Pas-de-Calais: sur la Liane, la détresse d'un village «coupé du monde»

Un homme se tient à côté de son garage inondé à Longfosse, dans le nord de la France, le 10 novembre 2023. (Photo Sameer Al-Doumy  AFP)
Un homme se tient à côté de son garage inondé à Longfosse, dans le nord de la France, le 10 novembre 2023. (Photo Sameer Al-Doumy AFP)
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Publié le Vendredi 10 novembre 2023

Pas-de-Calais: sur la Liane, la détresse d'un village «coupé du monde»

  • Si certains habitants, ceux dont les maisons ont été les plus sinistrées, ont été évacués par les pompiers, d'autres sont restés chez eux malgré l'isolement du village
  • «La population est fatiguée, elle n'en peut plus, elle se demande quand ça va s'arrêter», commente, fataliste, Bruno Debove, conseiller municipal délégué aux inondations

HESDIGNEUL-LÈS-BOULOGNE, France : «On n'en peut plus»: en une averse diluvienne d'une dizaine de minutes, Hesdigneul-lès-Boulogne s'est retrouvée «coupée du monde» vendredi matin, ses routes impraticables comme chaque jour depuis une semaine d'inondations dans le Pas-de-Calais.

«Ca fait une semaine que c'est comme ça, on n'en peut plus». Corentin Thelier, 27 ans, ne restera pas pour voir sa maison inondée une troisième fois en sept jours, après la tempête Ciaran et une crue historique mardi.

Il va passer la journée à Lille, à près de deux heures de route, «pour changer d'air», et reviendra dans la soirée pour constater les dégâts.

Bottes aux pieds et combinaison imperméable sur le dos, il a quitté Hesdigneul-lès-Boulogne au bon moment, peu avant 9 heures: moins de deux heures plus tard, le ciel noir crachait sur la commune une pluie intense, inondant les accès au village.

Tous les jours depuis une semaine, le village est «coupé du monde», assure Bernard Brécqueville, 75 ans, dont le jardin, qui s'étend jusqu'à un petit cours d'eau, est entièrement inondé.

Régulièrement, il sort de sa maison et relève de quelques centimètres une brique qui lui sert de repère de la montée des eaux. «Ce matin, l'eau était deux mètres plus loin», estime-t-il.

Même si sa maison, surélevée, est au sec, il reconnaît une «fatigue» face à «une période qu'on espère ne plus revoir».

Au gré des précipitations, l'eau envahit les quatre routes d'accès au village, vallonnées et entourées de champs. Lesquels sont si gorgés d'eau qu'ils n'absorbent plus rien, déversant l'eau vers l'asphalte la plus proche.

En 52 ans dans le village, Bernard Brécqueville n'a «jamais connu une telle catastrophe». Profitant d'une éclaircie, il sort en simple pull bleu clair pour prendre des nouvelles de ses voisins dont les maisons sont plus basses.

Par deux fois, lundi puis mercredi, les routes inondées l'ont contraint à annuler des rendez-vous chez son médecin à Saint-Etienne-au-Mont, à quelques kilomètres. Le troisième, prévu vendredi après-midi, s'annonce également compromis.

- «Une semaine paraît un mois» -

Si certains habitants, ceux dont les maisons ont été les plus sinistrées, ont été évacués par les pompiers, d'autres sont restés chez eux malgré l'isolement du village.

Et redoublent d'ingéniosité, à l'image de Gilles Montador, qui révèle avec un large sourire être allé chercher du pain «avec le tracteur du village». «On est montés dans la remorque!», rit-il.

Venue lui dire bonjour, Claudine Marie, 68 ans, veuve depuis quelques années, vit depuis une semaine dans la peur «de l'orage, d'être seule». Elle s'en remet à «ses charmants voisins» qui lui ont rapporté du pain et des oeufs. Mais elle n'est «pas sortie du village depuis une semaine. Une semaine qui me paraît un mois».

Sous sa doudoune bleue, elle s'est apprêtée - maquillage, élégant foulard de soie autour du cou -, comme un jour ordinaire, malgré les bouleversements.

«La population est fatiguée, elle n'en peut plus, elle se demande quand ça va s'arrêter», commente, fataliste, Bruno Debove, conseiller municipal délégué aux inondations. Lui-même, les yeux bleus rougis par la fatigue, «n'arrive pas à dormir» depuis une semaine que sa commune est sous l'eau.

