LE CAIRE: Un commandant libyen a menacé jeudi de recourir à la force contre les troupes turques si Ankara ne cesse pas d'interférer dans ce pays d'Afrique du Nord ravagé par la guerre. Il a effet lancé l'année dernière une offensive pour reprendre la capitale, Tripoli, au gouvernement d’union nationale (GNA).
Les commentaires de Khalifa Haftar sont une réponse à la décision du Parlement turc de renouveler pour une durée de dix-huit mois une loi qui autorise le déploiement de troupes turques en Libye. En apportant une aide militaire au gouvernement de Tripoli – notamment par des conseillers, du matériel et des renseignements –, la Turquie a contribué à stopper l'offensive – qui a duré un an – de Haftar contre la capitale. La Turquie est en outre accusée d'envoyer des milliers de mercenaires syriens en Libye.
«Nous ne connaîtrons ni sécurité ni paix tant que les bottes de l'armée turque profaneront notre sol immaculé», a déclaré M. Haftar depuis Benghazi, son fief oriental, le jour du 69e anniversaire de l'indépendance de la Libye. «Nous porterons les armes pour instaurer la paix par nos propres mains et de notre plein gré.»
En effet, la Libye sombre dans le chaos à la suite du soulèvement de 2011 qui a évincé et éliminé le dictateur Mouammar Kadhafi. Depuis 2015, deux gouvernements se partagent la Libye, l'un à l'est et l'autre à l'ouest du pays.
Le maréchal Haftar est l’allié au gouvernement de l'Est, tandis que la Turquie soutient le GNA.
La décision a été prise par le Parlement turc mardi, en dépit du cessez-le-feu déclaré en Libye en octobre, sous l'égide des Nations unies. L'accord de cessez-le-feu prévoit le départ des forces étrangères et des mercenaires dans un délai de trois mois.
«L'ennemi colonial a deux choix: partir pacifiquement ou être expulsé par la force», a déclaré M. Haftar, faisant référence à la Turquie.
La Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul) a saisi cette occasion nationale pour exhorter les rivaux libyens à appliquer le cessez-le-feu et à respecter une feuille de route politique qui prévoit la tenue d'élections nationales en décembre 2021.
«La Mission exhorte les Libyens à joindre leurs efforts et à prendre des mesures courageuses pour parvenir à une réconciliation nationale, afin d’assurer un avenir radieux à tous les Libyens pour qu'ils puissent vivre dans la paix et la prospérité. Cependant, la Mission réaffirme son engagement total à aider le peuple libyen à établir un État unifié», a affirmé la Manul dans une déclaration publiée jeudi.
Plus tôt ce mois-ci, 75 politiciens libyens appartenant à des camps opposés se sont réunis lors d’un forum politique virtuel, initié par les Nations unies. Ils sont convenus d'organiser les élections l'année prochaine. Cependant, ils n'ont pas réussi à résoudre le problème des modalités de sélection du gouvernement de transition qui dirigerait le pays avant les élections.
Dans un commentaire publié jeudi, le Groupe de crise international (International Crisis Group) a déclaré: «En raison du cessez-le-feu précaire qui perdure en Libye, le pays est divisé entre les forces alliées au gouvernement de Tripoli et leurs rivaux de l'Est.» «Pourtant, on a de bonnes raisons de craindre que l'interruption du conflit, qui dure depuis cinq mois, ne prenne fin brusquement.»
Ces dernières semaines, les deux gouvernements ont échangé des accusations concernant la violation des termes de l'accord de cessez-le-feu dans la mesure où tous deux continuent à mobiliser leurs troupes à proximité des lignes de front et à bénéficier de l'assistance militaire de leurs commanditaires régionaux respectifs.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.