PARIS: Face à la recrudescence des actes hostiles aux Juifs en France, le président du Sénat Gérard Larcher et la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet ont appelé "tous ceux qui se reconnaissent dans les valeurs de notre République" à participer dimanche à une "grande marche civique" contre l'antisémitisme.
L'initiative a été immédiatement saluée par la majorité, mais aussi par la droite et l'extrême droite. La France insoumise (gauche radicale) a pour sa part dit réserver sa réponse, en raison de la présence du Rassemblement national.
Le président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), Yonathan Arfi, a apporté son "plein soutien à l'appel".
"La République est en danger; ses fondements mêmes sont attaqués", s'alarment les présidents des deux chambres du Parlement, respectivement deuxième et quatrième personnages de l'Etat, dans une tribune publiée par Le Figaro.
"Depuis l’attaque terroriste perpétrée en Israël par le Hamas, le 7 octobre dernier, un massacre d’une ignominie jamais égalée depuis la Shoah, qui a causé la mort de 40 de nos compatriotes, les actes antisémites se multiplient dangereusement dans notre pays. En quatre semaines à peine, plus de 1.000 faits ont été enregistrés, soit deux fois plus qu’au cours de toute l’année 2022", poursuivent-ils.
Les massacres du 7 octobre, qui ont fait plus de 1.400 morts côté israélien, ont déclenché une guerre dévastatrice entre le Hamas et Israël qui, depuis, pilonne la bande Gaza. Selon le mouvement islamiste, les opérations militaires israéliennes y ont fait plus de 10.000 morts.
"Un sursaut s'impose, pour manifester clairement que la France n'accepte pas l'antisémitisme et que les Français ne se résignent pas, et ne se résigneront jamais à la fatalité des haines (...) Notre laïcité doit être protégée, elle est un rempart contre l’islamisme", écrivent encore les présidents des deux chambres.
M. Larcher et Mme Braun-Pivet évoquent une marche "entre le Palais Bourbon et le Palais du Luxembourg", les sièges de leurs assemblées, "unissant tous ceux qui se reconnaissent dans les valeurs de notre République et sont déterminés à les défendre".
«Les amis du soutien inconditionnel au massacre ont leur rendez-vous», dénonce Mélenchon
Le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon a critiqué mardi soir la marche qu'il voit comme le "rendez-vous" des "amis du soutien inconditionnel au massacre".
Dénonçant sur X (anciennement Twitter) une "manif de 'l'arc républicain' du RN à la macronie de Braun-Pivet", M. Mélenchon a déploré que "sous prétexte d'antisémitisme", ce rassemblement ne réclame pas "le cessez-le-feu", et donc l'arrêt des bombardements israéliens sur Gaza.
Séjourné, pas derrière la «même banderole» que le RN
Avant même l'annonce officielle, le président du parti Les Républicains Eric Ciotti avait fait connaître sa participation. "Je serai présent à cette marche, il faut que tous les républicains crient leur volonté de s'opposer avec la plus grandes des énergies à cette résurgence, à cette montée d’un antisémitisme totalement insupportable", a-t-il dit devant la presse à l'Assemblée.
"Nous répondrons présents", a écrit sur la plateforme X le président du Rassemblement national Jordan Bardella. Marine Le Pen sera à ses côtés, selon le RN, qui depuis le 7 octobre s'efforce d'apparaître comme un bouclier pour les Français juifs.
Le président du parti Reconquête! Éric Zemmour et sa candidate aux européennes Marion Maréchal ont fait savoir qu'ils iraient aussi marcher contre l'antisémitisme.
La France insoumise, sous le feu des critiques depuis les massacres en raison de son refus de qualifier de "terroriste" le Hamas, explique aussi ses réticences par la participation de ces formations d'extrême droite.
"Bien évidemment, quand il s'agit de combattre le racisme, l'antisémitisme (...) je suis toujours du côté de ceux qui luttent contre ces discriminations", a affirmé son coordinateur Manuel Bompard, avant d'ajouter qu'il serait "incongru de participer à une manifestation de cette nature en présence du Rassemblement national".
Président du parti macroniste Renaissance, Stéphane Séjourné a aussi marqué ses réserves.
"Renaissance sera présent dimanche pour la grande marche contre l'antisémitisme. Pour autant, jamais je ne défilerai derrière la même banderole que le Rassemblement national", a-t-il écrit sur X.
LFI nourrit de plus des relations conflictuelles avec les représentants de la communauté juive dans l'Hexagone, au premier rang desquels le Crif.
Le soir du 9 octobre, quelques heures après un rassemblement en solidarité avec Israël, Jean-Luc Mélenchon s'en était pris au Crif. Il l'avait notamment accusé d'obliger "tout le monde à s'aligner sur la position du gouvernement d'extrême droite israélien, en acceptant de manifester avec le RN".
Jean-Luc Mélenchon est "un ennemi de la République", avait répliqué le lendemain Yonathan Arfi.