Gros doutes sur la «coalition» contre le Hamas voulue par Macron

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre israélien à Jérusalem, le 24 octobre 2023 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre israélien à Jérusalem, le 24 octobre 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 25 octobre 2023

Gros doutes sur la «coalition» contre le Hamas voulue par Macron

  • Emmanuel Macron a évoqué l'idée d'une coalition internationale contre le groupe islamiste palestinien Hamas
  • Une proposition qui s'annonce extrêmement complexe à mettre en œuvre, selon des experts

PARIS: Emmanuel Macron a évoqué mardi, depuis Jérusalem, l'idée d'une coalition internationale contre le groupe islamiste palestinien Hamas, à l'origine des attaques sanglantes contre Israël, une proposition qui s'annonce extrêmement complexe à mettre en œuvre, selon des experts.

Des contours encore flous

Cette coalition serait-elle une extension ou une réplique de la coalition internationale créée en 2014 sous la houlette des Etats-Unis pour combattre le groupe Etat islamique (EI) en Syrie et en Irak?

Dans un premier temps, le président français a proposé que la coalition anti-Daech (le groupe djihadiste Etat islamique, NDLR) "puisse lutter aussi contre le Hamas".

L'Elysée a ensuite expliqué qu'il s'agissait "de s'inspirer de l'expérience de la Coalition internationale contre Daech et voir quels aspects sont réplicables contre le Hamas".

"Nous sommes donc disponibles pour réfléchir, avec nos partenaires et Israël, aux pistes d'actions pertinentes contre le Hamas", a-t-on expliqué à l'Elysée. "Ce sera ensuite aux partenaires et notamment à Israël d'exprimer leurs besoins".

Des membres hostiles à Israël

Pour l'heure, les experts doutent de la possibilité d'étendre ou répliquer la coalition visant Daech.

Car cette coalition globale regroupe à ce jour 86 membres dont l'Otan, l'Union Européenne, la Ligue Arabe et il y a "au moins une unanimité diplomatique de façade" dans la lutte contre ce groupe djihadiste, souligne Elie Tenenbaum de l'Institut français des Relations Internationales (IFRI).

En revanche, parmi ses membres, dont Israël ne fait pas partie, "de nombreux pays ne partagent absolument pas la position de la France sur le Hamas", poursuit-il, citant entre autres le Liban, le Qatar, la Jordanie, la Libye ou l'Irak.

Autre problème, certains membres sont ouvertement hostiles à Israël, notamment Bagdad, qui ne reconnaît pas l'existence-même du pays, ou Tripoli, qui n'entretient aucune relation avec son gouvernement.

Malgré une normalisation des rapports bilatéraux entre Israël et plusieurs pays arabes via les accords d'Abraham de 2020, la "faisabilité" de l'extension du périmètre de la coalition globale contre l'EI à la lutte contre le Hamas paraît ainsi "hautement improbable", estime M. Tenenbaum.

D'autant que le Hamas, contrairement à l'EI, qui était isolé, dispose d'alliés puissants dans la région, comme le Hezbollah libanais, soutenu par l'Iran, ennemi intime d'Israël.

Selon Renad Mansour, chercheur principal au centre de réflexion Chatham House, la tâche serait "beaucoup plus ardue" pour une telle coalition, qui apparaîtrait en outre comme une structure pro-israélienne, quand la rue et nombre de gouvernements arabes sont pro-palestiniens et bien plus favorables au Hamas.

Pas de soutien populaire

L'Etat islamique s'était emparé de certains territoires syriens et irakiens, notamment Mossoul ou Raqqa, qu'il gouvernait "de manière très brutale", des "atrocités" étant régulièrement "commises contre la population" locale, rappelle M. Mansour.

La coalition internationale bénéficiait donc d'"un large soutien autochtone, local et régional pour éliminer" l'EI, poursuit-il.

Le mouvement islamiste palestinien a, lui, pris le pouvoir dans la bande de Gaza après sa victoire aux élections de 2006. Et si aujourd'hui la population manque de tout, elle ne défie pas ouvertement le Hamas.

Risque d'escalade en Irak et Syrie

Héloïse Fayet, chercheuse spécialiste du Moyen-Orient au Centre des études de sécurité de l'IFRI est elle aussi circonspecte quant à une telle initiative.

"Depuis 10 jours, plusieurs bases de la coalition en Irak et en Syrie ont été attaquées à l'aide de drones et de roquettes" par des groupes chiites proches de l'Iran, note-t-elle sur le réseau X (ex-Twitter).

Etendre la coalition à la lutte contre le Hamas "risque d'accroître ce risque", poursuit l'experte, qui appelle Emmanuel Macron, à "clarifier ces propos afin de ne pas susciter de faux espoirs ou une escalade".

Reconstruction

Les coalitions contre les groupes terroristes ne se limitent pas à des opérations sur le terrain : dans le cas de la coalition contre l'EI, des forces irakiennes étaient formées, les partenaires partageaient des informations, notamment sur la lutte contre le financement du terrorisme, souligne Elie Tenenbaum.