Après une première crue lors du passage de la tempête Ciaran, la semaine dernière, la situation a empiré depuis lundi. Ce jour-là, l'eau «est montée à une vitesse inouïe (...), ça a été catastrophique», s'émeut Bruno Debove en ressortant de l'école, envahie par les eaux, de même que la mairie attenante.

Comme beaucoup, il lève régulièrement un oeil vers le ciel, si sombre en milieu de matinée que le village semble être plongé dans la nuit.

 


L’Europe en rangs dispersés face à la déferlante Trump

Le président américain Donald Trump arrive sur la pelouse sud de la Maison Blanche à Washington, DC, le 27 janvier 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump arrive sur la pelouse sud de la Maison Blanche à Washington, DC, le 27 janvier 2025. (AFP)
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  • Les Européens ont beau tenter de se préparer au retour de la déferlante Trump, ils ne sont toujours pas à jour, selon un ancien diplomate français
  • Il craint que l’Europe ne soit en train de risquer gros, en raison de son manque de préparation

PARIS: Ça va mal pour l’Europe. C’est le constat que fait un ancien diplomate français, un peu plus d’une semaine après l’investiture du président républicain Donald Trump pour un nouveau mandat à la Maison Blanche.

Durant son premier mandat (2017 à 2021), les dirigeants européens ont certes eu le loisir d’expérimenter ses méthodes brusques unilatérales et souvent provocantes.

Ils ont également compris que toutes ses décisions sont prises sur la seule base des intérêts des États Unis partant du fameux slogan «America first», faisant fi des accords internationaux et bilatéraux ainsi que des intérêts de ses propres alliés.

Pendant ces quatre années, Trump a avancé à la manière d’une déferlante, porté par un courant d’Américains protestataires, que certains croyaient éphémère et voué à disparaître sous le poids des frasques présidentielles.

Avec sa réélection pour succéder au président démocrate Joe Biden, force est de constater que c’est le contraire qui s’est passé.

Au lieu de se dissiper, le courant protestataire s’est radicalisé, pour devenir un courant idéologique porteur d’une vision bien précise du monde et de la place suprémaciste des États-Unis à la tête de ce monde.

Les Européens ont beau tenter de se préparer au retour de la déferlante Trump, ils ne sont toujours pas à jour assure l’ancien diplomate, qui craint que l’Europe ne soit en train de risquer gros, en raison de son manque de préparation.

Or depuis son retour à la Maison Blanche, Trump s’est d’emblée livré à une multitude de coups d’éclat, dont le dernier en date est sa décision de se retirer de nouveau de l’accord de Paris sur le climat.

Auparavant il avait assuré qu’il était en mesure de régler le conflit ukrainien en 24 heures dans l’ignorance la plus totale des intérêts européens et des menaces que cela peut impliquer au niveau de la sécurité du continent.

Sans tenir compte de leurs capacités économiques, il a sommé les pays européens de consacrer cinq pour cent de leurs revenus au budget de la Défense, tout en laissant planer un doute sur l’avenir de l’engagement américain dans le cadre de la sécurité européenne.

Il a réitéré à souhait son attachement à une mondialisation débridée, privilégiant les marchés et les produits américains, sans écarter une hausse exorbitante des droits des douanes sur les exportations européennes vers les États-Unis.

Il faut une Europe homogène et unifiée, souligne la source diplomatique, au sujet de l’attitude à adopter face au retour de Trump, mais cela est loin d’être le cas, puisque les rangs européens sont plus que jamais dispersés.

Pour comble, le couple franco-allemand qui, pendant de longues années, a été le moteur qui a fait évoluer l’Europe et mis un peu d’ordre dans ses rangs est en panne, pour des raisons inhérentes à la mauvaise conjoncture politique aussi bien à Paris qu’à Bonn.

Selon la même source, l’Europe diverge et hésite, entre une approche d’apaisement et une approche robuste et défensive.

La présidente de la commission européenne, Ursula Von Der Leyen, prône une approche latérale, qui consiste à proposer au président américain «des deals» conçus de façon à donner à Trump l’impression d’être à son avantage.

La France elle, indique la source, cherche à dégager un minimum de dénominateur commun entre les composantes européennes et une approche commune à minima pour éviter à l’Europe nombre de revers économiques et politiques dans les cinq années à venir.

Cela en tout cas semble être l’objectif de la rencontre européenne informelle qui se tiendra à l’initiative de la France au Château Limont, le 3 février prochain, sans aucune garantie de succès, surtout que, précise la source, certains pays d’Europe, dont l’Italie et la Pologne courtisent Trump.

