TBILISSI, Géorgie : Le parti au pouvoir en Géorgie a entamé une procédure de destitution de la présidente pro-occidentale Salomé Zourabichvili, qui se trouvait à Bruxelles vendredi, provoquant une énième crise politique dans ce pays aux relations complexes avec Moscou.
«Nous avons pris cette décision» car «fermer les yeux sur des violations flagrantes de la Constitution sape l'Etat de droit», a justifié le président du parti Rêve géorgien Irakli Kobakhidzé devant des journalistes au sujet de Mme Zourabichvili, qui est une ancienne diplomate française.
Élue en 2018 avec le soutien de cette formation, elle s'oppose désormais à sa politique de proximité avec la Russie et a multiplié les voyages pour faire obtenir à son pays le statut de candidat à l'Union européenne.
Vendredi, elle a rencontré à Bruxelles Charles Michel, le président du Conseil européen, instance qui représente les 27 Etats membres de l'UE.
Celui-ci «a souligné que la décision du Conseil européen d'accorder à la Géorgie la perspective européenne était une occasion historique à ne pas manquer», selon un compte-rendu transmis par ses services.
«Il a réaffirmé l'engagement de l'UE à aider la Géorgie à progresser sur la voie européenne» et a souligné «la nécessité pour le pays d'approfondir les réformes nécessaires, notamment dans les domaines de la justice, de la désoligarchisation, de la lutte contre la corruption et du pluralisme des médias».
Charles Michel a salué «l'engagement personnel de la présidente géorgienne à faire progresser la perspective européenne» du pays.
Le parti au pouvoir a interdit à Mme Zourabichvili de se rendre prochainement dans dix pays dont l'Ukraine et malgré ce refus, la première femme présidente en Géorgie s'était déjà rendue à Berlin jeudi, où elle a rencontré son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier.
C'est la première fois qu'un parti au pouvoir engage une procédure de destitution dans cette ancienne république soviétique d'environ quatre millions d'habitants.
Concrètement, il doit obtenir de la Cour constitutionnelle le droit de solliciter les parlementaires, qui doivent soutenir aux deux tiers sa proposition.
Le Rêve géorgien dispose de quatre-vingt-dix sièges et devra convaincre dix députés de l'opposition, ce qui a très peu de chance d'arriver. Selon lui, la présidente ne peut exercer constitutionnellement ses pouvoirs de représentation «qu'avec le consentement du gouvernement».
Alors que les relations entre Moscou et Tbilissi étaient été très difficiles depuis l'orientation pro-UE et pro-Otan prise en 2004, et a fortiori depuis une intervention militaire russe en 2008 suivi de la reconnaissance par Moscou de deux régions séparatistes géorgiennes, le gouvernement actuel dirigé par le Premier ministre Irakli Garibachvili a entrepris l'année dernière un rapprochement.
Cette politique suscite l'inquiétude d'une partie de la société qui craint une dérive autoritaire, et la désapprobation de Salomé Zourabichvili, qui ne voit d'avenir pour son pays qu'au sein de l'UE.