GRENADE: Le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien ont été invités à se retrouver d'ici à la fin du mois à Bruxelles pour tenter de réduire les fortes tensions entre leurs deux pays, a annoncé jeudi le président du Conseil européen Charles Michel.
Le jour de cette annonce, le chef de l'Etat azerbaïdjanais Ilham Aliev ne s'est toutefois pas rendu à un sommet européen au cours duquel le sujet devait être évoqué.
"J'ai indiqué que j'inviterai les deux dirigeants (MM. Aliev et Nikol Pachinian) pour une réunion à Bruxelles d'ici fin octobre", a déclaré M. Michel dans un entretien avec l'AFP à Grenade, dans le sud de l'Espagne, en marge du sommet de la Communauté politique européenne (CPE, une organisation ayant pour objectif de renforcer les liens entre l’Union européenne et ceux qui partagent ses valeurs sans en être membres).
Peu avant, l'Azerbaïdjan avait assuré être prêt à des pourparlers avec l'Arménie sous la médiation de l'Union européenne, après son offensive victorieuse dans la région disputée du Haut-Karabakh, où les soldats de la force d'interposition russe démantèlent en conséquence leurs installations.
"Le démantèlement des postes d'observation sur la ligne de front est terminé" dans trois districts, a fait savoir jeudi le ministère russe de la Défense. Ce contingent de maintien de la paix est présent dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu qui avait mis fin aux précédentes hostilités dans cette zone en 2020.
Vladimir Poutine a de son côté jugé jeudi que la reprise du Haut-Karabakh par l'Azerbaïdjan était "inévitable", après des critiques du gouvernement arménien, qui accuse la Russie d'inaction.
Cela "était inévitable après la reconnaissance de la souveraineté de l'Azerbaïdjan (sur le Karabakh) par les autorités arméniennes", a lancé le président russe, précisant que l'Arménie était "toujours" l'alliée de Moscou.
"Ce n'était qu'une question de temps avant que l'Azerbaïdjan ne commence à rétablir l'ordre constitutionnel dans cette région", a-t-il ajouté.
Réunions tripartites
Peu avant l'annonce par M. Michel d'une réunion entre le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien, Hikmet Hajiev, un conseiller de M. Aliev, avait fait savoir que son pays était "prêt à participer prochainement à Bruxelles à des réunions tripartites entre l'Union européenne, l'Azerbaïdjan et l'Arménie".
L'armée azerbaïdjanaise vient de remporter une victoire éclair face aux séparatistes arméniens du Haut-Karabakh, qui s'est depuis vidé de la quasi totalité de sa population.
A la veille des discussions à Grenade, Ilham Aliev avait déclaré qu'il n'y participerait pas, et ce en raison d'une "atmosphère antiazerbaïdjanaise", selon un responsable azerbaïdjanais. Le chef du gouvernement arménien, qui était quant à lui présent jeudi dans le sud de l'Espagne, avait déploré cette décision.
L'Azerbaïdjan a choisi de s'abstenir à cause de la "politique de militarisation" de la France dans le Caucase, de l'attitude de l'Union européenne vis-à-vis de la région et de l'absence de la Turquie, ce qui ne revient pas à "refuser des discussions avec l'Arménie", avait insisté le même responsable.
La cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna avait affirmé mardi que Paris avait "donné son accord" à la livraison de matériel militaire à l'Arménie, qui souhaite se protéger de son voisin azerbaïdjanais.
Le président français Emmanuel Macron a cependant pris soin d'affirmer jeudi à Grenade que le temps n'était "pas aux sanctions" contre l'Azerbaïdjan et qu'il fallait continuer de discuter avec ce pays pour "protéger au mieux" l'Arménie, tandis que ces deux Etats se sont mutuellement accusés de tirs sur leurs troupes respectives près de la frontière.
A Grenade, le Premier ministre arménien a rencontré le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a affirmé que Kiev souhaitait la "stabilité" du Caucase et des "relations amicales avec ses nations".
L'Arménie et l'Azerbaïdjan se sont opposées au cours de deux guerres, l'une au moment de la dislocation de l'URSS, l'autre à l'automne 2020, pour le contrôle de l'enclave du Haut-Karabakh.
L'Arménie craint désormais que son puissant voisin, bien plus riche et mieux armé, ne déclenche des opérations dans le sud de son territoire.