Certaines de ces missions, qui englobent "la stabilisation et la reconstruction de zones libérées", peuvent avoir "leur place dans la lutte contre le Hamas", observe le chercheur. Mais plutôt qu'une coalition anti-Hamas, construire une coalition pour une résolution du conflit israélo-palestinien rallierait sans aucun doute un soutien bien plus large, affirme-t-il.


Le ministre saoudien des Affaires étrangères reçoit son homologue iranien à Djeddah

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
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  • M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens
  • Cette visite précède d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui se tiendront dimanche à Oman.

RIYAD : Le ministre saoudien des Affaires étrangères Faisal ben Farhane a reçu samedi son homologue iranien Abbas Araqchi à Djeddah, a rapporté la chaîne d'information Al Arabiya.

M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens et discuter des questions bilatérales et des développements régionaux et internationaux.

Il devrait ensuite se rendre au Qatar pour participer au sommet du dialogue Iran-Monde arabe à Doha, a déclaré vendredi un porte-parole du ministère iranien.

Cette visite précède également d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui auront lieu dimanche à Oman.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Derrière le soutien d'Israël aux druzes, l'objectif d'affaiblir durablement la Syrie

Des religieux druzes assistent aux funérailles de membres de la minorité syrienne qui ont été tués lors de récents affrontements sectaires, dans le village de Salkhad, dans le gouvernorat de Suwayda, au sud du pays, le 3 mai 2025. (AFP)
Des religieux druzes assistent aux funérailles de membres de la minorité syrienne qui ont été tués lors de récents affrontements sectaires, dans le village de Salkhad, dans le gouvernorat de Suwayda, au sud du pays, le 3 mai 2025. (AFP)
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  • L'attachement affiché par Israël à défendre les druzes syriens s'accorde, de l'aveu même de certains de ses dirigeants, avec un but stratégique de long terme: l'affaiblissement de la Syrie
  • Pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, il s'agissait d'adresser un "message clair": Israël ne permettra aucun "déploiement de forces [armées syriennes] au sud de Damas" ni aucune "menace" contre les druzes

Jérusalem, Non défini: L'attachement affiché par Israël à défendre les druzes syriens s'accorde, de l'aveu même de certains de ses dirigeants, avec un but stratégique de long terme: l'affaiblissement de la Syrie.

A la suite de heurts intercommunautaires sanglants dans ce pays, Israël, qui occupe une partie de son territoire depuis 1967, a invoqué la protection de la minorité druze pour justifier plusieurs frappes, dont une le 3 mai à proximité du palais présidentiel à Damas.

Pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, il s'agissait d'adresser un "message clair": Israël ne permettra aucun "déploiement de forces [armées syriennes] au sud de Damas" ni aucune "menace" contre les druzes.

Dès mars, l'Etat hébreu avait menacé d'intervenir si le nouveau pouvoir qui a fait tomber Bachar al-Assad "s'en [prenait] aux druzes".

Toutefois, selon Andreas Krieg, maître de conférences au King's College de Londres, Israël n'est pas mu par "un souci altruiste": il "se sert [des druzes] comme d'un prétexte pour justifier son occupation militaire" en Syrie.

Dans une déclaration révélatrice des intentions d'Israël, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a affirmé que son gouvernement ne mettrait pas fin à la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza avant que "la Syrie [soit] démantelée".

"Pour contenir la situation", le président syrien par intérim, Ahmad al-Chareh, a confirmé mercredi "des discussions indirectes" avec Israël. Interrogée par l'AFP, la diplomatie israélienne n'a pas commenté.

- "Autonomie druze" -

Enferré depuis le 7-Octobre dans une guerre qui a largement débordé des frontières d'Israël, M. Netanyahu répète que son pays se bat pour sa survie et qu'il est déterminé à "changer le Moyen-Orient".

En 2015, alors membre de l'Institut d'études pour la sécurité nationale (INSS), son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, avait défendu un morcellement de la Syrie en diverses entités ethno-religieuses, prévoyant une "autonomie druze dans le sud".

Le projet rappelle le découpage de la Syrie imposé dans l'Entre-deux-guerres par la France, alors puissance mandataire. Paris avait dû y renoncer sous la pression des nationalistes syriens, y compris druzes.

Grand voisin d'Israël au nord-est, la Syrie a participé à trois guerres israélo-arabes, en 1948-1949, 1967 et 1973.

La dernière a consacré la mainmise d'Israël sur la partie du Golan syrien conquise en 1967 (et annexée depuis 1981).

Dans la foulée de la chute de M. Assad, Israël a pris le contrôle de la zone démilitarisée sous contrôle de l'ONU au Golan et mené des centaines de frappes sur des cibles militaires en Syrie.