Par ailleurs, cette approche ne fait pas l’unanimité en France, où de nombreuses voix s’élèvent en faveur d’une politique musclée face aux États-Unis, allant jusqu’à brandir le slogan «œil pour œil et dent pour dent», pour affronter l’agressivité trumpiste.

La période est cruciale, estime l’ancien diplomate et, à défaut d’unité et de préparation, les années à venir risquent d’être une sorte de «vallée de larmes», aussi bien pour l’Europe que pour le reste du monde, lorgné à travers le prisme abrupte et arbitraire du président américain.


Macron reprend ses déplacements de terrain mercredi dans le Nord

Le chef de l'Etat, qui a raréfié ses prises de parole et déplacements de terrain depuis la dissolution - un des derniers remonte à septembre 2024 dans une usine pharmaceutique près de Lyon - va ainsi pouvoir reprendre le pouls du pays en direct. (AFP)
Le chef de l'Etat, qui a raréfié ses prises de parole et déplacements de terrain depuis la dissolution - un des derniers remonte à septembre 2024 dans une usine pharmaceutique près de Lyon - va ainsi pouvoir reprendre le pouls du pays en direct. (AFP)
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  • Le chef de l'Etat est attendu à 18H00 dans le territoire de Sambre-Avesnois-Thiérache, qui s'étend sur deux départements (Nord et Aisne), où il avait donné le coup d'envoi de deux plans d'aide, avec près de 500 millions d'euros d'investissements de l'Etat
  • Il se rendra d'abord à l'usine Framatome de Maubeuge (Nord), spécialisée dans l'entretien de matériel de l'industrie nucléaire, puis à Aulnoye-Aymeries (Nord) pour un échange avec des élus et représentants des forces économiques

PARIS: Emmanuel Macron, en retrait sur la gouvernance du pays depuis la dissolution de l'Assemblée, renoue mercredi avec les visites de terrain, dans les Hauts-de-France, où il va faire le point sur le développement de territoires sinistrés.

Le chef de l'Etat est attendu à 18H00 dans le territoire de Sambre-Avesnois-Thiérache, qui s'étend sur deux départements (Nord et Aisne), où il avait donné le coup d'envoi de deux plans d'aide, avec près de 500 millions d'euros d'investissements de l'Etat, en 2018 et 2021.

Il se rendra d'abord à l'usine Framatome de Maubeuge (Nord), spécialisée dans l'entretien de matériel de l'industrie nucléaire, puis à Aulnoye-Aymeries (Nord) pour un échange avec des élus et représentants des forces économiques.

"Le but de ce déplacement est bien de montrer les apports qui ont été faits et (d'examiner) les perspectives à donner", a indiqué un conseiller présidentiel sans plus de précisions.

Le chef de l'Etat, qui a raréfié ses prises de parole et déplacements de terrain depuis la dissolution - un des derniers remonte à septembre 2024 dans une usine pharmaceutique près de Lyon - va ainsi pouvoir reprendre le pouls du pays en direct.

Très isolé, il espère aussi renouer avec l'opinion alors qu'il atteint des records d'impopularité depuis son arrivée à l'Elysée en 2017, avec seulement 20% de personnes satisfaites d'après les sondages.

S'il a perdu la main sur la politique économique et sociale au profit du Premier ministre, il entend continuer à incarner de grands rendez-vous et des batailles emblématiques, des Jeux olympiques au sommet de l'intelligence artificielle en février à Paris, et défendre son bilan.

"Il est tout à la fois sur des enjeux d'avenir, de rayonnement national et international du pays, et au côté des Français sur des sujets de préoccupation du quotidien", pointe un conseiller de l'Elysée.

Montée du RN 

"La nouvelle situation politique a changé sa manière de faire mais ça n'a pas effacé les sept ans d'action au cours desquels il a annoncé un certain nombre de plans, réformes qui ont eu un effet concret dans la vie des Français", ajoute-t-il.

Comme pour les annonces sur le Louvre mardi, tout cela se fait "en bonne intelligence" avec le gouvernement de François Bayrou, "dans le respect des prérogatives de chacun", assure-t-il encore.

Le territoire Sambre-Avesnois-Thiérache, autrefois marqué par l'essor de la métallurgie, des industries textiles, du verre et de la pierre, est confronté à des difficultés socio-économiques importantes avec la désindustrialisation de la fin du XXe siècle.

Les deux plans y ont fait reculer le chômage de 16,5% en 2017 à 12% en 2024 et relancé les créations d'entreprises avec quelque 2.500 par an contre 1.500 en 2018, se félicite l'Elysée.

