WASHINGTON: Le ministre américain de la Justice Bill Barr, qui a démissionné lundi, était un fidèle parmi les fidèles de Donald Trump, jusqu'à sa récente disgrâce pour avoir refusé de suivre le président républicain dans la contestation désespérée de sa défaite.
Comme il en a l'habitude, c'est le milliardaire qui a rendu la nouvelle publique sur Twitter, en joignant la lettre de démission de son ministre.
« Bill partira juste avant Noël pour passer les fêtes avec sa famille, le ministre de la Justice adjoint Jeff Rosen, une personne incroyable, assurera l'intérim », a écrit le président. « Notre relation a été très bonne » et Barr a « fait un travail exceptionnel », a-t-il ajouté.
Mais son départ était évoqué depuis quelques semaines. Il avait subi la colère de Donald Trump pour n'avoir pas dénoncé les fraudes électorales alléguées par l'hôte de la Maison Blanche et susceptibles selon lui d'invalider la victoire de Joe Biden à la présidentielle de novembre.
Les ministères de la Sécurité intérieure et de la Justice « ont enquêté et, pour l'instant, n'ont rien trouvé pour les étayer », avait-il déclaré le 1er décembre.
Donald Trump s'obstine à dénoncer des fraudes massives et refuse de reconnaître sa défaite. Mais son camp n'a jamais réussi à apporter la moindre preuve pour étayer ces accusations et les dizaines de recours en justice qu'il a présentés ont été quasiment tous rejetés, y compris ceux arrivés devant la Cour suprême.
L'ex-magnat de l'immobilier a aussi fait part ces derniers jours de sa « grande déception » car le ministre de la Justice n'a pas révélé avant l'élection de novembre l'existence d'une enquête sur la situation fiscale du fils de Joe Biden, Hunter.
Avec son air débonnaire et ses lunettes rondes, Bill Barr s'était pourtant imposé au sein du gouvernement comme l'un des plus solides défenseurs de Donald Trump et de la droite ultra-conservatrice.
« Avocat du président »
Ce juriste de 70 ans est un fervent partisan d'une lecture extensive des pouvoirs présidentiels, de la peine de mort, ou des pouvoirs de la police fédérale dans la gestion des manifestations contre les violences policières, mouvement historique qui traverse le pays depuis la mort de George Floyd.
A son arrivée à la tête du ministère en février 2019, cet homme calme, au ton bonhomme, jouissait d'une image assez lisse. Il avait déjà occupé ce poste au début des années 1990, un gage de sérieux dans une administration où les novices en politique étaient légion.
Mais ce relatif consensus a volé en éclat et Bill Barr s'est vite retrouvé affublé du surnom d' « avocat du président ». Il était notamment accusé d'avoir tout fait pour protéger Trump dans l'enquête du procureur spécial Robert Mueller sur une possible collusion entre la Russie et l'équipe de campagne du candidat républicain en 2016.
Fin 2019, il avait ainsi soutenu une théorie développée par le milliardaire, en totale contradiction avec son propre ministère.
Trump assurait alors que le FBI avait ouvert une enquête sur de possibles liens entre Moscou et son équipe de campagne pour des raisons politiques, une accusation balayée par l'inspecteur général, autorité indépendante au sein du ministère.
Mais Bill Barr avait préféré critiquer la police fédérale et la possible « mauvaise foi » de certains agents.
Selon ses partisans, ce natif de New York, diplômé de la prestigieuse université Columbia, ne défendait pas Donald Trump, mais la fonction présidentielle.
Il n'a eu de cesse de dénoncer l'opposition démocrate et la gauche américaine qui ont lancé selon lui « une attaque systématique des normes et de l'Etat de droit », soumettant le président à un « harcèlement constant ».
Catholique pratiquant, il a aussi déploré un déclin des valeurs religieuses aux Etats-Unis et une « campagne » des progressistes « pour détruire l'ordre moral traditionnel », tout en restant aux côtés d'un président deux fois divorcé et dont les commentaires sexistes avaient fait scandale en 2016.