NEW YORK: Une «refonte en profondeur» du système multilatéral est nécessaire pour répondre aux défis croissants du monde, a déclaré mardi la principale instance dirigeante de l’Église catholique à l’Assemblée générale de l’ONU.
Le Saint-Siège était représenté par l’archevêque Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États, qui a déclaré: «Nous vivons un moment crucial pour l’humanité, où la paix semble céder la place à la guerre. Les conflits s’intensifient et la stabilité est de plus en plus menacée.»
Il a salué les efforts historiques de l'ONU pour réduire la pauvreté, aider les migrants et promouvoir le désarmement nucléaire, tout en prévenant: «Ces dernières années, nous avons assisté à un effondrement de la confiance entre les nations, comme en témoigne clairement l'augmentation du nombre et de la gravité des conflits et des guerres.»
Cela a entraîné une «augmentation inévitable et tout aussi significative du nombre de réunions tenues à différents niveaux, bien que n’étant pas toujours en proportion directe avec l’efficacité requise pour poursuivre les objectifs proposés», a-t-il assuré.
Et même si les délégations prodiguent «des flots de mots» lors des forums internationaux, «on ne trouve pas toujours… la même volonté d’écouter», a affirmé Paul Richard Gallagher.
Il a transmis un message du pape François dénonçant la «colonisation idéologique», qu’il a définie comme le fait que des pays plus riches et plus puissants «tentent d’imposer leur vision du monde aux pays les plus pauvres». L’État de droit «semble parfois être remplacé par la loi du plus fort», a ajouté Paul Richard Gallagher.
Il a appelé à un retour à l'écoute et au dialogue sur la scène internationale, afin d'éviter de nouveaux conflits et d'atténuer les souffrances de l'humanité.
«Tous les États doivent redécouvrir un esprit d’entraide avec l'intention de construire une solidarité mondiale qui s'exprime concrètement en aidant ceux qui souffrent. Dans le cadre de cet engagement commun, les dirigeants doivent mettre de côté leurs propres besoins, attentes et désirs de souveraineté ou de toute puissance, devant le regard des plus vulnérables», a poursuivi M. Gallagher.
Il a également déclaré que le conflit en Ukraine «a joué un rôle déterminant pour ramener dans le débat la menace élevée d’une escalade nucléaire».
Il a décrit l’utilisation de l’énergie nucléaire dans la guerre comme un crime «non seulement contre la dignité des êtres humains, mais contre tout avenir possible pour notre maison commune».
Une autre grave préoccupation pour le Saint-Siège est la prolifération de l’intelligence artificielle (IA), a indiqué Paul Richard Gallagher. La «galaxie numérique en expansion dans laquelle nous vivons touche tous les aspects de nos vies et de notre communauté», a-t-il assuré.
En conséquence, il existe «un besoin urgent d’engager un débat éthique sur l’utilisation et l’intégration de l’IA dans la vie quotidienne à travers le monde», a estimé Paul Richard Gallagher.
Il a transmis le message suivant du pape François: «Nous devons être vigilants et œuvrer à ce que l’usage discriminatoire de ces outils ne prenne pas racine au détriment des plus vulnérables et des exclus. ll est inacceptable que la décision concernant la vie et l’avenir de quelqu’un soit confiée à un algorithme.»
L’inquiétude du Saint-Siège concernant l’IA s’étend à l’utilisation de systèmes d’armes autonomes dans les conflits, «seuls les humains» étant «véritablement capables de voir et de juger l’impact éthique de leurs actions».
L’instance dirigeante catholique a appelé à la création d’une organisation mondiale pour superviser l’utilisation de l’IA.
Les développements technologiques peuvent toutefois donner de l'espoir dans la lutte mondiale contre le changement climatique, a déclaré Paul Richard Gallagher, ajoutant que la communauté internationale «doit se concentrer sur un résultat positif» lors de la prochaine COP28 aux Émirats arabes unis.
Abordant la question des droits humains, il a affirmé qu’il «ne faut jamais oublier que le véritable test décisif pour déterminer si les droits humains sont protégés est le degré de liberté de religion ou de conviction de la population dans un pays».
Paul Richard Gallagher a ajouté: «Ce qui est inquiétant, c’est que nous continuons de vivre dans un monde où des personnes sont persécutées simplement parce qu’elles pratiquent leur foi en public».
Il a également mis l’accent sur l’inquiétude du Saint-Siège face à l’utilisation subjective des termes «crime de haine» et «discours de haine», ajoutant qu’ils étaient utilisés pour empêcher les gens d’exprimer leurs croyances religieuses. «La liberté religieuse est l’une des exigences minimales absolues nécessaires pour vivre dans la dignité», a soutenu Paul Richard Gallagher.
Le Saint-Siège est également préoccupé par la situation humanitaire en Syrie, où la population est «accablée par douze ans de guerre, des tremblements de terre et une grande pauvreté», a-t-il ajouté. «L'Église encourage la reprise d'un processus politique de réconciliation en Syrie.»
Le Soudan préoccupe aussi grandement le Saint-Siège, a affirmé Paul Richard Gallagher, ajoutant que l’instance dirigeante «lance un appel sincère pour déposer les armes afin que le dialogue puisse prévaloir et que les souffrances de la population puissent être allégées».
Les violences fréquentes résultant des coups d’État en Afrique subsaharienne ont «perturbé le processus démocratique, provoqué des morts et des destructions, ainsi que des crises humanitaires et migratoires», a déclaré Paul Richard Gallagher.
«Derrière ces actes de terrorisme et de violence se cachent également des intérêts économiques internationaux qui encouragent la dynamique injuste du colonialisme», a-t-il ajouté.
Le Saint-Siège a exprimé sa «vive préoccupation» concernant les événements survenus à Jérusalem et son statut de ville sainte».
«Je renouvelle mon appel aux Israéliens et aux Palestiniens pour s’ouvrir à un dialogue sincère, mais également à l’ensemble de la communauté internationale», a souligné Paul Richard Gallagher.
Il a terminé son discours en exhortant le monde à s’éloigner de «la logique de la légitimité de la guerre», concluant: «Le champ de bataille est devenu pratiquement illimité et ses effets potentiellement catastrophiques. La paix est possible si elle est vraiment voulue, et si la paix est possible, elle est un devoir. »
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com