Ils ont permis de doubler le nombre de voies de la RN2, de construire un nouveau complexe hospitalier à Maubeuge, un commissariat à Aulnoye ou de réhabiliter 70.000 logements et nombre de friches industrielles.

Sans enrayer pour autant la montée du Rassemblement national dans ce secteur aux législatives de 2022 et 2024.

"Le président, quand il s'engage pour des territoires, ne le fait pas dans une perspective de combat électoral", réplique-t-on à l'Elysée.

"Pour autant, ça doit sans doute interroger et inciter l'Etat à poursuivre ses engagements", souligne la présidence en rappelant les pactes similaires conclus dans d'autres départements comme les Ardennes.

 


Les défenseurs des droits des migrants dénoncent un débat «saturé de stigmatisations»

Un navire transportant 49 migrants, selon les autorités italiennes, arrive au port albanais de Shengjin quelques jours après que l'Italie ait repris, après une pause de plusieurs mois, le transfert de demandeurs d'asile vers son voisin maritime dans le cadre d'un programme controversé qui fait l'objet d'un examen judiciaire, le 28 janvier 2025. (AFP)
Un navire transportant 49 migrants, selon les autorités italiennes, arrive au port albanais de Shengjin quelques jours après que l'Italie ait repris, après une pause de plusieurs mois, le transfert de demandeurs d'asile vers son voisin maritime dans le cadre d'un programme controversé qui fait l'objet d'un examen judiciaire, le 28 janvier 2025. (AFP)
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  • "Depuis un an, les choses n'ont pas cessé de se dégrader", a déploré la secrétaire générale de la Cimade, Fanélie Carrey-Conte lors d'une conférence de presse organisée par une quarantaine d'ONG, associations et syndicats
  • "Le tout dans un débat qui est saturé de stigmatisations et un climat particulièrement nauséabond", a complété la militante

PARIS: Les défenseurs des droits des migrants ont dénoncé mardi un débat public "saturé de stigmatisations", un an après la promulgation de la loi Darmanin et en réaction à la nouvelle circulaire Retailleau et aux propos de François Bayrou évoquant un "sentiment de submersion".

"Depuis un an, les choses n'ont pas cessé de se dégrader", a déploré la secrétaire générale de la Cimade, Fanélie Carrey-Conte lors d'une conférence de presse organisée par une quarantaine d'ONG, associations et syndicats. "Le tout dans un débat qui est saturé de stigmatisations et un climat particulièrement nauséabond", a complété la militante.

"Ne nous laissons pas enfermer dans un triptyque: +stigmatiser, enfermer, précariser+", selon la responsable de la Cimade.

Interrogée sur les propos du Premier ministre François Bayrou, lundi soir sur LCI, sur un "sentiment de submersion" en matière d'immigration, Mme Carrey-Conte a jugé qu'ils illustraient un "basculement vers des analyses de plus en plus stigmatisantes sur la question migratoire avec des choses qu'on n'entendait pas avant".

"Ce type de propos étaient jadis réservés à la droite et à l'extrême droite mais le Premier ministre n'est pas le seul. Il y avait dans la loi Darmanin, la préférence nationale, le président de la République a lui pu parler de politique immigrationniste, il y a aussi l'obsession sur l'AME (aide médicale d'Etat). Tout cela illustre une fuite en avant et le franchissement de lignes rouges", a commenté la responsable de la Cimade.

"On a mis (dans la) tête du peuple que nous sommes le danger. Tous ceux (les sans papiers) qui ont fait du bien dans le pays sont invisibilisés", s'est ému Gollé Sylla, membre du collectif des sans papiers de Montreuil (Seine-Saint-Denis).

Les organisations mobilisées parmi lesquelles la Cimade, Médecins du Monde, le Secours catholique, le syndicat Solidaires ou bien encore des collectifs de sans papiers, ont tenu à faire "le triste bilan des droits bafoués" un an après la promulgation de la loi Darmanin.

"Dans la loi Darmanin, il n'y a que les mesures répressives qui sont appliquées et il n'y a rien d'intégration", a commenté Mariama Sidibé, membre de l'intercollectif des sans-papiers.

La récente circulaire Retailleau visant à restreindre les régularisations est accusée de participer à "la fabrique des sans papiers".

"Bâtiment, restauration, logistique, livraison, aide à la personne, ouvrier agricole. Des centaines de milliers de sans-papiers travaillent", a relevé Abderrahmane Sidibé de l'intercollectif des sans papiers. Ça signifie de nombreuses années de précarité et de pression, de travail dissimulé, le tout sans garantie d'avoir des papiers".