PARIS: Cueilli à froid par la décision de prolonger la fermeture des théâtres et cinémas, le monde de la culture fait monter la pression: une mobilisation prévue dans la rue et des recours en préparation devant le Conseil d'Etat.
Mardi, théâtres et cinémas auraient dû lever le rideau après un mois et demi de fermeture pour cause de confinement. Mais c'est finalement dans la rue qu'ils donneront de la voix, avec des rassemblements prévus à Paris et dans les régions.
Le Premier ministre Jean Castex avait annoncé jeudi que la fermeture des lieux culturels serait prolongée, au moins jusqu'au 7 janvier, en raison de la situation sanitaire et malgré la levée du confinement.
De quoi faire fulminer le monde de la culture qui s'estime oublié par l'exécutif depuis le début de la crise sanitaire et a décidé cette fois de riposter.
Syndicats et artistes s'apprêtent à saisir la plus haute juridiction administrative, le Conseil d'Etat, via un «référé liberté», une procédure d'urgence, comme ont pu le faire ces dernières semaines les professionnels de la restauration ou bien le secteur du ski. Un appel à soutenir ce recours a été relayé par plusieurs centaines de directeurs et directrices de théâtres et compagnies à travers la France.
Et les salles obscures ne sont pas en reste: la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a décidé lundi de préparer son propre recours, en parallèle, auquel devraient se joindre d'autres professionnels du 7e art. Elle espère être reçue rapidement par le ministère.
Pour peser, la CGT-Spectacle veut aussi se faire entendre dans la rue. «Oui, la culture est essentielle», clame le syndicat qui appelle les salariés du spectacle, du cinéma et de l'audiovisuel à se rassembler à Paris, place de la Bastille, mardi à midi, pour dénoncer la «politique du yoyo du gouvernement».
Des rassemblements sont aussi prévus dans une quinzaine d'autres villes, de Brest à Nice en passant par Strasbourg, avec pour objectif de peser pour obtenir «la réouverture de tous les lieux de spectacle».
- Enseignes rallumées -
De leur côté, les acteurs Jacques Weber, Audrey Bonnet et François Morel ont appelé à protester, toujours mardi, devant le Théâtre de l'Atelier (à Montmartre) à 18H30 pour exprimer leur «dégoût» et leur «colère» face aux décisions du gouvernement.
«Nous ne sommes pas des rebelles. Nous ne sommes pas des révolutionnaires. Nous ne sommes pas des agitateurs. Nous ne sommes pas fous, nous ne sommes pas inconscients», indique un communiqué du théâtre, dénonçant «un profond mépris à l'égard du secteur culturel et artistique tant nous atteignons une apogée en matière d’incohérence».
Même colère du côté des salles obscures. Elles qui étaient fin prêtes à rouvrir, avant la période cruciale des vacances de Noël, sont appelées à rallumer symboliquement leurs enseignes entre 17H00 et 18H00, «en signe de protestation», a expliqué à l'AFP le délégué général de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF), Marc-Olivier Sebbag.
A Sarlat, au coeur de la Dordogne, toute l'équipe du Rex, un cinéma indépendant, a annoncé qu'elle se tiendrait symboliquement devant son établissement pour «faire part de sa colère».
Vécue comme une rupture d'égalité par rapport aux commerces, la décision de maintenir les lieux culturels fermés «est le coup de trop», résume Nicolas Rihet, patron d'un distributeur indépendant, Alba Films, qui compte se rendre au rassemblement parisien.
«On a l'impression que les lieux culturels sont fermés pour rien, alors que les centres commerciaux, eux, sont ouverts et bondés», explique-t-il à l'AFP. «Les Français ont besoin de se divertir, et pas seulement devant la télé. Ce gouvernement veut que les gens pètent un câble!».