LONDRES: La British Broadcasting Corporation (BBC) mène une enquête urgente sur les accusations de partialité et de conduite non professionnelle portées contre le personnel du service arabe de la chaîne concernant la récente escalade à Gaza, a indiqué à Arab News un porte-parole de la BBC.
Cependant, les détracteurs de la chaîne publique britannique ont déclaré ne pas être surpris par les conclusions d’une récente enquête du Daily Telegraph, basé à Londres, qui a fourni des preuves de ce que certains ont décrit comme un «parti pris alarmant, mais pas surprenant» de la BBC Arabic.
«La direction de la BBC et le gouvernement britannique ont été avertis à plusieurs reprises des intentions cachées d’une grande partie du personnel du service arabe», indique une ancienne employée à Arab News. S’exprimant sous couvert de l’anonymat en raison du règlement d’un litige professionnel avec la chaîne, l’ancienne membre du personnel s’est plaint d’une «culture où une seule nationalité dominait et où les islamistes politiques et les Frères musulmans étaient favorisés».
L'ex-employée explique que cette culture d’entreprise était l’une des raisons qui l’avaient finalement poussée à partir, ajoutant que le personnel avait été témoin «d’années de ciblage systématique de la part de certains gouvernements arabes, tout en justifiant les opinions et les actes extrémistes comme étant de la liberté d’expression».
«Ce que nous faisions n’était pas du journalisme, mais de l’activisme», affirme-t-elle ajoutant qu’«il existe une différence entre mettre en cause les personnes au pouvoir, ce qui est le travail d’un bon journaliste, et donner une tribune à des voix radicales ou à des points de vue extrémistes».
L’enquête du Daily Telegraph, publiée dans le quotidien britannique le 21 octobre, analyse les allégations de partialité systématique au sein de la BBC Arabic dans ses reportages, ainsi que l’activité de ses journalistes sur les réseaux sociaux.
Parmi les partis pris flagrants mentionnés par le Telegraph, des journalistes auraient aimé et repartagé des messages apparemment antisémites à la lumière de l’escalade récente à Gaza. «Nous enquêtons de toute urgence sur cette affaire», a déclaré un porte-parole de la BBC à Arab News après ces découvertes.
«Nous prenons les accusations de violation de nos lignes directrices éditoriales et d’utilisation des réseaux sociaux très au sérieux, et si nous constatons des violations, nous agirons, notamment en prenant des mesures disciplinaires», a-t-il précisé.
Outre les activités récentes sur les réseaux sociaux, les critiques affirment que la BBC Arabic présente depuis longtemps des partis pris systématiques et des reportages inexacts. Une enquête menée en 2021 par le journal Jewish Chronicle, basé à Londres, et intitulée «La honte de la BBC Arabic: la partialité systématique révélée», a mis en évidence l’utilisation systématique par la chaîne d’un langage antisémite et «inspiré par le Hamas».
Les conclusions de cette longue enquête révèlent que le service en arabe de la chaîne britannique a dû être corrigé 25 fois sur une période de deux ans, soit une correction par mois en moyenne entre 2018 et 2021.
Un autre exemple de partialité est le recrutement d’un certain nombre de journalistes et de rédacteurs en chef qui avaient travaillé auparavant pour la chaîne de télévision libanaise Al-Manar, affiliée au Hezbollah, interdite dans le monde entier parce qu’elle est le porte-parole d’une entité désignée comme terroriste. Cette chaîne a également été critiquée pour avoir utilisé une carte du Moyen-Orient sur laquelle Israël était complètement effacé.
«Le contrôle de la “liste des invités” est l’une des tactiques les plus populaires utilisées par BBC Arabic», explique Hani Nasira, commentateur politique et expert en mouvements idéologiques, à Arab News. «La chaîne accueille notamment des analystes qui présentent des points de vue extrémistes sans accueillir d’invité aux points de vue opposés pour y répondre ou les contrer.»
«Par exemple, BBC Arabic accueille régulièrement Azzam Tamimi et Anas Altikriti sans mentionner leurs liens avec l’islam politique; elle les présente plutôt comme des analystes politiques exprimant une opinion impartiale», assure-t-il.
La BBC est financée par une redevance télé de 157,50 livres sterling (1 livre = 1,15 euro) par an, payée par tous les résidents du Royaume-Uni qui regardent la télévision. Selon le site Web de la BBC, cela permet à la chaîne de «rester libre de toute publicité et indépendante de tout intérêt politique et des actionnaires».
Lorsque les conclusions de l’enquête ont été publiées, Ghanem Nousseibeh, président de l’organisation à but non lucratif Muslims Against Antisemitism, basée au Royaume-Uni, a déclaré à Arab News que «la BBC Arabic a été très pro-islamiste dans sa couverture. Elle a notamment favorisé et parfois promu les discours des Frères musulmans dans le monde entier, mais plus particulièrement dans les pays où les Frères musulmans sont interdits».
«Cela influence le monde musulman et arabophone et légitime indirectement le discours antisémite et les autres discours extrémistes émanant des Frères musulmans. La BBC doit se pencher sérieusement sur le grave préjudice que la chaîne arabe fait subir à sa maison-mère, en particulier en tant qu’organisation financée par les contribuables britanniques», poursuit-il.
En avril 2020, Rana al-Attar, présentatrice de la BBC, a évoqué la série dystopique égyptienne de science-fiction An-Nehaya («La fin»), dans laquelle, sans le soutien des États-Unis, Israël s’effondre et ses habitants juifs fuient la région. Elle a commenté en saluant la destruction de «l’entité usurpatrice» et a applaudi la série «de tout son cœur».
Sur les réseaux sociaux, une vague de commentaires célébrant la destruction d’Israël a été publiée sur la page de BBC Arabic.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com