relatives à la protection de l'indépendance et de la fonction des avocats. De tels actes constituent des formes d'intimidation et de harcèlement", a dénoncé Ravina Shamdasani, la porte-parole du Haut-Commissariat à Genève, lors d'un point de presse.

Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Volker Türk, "exhorte les autorités à respecter et à sauvegarder les libertés d'expression, d'association et de rassemblement pacifique, qui sont garanties par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel la Tunisie est partie", a souligné Mme Shamdasani.

"L'Etat de droit doit être respecté et les personnes détenues arbitrairement, y compris pour avoir défendu les droits des migrants et lutté contre la discrimination raciale, doivent être libérées", exige encore le Haut-Commissariat, ajoutant que "les droits humains de tous les migrants doivent être protégés et les discours de haine xénophobe doivent cesser".

Mme Shamdasani a indiqué que le Haut-Commissariat était "très préoccupé par le fait que des migrants, pour la plupart originaires du sud du Sahara, ainsi que les personnes et les organisations qui leur viennent en aide, en Tunisie, sont de plus en plus souvent pris pour cible".

Et elle a dénoncé "une augmentation de l'utilisation d'une rhétorique déshumanisante et raciste à l'encontre des migrants noirs et des Tunisiens noirs".

Le président tunisien Kais Saied, qui concentre tous les pouvoirs depuis juillet 2021, s'est insurgé jeudi contre les critiques occidentales, défendant la légalité de ces mesures.