WASHINGTON: D'abord, ils ont perdu leur emploi à cause de la pandémie. Désormais, plus de 20 millions d'Américains risquent de perdre les aides du gouvernement qui leur permettent de rester à flots face à la crise sans précédent, provoquée par la pandémie de Covid-19.
Le Congrès peut encore agir pour prolonger ces mesures d'assistance au titre de la loi «Cares Act» votée en mars, avant la date butoir du 26 décembre.
Mais pour beaucoup, les mois de tergiversations des élus et l'indifférence des services sociaux surchargés ont déjà fait des ravages.
Joindre les deux bouts
Avant la pandémie, Tamora Israel, 37 ans, était orfèvre à plein temps, journaliste à temps partiel et co-propriétaire d'une galerie d'art dans le Massachusetts, tout en terminant ses études.
Quelques mois plus tard, elle est sans emploi dans l'Etat de Géorgie, partageant une maison et une voiture avec ses parents et son jeune frère, essayant de joindre les deux bouts avec un budget de 2.000 dollars par mois pour quatre personnes.
Ses journées jadis passées à rapporter des nouvelles de sa communauté ou à exercer son esprit d'entreprise sont maintenant remplies de trajets avec sa mère pour l'emmener à des rendez-vous médicaux ou faire les courses.
Il y a aussi le temps passé au téléphone avec les services du chômage du Massachusetts pour les convaincre de faire suivre les versements qui ont été suspendus parce qu'elle a déménagé.
«Nous sommes tout le temps sur le fil du rasoir. Pour l'instant, ça va encore mais si nous recevons une facture inattendue, nous sommes foutus», déplore Tamora.
Incertitude
En cette période d'incertitude, Grant McDonald est sûr d'une chose: il va être sans travail pendant très, très longtemps. Réalisateur vidéo et concepteur d'événements en direct, Grant, 31 ans, sait que les théâtres et les salles de concert avec lesquels il travaille habituellement seront parmi les derniers à rouvrir.
Estimant que le Congrès n'entend pas assez les chômeurs comme lui, il a uni ses forces avec un confrère du spectacle pour créer ExtendPUA.org.
Le groupe encourage les sans-emplois à faire pression sur leurs représentants pour renouveler les mesures de la loi «Cares», y compris l'indemnisation d'urgence en cas de pandémie de chômage. Si cette aide expire, il devra abandonner son appartement de New York et se faire héberger chez son père de l'autre côté du pays.
En dépit de plus de 30 réunions vidéo avec les élus et même un voyage à Washington, l'accord que le Congrès semble sur le point d'annoncer exclura probablement une partie de l'aide espérée par Grant McDonald. «Ils vont littéralement en faire le moins possible, le plus tard possible», s'alarme-t-il.
Enlisée
Alisha Negron, une diplômée d'histoire de l'art dont l'emploi de serveuse a disparu avec la pandémie, se considère chanceuse: sa famille à Porto Rico la soutient et l'appartement qu'elle partage dans la banlieue de Washington est abordable.
Pourtant, elle ne peut s'empêcher de s'étonner de la façon dont elle est traitée par le système américain de chômage.
Cette jeune femme de 29 ans a reçu une aide financière hebdomadaire pendant des mois qu'elle a dû dépenser dans l'assurance santé en raison de problèmes de tension artérielle.
Puis, elle a perdu ces versements en novembre, lorsque le gouvernement a estimé que le taux de chômage était trop bas en Virginie, où elle vivait, pour que l'État prolonge ses prestations.
Un accord au Congrès pourrait lui faire bénéficier d'un soutien financier, mais jusque-là, elle se retrouve avec une dette de plus de 5.000 dollars sur ses cartes de crédit et seulement 200 dollars mensuels d'aide alimentaire.
«Maintenant je suis enlisée ici», soupire-t-elle.