Objectif affiché: empêcher que les armes du pouvoir déchu ne tombent entre les mains des nouvelles autorités, issues de la mouvance islamiste, et dans lesquelles le gouvernement israélien voit un ennemi.

Les druzes, adeptes d'une religion syncrétique issue de l'islam chiite, sont présents surtout en Syrie, au Liban et en Israël.

Israël recense quelque 152.000 druzes, selon les dernières données disponibles. Ce chiffre inclut les 24.000 druzes habitant dans la partie annexée du Golan, dont moins de 5% ont la nationalité israélienne.

- Contrer la Turquie -

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des affrontements avec les forces de sécurité du nouveau pouvoir fin avril ont fait 126 morts dans des zones majoritairement druzes et chrétiennes proches de Damas et dans le bastion druze de Soueïda (sud-ouest).

Après ces heurts, cheikh Hikmat al-Hajri, sommité religieuse druze syrienne, a réclamé l'envoi d'une force de protection internationale, et souscrit à une déclaration communautaire affirmant que les druzes constituent "une partie inaliénable" de la Syrie.

En Israël, des druzes ont participé à plusieurs manifestations réclamant que le gouvernement défende leurs coreligionnaires en Syrie.

Loyaux à Israël, les druzes sont surreprésentés dans l'armée et la police, par rapport à leur importance dans la population.

"Israël se sent redevable vis-à-vis des druzes et de leur engagement exceptionnel dans l'armée", note Efraïm Inbar, chercheur à l'INSS.

Selon lui, les défendre s'inscrit aussi dans la géopolitique recomposée de l'après-Assad où Israël "tente de protéger les minorités druze et kurde de la majorité sunnite et d'éviter que la Turquie n'étende son influence à la Syrie".

A rebours d'Israël, Ankara, aux prises avec son propre problème kurde, soutient les nouvelles autorités de Damas et ne veut surtout pas voir se consolider les positions kurdes dans le nord-est de la Syrie, le long de sa frontière.


Liban: une "série" de frappes israéliennes dans le sud, selon l'agence officielle

Cette photo prise dans la région de Marjeyoun, au sud du Liban, montre la fumée qui s'échappe du site des frappes aériennes israéliennes sur les collines du village de Nabatiyeh, au sud du Liban, le 8 mai 2025. (AFP)
Cette photo prise dans la région de Marjeyoun, au sud du Liban, montre la fumée qui s'échappe du site des frappes aériennes israéliennes sur les collines du village de Nabatiyeh, au sud du Liban, le 8 mai 2025. (AFP)
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  • L'agence de presse officielle libanaise a fait état d'une "série" de frappes israéliennes jeudi dans le sud du Liban, en dépit du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah

BEYROUTH: L'agence de presse officielle libanaise a fait état d'une "série" de frappes israéliennes jeudi dans le sud du Liban, en dépit du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah.

"Une série de frappes israéliennes" a visé le secteur de Nabatiyé, à une dizaine de kilomètres de la frontière, a rapporté l'agence Ani.

Des médias locaux ont indiqué que les raids avaient touché des secteurs montagneux éloignés des zones d'habitation.

L'Ani a fait état "d'énormes explosions... ayant résonné dans la plupart des zones de Nabatiyé et du sud", provoquant "terreur et panique" parmi les habitants, qui se sont précipités pour aller chercher leurs enfants à l'école, tandis que des ambulances se dirigeaient vers les zones touchées.

Un photographe de l'AFP a vu de la fumée s'élever des collines de la région.

"On a entendu une forte explosion, environ dix frappes consécutives", a déclaré à l'AFP Jamal Sabbagh, un médecin de 29 ans qui effectuait des examens de santé auprès d'écoliers près de la ville de Nabatiyé.

"Certains enfants ont eu peur et il y avait de la panique, les enseignants étaient aussi effrayés", a-t-il confié.

Mercredi, une frappe israélienne à Saïda, également dans le sud du pays, avait tué un commandant du mouvement islamiste palestinien Hamas, allié du Hezbollah libanais.

Israël est en guerre contre le Hamas depuis que le mouvement palestinien a mené une attaque sans précédent dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, déclenchant une offensive israélienne dévastatrice dans la bande de Gaza.

Le Hezbollah, groupe armé libanais soutenu par l'Iran, avait alors ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban, affirmant agir en soutien aux Palestiniens.

Israël a mené entre septembre et novembre 2024 de violents bombardements sur le Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah.

Un cessez-le-feu est entré en vigueur le 27 novembre mais l'armée israélienne mène régulièrement depuis cette date des attaques au Liban, disant viser combattants et infrastructures du Hezbollah, très affaibli par la guerre.

Le Liban presse notamment les Etats-Unis et la France, garants de l'accord de cessez-le-feu, de contraindre Israël à cesser ses attaques et se retirer des cinq positions frontalières dans lesquels il s'est maintenu.

Beyrouth assure respecter ses engagements et accuse Israël de violer le cessez-le-feu.