PARIS: Paris Design Week sera témoin de la première édition du «Prix du design de l'Institut du monde arabe» le 6 septembre. Ce rendez-vous culturel offre une scène, et surtout une reconnaissance, aux talents émergents et entrepreneuriaux du monde arabe.
Une course à contre-courant contre les stéréotypes, contre l'effacement culturel, et contre la méconnaissance; cette récompense ambitionne de faire plus que simplement décerner un trophée ou un pécule. Il s'agit d'une quête pour redéfinir ce qui est souvent considéré comme «arabe» aux yeux du monde, en permettant aux designers de prendre place dans une histoire globale qui les a souvent négligés, sinon complètement ignorés.
Dans cet exercice, le jury se confronte non seulement à la qualité des travaux, mais aussi à la diversité des idées des inspirations venues de Médine à Marrakech, de Beyrouth à Bagdad.
Jury
India Mahdavi, François Leblanc di Cicilia, et Ismaïl Tazi, ces experts et entrepreneurs du design qui constituent le jury, ne sont pas là pour simplement juger mais pour naviguer dans une mer de possibilités presque infinies, cherchant le phare, la balise qui guidera peut-être la prochaine génération de créateurs arabes vers des territoires inconnus.
Cependant, au-delà des flashes de caméra et des applaudissements d'encouragement, quelles sont les nuances qui façonnent ces artistes designers arabes contemporains ?
À l'inverse de l'Occident où le design est souvent perçu comme une forme d'art autonome, le design arabe est souvent le résultat d'une fusion entre l'art, la culture et l'artisanat. Cela se reflète particulièrement dans les travaux d'Anas Koubaiti. Évoluant entre Rabat et Paris, ses conceptions ne sont pas seulement des objets, mais des histoires matérialisées issues de son héritage et de ses explorations urbaines.
Le design se soucie de l'écologie
Si la durabilité et le souci de la planète sont en vogue dans le design mondial, elles sont une source d'inspiration pour nombre de créateurs arabes. Prenez Annabel Ezedine du Liban, qui voit dans chaque déchet non pas une fin, mais un commencement. Son luminaire Evolvo transforme les cuirs de récupération en une source lumineuse où chaque imperfection scintille dans un décor intérieur.
La Design se conjugue au pluriel
Karim Tamerji et Elias El Hage explorent un matériau aussi humble que le sable pour leurs œuvres. Leur installation sculpturale à Downtown Design Dubaï en est un exemple éloquent. Ils poussent les limites de la terre comprimée, l'ancrant profondément dans un dialogue contemporain sur l'espace et la matérialité.
Selsebyl K’hila, une diplômée tunisienne, a choisi un chemin moins traditionnel pour le design en se concentrant sur les produits paramédicaux. Son projet inspiré par l'univers de Marvel ne sert pas seulement de fonction utilitaire mais crée également une expérience émotionnelle positive pour les enfants atteints d'infirmité motrice cérébrale. Le design, pour elle, invite à la guérison par les formes et les lieux.
Co-fondée par Alia El Tanani et ses collaborateurs, Don Tanani est une ode au design égyptien. Leur ambition s'étend au-delà des frontières nationales, car ils cherchent à présenter leur travail comme une représentation de l'excellence du design arabe. Les collections de Don Tanani puisent dans les richesses de l'histoire égyptienne, tout en les intégrant dans des contextes modernes et globaux.
Synergie entre le sublime et l'artisanal
Mehdi Kebaier et Yasmine Sfar, les cerveaux derrière Altin Studio, s'efforcent de réinventer l'artisanat traditionnel tunisien. Leur œuvre 'Orbite' est un songe spatial fabriqué à partir de matériaux terrestres, créant un pont entre le passé ancestral et un futur interstellaire.
Jassim AlSaddah, le créateur derrière Babnimnim Design Studio, incarne cette alliance parfaite entre technicité et poésie. Sa Mineral Collection transcende les textures et couleurs naturelles, les intégrant dans un ensemble de tapis qui sont à la fois des œuvres d'art et des éléments fonctionnels.
La première édition du «Prix du design de l'Institut du monde arabe» est sans doute un jalon dans l'histoire du design arabe, mais chaque designer présente une vision qui dépasse de loin ce moment de reconnaissance. Leurs œuvres sont des fenêtres ouvertes sur des mondes à la fois ancestraux et futuristes, locaux et universels. Ce sont ces dichotomies qui font du design arabe une entité si fascinante et aujourd'hui bien vivante.