Les messages de dissuasion américains s’avèrent inefficaces pour dissuader l’Iran et ses mandataires terroristes. Ces groupes continuent de mener des attaques de missiles et de drones contre les bases militaires américaines dans diverses régions d’Irak, ce que les États-Unis ont admis le 10 novembre. Au cours de ces 46 attaques, 56 soldats ont été blessés. La patience des États-Unis, qu’elle soit stratégique ou non, est à bout. L’Iran, en revanche, dispose d’un réservoir de patience avec lequel il peut tester les limites de la détermination américaine en mettant à l’épreuve le sérieux de la Maison Blanche concernant ses avertissements répétés sur les conséquences d’une attaque des forces américaines en Irak et en Syrie.
Dans une escalade calculée de la colère américaine, Vedant Patel, porte-parole adjoint du département d’État américain, a déclaré : « Nous avons envoyé un message de dissuasion très fort et direct à l’Iran sur notre volonté de protéger vigoureusement notre personnel et nos intérêts ». La dernière attaque militaire américaine contre des installations des Gardiens de la révolution iraniens et des milices qui leur sont associées a eu lieu dans l’est de la Syrie le 26 octobre.
Le communiqué du Pentagone souligne qu’il s’agit d’une réponse d’autodéfense à une série d’attaques en cours et largement infructueuses contre les Américains en Irak et en Syrie, et rappelle la nécessité d’éviter une escalade du conflit.
Une dissuasion efficace exige une réponse au moins aussi forte, compte tenu de l’équilibre des forces, des capacités d’armement et des considérations opérationnelles de chaque partie
Le fait est que les messages américains n’atteignent pas l’objectif visé. Ils ne peuvent pas être considérés comme un véritable moyen de dissuasion au sens opérationnel du terme.
Une dissuasion efficace exige une réponse au moins aussi forte, compte tenu de l’équilibre des forces, des capacités d’armement et des considérations opérationnelles de chaque partie. Toutes ces considérations exigent que la réponse américaine soit réellement dissuasive au sens pratique du terme. Comme ce n’est pas le cas, le message de dissuasion ne parvient pas à la partie iranienne comme prévu. Sans exagérer, on peut dire que la situation pourrait même encourager le CGRI à poursuivre ses attaques, à en accélérer le rythme et à en accroître la puissance destructrice, ce qui entraînerait de nouvelles pertes humaines et matérielles pour l’armée américaine.
Le dernier message de l’administration Biden par le biais d’intermédiaires régionaux est que les Etats-Unis sont prêts à intervenir militairement contre l’Iran et le Hezbollah s’ils attaquent Israël ou blessent des citoyens américains. Ces attaques, sporadiques mais continues depuis le 7 octobre, semblent être un test de volonté de la part de l’Iran et de ses milices. Rien ne semble changer dans la situation, si ce n’est les contre-attaques américaines auxquelles ces milices terroristes sont habituées et qui ne semblent pas affecter sérieusement le calcul iranien des pertes et profits. Les Gardiens de la révolution iraniens et leurs milices dans la région ont leur propre calcul de pertes et profits. La mort d’individus, aussi nombreux soient-ils, leur importe peu.
Le réservoir humain est énorme et les chiffres ne sont pas aussi importants pour eux que pour Israël ou les États-Unis. La perte de bases ou de dépôts d’armes en Irak ou en Syrie est insignifiante face au grand objectif stratégique que tous ces groupes poursuivent sous la bannière de l’Axe de la Résistance.
Ces groupes armés ont des objectifs déclarés et connus. Ils veulent saper le statut des Etats-Unis, détruire la réputation de l’armée américaine et atteindre des objectifs qui peuvent être présentés comme des victoires militaires massives contre l’influence américaine. Cela renforce la loyauté et la subordination de leurs partisans. Ces milices bénéficient également d’un plus grand nombre de sympathisants qui sont exposés aux campagnes de propagande iraniennes répétées qui se concentrent sur un discours de mobilisation constant. En bref, les messages de menace américains, qui ont été précédés de tentatives prudentes pour parvenir à un accord indirect avec l’Iran et le Hezbollah libanais sur les lignes de combat régionales et empêcher une expansion de leur portée, n’ont jusqu’à présent pas atteint leur objectif. Au contraire, leur résultat tangible est une escalade progressive de la guerre des milices, leur permettant d’entrer dans les lignes de conflit régionales et ouvrant peut-être la voie à une expansion significative du théâtre.
Les problèmes ne se limitent pas aux attaques de missiles ou de drones depuis l’Irak, mais se sont étendus à l’implication directe des milices houthies dans le conflit. Cette milice a même abattu un drone américain sophistiqué, ce qui fait craindre au Pentagone que l’épave ne tombe entre les mains de l’Iran.
Dr Salem AlKetbi est un politologue émirati. Il a été candidat au Conseil national fédéral.
X : @salemalketbieng
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.