PARIS: Rentrée scolaire anticipée pour les élèves en difficulté, refonte des programmes d'histoire, calendrier du bac modifié: Emmanuel Macron fixe encore une fois avant la rentrée le cap sur l'école avec une série d'annonces qui font déjà débat.
Comme en 2022 où le chef de l'Etat fraîchement réélu avait prononcé un discours inédit devant les recteurs, Emmanuel Macron s'invite à nouveau, en 2023, pour la rentrée scolaire à travers une interview fleuve au Point.
Macron, président de l'Education nationale? Le chef de l'Etat assume faire de l’éducation le "domaine réservé du Président" fustigeant au passage les "hypocrisies françaises".
"Il y a une très grande continuité depuis 2017. Pourquoi je parle autant de l’école ? Parce que c’est le cœur de la bataille que l’on doit mener parce que c’est à partir de là que nous rebâtirons la France", affirme-t-il dans son interview taclant au passage le "pédagogisme" qu'il accuse d'avoir renoncé à la transmission des savoirs, une critique souvent entendue à droite, plus rarement à gauche.
En posant le cadre et en listant les chantiers, Emmanuel Macron grille la politesse à son nouveau ministre de l'Education, Gabriel Attal qui doit s'adresser aux recteurs jeudi matin en Sorbonne, et dont la conférence de presse de rentrée n'est prévue que lundi.
"On a la confirmation que c’est Emmanuel Macron le super ministre de l’Education nationale", résume la secrétaire générale du Snes-FSU Sophie Vénétitay qui pointe "une méthode très verticale et très jupitérienne, puisqu’on continue de découvrir les choses dans les interviews".
"Pour nous Gabriel Attal est déjà quasiment désavoué. Ça devient finalement une méthode Macron que de mettre en difficulté les ministres à peine arrivés rue de Grenelle", relève Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa qui déplore une "vision caricaturale de l'Ecole".
Vacances scolaires, programmes d'histoire et d'éducation civique mais aussi autonomie des établissements scolaires, M. Macron avance des mesures qui provoquent déjà le débat voire la controverse au sein de la communauté éducative.
Seuls les aménagements sur le calendrier du baccalauréat nouvelle formule attendus depuis plusieurs semaines devraient être accueillis avec satisfaction tant l'opposition fut forte chez les personnels de l'Education nationale.
«Instrumentalisation»
Emmanuel Macron estime ainsi que les épreuves du baccalauréat, qui ont démarré pour la première fois en 2023 dès le mois de mars, ne peuvent pas se tenir "si tôt dans l'année".
"Si enfin il entend que la réforme qu’il a lui-même portée pose problème et qu’il entend la communauté éducative, ça sera ça de pris pour les personnels et les élèves", commente Mme Vénétitay.
Le ministre Gabriel Attal dévoilera dans les prochains jours les "ajustements", a annoncé M. Macron.
Bien moins consensuel, le président s'aventure sur le thème explosif des rythmes et des vacances scolaires en souhaitant que les élèves "qui en ont besoin" puissent rentrer à l'école "dès le 20 août" pour "faire du rattrapage".
"C’est stigmatisant et en plus cela signifie qu’il faut faire revenir plus tôt les enseignants", a commenté Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-CFDT.
"Il y a un principe de réalité, des fratries dans lesquelles un seul enfant peut être en difficulté, des gardes alternées, cela se heurte à beaucoup de principes de fonctionnement", juge Grégoire Ensel, président de la FCPE, première fédération de parents d'élèves.
"Le rythme et le calendrier scolaire ça demande un débat de société", poursuit-il.
"C'est très bien sur le principe mais ça dépend de la mise en pratique", nuance Laurent Zameczkowski, porte-parole des parents d'élèves de la Peep.
Dans son interview Emmanuel Macron promet encore de refonder des programmes scolaires d'histoire et d'instruction civique, tout en renforçant "la formation des enseignants" dans ces deux matières.
"L'histoire doit être enseignée chronologiquement et l'instruction civique, devenir une matière essentielle. Chaque semaine, un grand texte fondamental sur nos valeurs sera lu dans chaque classe puis débattu", précise le chef de l'Etat.
Pour Christine Guimonnet, secrétaire générale de l’Association des professeurs d’histoire-géographie (APHG), "c’est une méconnaissance de la façon dont on enseigne (...) On ne fait pas l’histoire à l’envers!".
"On aimerait que l’histoire cesse d’être instrumentalisée en permanence par les politiques", plaide l'enseignante.