Il y a deux ou trois ans, j’ai commencé à collectionner les cheveux et à créer avec après avoir vu un collier que Mona Hatoum a confectionné avec ses propres cheveux. Cela m’a vraiment impressionnée.
Je plaçais les cheveux sur du papier et les faisais bouger avec mon pinceau, en utilisant un moyen qui fonctionne comme de la colle. Ceci me rappelait beaucoup de pratiques habituelles, comme ma grand-mère qui récoltait du riz.
Ensuite, j’ai commencé à penser : « Qu’est-ce que cela signifie pour les cheveux de s’étendre par la force puis de se rétracter dans l’eau pour reprendre leur forme habituelle ? » Ce phénomène m’a fait réfléchir à la capacité des cheveux à mémoriser, à conserver leur forme.
Pour « Tasriha », je travaille avec la façade. Elle est formée de plusieurs couches à l’intérieur mais je tresse uniquement l’extérieur. Cela en dit beaucoup sur la manière dont nous fonctionnons en tant que société — nous embellissons toujours l’extérieur mais ne travaillons pas assez sur l’intérieur. « Tasriha » représente ce que les gens disent et la manière dont nous nous présentons.
Je savais que ce travail allait être extrêmement laborieux et épuisant. Il fallait faire face à beaucoup de pressions, mais je voulais endurer cela — le rituel qui existe dans la pratique.
Durant le confinement, je remettais des choses en question : j’enseigne depuis la maison, j’ai une réunion Zoom et je dois porter le voile. Cela ne fait aucun sens : je suis dans mon espace intime. Quelle est la différence entre le fait d’être couverte à l’intérieur et à l’extérieur ? Je me suis toujours posé cette question.
L’idée de couvrir et de découvrir était un point de départ pour considérer les cheveux comme un lieu de vie. Ils commencent à parler de tabous, de constructions sociales inhérentes aux idées religieuses ou culturelles — les choses à faire et à ne pas faire avec lesquelles nous avons grandi.
Je pense que les femmes dans notre culture portent un poids culturel important. Nous réussissons, nous nous distinguons dans ce que nous faisons, mais nous faisons également beaucoup de compromis. Faire ses preuves ne vient pas sans stress.
Je ne dis pas que je suis opprimée ou quoi que ce soit. Je m’exprime juste à travers ce langage visuel. Quelqu’un m’a dit : « Tu parlais pour nous tous, pas seulement pour toi ». Ces mots m’ont énormément touchée. Les gens s’identifient à cette œuvre et je crois que chaque femme s’y identifiera différemment.