PARIS: La Cour des comptes a appelé mercredi le gouvernement à définir, d'ici à fin 2024, une stratégie de détection de la fraude fiscale chez les particuliers, un axe peu développé dans le nouveau plan anti-fraude de l'exécutif.
Mesurer l'efficacité de la détection de la fraude chez les particuliers se heurte actuellement à une "carence majeure": l'absence d'évaluation fiable de la fraude fiscale, constate la Cour dans un rapport publié mercredi.
"La France ne dispose d'aucune évaluation rigoureuse de la fraude fiscale", a noté le premier président de l'institution, Pierre Moscovici, devant la presse. "En l'absence d'estimation de la fraude, (...) il est impossible de dire si la fraude détectée correspond à 20%, 50% ou 80% de la fraude commise".
Il est tout aussi difficile d'évaluer l'efficacité d'outils numériques déployés depuis les années 2010, tel le traitement de données de masse (data mining), a ajouté M. Moscovici, relevant que la part des dossiers de fraude ou donnant lieu à un redressement parmi les dossiers contrôlés s'est maintenue à environ 55% depuis 2018.
Les montants mis en recouvrement par le fisc après contrôle fiscal ont atteint 14,6 milliards d'euros en 2022. Un cinquième concernait des particuliers, le reste des entreprises.
Dans ce contexte, la Cour des comptes a demandé au gouvernement de "formaliser" d'ici à fin 2024 une stratégie nationale de détection des irrégularités fiscales chez les particuliers, qui fait défaut dans le vaste plan anti-fraude présenté en mai.
Six axes prioritaires
Elle a décliné six axes prioritaires.
Outre une estimation de la fraude, la Cour préconise une transparence accrue pour les choix stratégiques en matière de contrôle qui permettrait une meilleure allocation des moyens; un décloisonnement des systèmes d'information de l'administration pour une meilleure circulation des données; une amplification du renseignement fiscal; une prévention proactive aujourd'hui essentiellement tournée vers les entreprises; et une politique d'attractivité et de fidélisation des agents spécialisés.
En octobre, le gouvernement a lancé un Conseil d'évaluation des fraudes, qui réunit une trentaine de personnalités chargées "avant l'été" prochain de mettre de premiers chiffres sur ces phénomènes.
Le rapport "d'initiative citoyenne" de la Cour des comptes se concentre uniquement sur les impôts directement acquittés par les particuliers, lesquels s'élevaient à 160 milliards d'euros en 2022.
Il a été réalisé à la suite d'une consultation menée en 2022 par l'institution auprès des Français, qui a fait émerger six sujets sur lesquels la Cour s'est engagée à enquêter.